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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4196/2020

ATAS/30/2022 du 21.01.2022 ( LAA ) , ADMIS

Recours TF déposé le 02.03.2022, rendu le 25.11.2022, ADMIS, 8C_129/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4196/2020 ATAS/30/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 janvier 2022

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Sarah BRAUNSCHMIDT SCHEIDEGGER

 

 

recourant

 

contre

CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Didier ELSIG

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), ressortissant turc d’origine kurde né en 1975, s’est établi en Suisse en 1992. Il a travaillé pour plusieurs employeurs en tant que monteur-électricien et a obtenu un certificat fédéral de capacité (CFC) dans ce métier en 2010. Au service de son dernier employeur, il était assuré contre les accidents et les maladies professionnelles auprès de la caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la CNA).

b. Le 6 octobre 2017, l’assuré est tombé d’une échelle sur son poste de travail. Il a été admis aux Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), où un traumatisme cranio-cérébral mineur et des fractures des poignets ont été diagnostiqués. Il a subi une ostéosynthèse de l’extrémité distale du radius gauche le 10 octobre suivant.

c. Divers médecins ont régulièrement attesté une incapacité de travail totale dès la date de l'accident.

d. La CNA a pris en charge les suites de cet accident. Dans ce cadre, elle a versé des indemnités journalières complètes et remboursé les frais médicaux de l’assuré.

B. a. La CNA a recueilli différents renseignements médicaux auprès des médecins et thérapeutes de l’assuré, qu’elle a également adressé à la Clinique romande de réadaptation (CRR). Elle a sollicité son médecin d’arrondissement, le docteur B______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique. Celui-ci, à l’issue de son dernier examen en novembre 2019, a conclu à une incapacité de travail totale dans l’ancienne l’activité.

b. Dans une appréciation du 5 décembre 2019, le Dr C______ a évalué l’atteinte à l’intégrité en référence à la table n° 1 de la CNA relative aux troubles fonctionnels des membres supérieurs. Le cas pour le poignet droit était moins grave qu’une arthrodèse intra-carpienne, laquelle donnait droit à un taux d’indemnisation de 10 %. Il en allait de même pour l’autre poignet. Un taux de 7 % était ainsi fixé pour les deux poignets.

c. Le docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie, a également procédé à l’examen de l’assuré à la demande de la CNA le 11 décembre 2019. Il n’a retenu aucun diagnostic psychique et conclu à une capacité de travail totale sur ce plan.

d. Par courrier du 27 décembre 2019, la CNA a informé l’assuré qu’elle mettrait fin au versement des indemnités journalières et à la prise en charge des frais médicaux au 30 avril 2020, les examens médicaux ayant révélé que son état était stabilisé. Elle a confirmé cette position par courrier du 18 mars 2020.

e. Par décision rendue le 18 février 2020, l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (OAI) a rejeté la demande de prestations de l’assuré. Il a retenu que ce dernier disposait d’une capacité de travail dans une activité adaptée depuis le mois de février 2018 et présentait un degré d’invalidité de 6.94 % à cette date. Cette décision a fait l’objet d’un recours auprès de la chambre de céans.

f. Le 7 mai 2020, la CNA a procédé au calcul du degré d’invalidité de l’assuré. Le gain de valide a été fixé à CHF 72'780.-. Le gain avec invalidité était fondé sur l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) de 2018, dans un niveau de compétence 2, soit un salaire annuel de CHF 67'788.-. Adapté à la durée normale de travail de 41.7 heures et indexé à 2020, le revenu après atteinte à la santé était de CHF 71'377.45. Un abattement de 5 % portait ce revenu à CHF 67'809.-, ce qui aboutissait à une perte de gain de 6.83 %, arrondie à 7 %.

g. Dans sa décision du 8 mai 2020, la CNA a retenu que l’assuré était capable d’exercer une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles à plein temps. Elle a repris son calcul d’invalidité, lequel n’ouvrait pas droit à une rente dès le 1er mai 2020. Une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 7 % serait versée à l’assuré.

