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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1852/2002

ATAS/488/2005 (2) du 30.05.2005 ( AVS ) , ADMIS

Descripteurs : ; AVS ; ASSURANCE-VIEILLESSE, SURVIVANTS ET INVALIDITÉ ; DOMMAGE ; RESPONSABILITÉ FONDÉE SUR LE DROIT PUBLIC ; ORGANE(PERSONNE MORALE) ; COTISATION AVS/AI/APG
Normes : LAVS.52
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1852/2002 ATAS/488/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

6ème Chambre

du 31 mai 2005

 

En la cause

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE AVS DE LA FEDERATION DES ENTREPRISES ROMANDES – FER CIAM, rue de Saint-Jean 98, 1201 Genève

demanderesse en mainlevée d’opposition

 

contre

Monsieur C_________, comparant par Me Christian LUSCHER en l'étude duquel il élit domicile.

 

Monsieur F_________, domicilié à Genève.

 

Madame F_________ , domicilié à Genève.

défendeurs, ex-organes de la société X_________ SA (faillie)

 


EN FAIT

La société X_________ SA (ci-après : la société) ayant pour but l’ingénierie, l’étude et la réalisation de mandats relatifs à l’environnement, l’habitat, les transports et l’énergie, a été inscrite au registre du commerce de Genève le 25 janvier 1994, date à laquelle a pris effet son affiliation auprès de la Caisse Interprofessionnelle d’Assurance Vieillesse et Survivants de la Fédération Romand des Syndicats Patronaux - aujourd’hui la Caisse Interprofessionnelle d’Assurance Vieillesse et Survivants de la Fédération des Entreprises Romandes - (ci-après la Caisse).

Monsieur C_________ était inscrit comme administrateur unique du 7 mai 1998 jusqu'à la dissolution de la société par faillite prononcée le 29 février 2000 (Pièce No 66, Caisse).

3. La gestion quotidienne de la société était assurée par Madame F_________ et Monsieur F_________, lesquels disposaient d’une signature individuelle sur les comptes bancaires de l’entreprise (pièce N° 6, C_________). Ceux-ci signaient aussi l’ensemble des contrats (pièces N° 7 à 14, C_________), ainsi que les attestations de salaires (cf. PV de CP du 15 mars 2005).

4. La société déclarait du personnel depuis le 1er mars 1994. Les charges sociales étaient régulièrement versées jusqu’en novembre 1998, sous réserve d’une période de cinq mois, de février à juillet 1997, pour laquelle il a été nécessaire d’introduire des poursuites.

5. Dès le mois de décembre 1998, les cotisations n’ont plus été payées dans les délais légaux et ont dû faire l’objet de poursuites. Dès mai 1999, les cotisations paritaires n’ont plus été payées du tout. Les propositions de paiement par acomptes de l’arriéré n’ont pas été respectées par l’employeur (pièces N° 55 à 57, Caisse).

6. La Caisse a adressé à la société plusieurs menaces de plainte pénale, à la suite desquelles Monsieur F_________ s’est acquitté, en août 2000, des cotisations dites pénales pour la période de juin à décembre 1999 (pièces N° 30 à 53, Caisse).

7. L'état de collocation de la société faillie a été déposé le 28 mars 2001. L’Office des faillites a annoncé par courrier du même jour l’absence de dividende prévisible pour les créanciers de la 3ème classe.

8. Par trois décisions distinctes du 18 mars 2002, la Caisse a réclamé aux époux F_________, ainsi qu’à Monsieur C_________, le paiement de la somme de fr. 20'159,65 représentant le dommage subi en raison du non-paiement des cotisations AVS-AI-APG-AC et AF, y compris les frais de poursuite et les intérêts moratoires arrêtés au jour de la faillite, dues pour la période de mai 1999 à janvier 2001, pour un complément de l’année 1999 ainsi que celles découlant d’un rapport de contrôle portant sur les années 1994 à 1996.

9. Monsieur C_________ a formé opposition, par courrier du 17 avril 2002 (Pièce No 8, Caisse).

10. Monsieur et Madame F_________ n’ont pas retiré les décisions à eux adressées par courriers recommandés pendant le délai de garde. Le 4 avril 2002, la Caisse leur a réexpédié les décisions du 18 mars 2002 sous pli simple. Ils ont formé opposition le 2 mai 2002, contestant leur qualité d’administrateurs de fait (Pièces N° 9 et 10, Caisse).

11. La Caisse a saisi la Commission cantonale de recours en matière d'AVS, alors compétente, d’une demande en mainlevée des oppositions le 15 mai 2002.

