Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2759/2005

ATAS/351/2006 du 12.04.2006 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 24.05.2006, rendu le 03.05.2007, PARTIELMNT ADMIS, C 129/06
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2759/2005 ATAS/351/2006

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 5

du 12 avril 2006

 

En la cause

Madame D__________, représentée par Monsieur D__________

 

 

recourante

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHOMAGE, rue de Montbrillant 40, case postale 2293, 1211 GENEVE 2

intimée

 


EN FAIT

Un délai-cadre d'indemnisation courant du 4 mars 2004 au 3 mars 2006 a été ouvert en faveur de Madame D__________. Dans sa demande d'indemnités signée le 15 mars 2004, celle-ci a déclaré avoir travaillé du 3 février 2003 au 29 février 2004 auprès de la société X__________S.A. (ci-après : la société) et avoir été licenciée pour des raisons économiques. Ce fait est également confirmé par l'attestation de l'employeur du 10 mars 2004.

A sa demande d'indemnités, l'assurée a joint son contrat de travail du 12 janvier 2003 confirmant son engagement en tant qu'assistante chargée de communication et de vente à 80% dès le 1er février 2003 moyennant un salaire de 4'500 fr. et à 100% dès le 1er mai 2003 moyennant un salaire de 6'340 fr. Elle a également produit la lettre de congé de la société du 29 janvier 2004 pour le 29 février 2004 signée par Monsieur Z__________, ainsi que douze fiches de salaire mentionnant pour les mois de février et avril 2003 un salaire mensuel brut de 4'500 fr. et pour mai 2003 à février 2004 un salaire mensuel brut de 6'340 fr.

Selon l'extrait de compte individuel de la caisse de compensation FER-CIAM (ci-après : la caisse de compensation), la société a déclaré pour l'intéressée en 2003 un salaire annuel de 21'166 fr.

Il résulte du Registre du commerce de Genève que Monsieur D__________, père de l'assurée, était administrateur et président de la société avec signature individuelle. La société a été déclarée en faillite par jugement du Tribunal de première instance du 25 mai 2004.

Dans les pièces comptables de la société, établies par la fiduciaire L__________, est inscrit, au 31 décembre 2003, le versement à l'intéressée d'un montant de 19'310 fr. à titre de salaire. Concernant ce poste de l'écriture comptable, il est mentionné à la main "compte courant actionnaire". Pour l'exercice 2004, une écriture datée du 30 avril 2004 a trait au versement d'un salaire de 5'737 fr. 70 à l'intéressée. A côté de ce poste figure toutefois la mention manuscrite "passif transitoire".

Par décision du 8 juillet 2004, la caisse a refusé à l'assurée l'octroi d'indemnités en cas d'insolvabilité essentiellement au motif que son dossier ne faisait aucune mention de démarches de sa part propres à obtenir le règlement des salaires échus et qu'elle n'avait ainsi pas respecté l'obligation générale des assurés de diminuer le dommage. Cette décision n'a pas été contestée.

Par décision du 17 janvier 2005, la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse) a communiqué à l'assurée un refus rétroactif des prestations au 4 mars 2004, au motif qu'elle ne justifiait pas d'une période de cotisation de douze mois minimum prescrite par la loi. La caisse a indiqué à cet égard, que selon son contrôle interne, les salaires mentionnés sur l'attestation de l'employeur n'avaient pas été versés et qu'en conséquence les charges sociales y relatives n'avaient pas été payées non plus. Notamment les salaires mentionnés dans les écritures comptables de la société de 19'310 fr. et de 5'737 fr. 70 n'avaient jamais été versés à l'assurée. Quand à l'extrait de compte individuel, il ne comportait qu'une période de cotisations de février à décembre 2003 pour un montant de 21'166 fr. de salaire soumis à cotisations, soit une période totale de onze mois.