h. Par opposition du 4 juin 2020, l’assuré a pour l’essentiel contesté la stabilisation de son état de santé et la capacité de travail complète dans une activité adaptée retenue par la CNA. Il a fait grief à cette dernière de ne pas avoir procédé à des investigations suffisantes au plan médical, invoquant notamment la possibilité d’un Complex Regional Pain Syndrom (CRPS). Le calcul de l’indemnité pour atteinte à l'intégrité était prématuré au vu de l’état de santé non stabilisé. L’assuré a précisé par courrier du 13 août 2020 qu’il concluait également à la reprise du versement des indemnités journalières.

i. Par décision du 10 novembre 2020, la CNA a rejeté l’opposition de l’assuré. Elle a retenu que selon les documents médicaux, son état de santé était stabilisé. L’existence d’un CRPS avait été qualifiée de juste possible et l’assuré n’en présentait pas les symptômes typiques. Aucune instruction supplémentaire n’était nécessaire sur ce plan. Quant aux troubles psychiques, ils n’étaient pas en lien de causalité adéquate avec l’accident. S’agissant de la capacité de travail dans une activité adaptée, rien ne justifiait de remettre en cause l’appréciation des médecins de la CNA. Enfin, l’assuré n’apportait aucun argument scientifique pour contester l’indemnité pour atteinte à l'intégrité, qui devait ainsi également être confirmée.

C. a. L’assuré a interjeté recours contre cette décision auprès de la chambre de céans le 11 décembre 2020. Il a conclu, sous suite de dépens, préalablement à l’octroi d’un délai supplémentaire et, sur le fond, à l’annulation de la décision, à la constatation que son état de santé n’était pas stabilisé et au versement des indemnités journalières et des frais de traitement, et si par impossible son état devait être considéré comme stabilisé, à l’octroi d’une rente entière et d’une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 20 %.

b. Par écriture du 18 janvier 2021, le recourant a fait savoir à la chambre de céans qu’il avait récemment consulté un neurologue s'agissant du possible CRPS, dont il attendait encore le rapport. Il a sollicité une prolongation de délai pour le produire. Il a repris les arguments développés à l’appui de son opposition.

c. La chambre de céans a déféré à cette requête et a imparti au recourant un délai au 12 février 2021 pour compléter son recours, avant de lui fixer un ultime délai au 15 mars 2021 à cet effet par courrier du 4 mars 2021.

d. Dans sa réponse du 12 mai 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours.

e. Par réplique du 1er juillet 2021, le recourant a conclu, sous suite de dépens, à l’annulation de la décision litigieuse, à ce qu’il soit constaté qu’il avait droit au versement d’une rente d’invalidité de 20 % dès le 1er mai 2020, à ce que l’intimée soit condamnée à lui verser une telle rente dès cette date, ce qu’il soit constaté que le taux d'indemnité pour atteinte à l'intégrité était de 14 % et à ce que l’intimée soit condamnée à lui verser une indemnité pour atteinte à l'intégrité de ce taux.

Il a produit un rapport établi par les EPI le 2 novembre 2020, lequel faisait notamment état de douleurs provoquées par l’utilisation d’un clavier ou d’une souris, d’un apprentissage difficile de l’informatique, dans laquelle le recourant débutait, et d’une mobilité des mains et des doigts très restreinte, conduisant à la cessation d’une activité d’assemblage après 10 minutes.

f. Dans sa duplique du 19 août 2021, l’intimée a admis qu’une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 14 % devait être accordée au recourant, sous réserve de l’indemnité de 7 % déjà versée, au vu d’une appréciation établie le 28 juillet 2021 par son médecin d’arrondissement, le docteur E______, spécialiste en chirurgie orthopédique, qu’elle a produite. Dite appréciation confirmait pour le surplus une capacité de travail entière du recourant dans une activité adaptée.

g. Le recourant s’est déterminé le 13 septembre 2021, persistant dans ses conclusions. Il est notamment revenu sur la détermination du degré d’invalidité de l’intimée, en se référant au calcul auquel avait procédé la chambre de céans dans son arrêt rendu dans la procédure l’opposant à l’OAI (ATAS/646/2021 du 22 juin 2021).

h. Par observations du 22 septembre 2021, l’intimée s’est également déterminée, indiquant maintenir intégralement les conclusions prises dans sa réponse.

i. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture au recourant.


