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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/137/2009

ATAS/640/2014 (3) du 22.05.2014 ( LPP ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 30.06.2014, rendu le 07.09.2015, REJETE, 9C_507/2014
Descripteurs : PROCÉDURE ; AUTORITÉ JUDICIAIRE(TRIBUNAL) ; COMPOSITION DE L'AUTORITÉ ; DÉCISION DE RENVOI ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; AUDITION OU INTERROGATOIRE; TÉMOIN
Normes : Cst.29.2; Cst.30.1; CEDH.6.1
Résumé : Lorsque la cause est renvoyée à la Cour de céans par le TF pour qu'elle statue à nouveau dans une composition régulière, il n'y a pas lieu de rouvrir l'instruction, le droit d'être entendu des défendeurs ayant été entièrement respecté durant la procédure cantonale. En effet, par son renvoi, le Tribunal fédéral vise la prise de décision et non la procédure d'instruction. Dans le cadre de cette dernière, les défendeurs ont, au même titre que les demandeurs, participé activement à l'administration des preuves lors des audiences de comparution personnelle et d'enquêtes qui ont fait l'objet de procès-verbaux détaillés et signés. En outre, la présence dans la composition de la Cour d'un juge assesseur qui n'était pas domicilié dans le canton de Genève n'entache les procès-verbaux des audiences précitées d'aucun vice ou défaut formel qui exigerait que les parties et les témoins soient réentendus. Les écritures portant sur le fond produites par les défendeurs à la suite du renvoi du TF doivent être écartées faute de nécessité de compléter leurs précédentes écritures, l'état de fait et la situation juridique étant restés inchangés entre l'arrêt du 27 juin 2012 et le renvoi de la cause à la Cour de céans, hormis la question de la substitution des parties. De plus, le nouveau juge assesseur possède, sur la base du dossier, les mêmes connaissances que les six autres membres de la composition de la Cour de céans ayant déjà participé au premier jugement, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'autoriser les défendeurs à s'exprimer une nouvelle fois oralement ou par écrit.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/137/2009 ATAS/640/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 mai 2014

 

En la cause

Succession de feu Monsieur A______, soit Madame B______, domiciliée à Vernier, et Monsieur C______, domicilié à Chêne-Bourg, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE

Monsieur D______, domicilié à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE








demandeurs

contre

CPEG, CAISSE DE PREVOYANCE DE L'ETAT DE GENEVE, sise bd Saint-Georges 38, 1221 Genève 8, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jacques-André SCHNEIDER

AK______, sis à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jacques-André SCHNEIDER






défendeurs


EN FAIT.. 3

 

A. L'AUTONOMISATION DE AK______. 4

 

B. LA POLITIQUE SALARIALE ET LE SALAIRE ASSURE CIA.. 5

 

C. LES DISCUSSIONS PORTANT SUR L'ASSURANCE DE LA « DIFFERENCE AK______ ». 14

 

D. LE RECOURS DEVANT LA COMMISSION DE RECOURS. 17

 

E. LA PRESENTE PROCEDURE.. 19

 

EN DROIT.. 43

 

A. RECEVABILITE DE LA DEMANDE ET DROIT APPLICABLE.. 43

 

B. SUBSTITUTION DES PARTIES. 45

 

C. INCIDENT DE REOUVERTURE DE L'INSTRUCTION ET RECEVABILITE DES ECRITURES SUR LE FOND 45

 

D. OBJET DU LITIGE.. 49

 

E. AU FOND.. 49

 

a) Principes généraux en matière de prévoyance professionnelle. 49

 

b) La convention d'affiliation. 51

 

i) L'obligation de conclure une convention d'affiliation écrite. 52

 

ii) Le contenu de la convention d'affiliation tacite. 54

 

c) Le salaire assuré. 56

 

i) La détermination du salaire assuré. 56

 

ii) Le principe de l'égalité de traitement 61

 

d) La validité d'un accord sur le salaire assuré. 62

 

e) La violation des principes de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus de droit 63

 

f) L'absence d'assentiment de l'employeur s'agissant de l'augmentation des .........................
cotisations
. 65

 

g) L'art. 65 LPP.. 66

 

h) La prescription. 68

 

i) Conclusion. 72

 


EN FAIT

1.             Messieurs A______ et D______ (ci-après les assurés ou les demandeurs) ont été engagés par l'Etat de Genève en qualité de surveillants chez AK______, dès le 1er avril, respectivement le 1er juillet 1977 (pièces 1 et 3, demandeurs). A ce titre, ils étaient affectés au Département de l'économie publique - service AK______ (pièces 1 et 3, demandeurs).

Monsieur A______ (ci-après A.) a bénéficié de plusieurs promotions. Ainsi, dès le 1er janvier 1983, il a exercé la fonction de sapeur d'aviation 1, puis dès le 1er janvier 1985, celle de sous-chef de section sapeur d'aviation 1. En raison de ces promotions, il a bénéficié de changements de classe et des augmentations de salaire y relatives (pièce 34, défendeur).

Monsieur D______ (ci-après D.) a exercé la fonction de sapeur d'aviation 2 dès le 1er juillet 1979, de sous-chef de section sapeur d'aviation 2 dès le 1er septembre 1987 et enfin de chef de section sapeur d'aviation 2 dès le 1er janvier 1997. En raison de ces promotions, il a également bénéficié de changements de classe ainsi que des augmentations de salaire y consécutives (pièce 35, défendeur).

2.             Par acte du 14 janvier 2009, les demandeurs ont saisi le Tribunal cantonal des assurances sociales (TCAS), alors compétent, d'une action en constatation de droit à l'encontre de AK_______ (ci-après AK______ ou le défendeur) et de la CAISSE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL ENSEIGNANT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE ET DES FONCTIONNAIRES DE L'ADMINISTRATION DU CANTON DE GENEVE (ci-après la CIA, la caisse de pension ou la défenderesse).

Principalement, les demandeurs ont conclu, sous suite de dépens, 1) à la constatation que leur salaire déterminant au sens de l'art. 5 des Statuts de la CIA corresponde à leur salaire fixe figurant sur leur avis de situation respectif, 2) à la constatation que l'intégralité de ce salaire fixe soit assurée par la CIA conformément à ses dispositions statutaires avec effet rétroactif au 1er janvier 1999, 3) à la constatation que AK______ doive s'acquitter des rappels de cotisation, part employeur, 4) à ce qu'il leur soit donné acte de leur disposition à payer la part employé à leur charge, selon les arrangements prévus par le règlement général de la CIA et sous déduction du dommage qui leur a été occasionné, 5) à la condamnation de AK_______ à assurer auprès de la CIA l'intégralité de leur salaire fixe conformément aux dispositions statutaires avec effet au 1er janvier 1999 et 6) à la condamnation de AK______ au paiement à la CIA des rappels de cotisations, part employeur, qui en résultent.

Les demandeurs ont rappelé l'historique du litige.

A. L'AUTONOMISATION DE AK______

3.             Jusqu'au 31 décembre 1993, les collaborateurs de AK_______ à Genève étaient engagés par le Département de l'économie publique en qualité d'employés de l'Etat de Genève. A ce titre, ils étaient affiliés pour la prévoyance professionnelle auprès de la CIA.

4.             Dès le 1er janvier 1994, en application de la loi sur AK______ de Genève, la gestion et l'exploitation de AK_______ ont été confiées à un établissement de droit public autonome, dénommé « AK_______ à Genève ». Conformément à la loi, les employés ont été transférés de plein droit à AK_______, avec les droits économiques et les conditions de travail acquis au moment du transfert. Les employés ainsi transférés et ceux engagés ultérieurement pouvaient rester affiliés à la CIA pour la prévoyance professionnelle.

5.             Le Conseil d'administration de AK_______ (ci-après : le Conseil d'administration), pouvoir supérieur de l'établissement, était chargé d'établir un statut du personnel, après concertation avec les organisations représentatives du personnel, ce dont le personnel a été informé par circulaire du 31 mars 1994 (pièce 4, défendeur).

6.             La première version du Statut du personnel a été adoptée le 1er décembre 1995 par le Conseil d'administration et est entrée en vigueur le 1er janvier 1996 [ci-après : Statut AK_______ (édition 1996)] (pièce 5, demandeurs).

Le Statut AK_______ (édition 1996) prévoyait que les fonctions au sein de AK_______, à l'exception des cadres supérieurs, devaient faire l'objet d'une classification établie sur la base d'une méthode d'évaluation adoptée par le Conseil d'administration sur proposition d'une commission comprenant des membres de la direction et du personnel, ainsi que des experts. Les rémunérations étaient fixées selon l'échelle des traitements de la fonction publique, eu égard à la convention passée par AK_______ avec la CIA. En outre, si les conditions statutaires étaient remplies, les membres du personnel de AK_______ étaient affiliés à la CIA, leurs primes étant prises en charge par AK_______ à raison des deux tiers (voir chiffres 24, 25 et 34 du Statut AK_______ [édition 1996]).

Le Statut AK_______ (édition 1996) instituait  par ailleurs les commissions suivantes :

-          une Commission consultative du personnel (ci-après : la Commission du personnel), chargée de la défense des intérêts du personnel de AK_______ envers l'employeur. Elle pouvait donner son avis sur l'application du Statut AK_______, des règlements sectoriels et des règlements d'application, ainsi que sur les projets de révision. Tous les problèmes généraux concernant la gestion du personnel, et notamment ceux relatifs aux conditions générales de rémunération et à la sécurité sociale, devaient être étudiés par la direction en concertation avec la Commission du personnel.

-          une Commission de recours, composée de deux membres désignés par le personnel et de deux membres désignés par le Conseil d'administration, le président étant quant à lui désigné par le Tribunal de première instance parmi les magistrats ou les anciens magistrats de l'ordre judiciaire. Cette Commission de recours était chargée de trancher, en première instance, tous les litiges individuels relatifs à l'application du Statut AK_______ (édition 1996) et pouvait, en particulier, être saisie d'une action en constatation de droit initiée par la Commission du personnel. Les décisions de la Commission de recours pouvaient être attaquées par chacune des parties devant le Tribunal administratif.

7.             Par courrier du 20 décembre 1995, le directeur général de AK_______ a informé les employés que la première version du statut du personnel avait été adoptée. En attendant les règlements sectoriels ou d'application devant compléter ledit statut, les dispositions sectorielles ou d'application de la fonction publique étaient applicables par analogie et à titre transitoire. Par conséquent, s'agissant du salaire de chaque employé et en attendant les résultats de la réévaluation de toutes les fonctions prévues par le Statut AK______ (édition 1996), les employés de AK_______ bénéficiaient des conditions convenues entre le Conseil d'Etat et les organisations représentatives du personnel selon le protocole d'accord signé le 26 septembre 1995 (pièce 5, défendeur).

B. LA POLITIQUE SALARIALE ET LE SALAIRE ASSURE CIA

8.             Dans le cadre de l'établissement des règlements sectoriels, portant notamment sur la réévaluation des fonctions, la délégation « administration & personnel » de AK_______ a informé la CIA, par courrier du 12 juin 1996, que des questions la concernant avaient été soulevées et lui a proposé une rencontre en date du 25 juin 1996 (pièce 62, défendeur).

Lors de cette séance, les parties ont relevé trois contraintes principales s'agissant de la CIA : 1) l'affiliation de tout le personnel de AK_______ à la CIA, 2) la fixation du traitement conformément aux normes salariales de l'Etat et 3) l'engagement de AK_______ à indexer au minimum les traitements selon les mêmes règles que celles de l'Etat.

La CIA ne voyait par ailleurs pas d'inconvénients à ce que AK_______ accordât à son personnel des compléments de salaire et des indemnités particulières, mais ceux-ci ne pouvaient être pris en compte au titre de gain assuré. Si AK_______ souhaitait assurer des prestations complémentaires, il devait étudier la possibilité d'un deuxième pilier complémentaire, financé à concurrence de 50% minimum par AK_______ (pièce 4, défenderesse).

9.             La réévaluation des fonctions des employés de AK_______, - selon un processus paritaire entre la direction et les représentants du personnel, et avec l'appui d'un consultant extérieur (Corporate Resources Group, ci-après CRG) -, devait avoir lieu en deux temps (pièce 54, défendeur) :

-          Dans une première phase, des postes-repères de AK_______ devaient être définis selon un schéma standard. Dans les faits, 120 fonctions-repères ont ainsi été retenues (voir notamment pièce 7, demandeurs et pièce 61, défendeur).

-          Dans un deuxième temps, les postes devaient être évalués, puis classés selon une échelle propre à AK_______ et enfin positionnés dans la grille des salaires de l'Etat de Genève, compte tenu des exigences de la CIA.

10.         Des bulletins d'information ont été remis au personnel de AK_______ entre le 3 décembre 1996 et le 23 avril 1997 (pièces 54 à 59, défendeur). L'état d'avancement de la procédure de réévaluation des fonctions a été évoqué dans les éditions de juin et octobre 1997 du journal de AK_______ intitulé « NOUS » (pièces 60 et 62, défendeur). Il en résultait que les conclusions de cette évaluation des fonctions avaient fait l'objet d'un rapport de CRG daté du 30 novembre 1997 (document non produit), dans lequel les spécialistes avaient formulé des recommandations. Sur quoi, AK_______ a proposé d'initier la mise en oeuvre d'une nouvelle politique salariale (pièce 9, défendeur). 

11.         Parallèlement à la procédure de réévaluation des fonctions, le Conseil d'administration a décidé, en date des 20 mars 1997, 28 avril 1998 et 23 avril 1999, de verser aux employés la pleine compensation du renchérissement sous forme d'une allocation unique calculée sur le revenu brut de l'année précédente, non indexé (pièce 50, défendeur).

12.         Ces décisions ont été contestées par la Commission du personnel qui a introduit dès le 5 février 1998, par-devant la Commission de recours, des actions portant notamment sur la constatation que l'allocation unique de renchérissement précitée violait l'art. 26 du Statut AK_______ (édition 1996) (pièce 50, défendeur).

13.         Les 18 février et 20 mai 1998, deux séances entre la Commission du personnel et une délégation de la direction de AK_______ se sont tenues et ont notamment porté sur le projet d'évaluation et de la classification des fonctions. Il en est ressorti que les spécialistes consultés avaient recommandé l'établissement d'une nouvelle politique salariale, dont la mise en place était projetée pour le 1er janvier 1999 (pièces 7 et 8, défendeur).

14.         La nouvelle politique salariale a été présentée à la Commission du personnel le 31 août 1998 (pièce 10, défendeur).

Dans une note datée du même jour, le directeur général de AK_______ a informé la Commission du personnel qu'une analyse détaillée des rémunérations 1998 de chaque employé avait été effectuée dans le but d'en déduire la cohérence et les écarts d'équité interne et de compétitivité externe (comparaison avec les « prix du marché »). Il en était résulté que AK_______ devait s'aligner sur la médiane du marché. En effet, les résultats de l'analyse avaient notamment mis en évidence que les salaires situés entre 85% et 115% autour de la médiane, par rapport aux « prix du marché », étaient considérés comme étant dans une fourchette normale. Cependant, 23% du personnel percevait des rémunérations se situant au-dessus des références du marché (fonctions d'exécution) et 12% au-dessous (fonctions d'encadrement) (pièce 9, défendeur).

Afin de rectifier progressivement les écarts précités, la direction de AK_______ proposait de mettre en place, pendant une période de deux ans, le projet de rémunération transitoire suivant, avec pour objectif d'aligner les rémunérations sur la médiane du marché (pièce 9, défendeur) :

-          Un plan de rattrapage devait être aménagé pour les personnes rémunérées à moins de 85% de la médiane, dans le but de les ramener progressivement dans la fourchette de 85% à 115% autour de la médiane ;

-          Le salaire des personnes rémunérées à plus de 115% de la médiane devait être plafonné jusqu'à ce qu'il soit « rejoint » par la fourchette de 85% - 115%.

Le directeur général a par ailleurs précisé que les mécanismes d'augmentation traditionnels (annuités, primes de fidélité, etc.) seraient maintenus pour les personnes dont le salaire se situait entre 85% et 115% de la médiane (pièce 10, défendeur).

15.         Par courrier du 30 septembre 1998 , la Commission du personnel, sous la plume de son Président, Monsieur E______, a informé le directeur général de AK_______ qu'elle s'opposait à la nouvelle politique salariale, invoquant notamment le fait que le système de rémunération selon le marché allait être mis en place sans même que les critères le définissant ni son règlement d'application ne soient connus (pièce 14, défendeur).

16.         Une nouvelle rencontre entre la délégation administration & personnel et la Commission du personnel, avec la participation d'une délégation de la direction, portant sur la politique salariale s'est tenue le 19 octobre 1998 (pièce 12, défendeur). Selon une note du 20 octobre 1998, suite à cette rencontre,la délégation administration & personnel a préavisé, à la majorité, l'adoption, par le Conseil d'administration, de la nouvelle politique salariale de AK_______, étant précisé que les mécanismes d'application de cette politique devaient être soumis ultérieurement audit Conseil (pièce 15, défendeur).

17.         Le 23 octobre 1998, le Conseil d'administration de AK_______ a accepté la nouvelle politique salariale par 10 voix contre 5, avec une abstention (pièce 16, défendeur).

18.         Lors de la séance du 12 novembre 1998 de la Commission du personnel, en présence d'une délégation de la direction, un document provisoire intitulé « Nouvelle politique salariale, situation au 11/11/1998 », résumant la politique salariale telle qu'elle a été présentée précédemment, a été distribué aux participants et l'état d'avancement de la nouvelle politique a été discuté (pièce 13, défendeur).

19.         Quelques jours après, le 17 novembre 1998, s'est tenue une séance de la délégation administration & personnel dont le but était de donner un préavis au Conseil d'administration concernant les modalités d'application de la nouvelle politique salariale (pièce 17, défendeur).

Lors de cette séance, la question des rappels CIA a été abordée. Il est alors apparu que cette problématique pouvait amener un employé à percevoir, pendant la durée des versements du rappel CIA à sa charge, une rémunération globale inférieure à celle reçue jusqu'alors (pièce 17, défendeur). Le porte-parole de la Commission du personnel a suggéré que l'intégralité du rappel CIA soit prise sur les bénéfices 1998 de AK_______.

A la fin de la discussion, la délégation a émis un préavis à l'intention du Conseil d'administration, selon lequel il était favorable, à la majorité, aux dispositions d'application fixées par la direction. S'agissant du rappel CIA, la Commission du personnel demandait que la part à la charge de l'employé soit également payée par AK_______ si les résultats financiers le permettaient. En contrepartie, la délégation administration & personnel demandait que le personnel renonçât, pour 1999, à l'allocation de renchérissement prévue par le Statut AK__________ (édition 1996) et retirât immédiatement l'action en constatation de droit déposée le 5 février 1998 par la Commission du personnel auprès de la Commission de recours du personnel de AK_______ (pièce 17, défendeur).

20.         Par courrier du 23 novembre 1998, la Commission du personnel a fait savoir au directeur général de AK______ qu'elle refusait de retirer l'action en constatation de droit qui avait été initiée suite à une décision prise à la majorité des membres présents, pour les motifs suivants (pièce 18, défendeur) :

-          L'indexation des salaires intéressait l'ensemble du personnel de AK______, alors que la question du rattrapage CIA ne touchait que les employés concernés. Par ailleurs, la disparité des montants des rappels individuels ne permettait pas de traiter équitablement la totalité du personnel.

-          Dès lors que le rappel CIA consistait en un salaire différé, la Commission estimait que le rattrapage devait être pris en charge par l'employé et l'employeur et non pas résulter d'un sacrifice commun de l'ensemble du personnel.

Cela étant, la Commission du personnel ne s'opposait pas au paiement éventuel, par AK______, de la part employé, ledit rattrapage ne résultant pas d'une promotion, mais de l'application de la nouvelle politique salariale.

21.         Lors de sa séance du 26 novembre 1998, le Conseil d'administration a approuvé le préavis de la délégation administration et personnel du 17 novembre 1998 s'agissant du rattrapage CIA (pièce 19, défendeur). Cette position a été communiquée à la Commission du personnel, soit pour elle à Monsieur E______, le 3 décembre 1998 (pièce 20, défendeur). Il lui était également conseillé de reconsidérer sa décision de refuser le financement, par AK______, du rappel CIA incombant normalement au personnel, ainsi que les deux contreparties y liées (pièce 20, défendeur).

22.         Le 7 décembre 1998, le directeur général de AK______ a informé les membres de la direction qu'une erreur importante dans la détermination du montant total des rappels CIA avait été décelée, de sorte que l'entrée en vigueur de la nouvelle politique salariale, initialement fixée au 1er janvier 1999, était reportée à une date ultérieure, non encore décidée, les salaires 1999 étant ainsi déterminés selon les mécanismes habituels (pièce produite par le témoin F______ lors de son audition le 13 octobre 2010).

23.         Par courrier du 16 décembre 1998, la Commission du personnel a réitéré son refus de retirer l'action en constatation de droit, motif pris qu'elle ne pouvait favoriser une catégorie de personnel au détriment d'une autre. En effet, la prise en charge par AK______ de la part employé des rappels CIA ne concernait qu'une partie du personnel (pièce 21, défendeur).

24.         Une nouvelle réunion s'est tenue le 19 janvier 1999 entre la délégation de la direction et la Commission du personnel (à laquelle participaient notamment Messieurs G______ et F______) (pièce 22, défendeur). Au cours de celle-ci, un document intitulé « Nouvelle politique salariale : dispositions d'application révisées, situation au 18/01/1999 » a été distribué aux participants et commenté par deux des délégués de la direction.

Selon les notes de la séance, le directeur général n'a pas exclu de maintenir les employés qui ne voulaient pas payer de rappels CIA et qui en feraient la demande individuelle dans leur classe assurée CIA actuelle et de leur verser une « différence AK______ ». S'agissant de la prise en charge par AK______ de la part employé des rappels CIA, elle était liée à deux conditions (renonciation en 1999 à une allocation de renchérissement et retrait de l'action en constatation de droit), jusqu'alors refusées par la Commission du personnel (pièce 22, défendeur).

25.         Dans un courrier adressé au directeur général de AK_______ le 9 février 1999, la CIA a récapitulé le contenu des divers entretiens et échanges d'informations avec AK______, et notamment le fait que les nouvelles classes de fonction annoncées allaient conduire à des rappels de cotisation de l'ordre de 3'000'000 fr. en 1998, répartis à raison de deux tiers à charge de l'employeur et d'un tiers à charge du collaborateur, conformément aux statuts. Ces calculs se basaient sur une nouvelle classification, prévoyant une augmentation maximum de deux classes de fonctions par collaborateur (pièce 10, demandeurs, pièce 6, défenderesse).

26.         Par décision du 26 février 1999, le Conseil d'administration a adopté les dispositions d'application de la nouvelle politique salariale sans autre précision, après une discussion sur la prise en charge, par AK______, de l'intégralité des rappels, et par conséquent également du tiers en principe à la charge des employés (pièce 9, demandeurs, pièces 25 et 64, défendeur)

Conformément à une note du même jour du Président du Conseil d'administration, le reclassement d'un certain nombre de fonctions et de leurs titulaires suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle politique salariale entraînait des rappels de cotisations, estimés à 3'600'000 fr. au maximum, dont les deux tiers, soit 2'400'000 fr. au maximum, étaient à la charge de AK______. Le financement de cette part était assuré dans le cadre des comptes 1998 (pièce 9, demandeurs, pièces 25 et 64, défendeur).

27.         Le 26 avril 1999 s'est tenue, entre la CIA et la Commission du personnel, une séance portant sur les conséquences de la nouvelle politique salariale de AK______ sur les prestations d'assurances de la CIA (pièce 7, défenderesse ; pièce 24, défendeur).

Selon le compte-rendu de cette séance, une convention, ayant pour but la fixation des relations entre AK______ et la CIA, notamment en ce qui concernait la définition des salaires, devait être signée (pièce 7, défenderesse ; pièce 24, défendeur).

S'agissant du rappel des cotisations, la CIA a donné à la Commission du personnel des informations sur le but, la définition et le mode de calcul, la date d'effet des rappels dans le cadre de la nouvelle politique salariale (entrée en vigueur le 1er avril 1999, avec effet rétroactif au 1er janvier 1999), les possibilités de paiement du rappel de cotisation et les conséquences de la différence entre le salaire annoncé à la CIA et le salaire réel. S'agissant de ce dernier point, la CIA a précisé que cette situation pouvait être comparée à celle des collaborateurs de l'Etat de Genève, pour lesquels la prime de fidélité n'était pas assurée, ce qui pouvait représenter jusqu'à 10% du traitement annuel. Pour le surplus, la CIA, qui avait examiné la nouvelle politique salariale de AK______, relevait que celle-ci, bien que particulière à l'heure actuelle en comparaison avec l'ensemble des autres assurés, était cependant conforme aux statuts de la caisse de pension, de par la relation faite avec l'échelle des traitements de l'Etat (pièce 7, défenderesse ; pièce 24, défendeur).