12. Invité à se déterminer, Monsieur C_________, représenté par Maître Christian LUSCHER, a allégué n’avoir pas exercé lui-même ni la gestion ni l’administration de la société mais avoir délégué ces tâches aux époux F_________. Il précise qu’il a à plusieurs reprises exigé que lui soient communiqués les renseignements nécessaires, notamment en matière de cotisations sociales, à défaut de quoi il démissionnerait. Il ajoute qu’il a pris les mesures appropriées dès qu’il a soupçonné les époux F_________ d’effectuer sciemment de la rétention d’information (cf. courrier du 21 juin 2002).

13. Les époux F_________ ne se sont en revanche pas manifestés.

14. La cause a été transférée au Tribunal cantonal des assurances sociales dès le 1er août 2003, vu la modification de la loi sur l’organisation judiciaire.

15. Une comparution personnelle des parties a eu lieu le 15 mars 2005, à laquelle seuls Monsieur C_________ et la Caisse se sont présentés. Lors de cette audience, les parties ont persisté dans leurs conclusions ; Monsieur C_________ estime que les droits de la Caisse sont prescrits. Pour le surplus, il allègue qu’une obligation de réparer ne peut lui être imposée, faute de violation intentionnelle ou par négligence grave de l’art. 52 LAVS.

16. Copie du procès-verbal a été transmise aux époux F_________ le 31 mai 2005. Sur quoi la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1. La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l’article 3 alinéa 3 des dispositions transitoires, la présente cause, introduite avant l’entrée en vigueur de la loi et pendante devant la Commission cantonale de recours en matière d’assurance-vieillesse et survivants a été transmise d’office au Tribunal cantonal des assurances sociales, statuant en instance unique et dans la composition prévue par l’article 162 LOJ, notamment sur les contestations relatives à la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 56V LOJ). Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2. La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l’AVS, notamment en ce qui concerne l’article 52 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS). Désormais, la responsabilité de l’employeur est réglée de manière plus détaillée qu’auparavant à l’article 52 LAVS et les articles 81 et 82 du Règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants (RAVS) ont été abrogés. Le cas d’espèce reste néanmoins régi par les dispositions en vigueur jusqu’au 31 décembre 2002, eu égard au principe selon les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se son produits (ATF 122 V 467 consid. 1). Les dispositions légales pertinentes seront dès lors citées dans leur ancienne teneur.

Le défendeur soulève l’exception de la prescription, considérant qu’aux termes de l’art. 52 al. 3 LAVS, le droit de demander la réparation d’un dommage est prescrit deux ans après que la Caisse a eu connaissance du dommage.

Il convient cependant de souligner que cette disposition légale n’est entrée en vigueur qu’au 1er janvier 2003. Or, la demande en mainlevée de l’opposition a été déposée par la Caisse le 15 mai 2002. C’est ainsi l’art. 82 al. 1 RAVS, en sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2002, qui s’applique.

Aux termes de l'article 82, alinéa 1 RAVS, le droit de demander la réparation d'un dommage se prescrit lorsque la Caisse de compensation ne le fait pas valoir par une décision de réparation dans un délai d'une année à compter du moment où elle a eu connaissance du dommage et, en tout cas, à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter du fait dommageable.

Contrairement à la teneur de cette disposition, il s'agit en l'occurrence d'un délai de péremption à considérer d'office (cf. ATF 112 V 8, consid. 4c; RCC 1986 page 493). Lorsque ce droit dérive d'un acte punissable soumis par le code pénal à un délai de prescription de plus longue durée, ce délai est applicable (article 82, alinéa 2 RAVS).

Le Tribunal fédéral des assurances (TFA) a posé le principe qu'une caisse de compensation a "connaissance du dommage" au sens de la disposition précitée, à partir du moment où elle doit reconnaître, en y prêtant l'attention qu'on est en droit d'attendre d'elle et en tenant compte de la pratique, que les circonstances ne lui permettent plus de recouvrer les cotisations, mais pourraient justifier une obligation de réparer le dommage (ATF 116 V 75, consid. 3b; 113 V 181, consid. 2;112 V8, consid. 4d, 158; 108V 52, consid. 5; RCC 1983 page 108). Le fait déterminant est donc de constater qu'il n'y a "rien dont on puisse tirer profit, rien à distribuer" (cf. Fritsche : "Schuldbetreibung und Konkurs II, 2ème éd. Page 112), d'où résulte la perte de la créance de la Caisse.