 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Déposé dans les forme et délai prévus par la loi (art. 56ss LPGA), le recours est recevable.

On précisera dans ce cadre que si le recourant a pris certaines conclusions constatatoires, en principe irrecevables (cf. ATF 129 V 289 consid. 2.1), celles-ci n’ont pas de portée propre puisqu’elles ne sont que les prémisses des conclusions condamnatoires également formulées.

2.             La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Dès lors que le présent recours était pendant devant la chambre de céans à cette date, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA).

3.             Le litige porte sur le droit du recourant à des prestations de l’assurance-accidents, en particulier sur le point de savoir si son état de santé était stabilisé au 1er mai 2020, et dans l’affirmative sur son degré d’invalidité dès cette date.

En ce qui concerne le taux de l’indemnité pour atteinte à l'intégrité, dès lors que l’intimée a acquiescé en cours de procédure à son augmentation à un taux de 14 % eu égard au caractère bilatéral des atteintes aux poignets souligné par le Dr E______, il n’est plus litigieux.

4.              

4.1 L’assurance-accidents est en principe tenue d'allouer ses prestations en cas d'accident professionnel ou non professionnel en vertu de l’art. 6 al. 1 LAA. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique ou mentale (art. 4 LPGA).

4.2 Aux termes de l’art. 16 LAA, l’assuré totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite d’un accident a droit à une indemnité journalière (al. 1). Le droit à l’indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l’accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (al. 2). En vertu de l’art. 17 al. 1 LAA, l’indemnité journalière correspond, en cas d’incapacité totale de travail (art. 6 LPGA), à 80 % du gain assuré. Si l’incapacité de travail n’est que partielle, l’indemnité journalière est réduite en conséquence.

4.3 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10 % au moins par suite d'un accident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA). L'art. 8 LPGA précise qu’est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. Est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur un marché du travail équilibré dans son domaine d’activité, si cette diminution résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (art. 7 LPGA). Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA).

4.4 À teneur de l’art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu’il n’y a plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de l’assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente. La loi ne précise pas ce qu'il faut entendre par « une sensible amélioration de l'état de l'assuré ». Eu égard au fait que l'assurance-accident est avant tout destinée aux personnes exerçant une activité lucrative (cf. art. 1a et 4 LAA), ce critère se déterminera notamment en fonction de la diminution ou disparition escomptée de l'incapacité de travail liée à un accident. L'ajout du terme « sensible » par le législateur tend à spécifier qu'il doit s'agir d'une amélioration significative, un progrès négligeable étant insuffisant (ATF 134 V 109 consid. 4.3). Ainsi, ni la simple possibilité qu'un traitement médical donne des résultats positifs, ni l'avancée minime que l'on peut attendre d'une mesure thérapeutique ne confèrent à un assuré le droit de recevoir de tels soins (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 244/04 du 20 mai 2005 consid. 2). En matière de physiothérapie, le Tribunal fédéral a récemment précisé que le bénéfice que peut amener la physiothérapie ne fait pas obstacle à la clôture du cas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_39/2018 du 11 juillet 2018 et les références).

5.              

5.1 La responsabilité de l'assureur-accident s'étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle avec l'événement assuré (ATF 119 V 335 consid. 1).

Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. Il faut que d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, l'accident soit propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_628/2007 du 22 octobre 2008 consid. 5.1), au point que le dommage puisse encore équitablement être mis à la charge de l'assurance-accidents, eu égard aux objectifs poursuivis par la LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_336/2008 du 5 décembre 2008 consid. 3.1). La jurisprudence a développé sept critères permettant de retenir un lien de causalité adéquate entre un accident et une atteinte psychique additionnelle, dont le nombre qui doit être réalisé est fonction du degré de gravité de l’accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_729/2016 du 31 mars 2017 consid. 5.2 et 8C_98/2015 du 18 juin 2015 consid. 3.1)