28.         En date du 17 mai 1999, AK______ a informé la CIA que 19 de ses employés avaient refusé le changement de classe assurée CIA dans le cadre de la nouvelle politique salariale (pièce 26, défendeur).

29.         Le 2 juin 1999, 100 employés de AK______ ont déposé, auprès du Grand Conseil, une pétition (pétition 1258), demandant en substance que les autorités revoient l'ensemble du dossier relatif à la nouvelle grille salariale de AK______, la création d'un groupe de travail paritaire employeur et employés et l'effet suspensif de l'application de la nouvelle grille salariale tant que des recours étaient pendants.

Cette pétition a été traitée par la Commission de l'économie du Grand Conseil les 31 janvier, 7, 14 et 18 février 2000 (pièce 11, demandeurs). Entendu, le président du syndicat SSP/VPOD a expliqué que des problèmes se posaient au niveau de la CIA, dès lors que la totalité des salaires des employés n'y était plus assurée (pièce 11, pages 1 et 2, demandeurs).

Pour sa part, AK______, soit pour lui son directeur général, a confirmé avoir refusé de signer la convention entre AK______ et la CIA, ne voulant pas couvrir un éventuel déficit technique de 22 ou 23 millions de francs si AK______ venait à quitter la CIA (pièce 11, page 2, demandeurs).

Il ressort des discussions de la Commission de l'économie que ses membres étaient préoccupés par le fait que AK______ refusait de signer la convention avec la CIA, prévue dans le statut du personnel de AK______. En outre, plusieurs commissaires étaient choqués par le fait que la CIA n'assurait pas la totalité du salaire de certains employés (pièce 11, page 5, demandeurs).

La Commission a par conséquent rédigé la motion suivante (pièce 11, page 5, demandeurs) :

« Le Grand Conseil de la République et canton de Genève

considérant :

(...)

invite le Conseil d'Etat de Genève

-          à s'assurer qu'un groupe de travail paritaire (employeur et employés) soit mis sur pied pour mener les négociations relatives à la nouvelle grille salariale du personnel

-          à s'assurer que AK______ à Genève signe la Convention entre AK______ et la CIA prévue à l'art. 25 al. 1 du statut du personnel de AK______ à Genève ».

Lors de sa séance du 25 mai 2000, le Grand Conseil a accepté la proposition de motion précitée et l'a amendée en ajoutant l'invite suivante (Mémorial du Grand Conseil, MGC 2000/IV, p. 3924):

-          « à faire rapport, dans le délai de six mois, au Grand Conseil, sur les deux demandes précitées et le résultat des négociations, accompagné d'un rapport de l'inspection cantonale des finances sur l'ensemble de la politique salariale et financière de AK______ à Genève et de ses implications sur la caisse de pension CIA en ce qui concerne le personnel de AK__________ ».

Aucune suite n'a été donnée à la motion amendée.

30.         Par décision du 26 août 1999, la Commission de recours a admis les recours interjetés par la Commission du personnel, constaté que les décisions litigieuses n'étaient pas conformes à l'art. 26 al. 2 du Statut AK__________ (édition 1996) et invité le Conseil d'administration à accorder pour les exercices 1996, 1997 et 1998, au titre d'allocation de renchérissement pour le personnel, le plein renchérissement (pièce 50, défendeur).

31.         Le 27 janvier 2000, AK______ a adressé à chacun de ses employés un avis de situation valable dès le début de l'année 2000.

32.         Par acte du 28 février 2000, un collaborateur de AK______, Monsieur H______, a contesté son avis de situation auprès de la Commission de recours, invoquant notamment une inégalité de traitement dans la non-prise en compte salariale de ses années d'ancienneté (pièce 22, demandeurs). Par décision du 2 octobre 2000, la Commission de recours a partiellement admis le recours et a accordé au recourant la correction de son annuité 2000 ainsi que le versement d'une indexation entière.

Non satisfait, Monsieur H______ a recouru auprès Tribunal administratif (ci-après : TA), devenu depuis lors la Cour de justice, Chambre administrative, invoquant une inégalité de traitement en raison de l'intégration de la prime de fidélité au revenu global. En outre, la totalité du salaire n'était pas prise en considération auprès de la CIA : tout employé qui, par application de la nouvelle politique salariale, avait gravi plus de deux classes Etat, voyait son salaire assuré plafonné à ce niveau, ce qui constituait une autre inégalité de traitement.

Par arrêt du 9 avril 2002, le TA, considérant qu'en vertu du principe du parallélisme des formes le Conseil d'administration de AK______ pouvait valablement modifier le Statut AK______ (édition 1996), et cela même s'il n'y avait eu aucune modification formelle dudit statut, a rejeté le grief d'inégalité de traitement relatif à la prime de fidélité et au revenu annuel global (pièce 22, demandeurs).

S'agissant de la partie du litige concernant la prévoyance professionnelle, le TA a constaté que les dispositions des statuts de la CIA ne prévoyaient pas la situation dans laquelle un employeur affilié à la CIA disposerait d'une échelle de rémunération différente de celle fixée pour le traitement des membres du personnel de l'Etat. Dès lors que cette hypothèse était réalisée dans le cas d'espèce, AK______ s'était efforcé de faire correspondre les traitements versés à son personnel à une classe et une annuité de l'échelle de l'Etat, sans toutefois que cette correspondance soit parfaite, puisqu'il subsistait une « différence AK______ », non soumise à la prévoyance professionnelle. Par ailleurs, le TA a également considéré que « pour un employé payé exclusivement sur la base de l'échelle de traitement de l'Etat, il n'existait pas de « différence » entre le traitement déterminant au sens de l'article 5 alinéa 1 des statuts et son traitement fixe annuel. C'était dans cet esprit qu'étaient conçus les statuts de la CIA et qu'ils devaient être appliqués à l'ensemble des assurés de la catégorie I. A cet égard, le principe du parallélisme des formes avait pour conséquence que les conventions particulières entre un employeur et la CIA ne pouvaient déroger aux statuts que dans la mesure où ils ne faisaient pas, eux non plus, l'objet d'une approbation du Grand Conseil ». Ainsi, « le fait que le demandeur ne soit assuré auprès de la CIA que pour une partie de son salaire fixe annuel constitue donc une inégalité de traitement par rapport aux autres assurés de sa catégorie. A défaut de disposition statutaire ad hoc, prévoyant par exemple une autre définition du salaire déterminant lorsque le traitement réel est fondé sur une autre base que celle de l'Etat, l'esprit et le but des statuts, et notamment de leurs articles 5 alinéa 1, 6 alinéa 2 et 8 alinéa 1, entraîne l'obligation pour la CIA de calculer le salaire assuré, le montant des cotisations et celui des prestations d'après le salaire fixe annuel du demandeur et non d'après « sa classe équivalence Etat » (pièce 22, demandeurs). Le TA a par conséquent admis le recours de l'intéressé concernant la prévoyance professionnelle, invité la CIA à faire parvenir à AK______ un décompte des cotisations de prévoyances professionnelle dues, condamné AK______ à payer à la CIA sa part de cotisation ainsi définie avec intérêt de 5% dès le 1er janvier 2001 et condamné le recourant à payer à la CIA sa part de cotisation.

Saisi d'un recours, le Tribunal fédéral, constatant une violation du droit d'être entendu, a annulé l'arrêt précité dans la mesure où il concernait la prévoyance professionnelle et a renvoyé la cause au Tribunal cantonal des assurances sociales (TCAS), compétent depuis le 1er août 2003, pour qu'il statue après avoir préalablement appelé en cause la CIA et lui avoir reconnu et accordé les mêmes droits que ceux conférés aux autres parties (ATF B 47/02 et B 48/02 du 25 août 2003, pièce 23, demandeur).

Le 16 mars 2004, le TCAS a pris acte du retrait de la demande dirigée par Monsieur H______ contre AK______ et la CIA, compte tenu de l'accord hors procédure intervenu entre les parties (pièce 24, demandeurs).

33.         Faisant suite à l'entrée en vigueur le 1er janvier 2000 de son règlement général du 22 février 1999, la CIA a, par courrier du 13 novembre 2000 adressé à AK______, indiqué que l'affiliation de AK______ à la CIA était régie par une convention tacite depuis son autonomisation, soit dès le 1er janvier 1994, et que les modifications apportées au règlement général seraient applicables à l'ensemble des institutions affiliées à la cIA, donc y compris à AK______ (pièce 26, demandeurs).

C. LES DISCUSSIONS PORTANT SUR L'ASSURANCE DE LA « DIFFERENCE AK______ »

34.         Dès janvier 2000, des recherches concernant la mise en place d'un 2e pilier complémentaire ont été initiées et les discussions concernant un système de qualifications et de rémunération variable (P3) ont continué (voir pièces 65 à 98, défendeur).

35.         Lors d'une séance, qui s'est tenue le 16 juin 2003, à laquelle la Commission du personnel, la délégation de la direction et certains membres du Conseil d'administration ont assisté, la question de l'avancement des travaux CIA-AK______ a été abordée (pièce 12, demandeurs).

Il ressort du procès-verbal de séance que « l'objectif des travaux est de pouvoir mettre en application l'article 6 du statut de la CIA, et ce faisant de pouvoir supprimer la «différence AK______ » non assurée CIA ». La situation d'alors était la suivante : les annuités CIA étant calquées sur celles de l'Etat, un calcul au plus près était nécessaire, ce qui avait pour conséquence une « différence AK______ » non assurée CIA, qu'ils souhaitaient supprimer. Tant que l'employé restait dans la même classe de fonction, il n'y avait pas de rappel à payer. En revanche, si la nouvelle formule était appliquée, toute augmentation salariale, y compris au sein d'une même classe de fonction, allait faire l'objet d'un rappel. Il s'agissait par conséquent d'examiner si cette formule était intéressante, de sorte que le rappel à payer ne fût pas supérieur à la situation actuelle.

S'agissant de la convention d'affiliation, le directeur général a précisé que les statuts de la CIA avaient été modifiés depuis le passage de AK______ à un statut d'établissement public autonome, ce qui avait pour conséquence une affiliation de fait et de droit, ne nécessitant plus de convention liant les deux institutions.

36.         Une nouvelle séance de la Commission du personnel, de la délégation de la direction et de membres du Conseil d'administration s'est tenue le 6 octobre 2003. Au cours de celle-ci, l'un des délégués de la direction a expliqué qu'un mandat avait été donné au directeur de la CIA afin qu'il établisse les implications financières pour AK______ et pour le personnel, le but étant que le salaire fixe corresponde au salaire annoncé à la CIA. Il a également été précisé qu'une personne engagée en 2003 présentait également une « différence AK______ » non assurée CIA, dès lors que la CIA imposait à AK______ de déclarer un salaire figurant dans l'échelle des traitements de l'Etat de Genève. Or, les salaires AK______ ne correspondaient pas aux salaires de l'Etat (pièce 13, demandeurs).

Lors de cette séance, une présentation intitulée « Projet, modification de la couverture du salaire auprès de la CIA » a été distribuée aux participants (pièce 14, demandeurs).

37.         La direction de AK______, souhaitant assurer la totalité du salaire de ses collaborateurs auprès de la CIA, a mandaté la société I______ SA (devenue J______ SA depuis 2004, puis K______ SA. depuis 2011, ci-après K______), société active dans le domaine des conseils et services en matière de prévoyance professionnelle et de sciences actuarielles, afin d'examiner les incidences de la modification de la définition des salaires auprès de la CIA sur les coûts de la prévoyance professionnelle de ses collaborateurs.

38.         Selon le rapport établi en août 2004 par K______, la politique salariale appliquée par AK______ depuis 1999 impliquait que le salaire des collaborateurs de AK______, assuré auprès de la CIA, était toujours déterminé selon les classes de salaire de l'Etat de Genève, ce qui entraînait deux inconvénients majeurs : 1) la complexité du système et 2) la non-couverture d'une partie du salaire dans le cadre de la prévoyance professionnelle. Dès lors que les statuts de la CIA permettaient aux institutions externes de définir le salaire assuré indépendamment des classes de fonction de l'Etat, le calcul des rappels de cotisations était soumis à d'autres règles (pièce 17, demandeurs).

Dans le rapport précité, le système de rémunération de AK______ était résumé de la manière suivante : les employés de AK______ étaient répartis dans des classes de salaire, numérotées de 42 à 66, selon leur fonction. Une médiane était périodiquement définie par les spécialistes pour chaque classe de salaire sur la base du prix du marché. Le salaire du collaborateur variait ainsi en principe entre 85% et 115% de ladite médiane.

Le revenu mensuel d'un collaborateur de AK______ était composé des éléments suivants :

-          Un salaire fixe, établi à l'engagement, évoluant en fonction des annuités fixées conformément aux classes équivalentes de l'Etat, jusqu'à ce que le plafond de 115% fût atteint, et de l'indexation. A noter également que le salaire fixe convenu à l'engagement était augmenté de 5% de la médiane après six mois d'activité.

-          Une prime de fidélité, oscillant entre 15% et 30% du salaire fixe mensuel après cinq ans. Elle augmentait de 5% par année dès la sixième année.

-          La participation à l'assurance maladie.

S'agissant du salaire déterminant pour la prévoyance professionnelle, il était fixé conformément aux classes de l'Etat et de son évolution, de sorte qu'il y avait un décalage entre le salaire fixe AK______ et le salaire soumis à la CIA. Lors de la mise en place du système actuel, il y avait eu un réajustement des classes de l'Etat, déterminantes pour la CIA, ce qui avait eu les deux conséquences suivantes : 1) pour les collaborateurs se trouvant dans une classe CIA inférieure, l'adaptation vers le haut était limitée à deux classes et 2) les collaborateurs se trouvant dans une classe CIA supérieure avaient conservé leur classe avant le changement. En guise de conclusion, l'actuaire a indiqué qu'« il y a donc une disparité entre les collaborateurs d'une même fonction selon leur situation avant 1999 d'une part, entre collaborateurs présents en 1999 et ceux engagés depuis » (pièce 17, demandeurs).

39.         Au cours d'une séance qui s'est tenue le 4 octobre 2004 avec la délégation de la direction et des membres du Conseil d'administration, la Commission du personnel a souhaité savoir si le rapport de K______ avait été réalisé. Il lui a été répondu que ce rapport serait mis à l'ordre du jour de la prochaine séance et discuté (le procès-verbal n'a pas été produit).

40.         Selon des notes de la séance tenue le 9 mai 2005 entre la Commission du personnel et la délégation de la direction, un représentant de la Commission a demandé à pouvoir prendre connaissance du rapport actuariel concernant le coût impliqué par l'assurance à la CIA de la totalité du salaire. L'un des membres de la délégation de la direction a accepté de donner suite à cette demande et a précisé que « cela impliquera un changement important pour les collaborateurs et collaboratrices en termes de rappel ainsi que pour l'employeur, mais que l'assurance à la CIA de la totalité du salaire représente à terme un avantage pour tous ainsi qu'une simplification de [leur] politique salariale » (pièce 16, demandeurs).

41.         Le Statut AK_______ (édition 1996) a été abrogé par celui entré en vigueur le 1er mars 2006 [ci-après : Statut AK______ (édition 2006)] (pièce 6, demandeurs). Les dispositions relatives à la classification des fonctions et à l'affiliation à la CIA étaient sensiblement les mêmes que celles du Statut précédent.

42.         Lors d'une séance qui s'est tenue le 7 mai 2007 entre la délégation de la direction, la Commission du personnel et deux membres du Conseil d'administration, il a été expliqué que la délégation administration & personnel avait examiné la possibilité d'assurer la « différence AK______ » à la CIA ou auprès d'une autre institution de prévoyance afin d'établir un comparatif des coûts et qu'il n'y avait pas de « problème à avoir une différence AK______ non-assurée CIA, puisque l'assurance CIA pour le reste du salaire est totalement respectée. La problématique reste en revanche dans le fait qu'à ce jour, certains collaborateurs et certaines collaboratrices ne soient pas assuré-e-s dans leur bonne classe CIA, ce qui crée une inégalité de traitement. C'est cette inégalité que la direction générale souhaite corriger » (pièce 20, demandeurs).

43.         Une nouvelle séance s'est tenue le 1er octobre 2007, au cours de laquelle la délégation de la direction a présenté à la Commission du personnel et aux trois membres du Conseil d'administration les options étudiées à savoir : 1) assurer la différence AK______ auprès d'une autre institution de prévoyance que la CIA mais en primauté de cotisations ; 2) assurer la différence à la CIA, en maintenant le calage de la politique salariale de l'Etat et des annuités CIA et 3) assurer la différence AK______ actuelle à la CIA en calculant le salaire assuré selon les dispositions de l'art. 6 du règlement CIA (salaire fixe AK______ moins montant de coordination), ce qui impliquait aussi un changement du système de calcul des rappels. Après avoir présenté la situation en termes de coûts, la délégation de la direction a indiqué à la Commission du personnel que la première option était pour le moment retenue (pièce 21, demandeurs).

La Commission du personnel a toutefois relevé que cette solution ne règlerait pas le problème de l'inégalité de traitement pour les personnes qui n'étaient alors pas assurées dans leur bonne classe CIA, ce que la délégation de la direction a admis, tout en précisant que cette option permettait au moins d'assurer la totalité du salaire. En outre, la Commission a rappelé que ce dossier était en suspens depuis 1999, date de l'introduction de la nouvelle politique salariale, et trouvait « regrettable et inadmissible que certains membres du personnel voient leur situation péjorée au moment de la retraite ».

D. LE RECOURS DEVANT LA COMMISSION DE RECOURS

44.         Par acte du 3 janvier 2008, complété le 14 mars 2008, B. a interjeté recours auprès de la Commission de recours de AK______, invoquant une inégalité de traitement existant entre les membres du personnel de AK______ en ce qui concernait le salaire assuré (pièces 28 et 29, demandeurs).

Le recourant invoquait les principes d'adéquation, de collectivité et de planification ainsi que le principe d'égalité de traitement. Il soutenait que le contrat d'affiliation tacite, conclu entre AK______ et la CIA, ne saurait enfreindre les principes précités. Il a également rappelé que l'art. 4 des Statuts CIA (édition 2000) distinguait deux catégories de salariés : les salariés mensualisés (catégorie I) et les autres salariés (catégorie II), étant précisé que tout salarié bénéficiant d'un engagement de durée indéterminée ou de plus de trois mois était obligatoirement assuré dans la catégorie I. Etant engagé pour une durée indéterminée, il entrait par conséquent dans la catégorie I. A teneur de l'art. 5 des Statuts précités, le traitement déterminant des salariés de la catégorie I était le traitement légal annuel défini dans l'échelle des traitements des membres du personnel de l'Etat moins une déduction de coordination avec l'AVS. Par conséquent, l'intégralité de son salaire devait être prise en compte à titre de salaire déterminant au sens des statuts de la CIA. En outre, l'inégalité de traitement entre les employés de AK______ en matière de couverture de prévoyance professionnelle était contraire au droit. Le recourant concluait à la condamnation de AK______ à assurer l'intégralité de son traitement annuel auprès de la CIA et à payer à la CIA le rappel de cotisation en résultant, étant précisé qu'il s'engageait à payer la part des rappels lui revenant (pièce 29, demandeurs).

45.         Le 31 mars 2008, douze collaborateurs de AK______, dont D______, ont déposé un recours similaire à celui de leur collègue (pièce 30, demandeurs).

46.         Dans sa réponse du 12 juin 2008, AK______ a conclu, préalablement, à la récusation des quatre membres de la Commission de recours salariés de AK______, principalement à l'irrecevabilité des recours des assurés et à la transmission des causes au TCAS, alors compétent, et - en toute hypothèse - au rejet du recours. Il a expliqué en substance que les défendeurs avaient convenu d'un mode de conversion de l'échelle des traitements effectivement appliquée à l'échelle des traitements de l'Etat afin de pouvoir définir le traitement déterminant conformément aux Statuts de la CIA. Comme la réévaluation des fonctions au sein de AK______ et la progression du salaire qui s'en était suivie allaient inévitablement conduire à des rappels importants (12'000'000 fr. si l'intégralité du salaire devait être assurée), les défendeurs s'étaient accordés sur une limitation de la progression à deux classes CIA pour que les coûts restent supportables pour l'institution de prévoyance, l'employeur et les employés. Cette règle devait en outre pallier une inégalité de traitement dès lors qu'à fonctions égales, AK______ versait un salaire supérieur à celui versé par l'Etat à ses employés. AK______ invoquait également une convention conclue avec la CIA, l'absence de son assentiment pour augmenter sa part de cotisations et le fait que l'égalité de traitement entre les employés avait été respectée (pièce 31, demandeurs).

47.         Par décision du 13 novembre 2008, le Président de la Commission de recours a récusé les quatre juges assesseurs membres de AK______ (pièce 32, demandeurs).

48.         Le 21 novembre 2008, les recourants A______ et D______ ont, à leur tour, récusé le Président de la Commission de recours, considérant que l'équilibre paritaire de ladite Commission était rompu et que le Président ne pouvait siéger seul. Cela étant, ils n'avaient plus d'autre alternative que d'agir devant le TCAS (pièce 33, demandeurs).

E. LA PRESENTE PROCEDURE

49.         Dans leur écriture du 14 janvier 2009, les demandeurs ont conclu préalablement : 1) à la production, de manière anonymisée, des avis de situation de l'ensemble du personnel de AK______, en faisant figurer sur trois colonnes : a) la classe de traitement Etat de Genève, avant l'introduction de la nouvelle politique salariale, b) leur classe AK______, respectivement la classe équivalence Etat, lors de l'introduction de la nouvelle politique salariale au 1er janvier 1999 et c) leur classe AK______, respectivement la classe équivalence Etat, à ce jour, et 2) à la production de l'accord intervenu avec le collaborateur H______, dans le contexte de la procédure A/1706/2003.

Sur le fond, les demandeurs ont considéré que le procédé adopté par les défendeurs était contraire au droit pour les motifs suivants :

-          une disposition réglementaire autorisant la création de divers cercles d'assurés faisait défaut ;

-          le plafonnement du salaire assuré en fonction de l'importance de la réévaluation de la fonction ne constituait pas un critère admissible ;

-          les solutions « à la carte », telle que celle dont a bénéficié le collaborateur H______ (conclusion d'un accord), violaient le principe de l'égalité de traitement ;

-          le plafonnement des salaires pour certains collaborateurs avait pour conséquence des inégalités de traitements, au demeurant admises par AK______ ;

-          le personnel ou sa représentation n'avait pas accepté le plafonnement de leur salaire assuré ;

-          le mode de répartition à raison d'un tiers pour l'employé et de deux tiers pour l'employeur résultait de l'art. 34 al. 2 du Statut du personnel, de sorte que AK______ ne saurait se retrancher derrière les art. 66 al. 1 LPP et 331 al. 3 CO pour prétendre que les augmentations de cotisations en résultant pour certains salariés ne pouvaient pas suivre la même répartition sans son accord ;

-          la notion d'égalité de traitement ne pouvait pas s'apprécier en comparant la situation des nouveaux collaborateurs entrés en fonction après 1999 et ceux présents avant cette date, dès lors que les nouveaux collaborateurs rejoignaient la CIA avec l'avoir constitué dans leur précédent emploi, permettant ainsi le rachat de tout ou partie de leur droit, de sorte que, par définition, des inégalités de traitement existaient. La notion d'égalité de traitement devait en effet s'apprécier au regard de la situation du collectif de salariés auprès du même employeur, soit AK______. Par ailleurs, des divergences avec la grille de traitements de l'Etat de Genève existaient avec plusieurs des 36 affiliés externes de la CIA. Enfin, les demandeurs étaient rémunérés selon une classe de traitement correspondant en termes de rémunération à une classe de traitement équivalente existant dans l'échelle de traitement de l'Etat de Genève ;

-          si AK______ avait immédiatement assuré l'intégralité du salaire, les coûts de rappel auraient été inférieurs à ceux nécessaires à ce jour.

Enfin, les demandeurs soutenaient que la responsabilité de AK______ était engagée, celui-ci n'ayant pas respecté ses obligations légales et contractuelles en n'assurant que partiellement leur salaire. Dans ce contexte, ils ont subi des coûts supplémentaires résultant des manquements de leur employeur, ce qui constituait un dommage devant être réparé, de sorte qu'il devait être déduit du rappel de cotisations qu'ils seraient appelés à verser.