Le 14 février 2005, l'assurée a formé opposition à cette décision en concluant à son annulation et à l'octroi des indemnités de chômage. En premier lieu, elle a informé la caisse qu'elle avait été hospitalisée à plusieurs reprises en 2004 et qu'elle était toujours en traitement. Elle a par ailleurs indiqué avoir adressé, durant l'année 2003, et jusqu'à son licenciement, de nombreuses lettres à son employeur pour se plaindre et lui demander les comptes. Même si son père avait dirigé la société, elle avait été une employée comme les autres. Elle a par ailleurs produit trois autres contrats de travail conclus par la société avec les employés Mesdames B__________ et R__________, ainsi que Monsieur Z__________. Or, ces personnes n'avaient pas eu des problèmes pour obtenir les indemnités journalières de chômage, selon ses informations, même si le salaire ne leur avait pas été payé intégralement par la société. Quant aux cotisations sociales qui n'avaient pas été payées sur l'intégralité du salaire convenu, elle a expliqué que son père avait convenu avec la caisse de compensation que ces cotisations ne seraient versées que lors du paiement effectif des salaires. Jamais elle n'avait par ailleurs accepté que son salaire soit diminué. Par ailleurs, elle a rappelé qu'elle avait été licenciée seulement le 28 janvier 2004 pour le 29 février suivant, de sorte qu'il convenait d'admettre une période de cotisations de plus de douze mois.

Par décision sur opposition du 24 juin 2005, la caisse a rejeté celle-ci. Elle a relevé que, selon la jurisprudence en la matière, l'activité salariée doit avoir été effectivement exercée et le salaire y relatif être réellement versé au travailleur, pour admettre que les conditions relatives à la période de cotisations sont remplies. Le Tribunal fédéral des assurances (ci-après : TFA) a jugé à cet égard que la déclaration d'impôts et le formulaire de salaire signés par l'assuré et destinés à l'AVS ne constituaient pas des preuves suffisantes du versement du salaire et que, à défaut de pièces justifiant le versement du salaire, tels que extraits bancaires ou postaux, quittances de salaires, le versement du salaire ne pouvait être prouvé avec un degré de vraisemblance suffisant. La caisse fait valoir que de telles pièces faisaient défaut in casu et que l'assurée n'avait pas réussi à établir par d'autres moyens avoir réellement reçu chaque mois un salaire pour son activité d'employée au sein de la société.

Par acte du 29 juillet 2005, reçu le 3 août suivant, l'assurée, représentée par son père, a recouru contre cette décision. Ce dernier a informé en premier lieu le Tribunal de céans que sa fille n'était pas en mesure de se défendre, en raison de son état de santé. Elle était par ailleurs assistée par l'HOSPICE GENERAL et actuellement incapable de travailler. Implicitement, le père a demandé l'annulation de la décision et l'octroi des prestations de chômage au motif que sa fille avait été une employée ordinaire.

Le 1er septembre 2005, l'intimée a conclu au rejet du recours.

Le 3 octobre 2005, la recourante, par l'intermédiaire de son père, a essentiellement conclu à l'octroi de trois mois d'indemnités en cas d'insolvabilité, à l'octroi d'indemnités journalières de chômage, respectivement de prestations en cas d'incapacité de travail, et à l'octroi de mesures relatives au marché du travail. Elle a souligné qu'elle n'avait été ni actionnaire ni administratrice de la société et que son père n'avait pas non plus été actionnaire de celle-ci. Elle a répété que les cotisations sociales n'avaient été payées que sur les avances effectivement données et non pas sur la base du salaire contractuel. Certains employés de la société, ne pouvant accepter de ne pas être intégralement rémunérés, avaient quitté l'entreprise en septembre 2003, d'autres en novembre et décembre 2003, ainsi qu'au début 2004. Tous ces employés avaient pu bénéficier des indemnités de chômage sur la base des salaires convenus sauf elle. Concernant le reproche qui lui avait été fait de ne pas avoir revendiqué son salaire par la suite, elle a fait grief à la caisse de ne pas l'avoir informée de ses droits qu'elle ignorait.