6.             L'évaluation de l'invalidité par l'assurance-invalidité n'a pas de force contraignante pour l'assureur-accidents, qui n'a pas qualité pour recourir contre la décision de l’assurance-invalidité sur le droit à la rente ou sur le degré d'invalidité (ATF 131 V 362 consid. 2.2). Cela étant, la notion d'invalidité définie à l'art. 8 LPGA est en principe identique en matière d'assurance-accidents, d'assurance militaire et d'assurance-invalidité (ATF 126 V 288 consid. 2d ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 853/05 du 28 décembre 2006 consid. 4.1.1). En raison de cette uniformité, il convient d'éviter que pour une même atteinte à la santé, ces trois branches d’assurance n'aboutissent à des appréciations divergentes quant au taux d'invalidité. Cela n'a toutefois pas pour conséquence de les libérer de l'obligation de procéder de manière indépendante à l'évaluation de l'invalidité dans chaque cas. En aucune manière un assureur ne peut se contenter de reprendre simplement et sans plus ample examen le taux d'invalidité fixé par l'autre assureur, car un effet obligatoire aussi étendu ne se justifierait pas. Cependant, l'évaluation de l'invalidité par l'un de ces assureurs ne peut être effectuée en faisant totalement abstraction de la décision rendue par l'autre. À tout le moins, une évaluation entérinée par une décision entrée en force ne peut pas rester simplement ignorée. Toutefois, il convient de s'écarter d'une telle évaluation lorsqu'elle repose sur une erreur de droit ou sur une appréciation insoutenable ou encore lorsqu'elle résulte d'une simple transaction conclue avec l'assuré. À ces motifs de divergence, il faut ajouter des mesures d'instruction extrêmement limitées et superficielles, ainsi qu'une évaluation pas du tout convaincante ou entachée d'inobjectivité. Enfin, un assureur social ne saurait être contraint, par le biais des règles de coordination de l'évaluation de l'invalidité, de répondre de risques qu'il n'assure pas, notamment, pour un assureur-accidents, une invalidité d'origine maladive non professionnelle (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 323/04 du 30 août 2005 consid. 4.1). Une appréciation divergente ne peut intervenir qu'à titre exceptionnel et seulement s'il existe des motifs suffisants. À cet égard, il ne suffit donc pas qu'une appréciation divergente soit soutenable, voire même équivalente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 50/04 du 30 novembre 2004 consid. 4).

7.              

7.1 Pour pouvoir examiner le droit aux prestations, l'administration ou l'instance de recours a besoin de documents que le médecin ou d'autres spécialistes doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4; ATF 115 V 133 consid. 2).

7.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3; ATF 122 V 157 consid. 1c). Une expertise médicale établie sur la base d’un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d’appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l’assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d).

7.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

7.4 S'agissant de la valeur probante des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier. Ainsi, la jurisprudence accorde plus de poids aux constatations faites par un spécialiste qu'à l'appréciation de l'incapacité de travail par le médecin de famille (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références). Au surplus, on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou un juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_405/2008 du 29 septembre 2008 consid. 3.2).

8.              

8.1 L’art. 16 LPGA prévoit que, pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré. Il s'agit là de la méthode dite de comparaison des revenus, qu'il convient d'appliquer aux assurés exerçant une activité lucrative (ATF 128 V 29 consid. 1). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient en principe de se placer au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 128 V 174 consid. 4a).

8.2 Le revenu sans invalidité se détermine pour sa part en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce que l’intéressé aurait effectivement pu réaliser au moment déterminant s’il était en bonne santé (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à sa santé, en tenant compte de l’évolution des salaires (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 428/06 du 25 mai 2007 consid. 7.3.3.1). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant des ESS éditées par l'Office fédéral de la statistique. Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3).