50.         Dans sa réponse du 27 mars 2009, AK______ a conclu au rejet du recours, sous suite de dépens. Préalablement, il a relevé que son affiliation à la CIA résultait en fait d'une convention d'affiliation ex lege.

A titre principal, le défendeur a invoqué l'acceptation tacite des demandeurs ainsi qu'une violation des principes de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus de droit, considérant en substance qu'ils avaient tardé dans leur démarche, en bénéficiant des avantages conséquents concédés depuis plusieurs années par AK______ et en revendiquant le droit de bénéficier d'un avantage auquel ils avaient expressément renoncé : l'assurance de l'intégralité de leur salaire auprès de la CIA.

Subsidiairement, AK______ s'est référé aux art. 5 al. 3 des Statuts et 6ter al. 1 du règlement général de la CIA, permettant, selon lui, à la caisse de pension d'accepter la nouvelle politique salariale et le mode de conversion, dans les limites du plafond du salaire majoré assuré fixé par la CIA pour les salariés transférés de l'Etat à AK______. De plus, la convention d'affiliation liant la CIA à AK______, qui avait force contraignante en matière de prévoyance professionnelle conformément à l'art. 6bis al. 1 du règlement général pour tous les employés ayant accepté de passer au statut de personnel de AK______, contenait des règles particulières. Or, dans le cadre de cette convention, AK______ et la CIA s'étaient spécifiquement accordés sur la politique salariale et sur la divergence entre le salaire réel et le salaire annoncé. Par conséquent, ni les demandeurs ni le TCAS ne pouvaient y déroger et mettre à mal les principes convenus entre les parties en vertu de leur liberté contractuelle. En outre, en concluant à ce que l'intégralité de leur salaire soit assuré auprès de la CIA, les demandeurs ont sollicité une modification à la hausse de la contribution de leur employeur, ce qui n'est pas admissible en l'absence de l'assentiment de ce dernier conformément aux art. 66 al. 1 LP et 331 al. 3 CO. S'agissant des principes de la prévoyance professionnelle (principes de la collectivité, de l'égalité de traitement et de la planification), ils étaient tous respectés. En effet, AK______ a prévu trois catégories au sein du personnel : 1) les personnes engagées comme fonctionnaires de l'Etat antérieurement à l'autonomisation, pour lesquels le traitement assuré n'a pas intégralement suivi l'augmentation, 2) les personnes engagées postérieurement à l'autonomisation, dans des fonctions déjà existantes, placées dans la même situation que les fonctionnaires de l'Etat transférés à AK______ et 3) les personnes engagées postérieurement à l'autonomisation, dans des fonctions nouvellement créées. Ces catégories se fondaient sur des critères objectifs et étaient par conséquent conformes aux principes de la prévoyance précités. Quant aux demandeurs, ils avaient accepté cette situation en toute connaissance de cause, en se soumettant volontairement aux nouvelles conditions de salaire et de prévoyance. Enfin, si les conclusions des demandeurs devaient être admises, le TCAS ne pourrait prendre en considération que les cinq années précédant le dépôt de la demande, soit janvier 2009.

En annexe à sa réponse figurait notamment un rapport établi par K______ portant sur la modification de la définition du salaire assuré auprès de la CIA et actualisant les résultats précédents sur la base de l'effectif au 1er janvier 2009.

51.         La CIA a déposé sa réponse en date du 15 mai 2009 et conclu au rejet de l'action en constatation de droit. Elle a fait valoir que l'accord passé entre AK______ et la CIA concernant le salaire assuré avait valeur de convention. De plus, la convention d'affiliation initiale n'avait pas été résiliée et était ainsi restée en vigueur de par la loi. Compte tenu de l'emploi du terme « analogue » à l'art. 5 al. 3 de ses statuts, entrés en vigueur le 1er janvier 2000 [ci-après : Statuts CIA (édition 2000), correspondant à l'art. 15 al. 1 des statuts dans leur teneur en vigueur lors du passage à la nouvelle politique salariale [cités ci-après Statuts CIA (édition 1997)], la CIA, en sa qualité de corporation de droit public, était libre d'apprécier ce qui était analogue aux règles prévalant à l'Etat et elle n'avait donc pas excédé sa liberté d'appréciation en fixant le salaire assuré des collaborateurs de AK______ sur la base de l'équivalence des classes de salaire de l'Etat en les majorant de deux classes au maximum. Par ailleurs, si elle assurait la totalité du revenu soumis à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, les conditions d'assurance des collaborateurs de AK______ seraient nettement plus avantageuses que celles prévalant pour les autres assurés (fonctionnaires ou assurés hors échelle). Afin de limiter les coûts engendrés par l'augmentation du salaire induite par l'application de la revalorisation des fonctions des collaborateurs de AK______, tant pour la CIA que pour AK______ et ses employés, les défendeurs se sont accordés sur une limitation de la progression du salaire assuré à deux classes CIA selon l'échelle des traitements de l'Etat. Cette règle était prioritairement destinée à pallier une inégalité de traitement, due au fait qu'à fonctions égales, les collaborateurs de AK______ jouissaient d'un salaire supérieur à celui des fonctionnaires. Par ailleurs, l'art. 5 al. 3 des Statuts CIA (édition 2000) autorisait la CIA à appliquer unilatéralement et par analogie l'échelle des traitements de l'Etat à AK______, le cas échéant avec un assouplissement, pour calculer le traitement déterminant. En outre, conformément à la loi, la part sur-obligatoire de la prévoyance professionnelle était à la libre disposition de la CIA et de AK______, rien n'obligeant un employeur à assurer cette part non assujettie à la LPP. S'agissant des principes de la collectivité, de l'égalité de traitement et de la planification, ils avaient été respectés. Quant aux catégories de personnes, elles étaient prévues par l'art. 41 al. 3 AK______. De plus, le principe de l'égalité était respecté : « à fonctions et situations égales, traitement égal. Les situations différentes bénéficient d'un traitement différencié envisagé par l'art. 41 al. 3 AK______ ». En outre, le principe de la planification était respecté, car la solution adoptée reposait sur des critères objectifs. Enfin, si l'intégralité du salaire était assurée, le principe du financement prévu par l'art. 65 LPP serait violé.

Par chargé séparé du même jour, la CIA a fourni un rapport de la société L______ SA, actuaire-conseil et expert agréé, dont il ressort que la perte actuarielle totale sur les rappels de cotisations qu'elle aurait à supporter entre 2009 et 2018 s'élèverait à 3'500'000 frs. (pièce 9, défenderesse).

52.         Par ordonnance du 22 mai 2009, le TCAS a autorisé un deuxième échange d'écritures.

53.         Dans leur réplique du 9 juillet 2009, les demandeurs ont tout d'abord relevé que AK______ et la CIA entretenaient un amalgame entre trois phases : 1) l'adoption, le 1er décembre 1995, du nouveau statut du personnel par le Conseil d'administration, 2) la nouvelle politique salariale décidée par les dirigeants de AK______, débattue courant 1998 et 3) la décision unilatérale et soudaine des dirigeants de AK______ de limiter le salaire assuré pour certains collaborateurs, intervenue en janvier 1999.

Cela étant précisé, ils ont notamment allégué que les postes à hautes responsabilités n'étaient pas soumis au plafonnement de leur salaire assuré CIA, n'ayant pas fait l'objet d'un coulissement de plus de deux classes équivalent Etat, tout en bénéficiant d'une augmentation massive de leur salaire. Par conséquent, le critère d'une augmentation de plus de deux classes de traitement était injustifiable au regard de l'égalité de traitement, dès lors qu'il ne tenait pas compte de la réelle augmentation de salaire intervenue avec l'introduction de la nouvelle politique salariale.

Par ailleurs, en pratique, les critères mis en place par AK_______n'étaient absolument pas respectés. En effet, la situation de leurs collègues différait sans répondre à aucune logique. Ainsi, par exemple (pièces 38 à 43 demandeurs) :

-          Messieurs M______, N______ et O______, tous trois sous-chefs section sapeur aviation 1, se trouvaient en classe 17 de l'Etat de Genève et assurés en classe de traitement 11, et étaient donc dans la même situation que le demandeur A______ ;

-          Monsieur P______, également sous-chef section sapeur aviation 1, se trouvait en classe de traitement AK______ 50, soit en classe équivalent Etat 17, assuré CIA en classe de traitement 12, annuité 15 ;

-          Monsieur Q______, sous-chef section sapeur aviation 2, était en classe AK______ 50, soit en classe équivalent Etat 17, assuré CIA en classe 14, annuité 11 ;

-          Enfin, Monsieur R______, sous-chef section sapeur aviation 2, se trouvait en classe AK______ 50, soit en classe équivalant Etat 17, et assuré en classe CIA 14, annuité 11.

Sur le fond, les demandeurs ont relevé qu'après l'autonomisation, le personnel de AK______ était simplement resté assuré par la CIA et cela sans discontinuité, de sorte que le rapport d'affiliation se fondait toujours sur la loi. Si AK______ souhaitait modifier le contenu dudit rapport, il devait conclure une convention d'affiliation écrite dans le respect de la procédure d'approbation prévue par l'art. 3 al. 2 des statuts CIA (édition 2000). Par conséquent, « seule la conclusion d'une telle convention aurait pu éventuellement permettre la création de divers cercles d'assurés pour autant que ceux-ci soient délimités selon les critères objectifs acceptables et dans le respect de la loi ». Aucune convention d'affiliation n'ayant été valablement conclue entre les défendeurs, ces derniers restaient liés par les dispositions statutaires et réglementaires de la CIA. Pour le surplus, les demandeurs ont précisé les principes de prévoyance d'ores et déjà développés dans leur mémoire introductif d'instance.

54.         Par duplique du 29 octobre 2009, AK______ a contesté certains faits allégués par les demandeurs, produisant notamment des attestations de Madame S______, actuaire interne de la CIA (pièces 39 à 41, défendeur). S'agissant plus particulièrement de Messieurs M______, N______ et O______, ils occupaient la même fonction que Monsieur A______ et bénéficiaient par conséquent des mêmes conditions. Quand à Monsieur P______, il était assuré en classe 12 avant l'autonomisation de sorte qu'il a pu garder cette classe, en vertu de ses droits acquis. La différence de classe assurée en ce qui concernait Messieurs Q______ et R______ résultait de leur fonction - celle de sous-chef de section sapeur aviation 2 (feu) - qui était différente de celle d'un sapeur aviation 1.

En ce qui concernait la convention d'affiliation, AK______ considérait qu'il n'y avait strictement aucun fondement juridique exigeant une convention d'affiliation écrite. Pour le surplus, AK______ s'est référé à sa réponse du 27 mars 2009.

55.         Quant à la CIA, elle a dupliqué par écriture du 16 novembre 2009, persistant intégralement dans sa position. Elle a produit notamment des attestations de son actuaire interne portant sur certains allégués des demandeurs et sur le calcul des rappels s'agissant de ces derniers (pièces 10 à 13, défenderesse).

56.         A la suite de l'audience de comparution personnelle des mandataires du 1er décembre 2009, le TCAS a ordonné l'ouverture des enquêtes et invité les parties à déposer leur liste de témoins.

57.         Par courrier du 15 décembre 2009, AK______ a sollicité l'audition de Madame S______, actuaire interne à la CIA, et de Monsieur T______, chargé de la Division des ressources humaines au sein de AK______.

58.         Pour leur part, les demandeurs ont requis, dans un courrier du 21 décembre 2009, l'audition de Monsieur E______, employé AK______, ancien président de la Commission du personnel et ancien représentant du personnel au sein du comité de la CIA, Monsieur F______, employé AK______ et ancien président de la Commission du personnel, Monsieur H______, retraité AK______ et ancien représentant du personnel dans le comité de la CIA, Monsieur U______, retraité AK______, Monsieur G______, commandant adjoint du AL__________, Messieurs V______, W______, X______, Y______, Z______, AA______, M______ et Madame AB______, tous collaborateurs de AK______. En outre, les demandeurs persistaient dans leurs conclusions préalables tendant à la production, par AK______, d'un tableau récapitulatif comprenant les avis de situation concernant l'ensemble de son personnel.

59.         Suite au dépôt des listes de témoins, plusieurs échanges de courriers sont intervenus, les uns considérant que les demandeurs annonçaient des témoignages politiques et de moralité (AK______), les autres que la neutralité, l'objectivité et l'impartialité des témoins cités par les demandeurs n'étaient pas garanties (CIA). Enfin, la question de l'audition de Monsieur E______, toujours membre du Comité de la CIA et du Conseil d'administration de AK______, a suscité des controverses (courriers des 22 décembre 2009, 13 janvier 2010 et 16 février 2010).

60.         Le 17 février 2010, le TCAS a procédé à l'audition de Monsieur T______ (témoin n° 1), membre de la direction de AK______, chargé des ressources humaines, employé AK______ depuis le 20 novembre 2000. Le témoin a précisé qu'ayant été engagé après 1999, il était assuré au niveau de la LPP selon sa classe de fonction.

Il a déclaré que AK______ était toujours affilié à la CIA, la loi sur AK______ de Genève s'appliquant dans ce cadre. Selon le témoin, AK______ avait le choix de rester affilié à la CIA ou de la quitter. AK______ n'a toutefois jamais quitté la CIA, pour des raisons de coûts. En effet, s'il avait décidé de quitter l'institution de prévoyance précitée, il aurait été contraint de s'acquitter d'un montant de 91 millions de francs en raison du déficit de couverture. A sa connaissance, une convention d'affiliation écrite n'était pas nécessaire. AK______ était devenu une institution externe. Le témoin a confirmé qu'au niveau de la prévoyance professionnelle, il existait une catégorie I de salariés assurés, correspondant aux fonctions de AK______ existant au 31 décembre 1998 et aux personnes qui les occupaient. Il s'agissait d'appellations internes à AK______, ne correspondant pas à la définition des catégories figurant dans les statuts et le règlement de la CIA. Ces catégories avaient été désignées telles quelles lors de la nouvelle politique salariale de AK______, entrée en vigueur le 1er janvier 1999.

Le but de la nouvelle politique salariale de AK______ était de refléter les prix du marché et d'attirer plus de personnes à haute compétence. Après avoir détaillé la politique salariale, le témoin a précisé qu'elle était très attractive. D'ailleurs, la majorité des salariés avait bénéficié d'augmentations très importantes de salaire.

Le témoin a également précisé que dans son ancienne fonction, il était gestionnaire d'une caisse de prévoyance de sorte qu'il connaissait la problématique de la CIA. Cette dernière étant en primauté de prestations, le principe fondamental était celui de la solidarité, chaque augmentation de salaire devant faire l'objet d'un rappel de cotisation. Si une institution externe devait augmenter les salaires de ses employés, tous les affiliés de la CIA allaient financer les améliorations de la rente desdits employés en vertu du principe de la solidarité.

L'augmentation des salaires de AK______ en 1999 allait largement au-delà de celles ressortant de l'échelle des traitements de l'Etat de Genève pour des fonctions équivalentes. L'ensemble du personnel, sans exception, avait une différence AK______. Dès lors que les annuités de la CIA suivaient celles de l'Etat, il fallait, pour les salariés de AK______ qui appliquait une politique salariale différente, calculer en fonction de la classe AK______ l'équivalence de la classe CIA et trouver le salaire le plus proche de l'annuité CIA correspondante, de sorte qu'il y avait à chaque fois une part de salaire non-assurée, appelée « différence AK______ ».

Les nouvelles classes de fonction du consultantCRG allaient jusqu'à 90. Les 13 membres de la direction étaient classés au-dessus de la classe 57. Quant à lui, il avait été engagé en classe III AK______, soit dans une fonction n'existant pas au 31 décembre 1998. Sa prestation de libre passage lui avait permis de racheter les années de cotisations CIA, sans rappel de cotisation. AK______ n'a pas non plus eu de rappel et la solidarité CIA n'a pas été mise à contribution. Son titre exact à AK______ était celui de « Chargé de la division ressources humaines ». Auparavant, il y avait un responsable des ressources humaines, mais il dépendait de l'Office du personnel de l'Etat, de sorte que les fonctions n'étaient pas comparables.

Le témoin a affirmé qu'il n'avait pas d'intérêt personnel dans la présente cause, sa classe CIA correspondant à l'équivalence de la classe CRG. Cela étant, il avait également une « différence AK______ » non assurée, raison pour laquelle il avait lancé le projet pour assurer la différence AK______ de l'ensemble du personnel auprès d'une autre institution de prévoyance. Même si les demandeurs obtenaient gain de cause, sa différence AK______ existerait toujours.

61.         Le 17 février 2010 également a été entendue Madame S______ (témoin n° 2), actuaire interne à la CIA, employée par la CIA depuis novembre 2001.

S'agissant de la convention d'affiliation, le témoin a précisé que les statuts n'exigeaient pas de convention écrite. Cela étant, en général, une convention se signait entre la CIA et les institutions externes, ce qui n'avait toutefois pas été le cas avec AK______.

En 2001 [recte 2000], le règlement de la CIA avait été modifié et régissait désormais l'affiliation et le départ des institutions externes (voir art. 6bis à 6 octies du règlement). Il arrivait que la convention d'affiliation réglât encore d'autres aspects. Les dispositions réglementaires introduites en 2001 [recte 2000] avaient pour but d'éviter la signature systématique d'une convention avec les nouvelles institutions externes. Avec l'introduction de ces dispositions, il s'agissait ainsi de régler de façon formelle le fait qu'une institution externe puisse être affiliée sans convention écrite. Cela étant, seul le cas de AK______ n'a pas fait l'objet d'une convention écrite.

Les nouveaux salaires AK______ étant plus élevés que l'ancienne classe de traitement des employés, une équivalence avec l'échelle des traitements de l'Etat a été effectuée. Le basculement des salariés dans leur nouvelle classe de fonction pouvait entraîner jusqu'à 6 classes supplémentaires dans l'échelle de l'Etat de sorte que la question des coûts s'était posée pour la CIA, AK______ et les salariés relativement au salaire assuré. A la suite de consultations tripartites, il avait été décidé d'admettre jusqu'à deux classes équivalent Etat maximum supérieures pour calculer le traitement assuré CIA. Grâce à cette équivalence, la CIA pouvait appliquer son plan.

Après avoir expliqué le coût actuariel de l'amélioration du salaire assuré pour les demandeurs et le système du rappel, Madame S______ a précisé que AK______ comptait beaucoup de salariés « matures » en termes d'assurance, ce qui entraînait une grande différence entre ce qui devait être effectivement facturé et ce qui était demandé aux assurés et à l'employeur. Le déséquilibre était très grand. En d'autres termes, plus les augmentations de salaires étaient importantes, plus la perte actuarielle était grande et cela se reportait sur l'ensemble des assurés CIA.

Lorsqu'une institution externe, comme cela a été le cas de la Fondation des Parkings, désirait sortir de l'échelle des traitements de l'Etat, elle prenait contact avec la CIA, pour que cette dernière puisse s'assurer que la nouvelle grille salariale se rapprochait le plus de celle de l'Etat afin d'éviter une perte actuarielle trop importante pour elle.

62.         L'audition de Monsieur E______ (témoin n° 3), initialement prévue pour le 17 février 2010, a dû être reportée, la CIA ne l'ayant pas délié de son secret de fonction. Dans un courrier du 1er février 2010, le Comité de la CIA a considéré que Monsieur E______ était bénéficiaire de la procédure opposant les demandeurs à la CIA et à AK______, de sorte qu'il y avait un conflit d'intérêts potentiel entre son intérêt individuel et celui de la CIA et de ses membres.

De son côté,Monsieur AC______, Président du Conseil d'administration de AK______, a informé Monsieur E______ par pli du 3 février 2010 que tant que ses interventions se limitaient aux éléments précédant sa désignation au sein du Conseil d'administration de AK______, il n'y avait pas lieu de le délier de son secret de fonction. Cela étant, il était libéré dudit secret pour la période antérieure, en ce qui concernait notamment sa participation aux travaux de concertation liés à l'autonomisation de AK______.

63.         Le 11 mars 2010, la CIA a sollicité l'audition de Monsieur AH______, son directeur général.

64.         Par écriture du 15 mars 2010, la CIA a estimé qu'il n'était « guère concevable d'interroger M. E______ dans un domaine se trouvant dans le champ d'application de son devoir de loyauté et de fidélité », laissant cependant au TCAS le soin « de régler cette situation à satisfaction de droit ».

65.         Pour sa part, AK______, par courrier du 24 mars 2010, a considéré que Messieurs E______, H______, G______ et F______ étaient liés par le secret de fonction.

66.         Le 25 mars 2010, la CIA a transmis au TCAS copie d'un courrier du 19 mars 2010 adressé à Monsieur E______, dans lequel elle l'informait qu'elle s'en rapportait à justice quant au principe de son audition et à l'appréciation éventuelle de son témoignage.

67.         Le 13 avril 2010, AK______ a communiqué copie d'un courrier adressé parle Président du Conseil d'administration de AK______ à Monsieur E______ en date du 25 mars 2010, considérant qu'il ne lui appartenait pas, « en sa qualité de membre du conseil d'administration et compte tenu du devoir de loyauté y attaché, de témoigner dans le cadre d'un litige opposant AK______ à ses employés ». Pour le surplus, il renvoyait Monsieur E______ à son courrier du 3 février 2010 (pièce 44, défendeur).

68.         Le 14 avril 2010, Madame S______ (témoin n° 2) a, une nouvelle fois, été entendue à titre de témoin. Elle a exposé que les réévaluations de fonctions au sein de l'Etat entraînaient dans 90% des cas en 2009 une augmentation d'une à deux classes de traitement ainsi qu'un rappel de cotisation. En tenant compte du plafonnement de deux classes, la réévaluation des fonctions au sein de AK______ en 1999 était comparable à celles généralement effectuées à l'Etat de Genève. C'est la CIA qui a proposé à AK______ de procéder par analogie avec ce qui se passait à l'Etat et de procéder, s'agissant du traitement CIA assuré, à une augmentation de deux classes au maximum. Par ailleurs, chaque fonction de l'AK__________ a été associée à une classe de traitement de l'Etat de Genève.

Après avoir réexpliqué le système de rappels de la CIA, le témoin a précisé qu'il existait une surfacturation pour les jeunes assurés et une sous-facturation pour les assurés bénéficiant d'une promotion tardive. Lorsque le coût actuariel dépassait le plafond, qui était de 450% depuis 2000, il existait une solidarité, le coût actuariel étant compensé par le surcoût des jeunes assurés.

Lors de la réévaluation des fonctions au sein de l'Etat de Genève en 2009, 11% des employés bénéficiaient d'une augmentation de trois classes de traitement et 1% de plus de trois classes, étant précisé que le traitement assuré correspondait aux classes de traitement effectives. En cas de promotion, la règle des rappels était appliquée sur la base de la classe de traitement effective, sans plafonnement.

La situation de AK______ était atypique, les progressions salariales entraînant de grandes différences de classes de traitement. 75% des employés de AK______ étaient concernés par une augmentation de plus de deux classes, dont 24% concernait des sauts de trois classes et 51 % des sauts de plus de trois classes.

Après avoir rappelé la pratique de la CIA lorsque des institutions externes souhaitaient sortir de l'échelle des traitements de l'Etat, le témoin a précisé que le critère pour la CIA était essentiellement de savoir si le fait de changer de système occasionnait des rappels ou non et, dans l'affirmative, si cela risquait d'entraîner des pertes actuarielles majeures. A sa connaissance, la CIA n'avait jamais refusé le passage hors échelle, les études ayant démontré une perte actuarielle supportable. Cela étant, la problématique de la perte actuarielle pouvait être réglée dans des accords.

A l'audience, le témoin a remis au TCAS la note qu'elle avait établie le 12 avril 2010, dont il ressort que :

-          En 2009, l'Etat a sollicité la CIA pour 28 simulations de réévaluation de fonction, concernant 1804 personnes. Sur ces 1804 cas, 1587 donnaient lieu à un rappel de cotisation en raison d'un saut de classe au-delà de la classe 9, les proportions étant les suivantes : saut d'une classe : 51% ; saut de deux classes : 37% ; saut de trois classes : 11% et saut de plus de trois classes : 1%.

-          Si la limitation à deux classes au-dessus de la classe de fonction CIA initiale n'avait pas été appliquée en 1999, les proportions concernant les 253 employés de AK______ touchés auraient été les suivantes : saut d'une classe : 10%, saut de deux classes : 15%, saut de trois classes : 24% et saut de plus de trois classes : 51%.