En cas de faillite ou de concordat par abandon d'actifs, la Caisse n'a pas nécessairement connaissance du dommage au moment seulement où elle peut consulter le tableau de distribution et le compte final établis par l'Office des faillites ou le liquidateur, ou à la date à laquelle elle reçoit un acte de défaut de biens. En effet, celui qui subit une perte dans une faillite ou dans une procédure concordataire et veut intenter une action en dommages-intérêts a, en général, selon la pratique des tribunaux déjà suffisamment connaissance du dommage au moment où la collocation des créances lui est notifiée, ou à celui où l'état de collocation et l'inventaire ont été déposés et peuvent être consultés. A ce moment-là le créancier est, ou devrait être en général, en mesure de connaître l'état des actifs, la collocation de sa créance et le dividende probable (cf. ATF 116 II 161, consid. 4a; 116 V 75, consid. 3b = RCC 1990, page 415; ATF 113 V 182, consid. 2, avec réf. = RCC 1987 page 607).

Le Tribunal fédéral des assurances admet, en présence de circonstances spéciales, que la Caisse peut acquérir la connaissance nécessaire avant le dépôt de l'état de collocation; c'est en particulier le cas lorsqu'elle apprend de l'administration de la faillite, à l'occasion d'une assemblée des créanciers, qu'aucun dividende ne pourra être distribué aux créanciers de la classe. L'existence de telles circonstances ne sera cependant admise qu'avec retenue (ATF 118 V 195).

Selon la jurisprudence, le dommage est réputé survenu lorsque les cotisations dues ne peuvent plus être perçues, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 113 V 258, consid. 3c); RCC 1988, p. 137; BGE 109 V 92, consid. 9 et les arrêts cités : RCC 1983, p. 477). Lorsque les cotisations demeurent impayées en raison de l'insolvabilité de l'employeur (personne morale) le dommage est réputé survenu au moment où les créances de cotisations sont irrécouvrables, c'est à dire au moment où, eu égard l'insolvabilité de l'employeur, les cotisations ne peuvent plus être perçues selon la procédure ordinaire (ATF 112 V 157 consid. 2 ; Maurer, Schweizerisches Sozialversicherungsrecht, volume II, page 69). Ces principes s’appliquent aussi en cas de faillite liquidée par la procédure sommaire car le jugement ordonnant la liquidation sommaire ne permet pas à lui seul de connaître le dommage cf. ATFA du 6 novembre 2000, publié dans VSI 4/2001, p 194 ss).

En l’absence de motifs qui justifierait de retenir, à titre exceptionnel, une date antérieure à la connaissance du dommage au sens de la jurisprudence, force est d’admettre que la décision de la Caisse du 18 mars 2002 a été rendue à temps, eu égard au dépôt de l’état de collocation le 28 mars 2001. Partant, la Caisse respecte le délai de péremption d’un an dès la connaissance du dommage prévu à l'art. 82 al. 1 RAVS ainsi que le délai de cinq ans à compter du fait dommageable.

L’opposition de Monsieur C_________, par courrier du 17 avril 2002, est formée en temps utile.

Les époux F_________, quant à eux, ont contesté le 2 mai 2002 la décision en réparation du dommage du 18 mars 2002. Il y a cependant lieu de relever qu’ils ne l’ont reçue que le 4 avril 2002 sous pli simple. Leur opposition est ainsi également recevable.

La Caisse ayant saisi l'autorité compétente le 15 mai 2002, soit dans le délai de 30 jours à compter desdites oppositions (81 al. 3 RAVS), la demande de mainlevée de la Caisse est formellement recevable.

Aux termes de l'article 52 LAVS :

"L'employeur doit couvrir le dommage qu'il a causé en violant les prescriptions intentionnellement par négligence grave."

Il sied de rappeler que l'article 52 LAVS est une disposition spéciale (RCC 1989, page 117).

En l'espèce, le dommage consiste en la perte de la créance de cotisations subie par la Caisse en raison de l'insolvabilité de la société, soit les cotisations paritaires AVS, AI, APG et AC impayées de mai 1999 à janvier 2000, ainsi que celles découlant d’un rapport de contrôle portant sur les années 1994 à 1996, les frais administratifs, les intérêts moratoires, les frais de poursuite et les taxes de sommation.

Les amendes ne font pas partie du dommage (Ch. 6010 DP ; RCC 1991 p. 456) pas plus que les contributions d’allocations familiales objet, d’une procédure distincte.