8.3 Pour déterminer le revenu d'invalide de l'assuré, il faut en l'absence d'un revenu effectivement réalisé se référer aux données salariales, telles qu'elles résultent des ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b). L’application des ESS et en particulier du niveau de compétence est une question de droit (ATF 143 V 295 consid. 2.4). Depuis 2012, l’ESS prévoit pour recenser les revenus quatre niveaux de compétence : le niveau de compétence 4, qui comprend les activités avec résolution de problèmes complexes et prise de décision, le niveau de compétence 3, c’est-à-dire des activités pratiques complexes, le niveau de compétence 2 correspondant à des activités pratiques telles que vente / soins / traitement de données et administration / utilisation de machines, et le niveau de compétence 1, qui comprend des activités simples (L’Enquête suisse sur la structure des salaires 2012, Neuchâtel 2015, p. 18). S’agissant du niveau de compétence, le Tribunal fédéral a considéré qu’un assuré au bénéfice d'un diplôme d'aide-comptable et ayant accompli un stage pratique auprès d’un service de comptabilité devait se voir imputer le niveau de compétence 2 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_610/2017 du 3 avril 2018 consid. 4.3). Il a précisé que depuis 2012, l'accent est mis sur le type de tâches que l'assuré est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications, mais pas sur les qualifications en elles-mêmes. Il a ainsi admis qu’un assuré ayant obtenu un reclassement dans la profession de comptable justifiait le choix du niveau 2 de compétence, dès lors qu’il pouvait mettre en valeur ses connaissances nouvellement acquises même s’il n’avait pas encore d’expérience dans le domaine (arrêt du Tribunal fédéral 9C_901/2017 du 28 mai 2018 consid. 3.3). Notre Haute Cour a également relevé qu’un niveau 3 (soit l’actuel niveau 2) pourrait entrer en considération pour un assuré ayant travaillé plusieurs années en tant que chauffeur de taxi indépendant, et qui disposait à ce titre de connaissances commerciales et comptables (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 136/05 du 7 septembre 2005 consid. 5.2).

8.4 De manière générale, la jurisprudence admet pour déterminer le revenu d’invalide la référence à la valeur statistique médiane, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1).

8.5 Il y a lieu de procéder à une réduction des salaires statistiques lorsqu'il résulte de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité ou catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation) que le revenu que pourrait percevoir l'assuré en mettant en valeur sa capacité résiduelle de travail est inférieur à la moyenne. Un abattement global maximal de 25 % permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b).

8.6 On peut rappeler les principes suivants s’agissant des différents facteurs devant être pris en considération dans l’établissement de l’abattement. S’agissant du critère des années de service, il a pour but de tenir compte du fait qu’une personne qui débute dans une entreprise ne réalise en général pas un salaire moyen (Ulrich MEYER/ Marc REICHMUTH, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum IVG, 3ème éd. 2014, n. 108 ad art. 28a LAI). À titre d’exemple, le Tribunal fédéral a retenu que ce facteur justifiait une déduction de 5 % dans le cas d’une assurée âgée de 46 ans (arrêt du Tribunal fédéral 9C_160/2014 du 30 juin 2014 consid. 5.3). Toutefois, les années de service ne constituent pas le seul critère de fixation du salaire dans une nouvelle profession, l’expérience acquise lors des précédentes activités professionnelles a une influence tout aussi importante. En outre, l’incidence des années de service est moins élevée lorsque le profil d’exigences est bas. Ce paramètre n’est pas pertinent s’agissant des activités de niveau 1 (ou 4 avant 2012) de l’ESS (arrêt du Tribunal fédéral 9C_874/2014 du 2 septembre 2015 consid. 3.3.2 et les références). En ce qui concerne les limitations fonctionnelles, il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d'une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2013 du 22 août 2013 consid. 5.3). S’agissant des limitations fonctionnelles aux membres supérieurs, à titre d’exemple, le Tribunal fédéral a confirmé un abattement de 15 % en raison de limitations consistant à éviter les mouvements répétitifs ou d'effort du membre supérieur droit (arrêt du Tribunal fédéral 9C 839/2017 du 24 avril 2018 consid. 6.3).

9.              

9.1 Savoir s'il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières liées au handicap de la personne ou d'autres facteurs est une question de droit. L'étendue de l'abattement du salaire statistique dans un cas concret constitue en revanche une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_633/2016 du 28 décembre 2016 consid. 5.2). Il y a excès ou abus du pouvoir d’appréciation si l'autorité cantonale a retenu des critères inappropriés, n'a pas tenu compte de circonstances pertinentes, n'a pas procédé à un examen complet des circonstances pertinentes ou n'a pas usé de critères objectifs (ATF 130 III 176 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_847/2018 du 2 avril 2019 consid. 6.2.3).