69.         Par courrier du 30 avril 2010, la CIA a informé le TCAS que le Comité de la CIA avait finalement partiellement levé Monsieur E______ de son secret de fonction, pour la période antérieure à son mandat, soit avant le 1er janvier 2004.

70.         Le 3 mai 2010, Madame S______ a transmis au TCAS les documents ayant servi de base à son analyse du 12 avril 2010. En annexe figurait une note actualisée, faisant état de 34 autres cas qui auraient dû être ajoutés. Cela n'entraînait toutefois aucune modification des pourcentages.

71.         Madame S______ a été à nouveau entendue le 26 mai 2010. Lors de cette audience, elle a confirmé que si les employés de la catégorie I établie par AK______ étaient restés dans l'échelle de traitement de l'Etat, ils n'auraient pas eu droit à une augmentation du traitement assuré CIA. Si les salaires des employés de AK______ avaient été déplafonnés, cela aurait eu pour conséquence une augmentation des prestations de prévoyance dues par la CIA, dont le coût actuariel se serait élevé à 15 millions, ce chiffre incluant le montant actuariel et les rappels. Le rappel total facturé se serait élevé à 11 millions et demi, dont les deux tiers, soit 7,7 millions, auraient été à la charge de AK______, la différence de 3 millions et demi, qui n'aurait pas fait l'objet d'un rappel, aurait incombé à toute la collectivité des assurés CIA. Le témoin a également confirmé que les salariés de AK______, à fonctions égales, auraient bénéficié de meilleures prestations de prévoyance que tous les autres assurés CIA. L'estimation du coût de 15,5 millions a été effectuée sur la base de la situation de tous les assurés AK______ au 1er janvier 2009, en faisant une simulation sur les 10 ans à venir. Pour établir ce chiffre, elle s'était notamment fondée sur l'étude de K______ du 19 mars 2009, qu'elle a remise au TCAS. Les chiffres articulés dans son rapport avaient été validés par la société L______ (voir pièce 9, défenderesse). Si les salaires étaient déplafonnés, Monsieur A______ percevrait une rente annuelle de 60'000 fr. à 65 ans alors qu'actuellement elle s'élèverait à 45'000 fr. S'agissant de Monsieur D______, elle s'élèverait à 75'000 fr. si le salaire assuré était déplafonné alors qu'actuellement, elle serait de 62'000 fr.

Le même jour, Monsieur T______ (témoin n° 1) a été réentendu. Il a déclaré que la discussion fondamentale avec la CIA portait sur l'engagement financier de cette dernière, consécutivement à l'augmentation des classes de fonction. Suite à de nombreuses discussions, il avait été décidé de bloquer ladite augmentation à deux classes. A l'époque, le rappel que AK______ aurait été amené à verser s'élevait à 3,6 millions en tenant compte du plafonnement à deux classes. AK______ avait laissé la possibilité à chaque collaborateur de rester dans l'échelle des traitements de l'Etat, ce qui avait pour conséquence de ne pas pouvoir entrer dans la nouvelle échelle des traitements de AK______ avec l'augmentation correspondante. S'agissant des demandeurs, ils ne s'étaient jamais opposés à l'augmentation du salaire AK______ et du traitement assuré CIA. 11 ou 19 salariés avaient souhaité rester dans l'échelle des traitements de l'Etat. AK______ avait donné ce choix en raison des coûts de rappels engendrés pour les employés. Aucun texte ne définissait les catégories 1 à 3 de l'échelle de traitement AK______, dès lors qu'il s'agissait d'une pratique orale appliquée par AK______ depuis 1999. Le coût hypothétique qu'aurait entraîné l'augmentation du traitement assuré exclusivement auprès de la CIA aurait été trop élevé. AK______ avait donc envisagé une solution sous la forme d'un plan complémentaire en primauté de cotisations et en capitalisation intégrale. Le projet était déjà très avancé et a été suspendu jusqu'à droit connu dans la présente procédure. Il avait été évoqué pour la première fois en 2005. Avant d'aller devant la Commission du personnel, les questions relatives à la gestion du personnel se traitent avec la délégation administration et personnel du Conseil d'administration, dont trois des membres participaient ensuite aux débats devant la Commission du personnel. Les procès-verbaux de la Commission du personnel étaient accessibles sur l'intranet de AK______ depuis 2008 environ. Par le passé, chaque employé pouvait les consulter auprès des représentants du personnel membres de la Commission du personnel.

72.         Le 9 juin 2010, Messieurs E______ (témoin n° 3), U______ (témoin n° 4) et AA______ (témoin n° 5) ont été entendus par le TCAS.

Monsieur E______ (témoin n° 3), président de la Commission du personnel d'avril 1994 à mai 1999, membre de la Commission du personnel du Conseil d'administration depuis 1999, ancien représentant du personnel au sein du comité de la CIA, a déclaré que pendant le processus d'adoption du Statut du personnel de AK______, dès 1995, les employés étaient toujours soumis, pour ce qui concerne le salaire, à la grille de l'Etat. A l'époque, il n'était pas question d'une nouvelle politique salariale au sein de AK______. Le personnel devait adhérer au statut sans connaître les futurs règlements, l'adhésion à titre transitoire ayant été refusée. Le Conseil d'administration a décidé d'initier cette nouvelle politique salariale, alors qu'aucune demande en ce sens n'avait été formulée par le personnel. Les employés ont été informés de la nouvelle politique salariale, mais la Commission du personnel n'a pas adhéré à cette politique. Lorsque ladite politique a été présentée pour la première fois au personnel, il n'était pas encore question de limitation du salaire assuré CIA. Cela étant, en cas de promotion ou de changement de fonction, les statuts de la fonction publique, sauf erreur de sa part, limitaient le salaire assuré à deux classes. La limitation du salaire assuré CIA à deux classes de fonction supérieures résultait de l'application des mécanismes prévus dans la fonction publique. Quelques employés n'avaient pas souhaité payer de rappels et étaient ainsi restés assurés au même salaire CIA qu'avant la nouvelle politique salariale. La direction de AK______ avait envisagé la création d'un deuxième pilier complémentaire pour pouvoir assurer la différence de traitement. Il s'agissait d'une demande du personnel qui souhaitait que les indemnités soient également assurées en deuxième pilier.

Quant à Monsieur U______ (témoin n° 4), préretraité AK______, il a indiqué qu'il n'avait pas été appelé à adhérer formellement à la nouvelle politique salariale. Il a adhéré au statut du personnel de AK______ avant la nouvelle politique salariale, n'ayant aucune raison de rester à l'Etat, ce d'autant plus qu'il leur avait été promis que tous les acquis de l'Etat allaient être transférés à AK______. Lorsque la nouvelle politique salariale a été présentée, il n'était pas question d'une limitation du salaire assuré CIA à deux classes de fonction supplémentaires. Il s'est écoulé entre six mois et un an entre le moment où la politique salariale leur a été présentée et le moment de la limitation du salaire assuré CIA. Le personnel n'a pas eu le choix d'accepter la limitation du salaire assuré, elle lui a été imposée. Cela étant, AK______ avait indiqué au personnel qu'il allait étudier une solution pour assurer les différences de classes. « De mémoire, il me semble que cette limitation a été faite de manière arbitraire suite à une erreur de calcul du chef de service de personnel. A l'époque, il nous avait promis de reprendre l'intégralité des rattrapages. Le chef du personnel avait proposé une certaine somme au Conseil d'administration de AK______ afin qu'il vote un budget pour le rattrapage des classes CIA pour tout le personnel en classe plus élevée. L'erreur s'est révélée après le vote du budget par le Conseil d'administration. Après, la direction de AK______ a pris la décision de limiter le salaire assuré CIA à 2 classes de traitement maximum pour respecter le budget ». Le témoin a déclaré avoir été frustré par l'inégalité de traitement entre les différents collaborateurs, certains de ses collègues étant augmentés de deux classes de traitement équivalent Etat et assurés CIA de manière correspondante, alors que d'autres, comme lui, étaient augmentés de quatre classes équivalent Etat et prétérités de deux classes de traitement assuré CIA. Cela étant, il faisait confiance à la direction de AK______ qui avait dit qu'elle ferait quelque chose. D'ailleurs, l'association des cadres avait relancé à plusieurs reprises la direction. Quant à lui, il s'était plaint auprès de la direction à plusieurs reprises. Il avait réagi en 2007 lorsqu'il s'était rendu compte que de nouveaux collaborateurs, ses subordonnés, étaient engagés en classe CRG 21, équivalent Etat 18 et classe CIA 18, donc sans limitation, alors que lui-même était engagé en classe CRG 54, classe Etat 21 et classe CIA 19. Une autre personne était engagée en classe CRG 53, classe équivalent Etat 20 et classe CIA 20 également. Elle était donc moins bien classée que lui en termes de traitement, mais mieux assurée au niveau de la prévoyance professionnelle. Ces engagements concernaient toutefois des nouvelles fonctions n'existant pas dans la classification CRG. Jusqu'à sa retraite en 2009, il n'avait reçu aucune proposition concrète pour combler la différence AK______.

Enfin, Monsieur AA______ (témoin n° 5), sapeur d'aviation, opérateur à AK______, ancien membre de la Commission du personnel de 2006 à fin mars 2010, a indiqué au TCAS qu'en 1996, il avait été amené à adopter le nouveau statut du personnel de AK______ mais qu'il n'était alors pas encore question d'une nouvelle politique salariale, cette dernière leur ayant été présentée en 1998 et entrée en vigueur en 1999. Il ne se souvenait pas quand la question de la limitation du salaire assuré à deux classes de traitement supplémentaires était apparue. S'agissant de sa situation personnelle, il a indiqué que son salaire assuré CIA était de trois classes de moins que son salaire réel (classe 12 CIA alors qu'il était en classe CRG 49, équivalent Etat 15). Le poste d'appointé à AK______ qu'il occupait avait été créé après l'entrée en vigueur de la nouvelle politique salariale, après l'évaluation des fonctions CRG ayant eu lieu en 2007 (ce qui a immédiatement été contesté par AK______ en audience). Suite à sa promotion, il était passé de la classe CRG 48 (équivalent Etat 13) à la classe CRG 49 (équivalent Etat 15), mais son salaire était resté assuré en classe 12 CIA. Monsieur AA______ a également confirmé que lors d'une réunion du personnel, à laquelle il n'avait pas assisté, la question des possibilités de rattrapages CIA avait été évoquée. AK______ avait également indiqué que trois projets étaient en cours et notamment celui d'un deuxième pilier complémentaire en primauté de cotisations en dehors de la CIA. Par la suite, il a participé à une autre séance du personnel au cours de laquelle il leur avait été indiqué que tous les travaux de rattrapages étaient stoppés en raison des recours pendants devant la Commission de recours de AK______.

73.         Le 13 octobre 2010, Messieurs F______ (témoin n° 6), H______ (témoin n° 7), G______ (témoin n° 8) et X______ (témoin n° 9) ont été entendus par le TCAS.

Monsieur F______ (témoin n° 6), Président de la Commission du personnel de AK______ de 1997 à 2000, a précisé qu'il n'y avait pas eu de consultation formelle du personnel lors de l'introduction de la nouvelle politique salariale. Cette dernière avait été présentée à la Commission du personnel, qui ne l'avait jamais approuvée. La politique salariale précitée a été présentée au personnel pour la première fois en 1998 et était entrée en vigueur le 1er janvier 1999. Il n'était alors pas question d'une limitation du salaire assuré. « Un mois avant l'application de cette politique salariale, le directeur de AK______ a envoyé une note de service aux collaborateurs. Il les [a] informés du report de l'entrée en vigueur de cette politique salariale et a évoqué la problématique des rappels CIA. Il apparaissait qu'une erreur importante avait été commise dans la détermination du montant total des rappels CIA ». S'agissant du contexte du courrier du 23 novembre 1998 (produit sous pièce 18, défendeur), le témoin a indiqué, en se référant aux dates des courriers échangés, qu'il n'était alors pas encore question de limiter le salaire assuré. Il estimait en outre que la limitation du salaire assuré CIA était en lien avec l'échec des négociations concernant le retrait de l'action en constatation de droit. A sa connaissance, la limitation du salaire assuré n'était pas exigée par la CIA. De plus, le personnel n'avait pas été consulté avant cette limitation. En 1994, les salariés avaient le choix de rester soumis au statut du personnel de l'Etat ou d'adhérer au Statut du personnel de AK______. Pour les employés qui avaient choisi d'adhérer au Statut précité, la nouvelle politique salariale s'appliquait. Ils n'avaient pas le choix de l'accepter ou non. Dans les années 2000, la direction de AK______ avait indiqué à la Commission du personnel que la différence AK______ aurait pu être assurée différemment auprès d'une autre institution de prévoyance. La Commission du personnel a régulièrement relancé la direction sur ce point, mais aucune proposition concrète n'a été formulée. S'agissant de sa situation personnelle, son salaire assuré CIA (classe 18) se situait deux classes au-dessous de son salaire réel (classe CRG 53 et équivalent Etat 20). Le témoin était d'accord avec l'augmentation du salaire réel mais non avec la limitation du salaire assuré. Selon ses souvenirs, en 1999 il n'avait pas eu le choix de rester dans l'échelle des traitements de l'Etat au contraire de l'année 1994, où il avait le choix de rester soumis au statut du personnel de l'Etat ou non. Lors de l'entrée en vigueur du nouveau statut du personnel, le 1er janvier 1996, l'échelle des traitements n'était pas réglée par le Statut ; elle a été prévue après coup.

Monsieur H______ (témoin n° 7), Président de la Commission du personnel et ancien membre du Conseil d'administration de 1994 à 2003 environ, représentant du personnel dans le Comité de la CIA de 1995 à 2003, a confirmé qu'en 1994, le personnel avait le choix de rester à l'Etat ou d'être soumis au nouveau Statut du personnel de AK______. Pour sa part, il n'avait pas immédiatement adhéré au nouveau Statut, mais plus tard, en 1999, sous condition que nul ne soit licencié en raison de ses activités syndicales. Lors de l'introduction de la nouvelle politique salariale, il était passé de la classe 20 à la classe 24, équivalence Etat et donc classe 22 CIA. La différence AK______ n'était pas assurée. Le témoin a confirmé qu'en février 2000, il avait recouru contre son avis de situation et engagé une procédure dans laquelle il avait obtenu gain de cause sur plusieurs points, plus particulièrement sur la question du salaire assuré. Suite au renvoi par le TF, pour une question de procédure, il avait retiré son recours, croyant que AK______, la CIA et lui-même allaient parvenir à un accord. Selon le témoin, en fait son employeur l'avait « roulé », car il n'y a en réalité pas eu d'accord. Il avait été « manipulé par Monsieur AD______ ».

Monsieur G______ (témoin n° 8), sapeur d'aviation, membre de la Commission du personnel jusqu'en 1994 puis membre du Conseil d'administration de AK______ de 1994 à 2006, a confirmé que le personnel disposait du choix suivant : rester sous le statut de l'Etat ou adhérer au nouveau Statut de AK______. S'agissant de la politique salariale, il n'y avait pas eu consultation du personnel ; elle avait simplement été appliquée. A son sens, il était clair pour tout le monde, lors de la première présentation de la politique salariale, que le salaire assuré CIA allait augmenter de deux classes. S'agissant de l'évolution future, rien n'était confirmé. Concernant sa situation personnelle, le traitement avait toujours suivi, mais non le salaire assuré CIA En 2002, lors d'une promotion (chef de poste), il est passé en classe CIA 20 avec une classe de traitement équivalent Etat 20. La dénomination de son poste était nouvelle, mais le grade était celui de capitaine. Le 23 décembre 2004, il avait été promu et était devenu commandant adjoint. La classe de traitement le concernant était la classe 23, équivalent Etat et son salaire assuré était en classe 23 CIA, le grade existant toutefois déjà en 1999. Le témoin a également précisé que « lorsqu'il y a trop de progression salariale, il y a des étapes afin d'éviter qu'il y ait trop de pertes sur salaire du fait des rattrapages. C'est au bout de quelques années que [son] traitement de salaire assuré CIA est parvenu à sa classe de traitement salariale ».

Enfin, Monsieur X______ (témoin n° 9), contrôleur des aires de trafic à AK______, a également été entendu le 13 octobre 2010. Le témoin a expliqué qu'avant la nouvelle politique salariale, sa classe de fonction était la classe 14. Après l'entrée en vigueur de cette politique, sa classe de traitement était la classe 18 équivalent Etat et son salaire assuré était en classe 16 CIA (ce qui a été contesté par AK______). Il a été nommé cadre, soit chef de quart en 1996 ou 1997 et était devenu responsable de l'équipe de contrôleurs. Par la suite, il avait changé de poste, ayant en quelque sorte été rétrogradé. En 2005, il avait été nommé coach formateur. Toutefois, comme il comptait 20 ans de service en 2005, il a pu garder sa classe de traitement et son salaire. La fonction de coach formateur n'existait pas auparavant. Cela étant, lorsqu'il était entré dans cette nouvelle fonction, il présentait toujours la même différence AK______ non assurée. En revanche, un de ses collègues, Monsieur AE______, qui a suivi le même cursus que lui, a vu son salaire CIA s'aligner sur son salaire réel.

A l'issue de l'audience, le TCAS a imparti à la CIA un délai au 5 novembre 2010 pour produire la décision du comité relative à l'affiliation de AK______ à la CIA avec la limitation des salaires à deux classes de traitement.

74.         Par chargé complémentaire du 21 octobre 2010, AK______ a transmis les avis de situations de Messieurs F______, X______ et G______ (pièce 45, 48 et 49, défendeur), dont il ressort que seul Monsieur G______ bénéficiait d'un salaire assuré CIA équivalent à son salaire effectif (classe équivalent Etat : 20 puis 23 et classe CIA 20 puis 23) depuis le 1er août 2002.

75.         Par courrier du 5 novembre 2010, la CIA a brièvement récapitulé les faits. Faisant application de l'art. 15 al. 1 de ses statuts, « la CIA a estimé que la limitation à une majoration de deux classes du salaire assuré, sans promotion individuelle, permettait l'analogie avec les règles prévalant à l'Etat ». Cette position avait été confirmée par courrier du 9 février 1999. « Cette position de la CIA, qui était connue de tous, a été décidée et mise en oeuvre par son secrétariat dans le cadre de ses compétences statutaires ». La décision du Comité requise par le TCAS lors de l'audience du 13 octobre 2010 n'était pas jointe à ce courrier.

76.         Le 9 décembre 2010, la CIA a communiqué au TCAS un courrier du 28 mars 2001 que AK______ lui avait adressé, lui demandant d'établir un estimatif du coût d'un départ de AK______ au 31 décembre 2000 (pièce 14, défenderesse).

77.         Le 1er janvier 2011, la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire est entrée en vigueur et la Chambre des assurances sociales de la Cour de Justice (ci-après la Cour de céans), compétente en matière de prévoyance professionnelle, a repris la procédure pendante par-devant le TCAS.

78.         Le 19 janvier 2011, Messieurs AF______ (témoin n° 10) AG______ (témoin n° 11), AH______ (témoin n° 12), AI______ (témoin n° 13) et AJ______ (témoin n° 14) ont été entendus.

Monsieur AF______ (témoin n° 10) était chef des ressources humaines de AK______ entre 1996 et 2000. Il a confirmé que la nouvelle politique avait été initiée par la direction et que sa mise en place ne résultait pas d'un processus paritaire. Lors des discussions avec la Commission du personnel, la question du salaire assuré avait été abordée assez rapidement, notamment en ce qui concernait la différence AK______. AK______ avait effectué plusieurs simulations concernant l'ensemble des collaborateurs, y compris une simulation portant sur la prise en charge, par AK______, de l'entier des rappels, mais une décision de ne pas entrer en matière avait été prise pour une question de coûts. Pour lui, la différence AK______ n'avait rien à voir avec les rappels mais résultait de l'application de la nouvelle politique salariale, selon laquelle chaque collaborateur était classé dans une fonction au regard de la nouvelle grille salariale. Après avoir expliqué la nouvelle politique, avec la fourchette entre 80 et 115% de la médiane, le témoin a précisé que la différence AK______ correspondait en réalité à la différence de repositionnement dans la nouvelle grille non assurée. Il y avait une corrélation entre les classes CRG et les classes Etat, ce qui avait entraîné la problématique du repositionnement des classes AK______ dans les classe Etat utilisées par la CIA, ce qui pouvait entraîner une différence entre la rémunération AK______ et l'équivalence Etat. Le témoin se souvenait en outre qu'à un moment, les normes CIA ne permettaient pas la flexibilité voulue par la politique salariale. S'il y a eu blocage, c'était forcément pour une raison. AK______ étant déjà affilié à la CIA, il ne se souvenait pas d'une discussion quant à une convention d'affiliation.

Monsieur AG______ (témoin n° 11), employé par K______, a confirmé la teneur de ses rapports produits sous pièces 17 et 18, demandeurs ainsi que 36, défendeur. Il a exposé qu'en cas de suppression du plafond du salaire assuré, il y aurait eu des coûts de rappels plus élevés pour AK_______ et les employés, des coûts supplémentaires en termes de rappels et de cotisation et la constitution de provisions pour AK_______ en application des normes comptables internationales. Le témoin a ensuite expliqué toute la problématique de la constitution de provisions et du taux d'intérêts y applicable. S'agissant de la description du mandat tel que résultant des rapports, le témoin n'a pas eu de commentaires particuliers de la part de AK______. Cela étant, avec le temps, les coûts de rappels augmentent. Le rapport 2007 prévoyait deux calculs : le premier, portant sur 6 millions, représentait le coût de rappel total pour le réajustement des classes CIA pour les collaborateurs concernés, soit ceux pour lesquels le salaire déterminant avait été plafonné, et le second, portant sur 8,5 millions, représentait le coût sur 10 ans des cotisations de rappel si la définition du salaire déterminant CIA était modifiée pour tous les employés de AK_______.

Monsieur AH______ (témoin n° 12), directeur général de la CIA depuis 1998, a déclaré qu'il existait une convention et un règlement entre AK_______ et la CIA. Le règlement avait été adopté par le Comité et il avait signé personnellement la convention. Lors de la nouvelle politique salariale, il avait été décidé que les salaires AK_______ devaient être traduits en échelle de traitements de l'Etat. L'accord entre AK______ et la CIA a été ratifié par le Comité. Il y avait cependant une divergence sur la question du découvert en cas de départ collectif. Le refus de AK______ de prendre en charge la différence entre la couverture du moment et le 100% de la couverture des engagements a été en partie à l'origine de la modification du règlement général relatif aux institutions externes. A la demande de AK______, la CIA avait chiffré le coût du départ de AK______ à plusieurs dizaines de millions de francs. Les statuts et règlements de la caisse faisaient partie intégrante de la convention tacite liant la CIA et AK______. Selon le témoin, la convention d'affiliation tacite reprenait exactement ce qui figurait dans le règlement que AK______ n'avait pas signé. Il a expliqué qu'il y avait deux conventions : celle relative aux salaires plafonnés, qui a été signée, et celle concernant l'obligation de payer en cas de départs collectifs, qui n'a pas été signée. Depuis la modification des statuts de la CIA, l'exigence de la signature d'une convention d'affiliation écrite avait été abandonnée, permettant ainsi une affiliation tacite, étant précisé que les statuts et règlements CIA s'appliquaient d'office à une telle convention tacite. Le plafonnement de l'augmentation de deux classes de fonction a fait l'objet de décisions internes à la CIA, une décision formelle du Comité n'étant pas nécessaire à ce moment-là. Si le plafonnement à deux classes supplémentaires n'avait pas été appliqué, il y aurait eu des augmentations plus ou moins importantes du traitement assuré CIA, ce qui aurait entraîné un coût actuariel pour la CIA non couvert par les rappels.

La Cour de céans a procédé à l'audition des experts en caisses de pension de la société L______ SA, expert-conseil de la CIA.