La recourante a notamment joint à ses écritures quatre courriers manuscrits adressés à son père les 15 novembre 2003, 20 décembre 2003, 15 janvier 2004 et 8 mars 2004. Dans le premier courrier, elle lui a réclamé au moins de quoi payer son loyer et ses assurances. Dans le second, elle a fait état de ce qu'elle n'avait toujours pas été payée, tout en remerciant son père d'une avance de 600 fr. Le 15 janvier 2004, elle a mentionné notamment que les sommes que son père lui donnait ne suffisaient pas pour couvrir ses dépenses. Dans sa dernière lettre, elle a communiqué à son père qu'elle aurait préférée être licenciée par lui et non pas par Z__________ et fait référence à une lettre de son père dans laquelle celui-ci l'informait que la société lui devait 25'340 fr. Elle a ajouté:

"Je n'ai pas besoin d'autant, tu le sais, mais est-ce que je n'ai pas droit officiellement à un salaire pour février (03) et à des vacances?! Tu sais parfaitement que je n'ai pas pris de vacances, depuis le début de mon travail."

La recourante a produit également une "attestation à qui de droit" signée par son père pour la société, indiquant que la somme de 37'620 fr. brut était encore due à titre de salaires et de vacances. Selon cette attestation, la recourante lui avait à plusieurs reprises demandé de lui verser son salaire. En outre, il est mentionné qu'elle avait dû être hospitalisée plusieurs fois et l'était de nouveau à la date de l'attestation.

Dans ses écritures du 26 octobre 2005, l'intimée a persisté dans ses conclusions, en soulignant que le salaire n'avait pas été effectivement payé et que la recourante n'avait pas travaillé plus de onze mois.

Par courrier du 10 novembre 2005, le Tribunal de céans a invité la recourante à répondre à un certain nombre de questions et à lui transmettre les décomptes bancaires relatifs au versement du salaire.

Dans le délai imparti, son père et mandataire a répondu le 1er décembre 2005 que son bureau avait subi une inondation l'été dernier, puis deux mois après, un incendie, de sorte que certains documents étaient introuvables. Par ailleurs, la santé de sa fille s'était améliorée. Comme les autres employés, sa fille recevait des avances en fonction des encaissements. L'argent lui avait été remis en espèces et non par virements bancaires. Il admet que l'intégralité du salaire ne lui a jamais été versée.

Le 11 janvier 2006, une audience de comparution personnelle des parties a eu lieu. La recourante s'y est fait excuser et représenter par son père. Celui-ci a déclaré que les actionnaires de la société étaient espagnols et représentés par son épouse. Il ignorait si la somme de 19'310 fr. ressortant des écritures comptables de la société avait été effectivement payée le 31 décembre 2003. Il supposait cependant que cela n'avait pas été le cas. En effet, sa fille n'avait touché aucun salaire depuis octobre 2003. Il était probable qu'elle n'avait pas non plus reçu en avril 2004 la somme de 5'737 fr. 70 qui ressortait des écritures comptables. La société lui payait cependant probablement le loyer. Cela resultait aussi des écritures comptables, étant précisé que le nom de la régie était X__________ & Cie. Ce loyer a encore été payé en 2004. Au sein de la société, sa fille avait été traitée comme les autres employés. Aucun de ceux-ci n'avait reçu la totalité du salaire. Certains avaient cependant reçu des montants plus importants à titre d'avance, en raison de leur situation personnelle ou familiale. Il avait demandé un effort particulier à sa fille depuis octobre 2003, en raison des difficultés financières de la société. La faillite de celle-ci était toujours en cours. L'appel au créanciers n'avait eu lieu qu'en décembre 2005. Sa fille avait par ailleurs produit sa créance de salaire contre la société dans le cadre de cette faillite. Le père de la recourante a en outre indiqué que lui et sa femme avaient versé de l'argent à la société pour les actionnaires, lesquels avaient toujours affirmé qu'ils allaient la renflouer. Il a également mentionné que, à sa connaissance, sa fille avait touché des prestations du PCM jusqu'en septembre 2004. Il n'avait jamais eu connaissance d'une décision de restitution de la caisse. Par ailleurs, en janvier 2005, sa fille avait été hospitalisée. Elle n'est toujours pas en mesure de s'occuper de ses affaires. Quant à l'appartement de sa fille, la société l'avait loué dans un premier temps en son propre nom, puis transféré le bail au nom de la recourante.