9.2 Les tribunaux cantonaux des assurances au sens de l'art. 57 LPGA, qui constituent l'autorité de recours ordinaire dans la très grande majorité des cas relevant des assurances sociales, doivent disposer d'un pouvoir d'examen identique à celui du Tribunal administratif fédéral, et ce notamment au regard du principe constitutionnel de l'égalité de traitement de tous les assurés. Cela s'impose d'autant plus que le domaine des assurances sociales comprend de nombreuses situations – dont l’abattement sur le revenu d'invalide constitue un exemple flagrant – dans lesquelles l'administration dispose d'une marge d'appréciation importante, dont l'application doit pouvoir être contrôlée par l'autorité de recours de première instance (ATF 137 V 71 consid. 5.2). Contrairement au pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, celui de l'autorité judiciaire de première instance n'est ainsi pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative (Angemessenheitskontrolle). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité a adoptée dans un cas concret dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. À cet égard, le juge des assurances sociales ne peut sans motif pertinent substituer sa propre appréciation à celle de l'administration. Il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (arrêts du Tribunal fédéral 9C_690/2016 du 27 avril 2017 consid. 3.2 et 9C_855/2014 du 7 août 2015 consid. 4.2 et 4.3). Ainsi, lorsque la juridiction cantonale examine l'usage qu'a fait l'administration de son pouvoir d'appréciation pour fixer l'étendue de l'abattement sur le revenu d'invalide, elle doit porter son attention sur les différentes solutions qui s'offraient à l’assureur et voir si un abattement plus ou moins élevé serait mieux approprié et s'imposerait pour un motif pertinent, sans toutefois substituer sa propre appréciation à celle de l'administration (arrêt du Tribunal fédéral 9C_637/2014 du 6 mai 2015 consid. 4.2).

10.         Dans le cas d’espèce, le recourant conteste en premier lieu la stabilisation de son état de santé.

Madame F______, physiothérapeute du recourant, a relevé dans son rapport du 11 juin 2019 à la CNA le manque d’efficacité du traitement de physiothérapie sur la problématique centrale du recourant, soit sur ses douleurs. Les médecins de la Consultation de la douleur des HUG, que le médecin a consultés le 7 mai 2019, avaient certes préconisé, outre certaines adaptations médicamenteuses, une poursuite de la physiothérapie active. Ils ont cependant relevé dans leur rapport du 11 septembre 2019 que le recourant ne décrivait pas de changement dans les douleurs et considérait que les séances de physiothérapie étaient sans effet, et ont conclu que ces séances pourraient effectivement être espacées. Dans son appréciation du 8 novembre 2019, le Dr C______ a retenu que le recourant souhaitait reprendre la physiothérapie, mais que son intérêt ne semblait pas très évident. Deux ans après l'événement, les fractures étaient bien consolidées, et on ne constatait pas de signe d'arthrose radio-carpienne évident sur les clichés. Ce médecin d’arrondissement n’a alors pas proposé d’autre traitement. La physiothérapeute du recourant a certes établi un certificat le 18 février 2020, recommandant la poursuite de la physiothérapie afin de conserver les amplitudes articulaires et la souplesse tissulaire. Elle y a cependant également relevé l’absence d’évolution significative, et des progrès extrêmement limités à cause de l'aspect algique qui ne permettait pas de renforcement. Le docteur G______, médecin traitant du recourant, a également souligné que ce dernier souhaitait poursuivre la physiothérapie dans son rapport du 14 octobre 2019, tout en mentionnant un statu quo, soit un état stationnaire. Si ce médecin a réitéré le besoin de poursuivre la physiothérapie dans son courrier du 5 février 2020 à l’OAI, il y a cependant indiqué qu’il n’avait pas constaté de progrès significatif depuis 2019. On relèvera en outre que dans un courrier du 11 décembre 2018 au Dr G______, la doctoresse H______, médecin au Service de chirurgie de la main des HUG, a indiqué qu’aucun traitement chirurgical n’était proposé au recourant. Les médecins de la CRR avaient quant à eux pronostiqué une stabilisation dans les six mois après le séjour, ce qui correspond aux constatations du Dr C______.