Monsieur AI______ (témoin n° 13), chargé du dossier de la CIA auprès de la société précitée, a indiqué que les rappels tels que définis réglementairement ne couvraient pas l'entier du coût actuariel, la définition statutaire du rappel comportant un maximum facturable, de sorte que la perte actuarielle estimée se serait élevée à 3,5 millions de francs pour les 10 exercices à venir. Dès lors que les pertes actuarielles non couvertes étaient portées au résultat de l'exercice de la CIA, elles auraient été couvertes par les recettes encaissées par la CIA, soit par les contributions globales des employés affiliés et des assurés. Le financement de la CIA était basé sur une hypothèse de progression salariale et de carrière à l'intérieur de l'échelle des traitements de l'Etat. Pour éviter un subventionnement, par la collectivité des assurés, d'une progression salariale et des prestations de prévoyance correspondantes non prévues dans le financement ordinaire d'une caisse telle que la CIA, il était recommandé, sur le plan actuariel, de limiter ce type de subventionnement, pour éviter des inégalités de traitement, termes qui ne devaient pas être compris au sens juridique. Les autres institutions externes affiliées à la CIA avaient toutes une échelle de traitement extrêmement voisine de celle de l'Etat. A cotisations identiques, il était actuariellement justifié que la CIA plafonne les augmentations de traitement assuré hors échelle de traitements de l'Etat pour des institutions externes.

Monsieur AJ______ (témoin n° 14), actuaire conseil à la retraite, a déclaré que la question des salaires AK______ assurés auprès de la CIA avait fait l'objet de débats. La nouvelle politique de AK______ avait été sujette à discussions car elle posait problème, notamment en ce qui concernait la solidarité, dès lors qu'elle allait bien au-delà de l'échelle habituelle de l'Etat et que pour la CIA, cette nouvelle politique posait des problèmes de solidarité non souhaitables. Il a notamment précisé que « le système de rappel et le taux de cotisation étaient définis dans les statuts de la CIA. L'expert actuariel avait pour mission, tous les 4 ans, de vérifier si ce qui était prévu dans les statuts en termes de financement était suffisant ou pas pour financer le plan de prestations. Si on constate lors de l'expertise un manque de financement, l'actuaire avait pour habitude de dire qu'il fallait modifier le taux de cotisations et non [le] système des rappels car cela donnait lieu à des débats politiques interminables ». La Cia étant assimilée à une fondation commune, elle ne pouvait assurer des catégories particulières comme une fondation collective, dans laquelle le financement était assuré entreprise par entreprise. « Tout employeur externe qui demandait son affiliation à la CIA devait passer par une convention avec la CIA, écrite, si ma mémoire est bonne mais je ne sais plus depuis quelles années. Lors de chaque négociation, la CIA faisait attention à ce que la rémunération fixée par l'employeur ne s'écarte pas trop de l'échelle des traitements de l'Etat ». Il a encore ajouté que « le Comité de la CIA ne décidait pas souverainement des règles en matière de salaire assuré. Le projet de modification devait en effet être envoyé au Conseil d'Etat et, si ma mémoire était bonne, soumis au Grand Conseil pour approbation ».

79.         La Cour de céans a imparti un délai au défendeur pour actualiser le coût supplémentaire pour AK______, les parties étant invitées à déposer leurs conclusions après enquêtes.

80.         Dans ses écritures du 28 avril 2011, AK______ a persisté dans ses conclusions. Selon le défendeur, les enquêtes avaient démontré qu'il existait une convention d'affiliation initiale ex lege, reconduite tacitement, ainsi qu'un accord explicite et écrit, par échange de correspondance entre AK______ et la CIA, fixant le salaire assuré CIA pour les salariés AK______, sur la base d'une table de conversion de l'échelle des traitements de l'Etat en application des art. 5 al. 3 des statuts et 6ter al. 1 du règlement général de la CIA. Le plafonnement de la majoration du salaire assuré pour les catégories I et II était impératif pour des motifs d'égalité de traitement entre les assurés salariés de AK_______ et les autres assurés affiliés à la CIA. La catégorie III, concernant des fonctions nouvelles créées par AK______, n'avait pas entraîné de majoration du traitement assuré pour des personnes en fonction à AK______ au 31 décembre 1998. En cas d'augmentation du traitement des catégories I à III, il convenait également de convertir cette majoration à l'échelle des traitements de l'Etat pour vérifier qu'il n'y avait pas de progression excédant les annuités maximales de fonction prévues par l'échelle des traitements de l'Etat. Par conséquent, l'ensemble du personnel connaissait une « différence AK______ » s'agissant du traitement assuré. Au 1er janvier 1999, les salariés de AK______ avaient eu le libre choix d'adhérer au statut du personnel et de son échelle des traitements ou de rester dans l'échelle des traitements de l'Etat. Les demandeurs avaient bénéficié d'une amélioration de leur traitement et de leur salaire assuré CIA. De plus, ils avaient accepté individuellement leur situation de salaire et de prévoyance dès le 1er janvier 1999, acceptation qui avait été renouvelée tacitement chaque année à réception de leurs avis de situation de salaire et de retraite individuels. AK______ considérait que le déplafonnement du salaire assuré des demandeurs entraînerait une inégalité de traitement en leur faveur et au détriment des autres assurés de la CIA. Enfin, il ne saurait être imposé unilatéralement, ni à la CIA ni à AK______, une majoration du traitement assuré des demandeurs en violation des statuts et du règlement de la CIA ainsi que de l'accord clair conclu entre AK______ et la CIA.

81.         Le 14 février 2011, AK______ a communiqué à la Cour de céans un exemplaire du rapport de K______ du 4 février 2011, chiffrant les coûts supplémentaires liés à une éventuelle augmentation des cotisations à la CIA, en cas d'acceptation de la demande (pièce 51, défendeur).

82.         Par écriture du 29 avril 2011, les demandeurs ont intégralement persisté dans leurs conclusions. S'agissant de l'objet du litige, ils ont précisé que la différence entre le salaire versé et celui effectivement assuré auprès de la CIA était de deux ordres : 1) la relation faite entre les classes de traitement de AK______ et l'échelle de traitement de l'Etat de Genève ne permettait pas de prendre en considération l'intégralité de la rémunération, de sorte que AK______ avait envisagé d'assurer cette différence AK______ en primauté de cotisations auprès d'une tierce institution de prévoyance et 2) la limitation à deux classes de traitement équivalence Etat supplémentaire du salaire assuré auprès de la CIA suite à l'adoption de la nouvelle politique salariale. Sur le plan financier, cette deuxième différence AK______ était bien plus faible que ce que prétendait AK______. En ce qui concernait le rapport d'affiliation, les demandeurs ont rappelé que l'agrément du Conseil d'Etat, de la Caisse, de l'institution concernée et de son personnel ou de sa représentation étaient nécessaires pour la conclusion d'une convention d'affiliation, qui devait impérativement être écrite en raison du parallélisme des formes prévu par l'art. 12 CO et de la position du Grand Conseil dans sa motion. En ce qui concernait les rapports de prévoyance avec les assurés, les demandeurs ont considéré que tant que « le système de rémunération adopté par l'institution externe permet une analogie avec le système de traitement de l'Etat, au sens de l'article 5 al. 3 des Statuts, ce sont les règles ordinaires de la caisse qui s'appliquent ». Après avoir répété les principes de la planification, de collectivité et d'égalité de traitement, les demandeurs ont rappelé que la définition d'un cercle d'assurés devait être prévue dans les dispositions réglementaires et que, dans la mesure où les statuts de la CIA n'avaient pas été modifiés et approuvés par le Grand Conseil, les cercles d'assurés tels que voulus par AK______ ne pouvaient être pris en considération par la CIA. Par conséquent, « la décision de la direction de AK______ de plafonner le salaire assuré à deux classes de traitement en cas de réévaluation de fonction est intervenue de manière clairement contraire au droit ». Les demandeurs ont également examiné les listings que AK______ a remis à l'actuaire de la CIA, dont il ressort que de nombreux employés auraient bénéficié d'un coulissement de plus de deux classes en matière de salaire assuré. Enfin, ils ont fait valoir que la collectivisation de la part du rappel de cotisations, à partir d'un certain seuil, pouvait être évitée par la signature d'une convention d'affiliation.

83.         Le 29 avril 2011, la CIA a également persisté dans ses conclusions, rappelant en substance que AK______ et la CIA avaient convenu que la progression du salaire assuré serait limitée à deux classes, afin de permettre une structure des salaires analogue à ceux de l'Etat de Genève. Après avoir résumé les déclarations des témoins, la CIA a précisé que les autres institutions externes ne connaissaient pas de système de plafonnement similaire à celui de AK______, la situation de ce dernier étant atypique compte tenu des progressions salariales pratiquées et des grandes différences de classe de traitement qui en découlaient. « Compte tenu du plafonnement de deux classes, la réévaluation des fonctions en 1999 est comparable à celle effectuée en général à l'Etat de Genève ». Enfin, la CIA s'est prononcée sur la question de la solidarité des affiliés et des assurés et a précisé qu'en vertu du principe de la solidarité compris dans le plan de financement en primauté de prestations, la part du coût actuariel qui n'était pas couverte par le rappel facturé était assumée par la collectivité des assurés.

84.         Par courriers du 16 juin 2011, la Cour de céans a sollicité de AK______ la production de pièces complémentaires, dont le tableau récapitulatif réclamé par les demandeurs et le document relatif à la nouvelle politique salariale, situation au 18 janvier 1999.

85.         Le 13 juillet 2011, AK______ a fourni les pièces demandées, dont le document intitulé « nouvelle politique salariale : dispositions d'application révisées - situation au 18/01/1999 », à l'exception du mandat d'analyse des fonctions AK______ daté du 19 novembre 1996. S'agissant du mandat d'analyse du 19 novembre 1996 requis par la Cour de céans, AK______ a exposé que son contenu avait été détaillé dans plusieurs de ses écrits. Il a transmis le projet de description et d'évaluation des fonctions fournis par le cabinet mandaté. S'agissant du document intitulé « nouvelle politique salariale : dispositions d'application révisées - situation au 18/01/1999 », AK______ a indiqué que le texte de cette pièce avait été repris dans les documents produits sous pièce 23, défendeur et 9, demandeurs. Concernant Monsieur AE______, dont la situation avait été évoquée lors de l'audience d'enquêtes du 13 octobre 2010, il a bénéficié d'une promotion et a occupé une fonction créée après l'entrée en vigueur de la politique salariale. Selon le défendeur, la production des avis de situation de 1998 à ce jour entraînait un travail démesuré, plus de 10'000 pièces devant être caviardées et commentées lors de leur production. De plus, la protection des données et de la personnalité ne saurait être garantie. Par conséquent, AK______ a refusé de produire ces pièces.

86.         Le 15 juillet 2011, la CIA a produit les pièces requises par la Cour de céans, tout en précisant que la convention à laquelle Monsieur AH______ faisait référence au début de son audition le 19 janvier 2011, concernait en réalité le plafonnement des salaires à deux classes et correspondait au courrier du 9 février 1999 produit sous pièce 6, défenderesse. Quant au règlement cité par le témoin, il s'agissait du règlement général de la CIA du 22 février 1999. Pour le surplus, la défenderesse a repris des arguments d'ores et déjà invoqués.

87.         Après avoir pris connaissance des pièces produites, les demandeurs ont, par écriture du 30 septembre 2011, repris pour l'essentiel leurs arguments et conclusions précédents.

88.         Par courrier du 7 novembre 2011, AK______ a invoqué un fait nouveau, soit le projet de fusion de la CIA avec la Caisse de prévoyance du canton de Genève (ci-après : CPCG) et la Caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (ci-après : CEH) qui, s'il devait être approuvé par le Grand Conseil, aurait pour conséquence une diminution de la « différence AK_______ ». Pour le surplus, AK______ a en substance repris les arguments d'ores et déjà invoqués à plusieurs reprises.

89.         Le même jour, la CIA a persisté dans ses conclusions.

90.         Après échange des écritures, la cause a été gardée à juger le 8 novembre 2011.

91.         Par arrêt du 27 juin 2012 (ATAS/891/2012), la Cour de céans, composée de Madame Juliana BALDE (Présidente), de Mesdames Maya CRAMER, Doris GALEAZZI, Karine STECK et de Monsieur Jean-Louis BERARDI (juges) ainsi que de Madame Dana DORDEA et de Monsieur Eugen MAGYARI (juges assesseurs), a partiellement admis la demande du 14 janvier 2009 et a condamné AK______ et la CIA à assurer l'intégralité du salaire de Messieurs A______ et D______, au sens des considérants, avec effet au 1er décembre 2003. Elle a, en outre, invité la CIA à transmettre à AK______ et aux demandeurs le détail des rappels de cotisations résultant de l'assurance de l'intégralité du salaire, condamné AK______ à verser à la CIA les parts employeur et employé desdites cotisations et donné acte à Messieurs A______ et D______ de leur engagement à payer la part employé à leur charge, les y condamnant en tant que de besoin.

92.         Monsieur A______ est décédé le ______ 2012.

93.         Le 4 septembre 2012, AK______ et la CIA ont déposé un recours au Tribunal fédéral, concluant à l'annulation de l'arrêt du 27 juin 2012 et au déboutement, avec suite de frais, de Messieurs A______ et D______ de toutes leurs prétentions.

94.         Alors que la procédure de recours était pendante, la Cour de céans a appris que Monsieur Eugen MAGYARI, régulièrement élu juge assesseur, n'était plus domicilié dans le canton de Genève depuis le 30 novembre 2010, ce dont elle a informé le Tribunal fédéral et les parties par courrier du 15 mars 2013. Le 16 avril 2013, la Cour de céans a précisé que Monsieur Eugen MAGYARI ne remplissait plus les conditions d'éligibilité lors de la délibération de l'arrêt du 27 juin 2012 de sorte que le plénum avait statué dans une composition irrégulière.

95.         Le 27 mai 2013, le Tribunal fédéral a annulé l'arrêt du 27 juin 2012 et renvoyé la cause à la Cour de céans pour qu'elle statue à nouveau dans une composition conforme à la loi (ATF non publié 9C_683/2012).

96.         La Cour de céans a fixé, le 31 mai 2013, un délai expirant le 21 juin 2013 pour déposer d'éventuelles observations suite à l'arrêt du Tribunal fédéral précité.

97.         Par courrier du 31 mai 2013, la CIA et AK______ ont sollicité un échange d'écritures portant sur la suite de la procédure et, plus précisément, sur l'opportunité de répéter les actes d'instruction accomplis en présence de Monsieur MAGYARI et d'instruire les griefs dirigés contre l'arrêt du 27 juin 2012, formulés dans leur acte de recours au Tribunal fédéral et non tranchés par ce dernier.

98.         Le 4 juin 2013, les défendeurs ont sollicité une prolongation du délai au 15 juillet 2013.

99.         Par courrier du 7 juin 2013, la Présidente de la Cour de céans a rappelé à AK______ et à la CIA que l'arrêt du 27 juin 2012 avait été annulé pour violation de la garantie constitutionnelle à une composition régulière du tribunal et que la cause lui avait été renvoyée pour qu'elle statue à nouveau. Le délai imparti aux parties ne portait dès lors que sur ce point. Par ailleurs, l'instruction de la cause était close et ne saurait être reprise suite à l'arrêt du Tribunal fédéral de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner un nouvel échange d'écritures. Le délai au 21 juin 2013 était maintenu.

100.     Le 21 juin 2013, les défendeurs ont soulevé un incident de réouverture de l'instruction, considérant que les actes effectués postérieurement au 30 novembre 2010 étaient viciés. Dès lors que les vices les affectant ne pouvaient être guéris que par leur répétition, un délai pour se déterminer sur la suite à donner à l'instruction de la cause et notamment sur la nécessité de répéter les actes d'instruction accomplis après le 30 novembre 2010 devait être octroyé. Par ailleurs, il appartenait à la Cour de céans de trancher l'incident de réouverture de l'instruction dans une composition plénière. Enfin, la récusation de la Présidente de la Cour de céans était demandée dès lors que, statuant seule, elle avait persisté à considérer l'instruction comme étant close et refusé d'octroyer une prolongation du délai. L'impartialité de la Présidente de la Cour de céans était également contestée au vu des « critiques importantes et nombreuses adressées au premier jugement instruits par la même 4ème Chambre dans le recours au Tribunal fédéral ».

101.     Par courrier du 21 juin 2013, les demandeurs ont considéré que, compte tenu des termes clairs et dénués d'ambiguïté de l'arrêt du Tribunal fédéral du 27 mai 2013, il n'y avait pas lieu de rouvrir les enquêtes et de procéder à des échanges d'écritures ou d'accomplir tout autre acte d'instruction. Pour le surplus, ils ont persisté dans leurs conclusions.

102.     Le 13 novembre 2013, la Délégation des Juges de la Cour de justice en matière de récusation a rejeté la demande de récusation des défendeurs, relevant que les refus de rouvrir l'instruction de la cause et de prolonger le délai pour produire les observations constituaient à l'évidence des actes relevant de l'activité d'un juge rapporteur, susceptibles de recours en cas de contestation. Il en allait de même du grief de violation du droit d'être entendu relatif à la réouverture de l'instruction.

103.     Avec effet au 1er janvier 2014, une fusion par combinaison a été opérée entre la CIA et la Caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (CEH). A la même date, l'ensemble des actifs et des passifs de la CIA et de la CEH, ainsi que l'ensemble de leurs droits et obligations ont été transférés à la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (CPEG), par succession universelle et ces entités ont été dissoutes.

104.     Par écriture du 7 février 2014, les défendeurs ont répété leurs arguments s'agissant de la réouverture de l'instruction et repris, en détail, leur argumentation sur le fond.

105.     Pour leur part, par courrier du 10 février 2014, les demandeurs ont persisté dans les termes de leurs conclusions du 21 juin 2013.

106.     Sur ce, la cause a été gardée à juger le 4 mars 2014.

107.     Le 15 mai 2014, la présidente de la Cour de céans a retourné aux défendeurs leur envoi du 14 mai 2014, les informant qu'il n'en sera pas tenu compte, motif pris que cette écriture spontanée est intervenue après la clôture de l'instruction et la communication que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

A. RECEVABILITE DE LA DEMANDE ET DROIT APPLICABLE

1.             a) Selon l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP ; RS 831.40), chaque canton désigne un tribunal qui connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit.

A teneur de l'art. 56V al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941 en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010 (aLOJ; RS E 2 05), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaissait, en instance unique, des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu'aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du code des obligations ; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 ; art. 142 code civil).

Dès le 1er janvier 2011, cette compétence est revenue à la Cour de justice, Chambre des assurances sociales, laquelle a repris la procédure pendante devant le Tribunal cantonal des assurances sociales (art. 143 al. 6 de la LOJ du 26 septembre 2010).

b) Dans le cadre de contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, la compétence des autorités visées par l'art. 73 LPP est doublement définie. Elle l'est, tout d'abord, quant à la nature du litige: il faut que la contestation entre les parties porte sur des questions spécifiques de la prévoyance professionnelle, au sens étroit ou au sens large. Ce sont donc principalement des litiges qui portent sur des prestations d'assurance, des prestations de libre passage (actuellement prestations d'entrée ou de sortie) et des cotisations. Cette compétence est également limitée par le fait que la loi désigne de manière non équivoque les parties pouvant être liées à une contestation, savoir les institutions de prévoyance, les employeurs et les ayants droit (ATF 128 V 254 consid. 2a).

Savoir si le point litigieux est ou non l'objet d'une réglementation expresse de la LPP ou de ses dispositions d'exécution n'est toutefois pas déterminant, en ce qui concerne la recevabilité de l'action devant le tribunal cantonal ou du recours subséquent devant le Tribunal fédéral des assurances. Au contraire, les tribunaux institués par l'art. 73 LPP sont appelés à connaître aussi de litiges qui opposent une institution de prévoyance à un employeur ou à un ayant droit, même s'ils n'appellent l'application d'aucune disposition du droit public fédéral, quant au fond, et qui doivent être tranchés exclusivement au regard du droit privé, du droit public cantonal ou du droit public communal (ATF 117 V 50 consid. 1).

c) Le for de l'action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans laquelle l'assuré a été engagé (art. 73 al. 3 LPP).

d) En l'espèce, le litige a trait au salaire assuré et aux rappels de cotisation que les demandeurs et le défendeur auront à verser en cas d'admission de la demande de sorte qu'il est régi par les art. 73 LPP, 56V al. 1 let. b aLOJ et 143 al. 6 LOJ. Par ailleurs, le siège des défendeurs se trouve à Genève. La Cour de céans est ainsi compétente ratione materiae et loci pour connaître du présent litige.

Par ailleurs, l'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise, comme telle, à l'observation d'aucun délai (SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise, 1984, p. 19 ; SCHWARZENBACH-HANHART, Die Rechtspflege nach dem BVG, SZS 1983, p. 182).

La demande est ainsi recevable.

2.             La novelle du 3 octobre 2003 modifiant la LPP (1ère révision) est entrée en vigueur le 1er janvier 2005 (sous réserve de certaines dispositions dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er avril 2004 et au 1er janvier 2006; RO 2004 1700), entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de la prévoyance professionnelle (RO 2004 1677). Etant donné que les faits déterminants se sont réalisés pour partie avant et après l'entrée en vigueur de la novelle, l'ancien droit est applicable jusqu'au 31 décembre 2004 et le nouveau droit dès cette date (ATF 126 V 136 consid. 4b et les références).

B. SUBSTITUTION DES PARTIES

a/aa) De jurisprudence constante, l'acquisition d'une entreprise avec actifs et passifs est un cas de succession universelle (ATF 106 II 346 = JdT 1982 I, p. 77 ; voir également ATAS/620/2009 du 26 mai 2009 consid. 2). A Genève, l'art. 60 al. 1 de la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (LCPEG; B 5 22) prévoit qu'une fusion par combinaison entre la CPEG, la CIA et la CEH est opérée avec effet au 1er janvier de l'année 2014. A la même date, l'ensemble des actifs et des passifs de la CIA et de la CEH, ainsi que l'ensemble de leurs droits et obligations, en particulier les rapports de prévoyance en faveur des membres salariés ainsi que les rapports d'affiliation avec les employeurs, découlant de la loi ou des conventions d'affiliation, sont transférés à la CPEG, par succession universelle.

a/bb) Selon l'art. 560 al. 1 CC, les héritiers acquièrent de plein droit l'universalité de la succession dès que celle-ci est ouverte.

a/cc) Lorsque la succession dans les droits et obligations d'une partie a lieu à titre universel, elle entraîne, en vertu du droit fédéral, de plein droit, un changement de parties sans l'accord des autres parties à la procédure (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 142 et les références citées).

b) En l'espèce, il est établi qu'il y a eu succession universelle tant en ce qui concerne la CIA que feu Monsieur A______ - dont la succession a été acceptée ainsi que l'a constaté le Tribunal fédéral -, ce qui n'est au demeurant pas contesté. Il y a, par conséquent, lieu de procéder à la substitution des parties.

C. INCIDENT DE REOUVERTURE DE L'INSTRUCTION ET RECEVABILITE DES ECRITURES SUR LE FOND

3.             Dans leurs écritures des 21 juin 2013 et 7 février 2014, les défendeurs concluent à la réouverture de l'instruction, avec l'octroi d'un délai aux parties pour pouvoir se déterminer sur les actes d'instruction à accomplir, ceux effectués postérieurement au 30 novembre 2010 étant viciés. Dans leur écriture du 7 février 2014, ils se prononcent également, en détail, sur le fond du litige.

4.             a) Selon l'art. 29 al. 2 Cst., les parties ont le droit d'être entendues. Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa, 126 V 132 consid. 2b et les arrêts cités).

La jurisprudence, rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. et qui s'applique également à l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 129 II 504 consid. 2.2, 127 I 56 consid. 2b, 127 III 578 consid. 2c, 126 V 130 consid. 2a), a déduit du droit d'être entendu, notamment, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment (ATF 126 I 16 consid. 2a/aa, 124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références).

b) L'art. 30 al. 1 Cst. garantit à toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Les tribunaux d'exception sont interdits.