A cette même audience, l'intimée a déclaré avoir contrôlé les comptes de la société et constaté qu'il n'y a jamais eu de sortie d'argent pour la recourante, même si cela était mentionné dans les écritures comptables. L'intimée avait payé les indemnités journalières jusqu'au 31 juillet 2004, mais non pas les indemnités en cas d'insolvabilité. Le 17 janvier 2005, une décision de restitution des prestations perçues indûment a été notifiée à la recourante, laquelle était revenue à l'intimée avec la mention "non réclamé". Elle a été par la suite expédiée sous pli simple. Aucune opposition à cette décision n'avait été formée. La caisse a versé à la procédure copie de cette décision de restitution.

Le 8 mars 2006, Madame N__________a été entendue en tant que témoin. Elle a déclaré avoir été une employée dans la société d'avril à octobre 2003 en tant que responsable commerciale. La recourante avait également été une employée de la société et venait travailler tous les jours. Son père avait cependant expliqué à ce témoin que sa fille n'était pas payée. Seul son loyer était pris en charge par la société et elle recevait une aide ponctuelle. Le témoin n'avait jamais reçu son salaire pendant toute la durée des rapports de travail. Madame N__________avait accepté de ne pas être payée pendant plusieurs mois, car elle avait l'espoir que la situation de la société se redresse. A l'époque, elle vivait de ses économies. Le premier paiement n'était intervenu qu'à la fin du mois de décembre 2003. Le témoin n'avait jamais entendu la recourante se plaindre de ne pas avoir été payée. Madame N__________avait par ailleurs été responsable des écritures comptables qu'elle établissait sur programme Excel. Elle avait touché les indemnités de chômage et les indemnités en cas d'insolvabilité, sur la base du contrat conclu avec la société et des mois de cotisations dans ses activités antérieures.

Le 8 mars 2006 a également été entendu en tant que témoin Monsieur Z__________. Celui-ci a déclaré avoir travaillé pour la société en tant que responsable d'édition d'avril 2003 à décembre 2003, à temps partiel, puis de janvier à avril 2004. Cependant, en mars 2004, la société avait cessé ses activités. Pendant toute la durée des services, il avait été défrayé uniquement pour ses frais et n'avait jamais reçu de salaire. La recourante avait été une employée ordinaire de la société, à sa connaissance. Elle avait travaillé jusqu'à la cessation des activités de la société. Il n'a jamais entendu la recourante se plaindre de ne pas avoir été payée. Toutefois, tous les employés avaient été dans la même situation. Il avait accepté de travailler bénévolement pour la société jusqu'à fin 2003 et aucun contrat n'avait été conclu dans un premier temps, dès lors qu'il s'agissait de développer un projet. Pendant sa deuxième période de travail, un contrat de travail en bonne et due forme avait été conclu. Il avait par ailleurs fait valoir ses droits dans la faillite de la société. Il avait signé la lettre de licenciement de la recourante sur demande de son père. Enfin, il n'avait jamais discuté avec la recourante de ses conditions salariales.

Le Tribunal de céans a également procédé le 8 mars 2006 à l'audition de Monsieur L__________, fiduciaire de la société dès ses débuts. Il a indiqué avoir établi rétroactivement la comptabilité de la société en 2004 en bloc, à la demande expresse du juge de la faillite. La personne qui était chargée dans la société de la comptabilité était cependant déjà partie, de sorte qu'il avait dû se fonder sur les pièces qu'on lui avait remises. Il s'était basé notamment sur les déclarations de salaires à l'AVS par la société. A cet égard, il a produit une feuille des salaires pour 2003 et 2004 qui avait été établie par la société. Pour ce témoin, la recourante avait été une employée ordinaire de celle-ci dont toutefois le salaire avait été payé en partie sous forme de loyer. Quant au salaire de 19'310 fr. qui avait été payé à la recourante en 2003, selon ses écritures comptables, cette somme avait été avancée par les actionnaires, raison pour laquelle il avait mentionné "compte courant actionnaire" afin que ce montant leur soit remboursé. Le salaire de 5'737 fr. 70 figurant dans les écritures comptables pour 2004 n'a jamais été payé effectivement. Le comptable avait dès lors mentionné "passif transitoire". Il n'avait pas tenu compte, dans les salaires comptabilisés pour la recourante, de la prestation qu'elle a reçue à titre de paiement du loyer. Par ailleurs, il n'avait pas eu à disposition des rapports de caisse concernant les sorties concrètes d'argent. La comptabilité qu'il avait établie reposait cependant sur des pièces comptables réelles. Les salaires mentionnés dans les écritures comptables étaient nettes. Il ne s'était pas occupé de comptabiliser les cotisations AVS payées et dues. Le solde à payer à la recourante était bien de 44'910 fr. en 2004, comme cela ressortait de ses pièces comptables. De ce montant, il fallait cependant déduire les loyers payés par la société pour l'appartement de la recourante.