Au vu des éléments qui précèdent, force est d’admettre qu’aucun traitement permettant d’escompter une amélioration notable de l’état de santé du recourant n’était envisagé au 30 avril 2020, et on distingue en particulier mal les bénéfices attendus de la physiothérapie au vu des indications du Dr G______ et de Mme F______ quant à l’absence de progrès. De plus, selon la jurisprudence citée, même d’éventuels progrès amenés par la physiothérapie ne sont pas suffisants pour considérer que l’état de santé n’est pas stabilisé. C’est ainsi à juste titre que l’intimée a mis un terme au versement des indemnités journalières et à la prise en charge du traitement médical à cette date.

11.         Il y a ainsi lieu de déterminer le degré d’invalidité du recourant au 1er mai 2020, étant précisé que les médecins s’accordent à reconnaître que ce dernier ne peut définitivement plus exercer son activité de monteur-électricien.

11.1 L’intimée a considéré que le recourant disposait d’une capacité de travail complète dans une activité adaptée à cette date. Elle se fonde sur ce point sur l’avis du Dr C______ du 8 novembre 2019. Ce médecin a fait réaliser une radiographie pour compléter son examen, laquelle a révélé au poignet droit une absence de solution de continuité, et un aspect traduisant une consolidation du foyer fracturaire avec néanmoins un léger index radio-cubital positif. À gauche, le foyer fracturaire était consolidé. Dans son appréciation, le Dr C______ a résumé le dossier médical du recourant, avant de rapporter que ce dernier se plaignait de douleurs des deux poignets, particulièrement lors de mouvements brusques. La mobilisation d'une charge de 5 kg déclenchait des douleurs. Il n’avait pas repris la conduite automobile. Lors du status, le médecin a noté l’absence de signe clinique en faveur d'une algodystrophie. Les diagnostics étaient ceux de fractures des deux poignets et de possible Complex Regional Pain Syndrom (CRPS) du poignet gauche, avec raideur. L’évolution n’était pas favorable, avec une aggravation de la mobilité par rapport au dernier examen, dans un contexte de crainte à la mobilisation. Au plan professionnel, l'ancienne activité de monteur-électricien n'était plus exigible, compte tenu des douleurs des deux poignets. Dans une activité professionnelle réalisée indifféremment en position assise ou debout, avec port ponctuel de charges limitées à 2 kg sur les deux poignets, en ayant la possibilité de conserver des bracelets de soutien, on pouvait s'attendre à la reprise d'une activité professionnelle à plein temps sans baisse de rendement.

11.2 Le Dr C______ a émis ses conclusions au terme d’un examen clinique détaillé, en ayant pris connaissance de l’historique médical du recourant et de ses plaintes et après avoir complété son status par des examens radiologiques. Force est ainsi de constater que son rapport contient tous les éléments nécessaires au plan formel pour se voir reconnaître pleine valeur probante. En outre, les autres rapports des médecins ne permettent pas de s’écarter de l’exigibilité établie par le médecin d’arrondissement. En effet, les docteurs I______ et J______, médecins auprès de la CRR, où le recourant a séjourné du 12 juin au 11 juillet 2018, avaient dans leur rapport du 2 août 2018 émis un pronostic de réinsertion favorable dans une activité adaptée. Quant aux médecins de la Consultation de la douleur des HUG, ils ne se sont pas prononcés sur cet aspect. Le 11 décembre 2019, le Dr G______, rapportant des douleurs et une diminution fonctionnelle des mains, a indiqué que le recourant ne pourrait plus travailler en qualité d’électricien, ce qui n’est pas contesté. Ce médecin traitant a certes qualifié le pronostic de sombre du point de vue du travail dans son rapport du 14 octobre 2019, mais il ne fait pas état de diagnostics que le médecin d’arrondissement aurait ignorés, et cette indication est de plus insuffisamment motivée pour mettre en doute l’évaluation de ce dernier. Le Dr E______ a également confirmé l’exigibilité définie par le Dr C______.