A teneur de l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH ; RS 0.101), toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. En d'autres termes, un droit à une composition correcte de l'autorité judiciaire découle des art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH (ATF 127 I 128 consid. 3c ; ATF 125 V 499 consid. 2a ; ATF 117 Ia 166 consid. 5a).

b/aa) L'art. 30 Cst. n'exige pas nécessairement que l'autorité judiciaire appelée à statuer soit composée des mêmes personnes tout au long de la procédure, notamment pour l'audition des témoins et pour le jugement (8C_383/2009 du 2 juillet 2009, consid. 2.2 ; ATF 117 Ia 133 consid. 1e ; 96 I 321 consid. 2a). La modification de la composition de l'autorité judiciaire en cours de procédure ne constitue donc pas en tant que telle une violation de l'art. 30 Cst. (4A_325/2007 du 15 novembre 2007 consid. 2.3; ATF 96 I 321 consid. 2a). Elle s'impose nécessairement lorsqu'un juge doit être remplacé par un autre ensuite de départ à la retraite, d'élection dans un autre tribunal, de décès ou en cas d'incapacité de travail de longue durée (arrêt 4A_325/2007 du 15 novembre 2007 consid. 2.3).

b/bb) A Genève, les juges assesseurs sont des magistrats de l'ordre judiciaire au sens de l'art. 132 de la Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (Cst-GE - RS GE A 2 00) (ATF 130 I 106 consid. 2.1). Ils doivent remplir les conditions d'éligibilité prévues par l'art. 5 al. 1 LOJ, sauf celles de la titularité du brevet d'avocat et des 3 ans de pratique professionnelle utile au poste (art. 5 al. 2 LOJ). Tout juge assesseur doit, pour être éligible, avoir l'exercice des droits politiques dans le canton de Genève (art. 5 al. 1 let. b LOJ) et être domicilié dans le canton de Genève (art. 5 al. 1 let. c LOJ). Lors de l'adoption de la LOJ, le 26 septembre 2010, le législateur a prévu une disposition transitoire au terme de laquelle les magistrats déjà en fonction au moment de l'entrée en vigueur de la loi (le 1er janvier 2011) et ne remplissant pas la condition exigée par l'art. 5 al. 1 let. c LOJ n'y étaient pas soumis (art. 144 al. 8 LOJ).

b/cc) La LPA prévoit la possibilité de demander l'annulation des opérations auxquelles a participé une personne tenue de se récuser (au plus tard 5 jours après avoir eu connaissance du motif de récusation) et pour autant que la procédure ne soit pas clôturée (art. 15B al. 1 et 3 LPA), mais elle ne prévoit pas une telle possibilité pour les actes de procédure effectués par un tribunal composé irrégulièrement.

Par ailleurs, il y a motif à révision d'une décision définitive selon l'art. 80 let. e LPA lorsqu'il apparaît que « la juridiction qui a statué n'était pas composée comme la loi l'ordonne [...] ». En revanche, le fait qu'un tribunal composé irrégulièrement ait uniquement procédé à des actes de procédure n'est pas un motif de révision, ni un motif d'annulation du jugement, encore moins d'annulation des actes de procédure.

b/dd) En 2004, le Tribunal fédéral des assurances (TFA) a annulé plusieurs arrêts du Tribunal cantonal des assurances sociales (TCAS) et lui a renvoyé les causes pour qu'il statue à nouveau. Il a considéré que les prononcés entrepris avaient été rendus dans une composition irrégulière, dès lors que deux juges assesseurs, dont l'élection devait être ensuite invalidée, avaient participé à la procédure et à la décision (voir notamment l'ATF non publié I 144/04 du 11 mai 2004). Suite au renvoi de la cause, le TCAS a rendu de nouveaux jugements dans une composition conforme à la loi (voir par exemple arrêt du 28 septembre 2004, ATAS/751/2001, rendu suite à l'ATF non publié I 144/04). Saisi d'un recours à l'encontre de l'arrêt du 28 septembre 2004 (ATAS/751/2001), le Tribunal fédéral a notamment considéré que le seul fait que le TCAS, siégeant dans une nouvelle composition, ait rendu un jugement semblable à celui qui avait été prononcé dans une composition irrégulière, ne permettait pas de conclure à l'existence d'une violation du droit d'être entendu du justiciable. Par ailleurs, ce droit n'avait pas non plus été violé par le fait que le TCAS n'avait pas donné l'occasion à l'intéressé, dans sa composition modifiée, de s'exprimer à nouveau, oralement ou par écrit. Certes, selon la jurisprudence, les parties à un procès ont le droit d'exiger qu'un juge ne participe pas à une décision sans avoir pris connaissance de leurs allégués et de la procédure probatoire. Selon le Tribunal fédéral, ce qui est déterminant à ce propos, c'est qu'un juge intervenant pour la première fois dans un procès ait pu prendre connaissance de l'objet de celui-ci par l'étude du dossier. Or, cette exigence a été respectée par la juridiction cantonale, sans que l'intéressé ait eu à nouveau l'occasion de se déterminer, puisque les membres du tribunal qui intervenaient pour la première fois possédaient, sur la base du dossier, les mêmes connaissances que la présidente de la 1re Chambre du TCAS, laquelle avait déjà participé au premier jugement. L'état de fait et la situation juridique restaient inchangés et n'avaient pas non plus à être complétés en fonction de l'arrêt de renvoi du TFA (voir ATF non publié I 700/04 du 17 janvier 2006, consid. 2).

c) Selon la terminologie genevoise, l'expression « la cause est gardée à juger » signifie que l'instruction est close (voir Stéphane GRODECKI, La notion de la « cause gardée à juger » en procédure administrative genevoise, in RDAF 2010 I p. 239 ss). Dans un tel cas, le principe de la bonne foi commande au recourant de réagir à la communication des juges en requérant par exemple la tenue d'une comparution personnelle ou l'administration de preuves (cf. arrêts 8C_897/2011 du 22 novembre 2012, 8D_2/2010 consid. 3.3, 8D_4/2009 consid. 5.3 et les arrêts cités).

d/aa) En l'espèce, par arrêt du 27 mai 2013, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à la Cour de céans pour qu'elle statue à nouveau, dans une composition régulière. Dans ce contexte, le terme « statuer » doit être compris dans le sens de « prendre une décision, en vertu de l'autorité qu'on détient, au sujet d'une question, d'un litige » (voir définition donnée par le Dictionnaire Larousse). En d'autres termes, le Tribunal fédéral visait à l'évidence la prise de décision en tant que telle et non la procédure d'instruction. A cela s'ajoute le fait que l'absence de domicile dans le canton de Monsieur Eugen MAGYARI lorsqu'il a siégé lors des audiences de comparution personnelle du 11 janvier 2011 et d'enquêtes du 19 janvier 2011 n'entache les procès-verbaux des audiences précitées d'aucun vice ou défaut formel qui exigerait que les parties et les témoins devraient être réentendus comme le soutiennent les défendeurs. En effet, les défendeurs ont, au même titre que les demandeurs, participé activement à l'administration des preuves, leurs questions/contre-questions ainsi que les réponses des parties et des témoins, dûment protocolées, ont fait l'objet de procès-verbaux détaillés et signés. Les défendeurs, qui n'ont, au demeurant, jamais contesté la teneur desdits procès-verbaux, ont pu ensuite largement s'exprimer à leur propos dans leurs écritures. Le droit d'être entendu des défendeurs a été ainsi entièrement respecté durant la procédure cantonale.

Au vu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de rouvrir l'instruction de sorte que l'incident soulevé sur ce point sera rejeté.

d/bb) S'agissant des écritures sur le fond, il y a lieu de constater ce qui suit. La Cour de céans a informé les parties, le 8 novembre 2011, que la cause était gardée à juger. Conformément à la jurisprudence, celles-ci devaient réagir immédiatement si elles entendaient déposer des observations complémentaires, ce qu'elles n'ont pas fait. En outre, depuis le prononcé de l'arrêt du 27 juin 2012, l'état de fait et la situation juridique sont restés inchangés, hormis la question de la substitution des parties. Il n'est ainsi à l'évidence pas nécessaire de compléter les écritures en fonction de l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral (voir dans le même sens ATF non publié I 700/04 du 17 janvier 2006, consid. 2). A cela s'ajoute le fait qu'il n'appartient pas à la Cour de céans de se prononcer sur les griefs soulevés par les défendeurs dans leur recours en matière de droit public dirigé contre l'arrêt du 27 juin 2012 et non tranchés par le Tribunal fédéral, comme ils l'ont requis dans leur courrier du 31 mai 2013. Il n'en aurait été différemment que si le Tribunal fédéral était entré en matière sur le fond du litige et avait renvoyé la cause pour statuer dans le sens de ses considérants (voir notamment dans le même sens : ATFA non publié I 722/04 du 22 février 2005 consid. 1). Enfin, le nouveau juge assesseur, qui intervient pour la première fois, possède, sur la base du dossier, les mêmes connaissances que les six autres membres de la composition de la Cour de céans, lesquels avaient déjà participé au premier jugement de sorte qu'il n'y a pas lieu d'autoriser les défendeurs à s'exprimer une nouvelle fois oralement ou par écrit.

Pour tous les motifs précités, les écritures des défendeurs, en tant qu'elles portent sur le fond du litige doivent être écartées.

D. OBJET DU LITIGE

5.             Le présent litige porte sur le montant du salaire assuré des demandeurs auprès de la CIA et des rappels de cotisations en découlant. Il s'agit plus particulièrement de déterminer si, suite à la nouvelle politique salariale, les défendeurs étaient en droit de limiter le salaire assuré CIA à deux classes supplémentaires au maximum.

Cela étant, la Cour de céans relève que lors de l'entrée en vigueur de la politique salariale le 1er janvier 1999, le salaire annuel brut des demandeurs dépassait le montant de 71'640.- retenu pour le calcul du salaire coordonné, de sorte que la question du salaire assuré relève exclusivement de la prévoyance surobligatoire.

E. AU FOND

a)             Principes généraux en matière de prévoyance professionnelle

6.             Le système suisse de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité repose sur le principe des trois piliers (art. 111 Cst.). Les prestations du premier pilier (assurance-vieillesse, survivants et invalidité fédérale et prestations complémentaires) doivent couvrir les besoins vitaux des personnes assurées de manière appropriée (art. 112 al. 2 let. b Cst.), alors que les prestations du deuxième pilier (prévoyance professionnelle) doivent permettre aux personnes assurées de maintenir de manière appropriée leur niveau de vie antérieur (art. 113 al. 2 let. a Cst.; voir également art. 1 al. 1 LPP). II incombe au troisième pilier (prévoyance individuelle) de compléter les mesures collectives des deux premiers piliers selon les besoins personnels.

Les institutions de prévoyance qui participent à l'application du régime obligatoire de la prévoyance professionnelle (art. 48 al. 1 LPP) doivent respecter les exigences minimales fixées aux art. 7 à 47 LPP (art. 6 LPP). Il leur est toutefois loisible de prévoir des prestations supérieures aux exigences minimales fixées dans la loi (art. 49 LPP; Message à l'appui de la LPP, FF 1976 I 127 ch. 313 et 314; ATF 131 II 593 consid. 4.1 p. 603 et les références).

7.             a) Lorsqu'une institution de prévoyance décide d'étendre la prévoyance au-delà des exigences minimales fixées dans la loi (prévoyance surobligatoire ou plus étendue), on parle alors d'institution de prévoyance « enveloppante ». Une telle institution est libre de définir, dans les limites des dispositions expressément réservées à l'art. 49 al. 2 LPP en matière d'organisation, de sécurité financière, de surveillance et de transparence, le régime de prestations, le mode de financement et l'organisation qui lui convient, pour autant qu'elle respecte les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité ainsi que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 115 V 103 consid. 4b p. 109).

Dans les faits, une institution de prévoyance « enveloppante » propose, en général, un plan de prestations unique qui inclut les prestations minimales et les améliore, sans opérer de distinctions entre prévoyance obligatoire et prévoyance plus étendue. Afin de s'assurer que les prestations réglementaires respectent les exigences minimales de la LPP, autrement dit si la personne assurée bénéficie au moins des prestations minimales légales selon la LPP (art. 49 al. 1 LPP en corrélation avec l'art. 6 LPP), l'institution de prévoyance est tenue de pouvoir procéder à un calcul comparatif entre les prestations selon la LPP (sur la base du compte-témoin que les institutions de prévoyance doivent tenir afin de contrôler le respect des exigences minimales de la LPP [Alterskonto; art. 11 al. 1 OPP 2]) et les prestations réglementaires (Schattenrechnung; cf. ATF 136 V 65 consid. 3.7 p. 71 et les références; voir également ATF 114 V 239 consid. 6a p. 245).

b) Au lieu d'aménager la prévoyance plus étendue dans le cadre d'une institution de prévoyance « enveloppante », il est possible d'opérer une séparation organisationnelle stricte entre la prévoyance obligatoire et la prévoyance surobligatoire (« splitting »).

8.             En l'espèce, il est constant que la défenderesse est une institution de prévoyance de droit public pratiquant la prévoyance obligatoire et plus étendue (institution dite «enveloppante»: ATF 128 V 247 consid. 3a, 117 V 45 consid. 3b). Les prestations réglementaires vont en effet au-delà des prestations minimales selon la LPP (voir notamment arrêt non publié B 30/06 du 13 juillet 2006, consid. 3), dès lors que le montant assuré correspond au traitement des assurés et qu'il est supérieur au salaire coordonné selon l'art. 8 al. 1 LPP (voir dans ce sens arrêt de la Cour de céans, ATAS/505/2011, consid. 4, du 16 mai 2011 en la cause A/281/2009).

En tant qu'institution de prévoyance de droit public, la défenderesse se fonde sur des bases de droit public (STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2005 n° 251, p. 90 et 254, p. 91 ; GÄCHTER / GECKELER HUNZIKER, in LPP et LFLP, 2010, n° 6 ad art. 50 LPP).

b)            La convention d'affiliation

9.             AK______ invoque tout d'abord la force contraignante de la convention d'affiliation tacite conclue avec la CIA conformément à l'art. 6bis al. 1 du règlement général, qui règlerait notamment la question de la politique salariale et la divergence entre le salaire réel et le salaire annoncé à la CIA (réponse du 27 mars 2009, p. 29), ce qui est contesté par les demandeurs. Par ailleurs, la nature exacte de cette convention d'affiliation est également débattue. Pour les demandeurs, l'affiliation du personnel de AK______ résultait de l'adoption de l'art. 34 du Statut (édition 1996) (voir demande du 14 janvier 2009, p. 16, réplique du 9 juillet 2009, p. 25, conclusions motivées après enquêtes du 29 avril 2011, p. 5), étant précisé que dans un tel cas, le rapport d'affiliation se fonderait toujours sur la loi (réplique du 9 juillet 2009, p. 25). Pour la CIA, le rapport d'affiliation entre AK______ et la CIA résultait tantôt d'une convention d'affiliation initiale n'ayant pas été résiliée suite à l'autonomisation et restée en vigueur de par la loi (réponse du 15 mai 2009, p. 20) tantôt des dispositions légales, formelles, qui lui sont spécifiques (notamment l'art. 5 al. 3 des statuts et l'art. 6ter du règlement général) ainsi que de la loi cantonale sur AK______ de Genève (LAK__________ ; RS H 3 25) (voir conclusions après enquêtes du 29 avril 2011, p. 3). Enfin, pour AK______, son personnel était resté affilié à la CIA de par la loi, de sorte que la convention d'affiliation était une convention ex lege (réponse du 27 mars 2009, p. 22, conclusions après enquêtes du 28 avril 2011, p. 14), reconduite tacitement par la suite (conclusions après enquêtes du 28 avril 2011, p. 14).

10.         A titre liminaire, la Cour de céans examinera les relations juridiques entre AK______ et la CIA et plus particulièrement la problématique de la convention d'affiliation

a) Les employeurs soumis au droit privé s'affilient en général à des institutions régies par le droit privé de sorte que les relations juridiques entre les parties sont les suivantes (voir notamment GEISER, Zu den Vertragsverhältnissen in der berufliche Vorsorge, in Mélanges en l'honneur de Pierre Tercier, 2008, p. 259 et ss, voir également RIEMER / RIEMER-KAFKA, Das Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, 2006, § 4, p. 85 (cité ci-après : RIEMER / RIEMER KAFKA), LÜTHY, Das Rechtsverhältnis zwisschen Arbeitgeber und Personalvorsorgestiftung insbesondere der Anschlussvertrag mit einer Sammel- oder Gemeinschaftsstiftung, 1989, p. 72 et ss) :

-          L'employé et l'employeur sont liés par un contrat de travail de droit privé au sens des art. 319 et ss CO.

-          La relation entre l'employeur et l'institution de prévoyance repose sur une convention dite d'affiliation (Anschlussvertrag; art. 11 LPP) qui est un des contrats innommés du droit et de la pratique de la prévoyance professionnelle (ATF 120 V 299 consid. 4a p. 304).

-          Enfin, l'assuré est lié à l'institution de prévoyance de par la loi en ce qui concerne les prestations obligatoires (RIEMER, Vorsorge-, Fürsorge- und Sparverträge der beruflichen Vorsorge, in Innominatverträge, Festgabe zum 60. Geburtstag von Wlter R. SCHLUEP, 1988, p. 234, cité ci-après : RIEMER) et, en ce qui concerne les prestations surobligatoires, par un contrat innommé (sui generis) dit de prévoyance, dont le règlement de prévoyance constitue le contrat préformé, savoir ses conditions générales, auxquelles l'assuré se soumet expressément ou par actes concluants (par exemple, en conservant le règlement reçu, en payant des cotisations ou en acceptant la déduction correspondante sur son salaire (ATF 127 V 301, consid. 3a, voir également ATAS/563/2010 du 20 mai 2010).

b) Des institutions de droit public ont été créées en Suisse pour le personnel de la fonction publique (RIEMER / RIEMER-KAFKA, op. cit., §1, n° 70, p. 26). Dans un tel cas, les relations juridiques entre les parties sont en général les suivantes :

-          Les relations entre l'employeur - soit l'Etat - et l'employé sont généralement régies par le droit de la fonction publique ;

-          L'employeur est lié à l'institution de prévoyance de droit public de par la loi ;

-          Enfin, les rapports entre l'employé et l'institution de prévoyance sont régis par la loi, soit en d'autres termes par les statuts auxquels force de loi est reconnue, et non pas par un contrat de prévoyance, comme c'est le cas entre l'employé et l'institution de prévoyance de droit privé (ATF 119 V 142).

i)               L'obligation de conclure une convention d'affiliation écrite

11.         Dans le cas d'espèce, trois phases distinctes peuvent être distinguées s'agissant des relations entre AK______, la CIA et les demandeurs.

a) Avant l'autonomisation de AK______, en 1994, la situation correspondait à celle prévalant dans le domaine de la fonction publique : les relations juridiques entre les parties étaient toutes régies par la loi, aucun élément contractuel n'entrant en ligne de compte.

Il s'ensuit que les demandeurs, engagés par l'Etat de Genève en 1977 en qualité de surveillants AK______, étaient, à ce titre, assurés ex lege auprès de la défenderesse, institution de droit public conformément aux art. 53 du Règlement fixant le statut du personnel de l'administration cantonale du 17 octobre 1973, puis 47 du Règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale du 7 décembre 1987 (ci-après : règlement d'application), aujourd'hui abrogés. La conclusion d'un contrat de prévoyance n'était ainsi pas nécessaire. L'Etat de Genève, employeur, était également affilié à la CIA ex lege sans qu'une convention d'affiliation ne soit nécessaire.

b) Lors de l'autonomisation de AK______, en 1994, tout le personnel travaillant à AK______ - et par conséquent les demandeurs - a été transféré de plein droit à AK______ conformément à l'art. 41 al. 1 LAK______. S'agissant de la prévoyance professionnelle, l'alinéa 3 de cette même disposition prévoyait que « le personnel transféré à l'établissement [pouvait] rester affilié à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA) ».

Dans un premier temps, le statut du personnel de AK______ est resté régi, par analogie et à titre transitoire, par la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 15 octobre 1987, ainsi que par les autres lois et règlements qui lui étaient applicables, jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions d'application de l'art. 13 al. 2 let. j LAK______ (voir art. 1 du règlement concernant le statut transitoire du personnel de AK______ à Genève, du 5 décembre 1995 ; ci-après : règlement concernant le statut transitoire ; RS J 3.25.08, aujourd'hui abrogé). En d'autres termes, jusqu'à l'établissement du statut du personnel, prévu par l'art. 13 al. 2 let. j LAK______, le personnel de AK______ restait soumis au règlement d'application précité et notamment à son art. 47 qui prévoyait l'affiliation ex lege à la CIA.

c) Suite à l'adoption du Statut du personnel de AK______ à Genève (AK_______) le 1er décembre 1995 [ci-après : Statut AK_______ (édition 1996)], entré en vigueur le 1er janvier 1996, le règlement précité concernant le statut transitoire susmentionné a été abrogé.

Le Statut AK______ (édition 1996) prévoit à son art. 43 que dans la mesure où les conditions statutaires étaient remplies, les membres du personnel étaient affiliés à la CIA. En adoptant cette disposition, AK______ a, à l'évidence, marqué son intention de rester affilié à la CIA.

Se pose dès lors la question de la nécessité de conclure une convention d'affiliation écrite avec la CIA.

c/aa) La CIA est une institution de droit public créée pour les fonctionnaires de l'Etat de Genève, l'affiliation de ces derniers s'effectuant ex lege. L'art. 1 des Statuts CIA (édition 1997), applicable lors de l'adoption du Statut AK______ (édition 1996), prévoit cependant que les établissements ou les fondations de droit public cantonal ainsi que des institutions privées pouvaient s'affilier à la CIA en concluant une convention d'affiliation. Ces institutions n'étant pas affiliées ex lege à la CIA, la conclusion d'une telle convention était à l'évidence nécessaire. Au préalable, la demande des institutions externes devait avoir été approuvée tant par le Conseil d'Etat que par le Comité de la CIA.

c/bb) Suite à son autonomisation, AK______ se trouvait à l'évidence dans la même situation que les institutions externes précitées, n'étant plus affilié ex lege à la CIA. En effet, si l'affiliation du personnel de AK______ à la CIA existait certes avant l'autonomisation de AK______ en vertu du règlement d'application, il n'en demeure pas moins qu'avec l'entrée en vigueur du Statut AK______ (édition 1996), le 1er janvier 1996, le règlement précité n'était plus applicable de sorte que le personnel de AK______ n'était plus assuré ex lege à la CIA, étant rappelé que la LAK______ prévoyait la possibilité de rester affilié et non pas l'obligation.

Par conséquent, dès lors que dans le cas d'espèce, le lien d'affiliation du personnel de AK______ et la CIA a cessé d'exister ex lege avec l'adoption du statut du personnel, la conclusion d'une convention était nécessaire. Cela étant, les Statuts CIA (édition 1997) ne prévoyant aucune condition de forme à cette convention, il y a lieu d'admettre qu'une telle convention pouvait être conclue tacitement, même si la forme écrite eût été préférable pour la sécurité du droit.

Par ailleurs, même s'il ressort des statuts de la CIA que la demande d'affiliation de l'institution devait être approuvée par le Conseil d'Etat et le Comité de la CIA, la Cour de céans est d'avis que cette approbation était superflue, dans le cas d'espèce, dès lors que la LAK______ permettait au personnel de rester affilié à la CIA.

Au vu des considérations qui précèdent, la Cour de céans considère qu'une convention d'affiliation a, en réalité, été conclue tacitement entre AK______ et la CIA. En effet, dans le cas contraire, le personnel de AK______ n'aurait plus été assuré auprès de la CIA dès le 1er janvier 1996, ce qui n'est à l'évidence pas le cas.

ii)             Le contenu de la convention d'affiliation tacite

12.         Selon AK______, la convention d'affiliation portait également sur la limitation du salaire assuré à un coulissement de deux classes (voir réponse de AK______ du 27 mars 2009). Il convient d'examiner ce moyen soulevé par le défendeur.

a) La relation entre l'employeur et l'institution de prévoyance repose sur une convention dite d'affiliation (Anschlussvertrag; art. 11 LPP) qui est un des contrats innommés du droit et de la pratique de la prévoyance professionnelle (ATF 120 V 299 consid. 4a p. 304). Par ce contrat, l'institution s'engage à fournir les prestations découlant de la LPP pour l'employeur. En contrepartie, celui-ci s'engage à payer les primes dont elle demande le paiement. En remplissant ces incombances, les parties s'acquittent de leurs obligations contractuelles (ATF non publié B 149/2006, consid. 6.2 ; (STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2005, n° 315, p. 113 ; WYLER, in LPP et LFLP, 2010, n° 5 ad Art.11).

Une telle convention d'affiliation contient en principe les obligations suivantes pour l'employeur (LÜTHY, op.cit., p. 87 et ss):

-          L'obligation d'annoncer tout travailleur appartenant au cercle des personnes assurées selon le règlement ;

-          L'obligation de s'acquitter des primes et de les déduire du salaire des travailleurs ;

-          L'obligation de créer une commission de prévoyance du personnel ;

-          La reconnaissance des statuts et du règlement de l'institution de prévoyance.

b/aa) En l'espèce, la Cour de céans rappelle, à titre liminaire, que la convention d'affiliation ne peut être entrée en vigueur qu'avec effet au 1er janvier 1996. En effet, ce n'est qu'à cette date que le Statut AK______ (édition 1996) est entré en vigueur, ce qui a eu pour conséquence l'abrogation du règlement concernant le statut transitoire et la fin de l'affiliation ex lege du personnel à la CIA. Par ailleurs, les statuts CIA (édition 2000) et le règlement général ne sont entrés en vigueur que le 1er janvier 2000 (voir notamment art. 76 du règlement général, en ce qui concerne ce dernier), soit près d'un an après l'instauration de la nouvelle politique salariale.