A l'audience d'enquête précitée, la recourante, représentée par son père, a produit le contrat de bail conclu le 5 avril 2002 par la société avec Monsieur R__________, représenté par X__________ & Cie Agence Immobilière SA, portant sur un appartement de 2,5 pièces à la rue Prieuré 4 à Genève. Le début du bail était le 16 avril 2002. La recourante a également versé à la procédure copie du fax de la société du 28 mars 2002 à cette dernière régie, aux termes duquel la société a communiqué qu'elle logera dans cet appartement sa collaboratrice, Madame Isabelle D__________. La société a également mentionné dans cette missive qu'elle attendait les clés au plus vite afin de pouvoir procéder à la rénovation de la cuisine.

Le 17 mars 2006, l'intimée s'est déterminée après enquêtes en maintenant sa position. Elle a relevé que les questions posées à la recourante par le Tribunal de céans dans son courrier du 10 novembre 2005 n'avait pas trouvé de réponses claires. Par ailleurs, elle a fait valoir que la somme de 21'166 fr. qui aurait été payée à la recourante, selon l'extrait de compte individuel de la caisse de compensation, ne correspondait à aucune pièce justificative du versement de salaire, ni au montant de salaire prévu contractuellement ni enfin aux salaire déclarés par la société à l'AVS, selon la feuille de salaires produite par Monsieur L__________ lors de son audition. Les anciens employés de la société entendus, n'avaient par ailleurs soit jamais parlé avec la recourante de ses conditions salariales, comme Monsieur Z__________, soit avaient déclaré qu'elle n'était pas payée, comme Madame N__________. La caisse a relevé également que la recourante n'avait jamais entrepris d'action concrète pour réclamer le salaire dû. S'agissant des loyers, l'intimée a souligné que les pièces du dossier et les déclarations des témoins étaient contradictoires. En effet, la recourante sollicitait dans les lettres à son père le versement de son salaire pour payer son loyer. Dès lors, l'intimée a considéré qu'il ne fallait pas non plus tenir compte du paiement du loyer par la société à titre de part salariale. Enfin, la recourante avait déjà occupé le logement en cause plusieurs mois avant le début du rapport contractuel, dès lors que la société avait loué l'appartement en question pour elle à partir du 16 avril 2002. Ce logement n'avait donc été déclaré comme logement de fonction, aux dires de l'intimée, que pour amplifier les charges déductibles de la société.

En l'annexe de ses écritures, l'intimée a produit copie de la demande d'indemnité d'insolvabilité du 21 juin 2004 de la recourante, de sa production de créance du 23 juin 2004 et de l'attestation du 27 mai 2004 de la société. De la production de la créance résulte que la recourante a produit dans la faillite de la société une créance correspondant aux salaires d'octobre 2003 à février 2004, ainsi qu'à une indemnité de vacances relative à cette période, sur la base d'un salaire mensuel de 6'340 fr., pour un montant de 42'919 fr. 25. Dans l'attestation précitée, la société certifie, sous la plume du père de la recourante, que celle-ci n'a pas perçu son salaire ni l'indemnité de vacances dus à partir du 1er octobre 2003 jusqu'à son inscription au chômage.

A la demande du Tribunal de céans, la caisse de compensation a produit le 20 mars 2006 à nouveau un extrait du compte individuel de la recourante. Il résulte de celui-ci qu'aucun salaire n'a été déclaré pour elle en 2004.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 8 LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) qui sont relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

a) Le recours contre la décision sur opposition du 24 juin 2005 a été interjeté dans le délai légal de 30 jours (art. 60 LPGA), compte tenu de la suspension de ses délais prévus aux art. 38 al. 4 let. b LPGA et 89 C let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPGA9). Il respecte également les conditions de formes prescrites par l'art. 61 LPGA.