Le dommage dont la Caisse peut demander réparation se chiffre ainsi au total de la production ( 21'159 Fr. 15), dont on déduit les contributions d’allocations familiales (1'066 Fr 70), soit 20’092 Fr 95 (cf. Pièce N° 16, Caisse).

L'article 14 al. 1 LAVS, en corrélation avec les articles 34 et suivants RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses périodiquement les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décision.

L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes, est pour l'employeur une tâche de droit public prescrite par la loi. A cet égard, le Tribunal fédéral des assurances a déclaré à réitérées reprises que la responsabilité de l'employeur au sens de l'article 52 aLAVS est liée au statut de droit public (RCC 1987, p. 220). L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'article 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (RCC 1985, p. 646).

Le TFA a affirmé expressément que l'obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l'employeur, des prescriptions régissant l'AVS (RCC 1978, page 259; RCC 1972, page 687). La caisse de compensation qui constate qu'elle a subi un dommage par suite de la non-observation de prescriptions peut admettre que l'employeur a violé celles-ci intentionnellement ou du moins par négligence grave, dans la mesure où il n'existe pas d'indice faisant croire à la légitimité de son comportement ou à l'absence d'une faute (cf. ATFA du 28 juin 1982, RCC 1983 page 101).

Lorsque l'employeur est une personne morale, ses organes répondent solidairement, à titre subsidiaire, du dommage causé par celui-ci, notamment quand la personne morale n'existe plus au moment où la responsabilité est engagée (cf. No 6003 des directives de l'OFAS sur la perception des cotisations - DP ; ATF 114 V 79, consid. 3; 113 V 256, consid. 3c; RCC 1988, page 136, consid. 3c; ATF 1111 V 173, RCC 1985, page 649, consid. 2).

Par "organe", il faut entendre toute personne physique qui représente la personne morale à l'extérieur ou qui peut exercer une influence décisive sur le comportement de celle-ci (cf. No 6004 DP). Lorsqu'il est saisi du cas d'une société anonyme, le TFA s'est toujours référé à l'article 754, 1er alinéa, en corrélation avec l'article 759, 1er alinéa du CO. Conformément à ces articles, toutes les personnes chargées de l'administration, de la gestion ou du contrôle, répondent, à l'égard de la société, de même qu'envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu'elle leur cause en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs et les personnes qui répondent d'un même dommage en sont tenus solidairement.

Sont réputés chargés de l'administration ou de la gestion au sens de l'article 756 CO, "non seulement les organes de décision désignés expressément comme tels, mais également les personnes qui prennent effectivement des décisions relevant des organes, ou qui assument la gestion proprement dite et ont ainsi une part prépondérante à la formation de la volonté au sein de la société" (ATF 107 II 353, consid. 5a; ATF 112 II 1985 et l'arrêt du 21 avril 1988 en la cause A; Forstmoser, Die aktienrechtlische Verantwortlichkeit, 2ème édition, pages 209 et ss).

5. Il s'agit à présent de déterminer si les défendeurs ont ou non l'obligation de réparer le dommage subi par la Caisse.

Un employeur fait preuve de négligence grave s'il ne se conforme pas à ce qui peut être raisonnable exigé de toute personne capable de discernement dans une situation identique et dans les même circonstances (RCC 1972, p. 690).

La mesure de ce qu'on est en droit d'exiger doit être évaluée d'après ce que l'on peut ordinairement attendre en matière de comptabilité d'un employeur de la même catégorie. S'agissant d'une société anonyme, on peut par principe poser des exigences sévères (RCC 1985, p. 646).

Selon la jurisprudence constante du TFA, c'est une faute grave que d'accepter et de conserver un mandat d'administrateur sans exercer les pouvoirs et les devoirs qui sont attachés à cette fonction (cf. ATFA C.B D.D du 7 avril 1993). Même si l'on retient qu'un administrateur n'était pas personnellement chargé du règlement des comptes avec l'administration de l'AVS, il devait néanmoins veiller à ce que la gestion de l'autre administrateur fut conforme à la loi (RCC 1992, p. 268). L'administrateur doit déployer toute la diligence nécessaire à la surveillance de cette gestion (RCC 1989, p. 114). Il s'agit-là d'une obligation inaliénable et intransmissible (cf. ATFA M.L L.L P.L du 9 décembre 1997; RCC 1989, p. 176).