Aussi, compte tenu de ce qui précède, le contenu de la convention d'affiliation tacite ne peut s'examiner qu'au regard des dispositions statutaires applicables en 1996, lorsqu'il a été décidé que le personnel de AK______ resterait affilié à la CIA.

b/bb) Selon l'art. 41 al. 3 LAK______, « le personnel transféré à l'établissement [pouvait] rester affilié à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA) ».

Une interprétation littérale de cette disposition permet de retenir que le personnel transféré avait la possibilité - et non l'obligation - de rester affilié à la CIA. De plus, l'emploi du terme « rester » signifie à l'évidence que l'affiliation devait perdurer aux mêmes conditions que précédemment (selon le Petit Larousse, le terme « rester » signifie « se maintenir, continuer à être dans la même position, le même état »). Par conséquent, la convention d'affiliation ne pouvait que reprendre les mêmes termes et conditions que ceux précédemment applicables, soit ceux ressortant clairement des statuts de la CIA.

b/cc) En outre, comme constaté précédemment, lors de la conclusion de la convention d'affiliation tacite, fin 1995, la nouvelle politique salariale n'avait pas encore été évoquée de sorte que la convention d'affiliation initiale ne pouvait en tout état pas tenir compte de ces particularités.

b/dd) La Cour de céans relève enfin que Monsieur AH______, directeur général de la CIA, a lui-même admis l'existence de deux conventions : 1) la convention d'affiliation, conclue tacitement, qui ne faisait que reprendre les statuts et règlements de la CIA et 2) une convention sur le salaire assuré, qu'il a lui-même signée (voir procès-verbal de l'audition de Monsieur AH______ du 19 janvier 2011, p. 3 à 5). A noter qu'aucune convention stricto sensu portant sur le salaire assuré n'a formellement été conclue, le témoin faisant en réalité allusion à un courrier du 9 février 1999 que la CIA a adressé à l'AK__________ (voir courrier de la CIA du 15 juillet 2011).

c) Force est par conséquent de constater que, contrairement à ce que AK______ soutient, la convention d'affiliation tacite conclue avec la CIA ne portait aucunement sur le salaire assuré et sa limitation à deux classes supplémentaires en cas de réévaluation des fonctions. Elle ne pouvait en effet que reprendre les statuts et règlements de la CIA applicables lors de sa conclusion, ce qui a d'ailleurs été confirmé par Monsieur AH______ lors de son audition du 19 janvier 2011.

Il s'ensuit que le salaire assuré doit être déterminé conformément aux dispositions statutaires de la CIA.

c)             Le salaire assuré

i)               La détermination du salaire assuré

13.         La Cour de céans relève que les conclusions des demandeurs portent sur la période du 1er janvier 1999 au jour du présent arrêt. Or, les Statuts de la CIA ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2000 de sorte qu'il convient de distinguer deux périodes : 1) l'année 1999, pour laquelle les Statuts CIA (édition 1997) étaient applicables et 2) la période dès 2000, à laquelle les Statuts CIA (édition 2000) sont applicables.

a/aa) Selon l'art. 4 al. 4 des Statuts CIA (édition 1997), les membres actifs sont répartis en deux catégories : 1) les personnes âgées de 20 ans révolus au moins et qui sont mensualisées (catégorie I) et 2) les autres personnes assurées en application des présents statuts (catégorie II). L'art. 4 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000) prévoit les catégories suivantes : 1) les salariés qui sont mensualisés (catégorie I) et les autres salariés (catégorie II).

Le traitement assuré sert de base pour le calcul des cotisations des membres actifs et de l'employeur [art. 16 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 6 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000)] et pour le calcul des prestations de la caisse [art. 18 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 8 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000)]. Selon les art. 16 al. 2 des Statuts CIA (édition 1997) et 6 al. 2 des Statuts (édition 2000), le traitement assuré correspond au traitement déterminant défini aux art. 15 des Statuts (édition 1997) et 15 des Statuts (édition 2000)] moins une déduction de coordination avec l'AVS. Le traitement déterminant des membres actifs de la catégorie I est le traitement légal annuel défini dans l'échelle des traitements des membres du personnel de l'Etat [art. 15 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 5 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000)]. Le traitement déterminant du personnel des institutions externes est fixé d'entente entre l'employeur et la caisse selon des règles analogues à celles prévalant à l'Etat [art. 15 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 5 al. 3 des Statuts CIA (édition 2000)]. Le traitement déterminant est limité au traitement maximum de la classe 30 de l'échelle des traitements des membres du personnel de l'Etat [art. 15 al. 2 des Statuts CIA (édition 1997) et 5 al. 4 des Statuts CIA (édition 2000)].

Selon les art. 26 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 56 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000), un rappel de cotisations est perçu en cas d'augmentation du traitement assuré résultant d'un changement de classe. Dans certains cas, non pertinents en l'espèce, l'augmentation du traitement assuré n'est pas soumise à rappel. Aux termes de l'annexe IV aux Statuts CIA (édition 1997) et de l'art. 8 de l'annexe aux Statuts CIA (édition 2000), le rappel de cotisations se calcule sur la différence entre le traitement légal, échelon 15 de la nouvelle classe de traitement et le traitement légal, échelon 15, de l'ancienne classe. Ce montant est à multiplier par le taux de rappel existant au moment où le changement de classe de traitement a lieu. Le taux de rappel est égal au taux de la prestation de libre passage, mais au minimum à 75% et au maximum à 270%, respectivement de à 450% [Statuts CIA (édition 1997), respectivement Statuts CIA (édition 2000)]. Le rappel de cotisations est de 1/3 à la charge du membre actif et 2/3 à celle de l'employeur. Pour les membres actifs non soumis aux normes salariales de l'Etat, la classe de fonction initiale prise en considération est déterminée par la caisse. Les règles de calcul du rappel dû en cas d'augmentation de traitement sont définies dans la convention liant la CIA à l'employeur, conclue en application des art. 2 des Statuts CIA (édition 1997) et 3 des Statuts CIA (édition 2000).

En d'autres termes, selon la systématique des statuts de la CIA :

-          Le traitement assuré, qui sert de base au calcul des cotisations et des prestations de la caisse [art. 16 al. 1 et 18 al. 1 des Statuts CIA (édition 1997) et 6 al. 1 et 8 al. 1 des Statuts CIA (édition 2000] se calcule conformément aux art. 15 et 16 des Statuts CIA (édition 1997) et 5 et 6 des Statuts CIA (édition 2000).

-          Les règles de calcul des rappels pour les membres actifs non soumis aux normes salariales de l'Etat sont définies dans la convention liant la CIA à l'employeur [voir annexe IV, ch. 3, let. a) aux Statuts CIA (édition 1997) et art. 8 de l'annexe aux Statuts CIA (édition 2000)].

a/bb) Selon l'art. 6bis al. 2 du règlement général de la CIA, les salariés des institutions externes appartiennent à la catégorie I ou à la catégorie II selon les conditions exposées à l'art. 4 des statuts précités et sont attribués aux groupes prévus à cet effet à l'art. 67 des statuts en fonction de la nature de leur activité professionnelle. Le salarié déjà affilié à la CIA en vertu de son engagement par l'Etat ou par une autre institution externe et qui quitte l'un de ses employeurs pour être engagé par l'institution, reste membre de la CIA. Ses droits et obligations à l'égard de la CIA ne sont pas modifiés (art. 6bis al. 3 du règlement général). Sauf exceptions, le traitement ainsi que l'âge ultime de la retraite sont fixés conformément aux normes de l'Etat de Genève (art. 6ter al. 1 du règlement). Si le traitement est fixé conformément aux normes de salaire appliquées par l'Etat, le calcul des rappels a lieu selon les statuts de la Caisse. Si ce n'est pas le cas, un rappel est perçu dès que le nouveau traitement brut dépasse de 20% le montant du premier traitement brut indexé selon les normes de l'Etat (art. 6ter al. 2 du règlement).

b) Dans la mesure où l'application des dispositions du droit public cantonal régissant une institution de prévoyance est en cause, le sens et la portée de ces dispositions doivent être déterminés selon les règles usuelles d'interprétation de la loi. Ainsi, il faut en premier lieu se fonder sur la lettre de la disposition en cause (interprétation littérale). Si le texte de cette dernière n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté de son auteur telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique). Le sens que prend la disposition dans son contexte est également important (ATF 128 II 347 consid. 3.5, 128 V 105 consid. 5, 207 consid. 5b, 125 II 484 consid. 4).

c) En l'espèce, le litige ne porte pas sur les règles de calcul des rappels, celles-ci n'ayant pas été contestées. Il concerne uniquement le calcul du salaire assuré, conformément aux art. 15, 16 et 18 des Statuts CIA (édition 1997) et 5, 6 et 8 des Statuts CIA (édition 2000).

AK______ étant une institution externe, le traitement assuré de ses salariés de la catégorie I, à laquelle appartiennent les demandeurs, devait être établi en se fondant sur des dispositions analogues à celles de l'Etat [art. 15 et 16 des Statuts CIA (édition 1997) ainsi que 5 et 6 des Statuts CIA (édition 2000)]. Par « analogue », il faut entendre « qui offre une ressemblance, des rapports de similitude avec autre chose » (Dictionnaire Petit Larousse). Conscients de ce point, la CIA et AK______ se sont accordés pour attribuer une classe « équivalent Etat » à chaque classe AK______ mais limitée à deux classes de traitement supplémentaires au maximum (voir notamment procès-verbal de l'audition de Madame S______ du 17 février 2010, p. 5), ce qui n'est pas contesté par les demandeurs. Il sied donc de déterminer si le salaire assuré des fonctionnaires de l'Etat de Genève était également limité à deux classes supplémentaires en cas de réévaluation des fonctions ou de promotion.

c/aa) S'agissant tout d'abord de la réévaluation des fonctions, Madame S______ a expliqué qu'en 2009, 11% des employés de l'Etat de Genève avaient bénéficié de sauts de trois classes et 1% de plus de trois classes. Elle a également précisé que le traitement assuré correspondait aux classes de traitement effectives. En cas de promotion, la règle des rappels était appliquée sur la base de la classe de traitement effective, sans plafonnement (voir procès-verbal de l'audition de Madame S______ du 14 avril 2010, p. 3)

Ainsi, en cas de réévaluation de fonctions à l'Etat de Genève, le traitement assuré correspondait aux classes de traitement effectives même si l'employé en question avait bénéficié d'un coulissement de plus de deux classes.

En d'autres termes, si, en pratique, la réévaluation des fonctions à l'Etat en 2009 n'entraînait généralement pas de coulissements plus importants que deux classes de fonction dans 88% des cas, 12% des employés ont bénéficié d'un saut de plus de deux classes de fonction et le traitement assuré auprès de la CIA correspondait à la classe de traitement effective.

c/bb) En cas de changement de fonction avec promotion, l'art. 8 du règlement d'application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (RTrait ; RS 5 15.01), qui n'a subi aucune modification pendant la période litigieuse, prévoit que la promotion donne lieu immédiatement à l'octroi d'une augmentation extraordinaire de traitement qui correspond à a) une triple annuité et un coulissement dans la nouvelle classe ou dans la classe la plus proche lorsque la nouvelle fonction est située 3 classes et plus au-dessus de la fonction antérieure, b) une double annuité et un coulissement dans la nouvelle classe ou dans la classe la plus proche lorsque la nouvelle fonction est située 2 classes au-dessus de la fonction antérieure, c) une annuité et un coulissement dans la nouvelle classe lorsque la nouvelle fonction est située une classe au-dessus de la fonction antérieure et d) le niveau salarial du titulaire promu ne peut être inférieur aux normes fixées à l'article 3. En pratique, en prenant en considération la grille salariale 2009, cela signifie que si un fonctionnaire actuellement en classe 11, annuité 7, est promu en classe 14, son traitement sera calculé de la manière suivante : traitement en classe 11, annuité 7 + 3 annuités de promotion = classe 11, annuité 10 ; coulissé en classe 14, son nouveau traitement correspondra à la classe 14, annuité 5. Il aura ainsi fait un saut de trois classes et l'intégralité de son salaire sera assurée auprès de la CIA.

c/cc) Force est par conséquent de constater qu'aucune règle ne limite les réévaluations de fonction ou les promotions à deux classes de fonction. Lors de la dernière réévaluation, en 2009, 12% des personnes touchées ont bénéficié d'un saut de trois classes et plus et leur traitement assuré auprès de la CIA correspondait au traitement effectif. En cas de promotion, l'art. 8 RTrait prévoyait le coulissement dans la nouvelle classe de traitement ou dans la classe la plus proche même si le saut était supérieur à deux classes.

La Cour de céans peine ainsi à comprendre l'argumentation des défendeurs pour justifier la limitation du traitement assuré à deux classes. Dans ce contexte, elle relèvera d'ailleurs qu'aucun des défendeurs n'a invoqué de disposition ou de jurisprudence à l'appui de sa position, ni même aucun fait susceptible de donner lieu à une limitation de la couverture d'assurance. Le fait que les réévaluations de fonction ou les changements de fonction avec promotion n'entraînent, en pratique, pas de coulissement de plus de deux classes dans la plupart des cas, ne signifie pas qu'il y ait une règle dans ce sens. Le contraire ressort d'ailleurs de la note établie par Madame S______ le 12 avril 2010 qui admet qu'en 2009, 12% des employés de l'Etat avaient bénéficié d'une réévaluation de fonction ayant entraîné un coulissement de plus de deux classes, ainsi que de l'art. 8 RTrait, qui reconnait les coulissements de trois classes et plus.

d) Au vu de ce qui précède, la Cour de céans considère qu'il y a lieu de retenir que le salaire assuré au sens des statuts de la CIA doit correspondre à la classe « équivalent Etat » de la classe AK______. Certes, une différence entre le salaire perçu et le salaire assuré pourrait persister, dans les cas où le traitement AK______ ne correspond pas exactement au traitement selon la grille de l'Etat, mais cela correspond à l'esprit des statuts.

ii)             Le principe de l'égalité de traitement

14.         En sus du fait que la limitation du salaire assuré CIA à deux classes supplémentaires n'était pas prévue par les Statuts de la CIA, les demandeurs invoquent une violation du principe de l'égalité de traitement.

15.         a) Dans le cadre de l'accomplissement de ses tâches en matière de prévoyance obligatoire et surobligatoire, l'institution de prévoyance demeure tenue de se conformer aux principes généraux de procédure applicables dans le droit des assurances sociales et aux exigences constitutionnelles, telles que l'égalité de traitement, l'interdiction de l'arbitraire, la proportionnalité ou encore la protection de la bonne foi (ATF 132 V 154 et 279 consid. 3.1, 130 V 376 consid. 6.4 et les références, 115 V 109 consid. 4b; STAUFFER, Berufliche Vorsorge, Zurich/Bâle/Genève 2005, p. 513, ch. 1358 ss).

Le principe de l'égalité de traitement déduit de l'art. 8 Cst consiste à traiter de manière identique ce qui est semblable et de manière différente ce qui est dissemblable (ATF 118 Ia 1consid. 3a p. 2). Selon la jurisprudence déduite de l'art. 8 Cst, le règlement d'une institution de prévoyance viole le principe de l'égalité de traitement lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente (cf. ATF 130 V 18 consid. 5.2, ATF 126 V 52 consid. 3b).

b) En l'espèce, les statuts de la CIA prévoient en substance deux catégories de personnes : les personnes mensualisées (catégorie I) et les autres personnes (catégorie II). Comme indiqué précédemment, des règles analogues à celles prévalant à l'Etat doivent être appliquées pour déterminer le traitement assuré des employés des institutions externes. Ledit règlement prévoit donc une égalité de traitement entre les membres des institutions externes et les employés de l'Etat en ce qui concerne la détermination du traitement assuré dès lors que des règles semblables doivent être appliquées aux employés AK______ et à ceux de l'Etat de Genève. Le règlement en tant que tel ne viole par conséquent pas le principe de l'égalité de traitement.

Cela étant, la Cour de céans constate que la CIA a violé le principe précité dans l'application de ce règlement. En effet, alors que les employés de l'Etat bénéficiant d'un coulissement de plus de deux classes voient leur salaire assuré correspondre à leur traitement, le salaire assuré des employés de AK______, engagés avant l'entrée en vigueur de la nouvelle politique salariale, en 1999, est limité à un saut de deux classes CIA maximum, quand bien même dans les faits, ils ont bénéficié d'un traitement supérieur. Par ailleurs, un employé engagé après 1999 dans une fonction nouvelle qui bénéficie d'une promotion et d'un saut de plus de deux classes voit son salaire assuré correspondre à son traitement. La CIA traite ainsi différemment des situations identiques ce qui est contraire au principe de l'égalité de traitement déduit de l'art. 8 Cst.

C'est le lieu de préciser que les principes de collectivité, d'égalité de traitement et de planification prévus par les art. 1c, 2f et 1g de l'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du 18 avril 1984 (OPP 2 ; RS 831.441.1) ne trouvent pas application dans le cas d'espèce, les statuts de la CIA prévoyant deux catégories de salariés fondées sur des critères objectifs, pour lesquels le principe de l'égalité de traitement est respecté. Ce sont en réalité l'interprétation et l'application des Statuts au cas de AK______ qui violent le principe de l'égalité de traitement.

d)            La validité d'un accord sur le salaire assuré

16.         Pour justifier la limitation du salaire assuré, les défendeurs se réfèrent à la conclusion de deux accords, à savoir une convention portant sur la question du salaire assuré conclue entre AK______ et la CIA (voir procès-verbal d'audition de Monsieur AH______ du 19 janvier 2011) et un accord formel et tacite des demandeurs portant sur le salaire assuré compte tenu de la réception des avis de situation annuels et du paiement des cotisations sans opposition (réponse de AK______ du 27 mars 2009, p. 24). Il convient d'examiner si de tels accords ont été conclus et, le cas échéant, quelle en est la validité.

a/aa) Les statuts de la CIA, institution de droit public, ont été adoptés par le Grand Conseil (en ce qui concerne les Statuts CIA (édition 1997), voir loi 6365 pour les statuts initiaux et lois 6742, 6677, 6942, 7065 et 7121 pour les modifications statutaires ultérieures - pièce 2a, défendeur ; en ce qui concerne les Statuts CIA (édition 2000), voir loi 8015 pour les statuts initiaux et lois 8553, 9066, 9176 et 10002 s'agissant des modifications statutaires ultérieures - pièce 2b, défendeur) de sorte que force de loi doit leur être reconnue. Ils font désormais partie du droit cantonal (ATF 119 V 142).

Dans un tel cas, à la différence de celles qui lient les institutions de droit privé à leurs affiliés, les relations entre institutions de droit public et assurés, en matière de prévoyance plus étendue, se fondent, non sur un contrat de prévoyance, mais directement sur la loi (ATF 119 V 142).

a/bb) En vertu du principe du parallélisme des formes, selon lequel une disposition légale (au sens matériel) ne peut être modifiée que par l'adoption d'une disposition de rang égal ou supérieur (KNAPP, Précis de droit administratif, 1991, p. 59 n° 272, MOOR, 1994, ch. 2.2.1.2 p. 82), les statuts de la CIA ne peuvent être changés que par le biais d'une modification législative.

b) Au vu de ce qui précède, si les défendeurs entendaient modifier le salaire assuré pour les employés de AK______, il leur appartenait d'entreprendre les démarches nécessaires pour que le Grand Conseil révise les statuts de la CIA. En effet, un accord entre AK______ et la CIA ne peut déroger aux statuts précités dans la mesure où il n'a pas fait l'objet d'une approbation par le Grand Conseil. Or, il est patent qu'aucune convention stricto sensu n'a formellement été conclue entre AK______ et la CIA.

Il en va de même d'un éventuel accord entre la CIA et les demandeurs. En effet, un tel accord, qui plus est tacite, ne saurait déroger aux statuts d'une institution de droit public, même en matière de prévoyance surobligatoire. Quoi qu'il en soit, en l'espèce, un tel accord n'existe pas (voir infra let. e).

C'est par conséquent à tort que les défendeurs entendent se prévaloir de tels accords.

e)             La violation des principes de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus de droit

17.         Selon AK______, les demandeurs ont adopté un comportement contraire à la bonne foi, commettant ainsi une violation du principe de l'interdiction de l'abus de droit (réponse de AK______ du 27 mars 2009, p. 24).

a) Le principe de la bonne foi, ancré à l'art. 2 al. 1 CC, s'applique à l'ensemble des domaines du droit. L'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi (art. 2 al. 2 CC). Le juge possède ainsi le pouvoir de corriger les effets de l'application (formelle) de la loi lorsque celle-ci se heurte aux impératifs (matériels) des intérêts à protéger selon la justice (notamment: ATF 134 III 52 consid. 2.1 p. 58/59; DESCHENAUX, Le Titre préliminaire du code civil, in Traité de droit privé suisse, tome II/1, 1969, p. 146; BAUMANN, Commentaire zurichois, 1998, n° 21 ad art. 2 CC). L'existence d'un abus de droit s'apprécie au regard des circonstances du cas d'espèce, en prenant en considération les divers cas de figure mis en évidence par la jurisprudence et la doctrine (ATF 134 III 52 consid. 2.1 p. 58; 129 III 493 consid. 5.1 et les arrêt cités). Ainsi l'exercice d'un droit peut être abusif s'il contredit un comportement antérieur, qui avait suscité des attentes légitimes chez l'autre partie (venire contra factum proprium). Par exemple, commet un abus de droit la partie qui, dans un premier temps, accepte de conclure une convention et qui se prévaut ensuite de son invalidité en invoquant des règles légales impératives, alors qu'elle s'était délibérément accommodée du contenu de la convention au moment de la conclure ou qui avait voulu cette convention dans son propre intérêt (ATF 112 II 330 consid. 2b et les références; 81 II 627 consid. 3 p. 632; 72 II 39 consid. 3 p. 43; cf. également ATF 133 III 61 consid. 4.1 p. 76; MERZ, in Commentaire bernois, 1962, n° 493 ad art. 2 CC; BAUMANN, in Commentaire zurichois, 1998, n° 281/282 ad art. 2 CC; ABBET, De l'Exceptio doli à l'interdiction de l'abus de droit, 2006, p. 239).

La partie qui reproche à son cocontractant un abus de droit doit prouver les circonstances particulières qui, dans le cas concret, autorisent à retenir que l'invalidité de la convention est invoquée de façon abusive (ATF 134 III 52 consid. 2.1 p. 58/59). Si de telles circonstances sont réunies, chaque instance judiciaire est tenue d'office de faire application de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 134 III 52 consid. 2.1 p. 59 et les arrêts cités).

b) En l'espèce, AK______ prétend avoir pris de nombreuses mesures en faveur de son personnel, se fiant notamment à l'absence de contestation individuelle, en procédant à des hausses substantielles de salaire et en introduisant d'autres avantages. Il n'aurait jamais procédé de la sorte « s'il avait pu concevoir que, bien des années plus tard et malgré leur acceptation donnée à l'époque, des employés élèveraient les prétentions exorbitantes des demandeurs » (réponse du 27 mars 2009, p. 24 ss).

Il résulte cependant des pièces du dossier ainsi que des témoignages recueillis au cours de la procédure que la nouvelle politique salariale a été initiée par la direction de AK______ sans que le personnel n'en ait émis le souhait (voir procès-verbal de l'audition de Monsieur E______ du 9 juin 2010, p. 3). Le choix d'accepter cette politique salariale ne lui a au demeurant jamais été donné (voir procès-verbal des auditions de Monsieur U______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur AA______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur F______ du 13 octobre 2010, p. 2 et 3 et de Monsieur G______ du 13 octobre 2010, p. 2). Qui plus est, la Commission du personnel, qui était chargée de la défense des intérêts du personnel, notamment en ce qui concerne les conditions de rémunération, s'est opposée à cette nouvelle politique (pièce 14, défendeur et procès-verbal d'audition de Monsieur E______ du 9 juin 2010, p. 3).