Se pose cependant la question de savoir si le recours contre la décision attaquée est en l'occurrence recevable, s'agissant, du moins en partie, d'une décision de constatation et non pas de restitution. En effet, selon la jurisprudence du TFA, une "décision" qui ne modifie pas avec effet obligatoire et directement contraignant une prétention servie à l'intéressée, telle qu'une indemnité de chômage, est de nature constatatoire et ne satisfait pas à l'exigence d'un intérêt digne de protection, de sorte qu'elle n'est pas attaquable devant une autorité judiciaire cantonale (arrêt non publié du TFA du 12 octobre 2005, cause 183/04 consid. 2.2).

Cependant, d'une part, la totalité des indemnités de chômage éventuellement dues pendant le délai-cadre d'indemnisation n'a pas encore été versée à la recourante, de sorte que la décision litigieuse n'est pas purement constatatoire, mais comporte également un refus de prestations futures. D'autre part, la décision de l'intimée lie également l'OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI qui est l'autorité compétente en matière de prestations en cas d'incapacité passagère, totale ou partielle de travail au sens des art. 9 à 21 de la loi cantonale en matière de chômage du 11 novembre 1983 (LC), selon l'art. 8 al. 1 du règlement d'exécution de la LC du 3 décembre 1984 (ci-après : règlement d'exécution). En cas d'admission du recours, il appartiendra à cet office de statuer sur le droit aux prestations en cas d'incapacité de travail dues pendant le délai-cadre d'indemnisation qui a expiré le 3 mars 2006. Il convient dès lors d'admettre également un intérêt digne de protection à ce que le droit aux prestations de chômage fondées sur la LACI soit constaté. Partant, le recours contre la décision sur opposition du 24 juin 2005 doit être déclaré recevable.

b) La recourante conteste en outre la décision du 8 juillet 2004 de l'intimée, par laquelle celle-ci lui a refusé les indemnités en cas d'insolvabilité. Cette décision n'a, à la connaissance du Tribunal de céans, jamais fait l'objet d'une opposition dans le délai légal et une restitution de ce délai pour des raisons de santé n'a pas non plus été demandée. Elle est ainsi entrée en force de chose jugée. Par conséquent, le recours contre celle-ci est irrecevable.

Le litige porte sur le droit de la recourante à des indemnités de chômage, respectivement des prestations en cas d'incapacité passagère, totale ou partielle de travail prévues aux art. 8 et ss LC. Il s'agit en particulier de déterminer si la recourante remplit la condition de la période de cotisation de douze mois prescrite par la loi.

Cette condition doit être satisfaite par l'assuré, pour avoir droit à l'indemnité de chômage, en vertu de l'art. 8 al. 1 let. e LACI, à moins qu'il soit libéré de cette condition, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. L'art. 13 al. 1 LACI prévoit que celui qui, dans les limites du délai-cadre (art. 9 al. 3 LACI), a exercé durant douze mois au moins une activité soumise à cotisation remplit les conditions relatives à la période de cotisation.

Par activité soumise à cotisation, il faut entendre toute activité de l'assuré, destinée à l'obtention d'un revenu soumis à cotisations pendant la durée d'un rapport de travail (GERHARDS, Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz [AVIG], tome I, note 8 ad art. 13 LACI, p. 170). L'exercice effectif d'une activité salariée suffisamment contrôlable, comme exigence qui doit être satisfaite pour admettre que les conditions relatives à la période de cotisation sont remplies (ATF 113 V 352; DTA 1999 n° 18 p. 101 consid. 2a et la référence; Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], p. 64, ch. m. 161 et les notes n° 325 et 326), implique également qu'un salaire ait réellement été versé au travailleur. En conséquence, il n'y a pas d'activité soumise à cotisation en l'absence d'une rémunération versée à l'assuré (DTA 2001 n° 27 p. 225). La déclaration d'impôts et le formulaire de salaire signé par l'assuré et destiné à l'AVS ne constituent pas des preuves suffisantes du versement du salaire. A défaut de pièces justifiant le versement du salaire (extraits bancaires ou postaux, quittances de salaire), le versement du salaire n'est pas réputé prouvé au degré de vraisemblance prépondérante (DTA 2004 n° 10 p. 115). Outre qu'elle découle de l'interprétation de la loi, l'exigence d'un salaire effectif - pour admettre que les conditions relatives à la période de cotisation sont réunies - présente également l'avantage de prévenir les abus qui pourraient résulter en cas d'accord fictif entre un employeur et un travailleur au sujet du salaire que le premier s'engage contractuellement à verser au second. A cet égard, les principes jurisprudentiels développés à propos de l'art. 23 al. 1 LACI peuvent être transposés mutatis mutandis: un salaire contractuellement prévu ne sera dès lors pris en considération, sous l'angle de l'art. 13 al. 1 LACI, que s'il a réellement été perçu par le travailleur durant une période prolongée et que s'il n'a jamais fait l'objet d'une contestation (DTA 2001 n° 27 p. 228 consid. 4c, arrêt Z. du 9 mai 2001, C 279/00 ; arrêt A. du 31 août 2001, C 354/00, consid. 2c).

Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf disposition contraire de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a). Par ailleurs, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et les faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références).

En l'occurrence, la recourante était au bénéfice d'un contrat de travail signé par la société, sous la plume de son père, administrateur de celle-ci, prévoyant un salaire mensuel de 4'500 fr. de février à avril 2003, puis dès le 1er mai 2003 de 6'340 fr. Cependant, dans les faits, la société n'a déclaré pour 2003 à l'AVS que des salaires de 21'166 fr. Par ailleurs, l'ancien administrateur de la société et mandataire de la recourante a clairement déclaré qu'aucun salaire ne lui avait été versé dès octobre 2003. L'intimée met cependant en doute que la recourante ait effectivement travaillé pour la société et semble également contester aujourd'hui qu'elle ait reçu le salaire déclaré à l'AVS pour 2003.

Il ne peut cependant pas être nié que la recourante a effectivement travaillé pour la société. Cela est confirmé par les anciens employés de celle-ci. Par ailleurs, il convient d'admettre qu'elle a travaillé pour la société jusqu'à ce que cette dernière cesse ses activités, soit jusqu'à fin février 2004, ce qui représente treize mois. Pendant cette période, elle n'a pas pris de vacances, selon ses dires, ce qui démontre également qu'elle avait été réellement active pour la société. A cet égard, il est à relever que la recourante s'est plainte, dans une de ses lettres, des circonstances de son licenciement, ce qui permet de conclure qu'elle se considérait effectivement comme une employée ordinaire. En effet, si elle n'était pas liée par un contrat de travail à la société, on ne comprendrait pas que ce fait puisse avoir une importance.

Concernant ses conditions salariales, les témoignages sont contradictoires. Madame N__________a déclaré que la recourante ne devait pas être payée, hormis une aide ponctuelle et la prise en charge de son loyer par la société. Monsieur Z__________ n'avait cependant pas cette impression et l'avait considérée comme une employée ordinaire qui travaillait moyennant un salaire. Cela est également affirmé par le père de la recourante, administrateur de la société, dont les déclarations ne peuvent toutefois être recueillies qu'à titre de renseignements, au vu du lien parental. Il résulte par ailleurs de la feuille de salaire établie par la société et produite par Monsieur L__________, que le salaire de la recourante a été enregistré comme pour tous les autres employés. C'est sur cette base que la fiduciaire L__________ a rétroactivement établi la comptabilité de la société. La recourante a également réclamé de l'argent pour son travail à son père, dans ses lettres versées à la procédure. Dans sa lettre du 20 décembre 2003, elle fait en outre état d'une avance de 600 fr. qu'elle avait reçue. Dans son courrier du 8 mars 2004, elle indique que son père lui a écrit que la société lui devait 25'340 fr. brut. Il ressort aussi de ces courriers que la recourante n'avait visiblement pas une autre source de revenu ni des économies et qu'elle avait réellement besoin de la rémunération versée par la société pour subvenir à ses besoins. Il faut enfin tenir compte du fait que la recourante a rencontré de graves problèmes de santé après février 2004, ce qui peut expliquer qu'elle n'a pas été plus revendicative pour réclamer son salaire. Elle n'était selon toute vraisemblance pas en état de se défendre. De ces éléments, le Tribunal de céans conclut que la recourante ne travaillait pas bénévolement pour la société, selon la volonté des parties, et que le contrat de travail n'était, sur ce point du moins, pas fictif. Par ailleurs, dans la mesure où elle a travaillé jusqu'à fin février 2004, il convient d'admettre qu'elle a exercé durant les douze mois requis par la loi une activité soumise à cotisations.