6. Monsieur et Madame F_________ contestent leur qualité d’organes de fait de la société.

La jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l’art. 754 CO admet que sont également réputées chargées de la gestion et de l’administration les personnes qui – sans être désignées formellement en qualité d’organes – prennent en fait les décisions réservées aux organes ou se chargent de la gestion proprement dite, participant ainsi de manière déterminante à la formation de la volonté de la société (cf. RCC 1988 p. 631 ; ATFA du 26 mai 1986 en la cause S.F. & D.S.).

Force est de constater que les époux disposaient d’une signature bancaire individuelle, qu’ils négociaient et concluaient les contrats au nom de la société, tout comme ils engageaient et dirigeaient son personnel. Ils ne motivent d’ailleurs pas leur argument, ni sous forme de conclusions motivées, ni lors de la comparution personnelle des parties où ils ont d’ailleurs fait défaut.

Le fait qu’un directeur chargé de la gestion ait eu accès au compte bancaire de la société et que, par ailleurs, il ait eu connaissance du retard de la société dans le versement des cotisations, ne permet pas de dire qu’il a commis une faute intentionnelle ou une négligence grave. Est bien plutôt déterminant le point de savoir s’il était habilité, dans le cadre des compétences qui lui avaient été déléguées, d’utiliser le compte bancaire en question pour toutes les affaires de la société, notamment celles ayant trait au règlement des créances de la caisse de compensation (ATFA du 26 mai 1986 en la cause S.F. & D.S.).

Il appert des pièces figurant au dossier, ainsi que des déclarations de Monsieur C_________, que les époux F_________ étaient chargés de toute la gestion administrative et financière de la société. Il convient de rappeler qu’il appartient à l’employeur de faire valoir dans la procédure d’opposition des motifs justifiant ou excusant son comportement, à charge pour lui d’en rapporter la preuve en vertu de son devoir de collaborer à l’établissement des faits (ATFA du 23 décembre 1982 en la cause P.D.). Force est de constater que les époux n’ont apporté aucun motif justifiant ou excusant leur comportement. Ils ont, en conséquence, fait preuve de négligence grave au sens de l’art. 52 LAVS.

7. Monsieur C_________ était inscrit comme administrateur unique de X_________ SA en liquidation, du 7 mai 1998 jusqu'à la dissolution de la société par faillite prononcée le 20 février 2000.

Il allègue avoir délégué toutes les tâches administratives et de gestion aux époux F_________ et souligne le comportement fautif de ceux-ci, lesquels auraient omis de "fournir" les pièces comptables permettant de mettre en place un suivi et un contrôle financier.

L’administrateur qui est écarté de la gestion pendant près de deux ans, et tolère cette situation, en se contentant de demander oralement des renseignements, engage sa responsabilité. Au demeurant, il lui est loisible, en tant qu’administrateur, de convoquer une assemblée générale des actionnaires, de s’adresser à l’organe de contrôle, voire de s’enquérir auprès de la caisse de compensation de la régularité du paiement des cotisations AVS (RCC 1989, p.114).

Monsieur C_________, quand bien même il ne s'occupait pas des tâches courantes de l'administration de la société, responsabilités assumées par les époux F_________, se devait de veiller à ce que les cotisations AVS-AI-APG, AC et AF soient payées en temps utile et au besoin demander des renseignements complémentaires et le cas échéant intervenir si des erreurs ou manquements étaient constatés. (RCC 1985, p. 646). En tant qu’expert-comptable, il savait qu’il ne pouvait surveiller les activités de la société dont il était administrateur qu’à distance, vu son domicile en Valais ; partant il se devait d’être encore plus vigilant.

Peut-être a-t-il été victime des agissements des dirigeants de fait de l’entreprise. Il ne démontre en tout cas pas avoir pris des mesures pour veiller à ce que les salaires soient correctement annoncés auprès de la Caisse ni que les charges sociales correspondantes soient régulièrement payées. Le défendeur reconnaît même que les situations comptables présentées par les époux F_________ faisaient état de dettes envers la Caisse. A aucune occasion, il ne s’est mis en rapport avec celle-ci pour obtenir la vérification de l’état de règlement des cotisations paritaires. Partant, la négligence grave de Monsieur C_________ sera retenue.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

1. Déclare recevable la demande de mainlevée des oppositions formées le 15 mai 2002 par la Caisse interprofessionnelle d’assurance vieillesse et survivants de la fédération des entreprises romandes (anciennement FRSP-CIAM).

Au fond :

2. Lève les oppositions formées par Messieurs C_________ et F_________ et par Madame F_________, à concurrence de 20'092 Fr 95.

3 Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

La greffière :

 

Nancy BISIN

 

Juge suppléant :

 

Howard Jan KOOGER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le