La Cour de céans relève que lors de la présentation de la nouvelle politique salariale, il n'était pas encore question de la limitation du salaire assuré (voir procès-verbal des auditions de Monsieur AA______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur F______ du 13 octobre 2010, p. 3 et de Monsieur G______ du 13 octobre 2010, p. 2). Par la suite, ce principe a été imposé au personnel de AK______, aucun choix ne lui ayant été donné (voir procès-verbal des auditions de Monsieur U______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur E______ du 9 juin 2010, p. 3, de Monsieur U______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur AA______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur F______ du 13 octobre 2010, p. 3 et de Monsieur G______ du 13 octobre 2010, p. 2). D'ailleurs, dès l'entrée en vigueur de la nouvelle politique salariale, une pétition destinée au Grand Conseil a été signée par près de 100 employés (pièce 11, demandeurs).

En réalité, le seul choix qui ait été donné au personnel date de 1994 et portait sur la possibilité d'adhérer au statut du personnel de AK______ ou de rester soumis à celui de l'Etat de Genève (voir procès-verbal des auditions de Monsieur U______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur AA______ du 9 juin 2010, p. 2, de Monsieur F______ du 13 octobre 2010, p. 3 et de Monsieur G______ du 13 octobre 2010, p. 2).

Enfin, dès 2000, la question de l'assurance de la différence AK______ a fait l'objet de discussions entre la direction et la Commission du personnel ou l'association des cadres (voir notamment pièces 12 à 16, 20 et 21, demandeurs et procès-verbaux des auditions de Monsieur T______ du 9 juin 2010, p. 8, de Monsieur U______ du 9 juin 2010, p. 3, de Monsieur AA______ du 9 juin 2010, p. 3 et de Monsieur F______ du 13 octobre 2010, p. 3).

Au vu de ce qui précède, il apparaît évident que la nouvelle politique salariale et la limitation à un saut de deux classes du salaire assuré auprès de la CIA ont été imposés aux membres du personnel de AK______. Or, cette situation a été contestée par la Commission du personnel, représentant les intérêts du personnel, et des discussions pour assurer la différence AK______ ont été menées. Le défendeur ne peut dès lors prétendre ne pas être au courant de l'opposition du personnel. Ainsi, même si les demandeurs n'ont pas agi à titre individuel dès la limitation à deux classes CIA, il ne peut leur être reproché un comportement contradictoire compte tenu des circonstances et des discussions portant notamment sur le fait d'assurer la différence AK______, menées par la Commission du personnel, représentant leurs intérêts. En particulier, rien ne permet d'admettre que les demandeurs ont manifesté clairement leur volonté de renoncer définitivement au prélèvement des cotisations (cf. ATF 9C_832/2013 du 23 avril 2014 consid. 7).

Le défendeur ne saurait ainsi raisonnablement soutenir que les demandeurs ont violé le principe de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus de droit.

f)              L'absence d'assentiment de l'employeur s'agissant de l'augmentation des cotisations

18.         AK______ invoque également les art. 66 LPP et 331 al. 3 CO, considérant ne pas avoir donné son assentiment pour une augmentation des cotisations.

a) Selon l'art. 66 al. 1 LPP, l'institution de prévoyance fixe dans ses dispositions réglementaires le montant des cotisations de l'employeur et de celles des salariés. La somme des cotisations (contribution) de l'employeur doit être au moins égale à la somme des cotisations de tous les salariés. La contribution de l'employeur ne peut être fixée plus haut qu'avec son assentiment. Quant à l'art. 331 al. 3 CO, il stipule que lorsqu'il incombe au travailleur de verser des cotisations à une institution de prévoyance, l'employeur est tenu de verser en même temps une contribution au moins égale à la somme des cotisations de tous les travailleurs; il financera sa contribution par ses moyens propres ou à l'aide de réserves de cotisations de l'institution de prévoyance; ces réserves doivent avoir été accumulées préalablement dans ce but par l'employeur et être comptabilisées séparément.

Ces dispositions portent sur le principe de la parité collective des cotisations. Cela ne signifie cependant pas que chaque cotisation versée pour un assuré entraîne toujours une cotisation équivalente de l'employeur. Il est ainsi admissible que les cotisations des employés les plus jeunes soient plus élevées que les cotisations de l'employeur les concernant. Cependant, avec l'accord de l'employeur, une cotisation plus élevée peut être fixée au niveau réglementaire (BRECHBUHL, in Commentaire LPP et LFLP, 2010, n° 8 et 13 ad art. 66).

b) En l'espèce, le litige ne porte pas sur la question du taux de la cotisation, mais sur le salaire assuré. Force est ainsi de constater que les art. 66 al. 1 LPP et 331 al. 3 CO ne trouvent pas application in casu, le taux de cotisation - qui n'a pas varié au demeurant - à raison d'un tiers pour l'employé et de deux tiers pour l'employeur étant prévu par les statuts CIA et le Statut AK______.

g)             L'art. 65 LPP

19.         Dans un autre moyen, la défenderesse invoque l'art. 65 LPP, apparemment pour justifier l'accord entre AK______ et elle-même.

a) A teneur de l'art. 65 LPP, les institutions de prévoyance doivent offrir en tout temps la garantie qu'elles peuvent remplir leurs engagements (al. 1). Elles régleront leur système de cotisations et leur financement de telle manière que les prestations prévues par la présente loi puissent être fournies dès qu'elles sont exigibles (al. 2). Les frais d'administration des institutions de prévoyance sont portés au compte d'exploitation. Le Conseil fédéral édicte des dispositions relatives aux frais d'exploitation et fixe de quelle manière ils doivent être pris en compte (al. 3).

Selon le Tribunal fédéral, lorsque l'équilibre financier de l'institution de prévoyance est sérieusement menacé, l'institution de prévoyance peut s'écarter des dispositions règlementaires. En effet, dans un arrêt du 28 juin 2006 dans l'affaire Fondation F. contre M. et B., 2A.562/2005, le Tribunal fédéral a estimé que l'art. 65 al. 1 LPP, qui impose aux institutions de prévoyance professionnelles d'offrir en tout temps la garantie qu'elles peuvent remplir leurs engagements, est une disposition fondamentale et impérative qui prime les dispositions règlementaires dont l'application aurait pour effet de provoquer la survenance d'un découvert ou de l'augmenter. Il ne saurait par conséquent être reproché à une institution de prévoyance d'avoir pris des mesures d'assainissement immédiates, si ce n'est préventives, lui permettant d'éviter un découvert prévisible, avant même de modifier son règlement. Cela reviendrait à lui reprocher d'avoir respecté l'exigence fondamentale de l'art. 65, al. 1 LPP.

Il ressort toutefois du cas jugé par notre Haute Cour, que ce n'est que dans des hypothèses très précises (situation financière nécessitant la prise de mesures d'assainissement immédiates) que l'institution de prévoyance peut s'écarter de son règlement. Au surplus, même dans cette hypothèse, elle ne saurait faire fi des principes fondamentaux régissant la prévoyance professionnelle, soit ceux de la collectivité, de la solidarité, de la planification, de l'adéquation et de l'égalité de traitement. (ATF 120 Ib 199 consid. 3c S. 202; ASA 71 384 consid. 3b p. 387 s., avec des références à la doctrine; arrêt du 20 mars 2002, 2A.404/2001 consid. 2.1 publié in : Pra 2002 208; arrêt du 21 décembre 2001 2P.127/2001 consid.. 4b, publié in: StR 57 2002, p. 388; cf. ATF 129 III 305 consid. 2.5 S. 310).

b) En l'espèce, il n'est pas contesté que la nouvelle politique salariale allait entraîner des coûts supplémentaires pour les parties et qu'une part de ceux-ci ne serait pas couverte par les rappels. Cela étant, la CIA n'a ni allégué ni prouvé qu'elle se trouvait, lors de l'introduction de la nouvelle politique salariale en 1999 et de la limitation à deux classes supplémentaires qui s'en est suivie, dans une situation financière nécessitant la prise de mesures d'assainissement immédiates. Elle n'a, en particulier, pas allégué de découvert et ne l'a encore moins démontré de manière concrète. Tout au plus a-t-elle indiqué devoir supporter, si l'intégralité du salaire des employés de AK______ était assurée, un coût non facturé de 1'347'913 fr. en 2009 et de 3'500'000 fr. sur les 10 prochaines années (de 2009 à 2018). Ces pertes auraient été reportées sur la collectivité des assurés, ce qui aurait entraîné une solidarité non souhaitable entre assurés. La Cour de céans relève dans ce contexte que les chiffres allégués tiennent uniquement compte de la situation prévalant en 2009 et non de celle existant en 1999, lors de l'introduction de la nouvelle politique salariale.

De surcroît, quand bien même la CIA se serait trouvée dans une situation financière nécessitant la prise de mesures d'assainissement immédiates, la limitation du salaire assuré à deux classes CIA supplémentaires, appliquée aux seuls employés de AK______, ne saurait constituer une telle mesure. Elle correspond au contraire à une convention isolée de prévoyance « à la carte », imposée aux seuls employés de AK______, laissant ainsi subsister la possibilité de tenir compte de sauts de plus de deux classes pour les employés de l'Etat de Genève et des autres institutions de droit public, affiliées à la CIA. Or, de telles mesures sont proscrites par les principes fondamentaux régissant la prévoyance professionnelle, notamment ceux de la collectivité et de l'égalité de traitement (cf. arrêt du 21 décembre 2001 2P.127/2001 consid. 4b, publié in: StR 57 2002, S. 388, 391).

Le moyen soulevé par la défenderesse est ainsi mal fondé.

h)            La prescription

20.         Le défendeur invoque enfin la prescription d'une partie des prétentions des demandeurs.

a) Selon l'art. 66 al. 2 LPP, applicable en matière de prévoyance obligatoire, l'employeur est débiteur de la totalité des cotisations envers l'institution de prévoyance. En matière de prévoyance surobligatoire, une règle analogue se trouve à l'art. 331 al. 3 CO, qui prévoit que lorsqu'il incombe au travailleur de verser des cotisations à une institution de prévoyance, l'employeur est tenu de verser en même temps une contribution au moins égale à la somme des cotisations de tous les travailleurs. L'employeur doit transférer à l'institution de prévoyance le montant de la cotisation déduite du salaire du travailleur en même temps que sa propre contribution (voir BRECHBÜHL, in LPP et LFLP, 2010, n° 32 ad Art. 66). A teneur des art. 66 al. 3 LPP et 331 al. 3 in fine CO, l'employeur déduit en outre du salaire les cotisations que les dispositions réglementaires mettent à la charge du salarié.

Conformément à la jurisprudence, l'action par laquelle un employé réclame à son employeur le paiement a posteriori des cotisations d'employeur et d'employé à l'institution de prévoyance doit être intentée contre l'employeur et non contre l'institution de prévoyance (ATF 129 V 320 consid. 3.1, voir également ATFA non publié B 4/99 du 6 décembre 1999, consid. 6 in SZS 2002 p. 499).

b) En l'espèce, le litige porte sur le montant du salaire assuré et par voie de conséquence, sur les cotisations qui auraient dû être prélevées par AK______ sur le salaire effectif des demandeurs et reversées à la CIA, avec la part employeur. Conformément à la jurisprudence précitée (ATF 129 V 320 et les références citées), il s'agit donc d'un litige opposant les travailleurs, soit en l'occurrence les demandeurs, à leur employeur, AK______, débiteur des cotisations litigieuses et défendeur.

Dans un tel cas, selon la doctrine, les créances pour les cotisations de l'employeur, non déduites du salaire, sont soumises au délai de prescription de cinq ans de l'art. 41 LPP et non à celui des art. 62 et ss CO (PETREMAND, in LPP et LFLP, 2010, n° 12 ad Art. 41 LPP).

21.         a) Selon l'art. 41 al. 1 LPP, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004, applicable à la prévoyance obligatoire, les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans quand elles portent sur des cotisations ou des prestations périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 du code des obligations sont applicables. Depuis le 1er janvier 2005, l'art. 41 LPP prévoit à son alinéa 1 que le droit aux prestations ne se prescrit pas pour autant que les assurés n'aient pas quitté l'institution de prévoyance lors de la survenance du cas d'assurance. Quant à la prescription des actions en recouvrement de créances, elle n'a pas été modifiée (cf. al. 2).

b) Jusqu'au 31 décembre 2004, la LPP ne prévoyait pas de disposition particulière sur la prescription des prétentions de l'assuré en matière prévoyance plus étendue. Toutefois, dans un arrêt du 29 novembre 1991, publié aux ATF 117 V 329, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que dans la prévoyance obligatoire comme dans la prévoyance plus étendue, les créances de l'affilié étaient soumises à un délai de prescription de cinq ans quand elles portaient sur des prestations périodiques et de dix ans dans les autres cas. Cette solution, consacrée par l'art. 41 al. 1 LPP, s'inspirait directement des art. 127 et 128 CO, qui étaient, quant à eux, applicables à la prévoyance plus étendue (RIEMER, Das Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, p. 104, n. 20; message précité, FF 1976 I 219). Ainsi, dans le cas d'une rente d'invalidité, chacun des arrérages se prescrivait par cinq ans, alors que le droit de percevoir les rentes comme tel se prescrivait dans le délai ordinaire de dix ans (cf. ATF 111 II 501).

Depuis le 1er janvier 2005, l'art. 49 al. 2 LPP, applicable en matière de prévoyance plus étendue, renvoie à l'art. 41 LPP pour ce qui a trait à la prescription.

c) Lorsque, comme en l'occurrence, la loi ne contient pas de disposition transitoire en ce qui concerne le régime de prescription applicable, la jurisprudence et la doctrine considèrent que la nouvelle réglementation est applicable aux prétentions relevant de l'ancien droit, si celles-ci, bien que nées et exigibles avant l'entrée en vigueur du nouveau droit, ne sont pas encore prescrites ou périmées à ce moment-là (ATF 132 V 159 consid. 2 p. 161, 131 V 425 consid. 5.2 p. 42, 111 II 193, 107 Ib 198 consid. 7b/aa p. 203, 102 V 206 consid. 2 p. 207; Rhinow/Krähenmann, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband, no 15 B III d p. 45; Gadola, Verjährung und Verwirkung im öffentlichen Recht, in : PJA 1/95, p. 58).

d) L'exigibilité des créances de cotisation n'est prévue par la loi que depuis la révision de la LPP entrée en vigueur le 1er janvier 2005. En effet, depuis cette date, l'art. 66 al. 4 LPP prévoit que l'employeur transfère à l'institution de prévoyance sa contribution ainsi que les cotisations des salariés au plus tard à la fin du premier mois suivant l'année civile ou l'année d'assurance pour laquelle les cotisations sont dues. L'institution peut toutefois prévoir une disposition réglementaire (BRECHBUHL, op. cit., n° 34 ad art. 66). Avant cette date, l'exigibilité d'une créance de cotisation ressortait des dispositions réglementaires ou contractuelles (ATF 136 V 73, consid. 3.1, voir également arrêt non publié 9C_618/2007 du 28 janvier 2008, consid. 1.1.2).

e) En l'espèce, depuis l'entrée en vigueur du règlement général, le 1er janvier 2000, la perception des cotisations est prévue par l'art. 26bis qui stipule que les cotisations doivent être versées à la Caisse au plus tard dans les quinze jours qui suivent le mois pour lequel elles sont dues, étant précisé que la perception de cotisations annuelles s'effectue 10 fois par an pour les salariés de la catégorie I conformément à l'art. 55 al. 5 des Statuts CIA (édition 2000). Auparavant, les Statuts CIA (édition 1997) prévoyaient uniquement que la perception des cotisations annuelles s'effectuait 10 fois par an et qu'elles étaient versées à la Caisse par l'employeur. Dans un tel cas, conformément à l'art. 130 al. 1 CO, la créance est exigible dès sa naissance (PICHONNAZ, in Commentaire romand - Code des obligations I - art. 1 à 529, n° 1 ad art. 130).

e) S'agissant de l'interruption de la prescription, le Tribunal fédéral des assurances a rappelé (arrêts non publiés du 16 octobre 2006, B 55/06 et du 18 août 2006, B 53/06) que le droit public admet de façon plus large que le droit privé des actes interruptifs du créancier, en ce sens que le délai de prescription est interrompu -outre par les moyens mentionnés par l'art. 135 CO - par tout acte par lequel celui-ci fait valoir sa prétention de manière appropriée à l'égard du débiteur (voir GADOLA, op. cit., pp. 47 ss ; BRACONI, Prescription et péremption dans l'assurance sociale, in Droit privé et Assurances sociales, Fribourg 1990, p. 232 ; MOOR, Droit administratif, vol. II, p. 54).

Toutefois, en matière de prévoyance professionnelle, les institutions de prévoyance ne sont pas habilitées à rendre de décision à l'égard de leurs affiliés. Elles doivent -comme les ayants droit ou les employeurs - faire valoir leurs droits par voie d'action pour les litiges visés par l'art. 73 LPP (ATF 115 V 229 consid. 2) et sont, sous cet angle, soumises aux mêmes exigences que les créanciers de droit privé. Il faut encore relever qu'en matière de prévoyance professionnelle, l'art. 41 al. 2 LPP, relatif à la prescription des actions en recouvrement de créances de cotisations ou de prestations périodiques, renvoie explicitement aux art. 129 à 142 CO. Cette réglementation est impérative et s'applique à toutes les créances fondées sur la LPP, notamment aussi aux rapports juridiques avec des institutions de droit public (Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 19 décembre 1975, FF 1976 I 251 ; voir aussi ATF 132 V 165 consid. 4.4.3 et ATF 128 V 241 consid. 3b, où le Tribunal fédéral des assurances se réfère explicitement aux actes interruptifs de prescription au sens de l'art. 135 CO ; cf. également l'ATF du 10 février 2004, B 87/00). En raison de ce renvoi pur et simple aux dispositions du Code des obligations et dès lors que l'énumération contenue à l'art. 135 ch. 2 CO est exhaustive, il n'y a pas de place en l'espèce pour une réglementation plus large en matière d'interruption de la prescription du fait du créancier (cf. également BRACONI, op. cit., p. 232).

22.         En l'espèce, il convient de distinguer trois périodes :

-          Les cotisations dues pour l'année 1999 : elles étaient d'ores et déjà prescrites lors de l'entrée en vigueur de la version actuelle de l'art. 41 LPP, le 1er janvier 2005. En effet, exigibles dès le mois où elles étaient dues, soit au plus tard le 31 décembre 1999, les cotisations précitées se sont prescrites au plus tard le 31 décembre 2004.

-          Les cotisations dues pour les années 2000 à 2004 : la prescription des cotisations non encore prescrites lors de l'entrée en vigueur de la version actuelle de l'art. 41 LPP doit, conformément à la jurisprudence, s'examiner au regard de la nouvelle teneur de l'art. 41 LPP, en vigueur depuis le 1er janvier 2005 (voir ATF 132 V 159 consid. 2 p. 161, 131 V 425 consid. 5.2 p. 42, 111 II 193, 107 Ib 198 consid. 7b/aa p. 203, 102 V 206 consid. 2 p. 207).

Dès le 1er janvier 2000, l'employeur devait reverser à la caisse les cotisations prélevées dans les quinze jours qui suivent le mois pour lequel elles sont dues. Par conséquent, elles étaient exigibles dès l'expiration de ce délai. Ainsi, les cotisations dues pour le mois de janvier 2000 devenaient exigibles le 15 février 2000 et se prescrivaient cinq ans après, soit le 15 février 2005, celles dues pour le mois de février 2000 devenaient exigibles le 15 mars 2000 et se prescrivaient le 15 mars 2005, etc. Par conséquent, au jour du dépôt de l'action en constatation de droit, le 14 janvier 2009, seules les cotisations dues pour la période courant de janvier 2000 à novembre 2003 étaient prescrites. En effet, les cotisations dues pour le mois de décembre 2003 devenaient exigibles le 15 janvier 2004 et se prescrivaient le 15 janvier 2009.

-          Enfin, s'agissant des cotisations dues pour les années 2005 à 2009, elles ne sont pas prescrites compte tenu du dépôt de l'action en constatation de droit le 14 janvier 2009.

Reste à examiner si la prescription a été interrompue.

Selon l'art. 135 CO, les demandeurs auraient dû faire valoir leurs droits en déposant une poursuite, une citation en conciliation, en ouvrant une action ou en soulevant une exception devant un tribunal dans le délai de prescription. Tel n'a toutefois pas été le cas avant le dépôt de la présente demande, le 14 janvier 2009. En effet, la Cour de céans relève que la Commission de recours instituée par le Statut du personnel de AK______ ne fait pas partie de la liste des tribunaux au sens de la LPA de sorte qu'elle ne peut être assimilée à un tribunal. Par conséquent, le dépôt du recours le 3 janvier 2008 en ce qui concernait Monsieur A______ et le 31 mars 2008 s'agissant de Monsieur D______ ne pouvait interrompre la prescription. Par ailleurs, même si elle devait être considérée comme un tribunal, la Commission de recours aurait été incompétente ratione materiae : selon le statut du personnel de AK______, ladite Commission était compétente pour connaître des litiges individuels relatifs à l'application dudit statut. Or, la problématique du salaire assuré auprès de la CIA et des cotisations y relatives ne relève à l'évidence pas de l'application du statut du personnel précité mais constitue en réalité une question de prévoyance professionnelle, de la compétence de la Cour de céans.

Par conséquent, dès lors que la prescription n'a été valablement interrompue qu'avec le dépôt de la demande en paiement par-devant le TCAS, le 14 janvier 2009, la demande en paiement des cotisations dues pour la période du 1er janvier 1999 au 30 novembre 2003 est prescrite.

 

i)               Conclusion

23.         Au vu des considérations qui précèdent, la Cour de céans est d'avis qu'aucune disposition légale ou statutaire ne permettait aux défendeurs de définir le salaire assuré des employés de AK______ différemment de celui des autres assurés de la CPEG. En procédant cependant de la sorte, ils ont traité différemment les employés de AK______ pour de simples questions de coûts, ce qui ne constitue pas un motif justifiant cette démarche. Cela étant, les prétentions des demandeurs seront réduites dans la mesure où le salaire assuré ne pourra correspondre qu'au traitement assuré dès le 1er décembre 2003, eu égard au délai de prescription.

Par conséquent, la demande du 14 janvier 2009 doit être partiellement admise.

Il appartiendra à la CPEG d'établir un décompte précis des rappels de cotisations à l'attention de AK______ et des demandeurs, récapitulant les montants des rappels à leur charge respective.

La Cour de céans relève enfin qu'à teneur des dernières écritures produites, les demandeurs ont renoncé à réclamer la réparation d'un dommage qu'ils n'ont au demeurant jamais précisé.

 

24.         Les demandeurs, représentés par un avocat, obtenant partiellement gain de cause, les défendeurs seront condamnés, conjointement et solidairement, à leur verser une indemnité globale de 10'000 fr., à titre de participation à leurs frais et dépens (art. 89H al. 3 LPA et art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986, - RFPA, RS/GE E 5 10.03; ATAS 737/2008).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

 

Préalablement :

1. Rectifie la qualité des parties en ce sens que la CIA, CAISSE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL ENSEIGNANT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE ET DES FONCTIONNAIRES DE L'ADMINISTRATION DU CANTON DE GENEVE devient la CPEG, CAISSE DE PREVOYANCE DE L'ETAT DE GENEVE et que Monsieur A______ devient la Succession de feu Monsieur A______, soit Madame B______ et Monsieur C______.

A la forme :

2.        Déclare la demande du 14 janvier 2009 recevable.

Sur incident :

3.        Ecarte les écritures des défendeurs des 21 juin 2013 et 7 février 2014 en tant qu'elles portent sur le fond du litige.

4.        Rejette l'incident de réouverture de l'instruction.

Au fond :

5.        Admet partiellement la demande dans le sens des considérants.

6.        Condamne AK______ et la CPEG à assurer l'intégralité du salaire de feu Monsieur A______ et de Monsieur D______, au sens des considérants, avec effet au 1er décembre 2003.

7.        Invite la CPEG à transmettre à AK______ et aux demandeurs le détail des rappels de cotisations qui résultent de l'assurance de l'intégralité du salaire, au sens des considérants.

8.        Condamne AK______ à verser à la CPEG les parts employeur et employé desdites cotisations.

9.        Donne acte à l'hoirie de feu Monsieur A______ et à Monsieur D______ de leur engagement à payer à AK______ la part employé à leur charge.

10.    Les y condamne en tant que de besoin.

11.    Déboute les parties de toutes autres ou contraires conclusions.

12.    Condamne AK______ et la CPEG, conjointement et solidairement, à payer aux demandeurs une indemnité globale de 10'000 fr., à titre de participation à leurs frais et dépens.

13.    Dit que la procédure est gratuite.

14.    Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Juliana BALDE

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le