Se pose cependant la question du montant du salaire convenu, dès lors que, d'une part, le salaire intégral n'a jamais réellement été versé, même si les autres employés de la société étaient dans la même situation, et que, d'autre part, un lien de filiation unit la recourante à l'administrateur de la société. Du témoignage de Madame N__________, il y a lieu de conclure que la rémunération de la recourante devait selon toute vraisemblance dépendre de la bonne marche des affaires de la société, mais qu'un minimum devait lui être assuré, sous forme de paiement du loyer et d'une rémunération en espèce. A cet égard, il est à constater que, de février à septembre 2003, la recourante a reçu, selon son compte individuel AVS, la somme brute de 21'166 fr., ce qui représente pour huit mois d'activité un salaire mensuel de 2'645 fr. 75. Il convient également d'examiner si la recourante a bénéficié parallèlement d'une prestation à titre de salaire sous forme de prise en charge de son loyer. L'intimée le met en doute en faisant essentiellement valoir que le contrat de bail relatif à l'appartement en cause a été conclu par la société déjà à partir du 16 avril 2002, alors que la recourante n'a commencé à travailler dans la société que depuis février 2003. Il résulte en outre de la base de données CALVIN que la recourante est domiciliée dans l'appartement loué par la société depuis le 31 juillet 2002. Cependant, rien n'empêchait la société de louer l'appartement déjà avant le début du contrat de travail. Ce fait ne s'oppose pas non plus à ce qu'objectivement le paiement du loyer par la société doit être considéré dès février 2003 et jusqu'à la fin du contrat de travail comme une contre-prestation du travail fourni.

Il est vrai que, dans une des quatre lettres que la recourante a produites dans la procédure, elle demande "de quoi payer mon loyer". Toutefois, dans les autres courriers elle n'en fait plus état et ne mentionne que des frais médicaux importants. Il convient d'en conclure que, dans son courrier du 15 novembre 2003, elle a dû oublier que ce loyer était pris en charge par la société. Ce fait est en tout état de cause établi par pièces et par le témoignage de Madame N__________.

Au vu des pièces du dossier et des témoignages, le Tribunal de céans estime que le loyer de la recourante a été effectivement payé par la société et qu'il constitue une partie du salaire mensuel convenu. Par conséquent, il convient d'ajouter au montant de 2'647 fr. 75 le loyer de 1'060 fr. Le salaire assuré doit ainsi être déterminé à 3'708 fr., en chiffres ronds.

Au vu de ce qui précède, il convient d'admettre que la recourante a droit aux indemnités journalières de chômage, respectivement aux prestations en cas d'incapacité de travail, pendant le délai-cadre du 4 mars 2004 au 3 mars 2006, sous réserve du respect des autres conditions légales, sur la base d'un salaire mensuel assuré de 3'708 fr.

Cela étant, le recours sera déclaré irrecevable, en ce qu'il porte sur le refus des indemnités en cas d'insolvabilité. Il sera partiellement admis pour le surplus.

 

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours contre le refus des indemnités en cas d'insolvabilité irrecevable.

Déclare le recours contre la décision du 24 juin 2005 de l'intimée recevable.

Au fond :

L' admet partiellement.

Annule la décision sur opposition du 24 juin 2005 de l'intimée.

Constate que la recourante a droit aux indemnités de chômage pendant le délai-cadre d'indemnisation courant du 4 mars 2004 au 3 mars 2006, sous réserve du respect des autres conditions légales, au sens des considérants.

Fixe le gain annuel assuré à 44'496 fr.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par plis recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

La greffière

 

 

 

Yaël BENZ

 

La Présidente 

 

 

 

Maya CRAMER

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties et au Secrétariat d’Etat à l’économie par le greffe le