Le recourant fait en outre valoir que le possible CRPS évoqué par le Dr C______ dans sa première appréciation du 23 avril 2018 n’a pas été investigué. Sur ce point, on rappelle que cette atteinte, également connue sous les noms d’algodystrophie ou de maladie de Sudeck (arrêt du Tribunal fédéral 8C_528/2016 du 31 octobre 2016 consid. 4.2), y a été qualifiée de simplement possible. En outre, l’évocation de cette atteinte paraît en contradiction avec le fait que le médecin d’arrondissement a expressément exclu des signes d’algodystrophie lors de son examen de novembre 2019, à l’instar des médecins de la CRR. Ce diagnostic n’est en outre retenu par aucun autre médecin, en particulier ni par le Dr G______, ni par les médecins de la Consultation de la douleur. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de procéder à des investigations supplémentaires pour exclure formellement une telle atteinte. Dans le cadre de la procédure devant la chambre de céans, le recourant a du reste sollicité plusieurs délais afin d’obtenir l’avis d’un spécialiste quant à ce diagnostic. Il a cependant précisé dans sa réplique du 1er juillet 2021 que le neurologue qu’il avait consulté avait uniquement réalisé un examen neuromyographique pour exclure un syndrome du tunnel carpien, sans investiguer un possible CRPS. Bien qu’on ne dispose pas du rapport de ce médecin, on peut raisonnablement admettre que s’il avait constaté des signes suggérant une telle pathologie, il aurait réalisé les examens nécessaires pour confirmer ou infirmer son existence, a fortiori dès lors que le recourant l’avait vu à cette fin. Par surabondance, on ajoutera que même si un CRPS devait être retenu eu égard à son évocation par le Dr C______ en avril 2018, le lien de causalité avec l’accident d’octobre 2017 ne serait pas nécessairement établi. En effet, selon la littérature médicale, le délai maximum entre un facteur déclenchant et la survenance d’un CRPS permettant d’attribuer la responsabilité à ce facteur est, selon les études, de 3 mois ou de 6 à 14 semaines. Lorsque ce délai dépasse 4 mois, le lien de causalité avec le traumatisme doit être sérieusement mis en doute (David IONTA, Le syndrome douloureux régional complexe [SDRC] et causalité en LAA in Jusletter du 18 octobre 2021, pp. 5-6 et les références médicales citées). Or, en l’espèce, aucun médecin n’a décrit de symptôme d’une telle atteinte avant l’examen du Dr C______ en avril 2018, plus de six mois après l’accident.

11.3 S’agissant de la détermination de l’activité exigible du recourant, ses limitations fonctionnelles ne sont pas telles qu’il serait entièrement privé de l’usage de ses mains. Ni les médecins de la CRR, ni le Dr C______ n’ont proscrit totalement les activités exigeant des mouvements des mains ou des poignets. Les premiers avaient retenu à titre de limitations fonctionnelles provisoires, avant que la situation ne se stabilise, l’exclusion du port de charges de 5 kg, des mouvements nécessitant de la force des mains et des poignets, et des mouvements répétés des poignets. Il ressort également a contrario du certificat du 18 février 2020 de la physiothérapeute que les gestes des poignets sont possibles dans une certaine mesure, puisqu’elle évoque la possibilité d’utiliser un clavier ou une souris d’ordinateur - pendant une période certes limitée à 30 minutes d’affilée. On notera qu’elle restreint le port de charges à 2 kg, ce qui correspond à la limitation admise par le Dr C______. Enfin, le rapport des EPI – qui en toute hypothèse ne saurait primer sur les conclusions des médecins conformément à la jurisprudence – fait état de douleurs à l’assemblage et lors d’activités informatiques prolongées, ce qui démontre également que le recourant est encore en mesure de se servir de ses mains et de ses poignets. Du reste, selon la jurisprudence, il n’est pas irréaliste de retenir l’exigibilité d’une activité adaptée, à l’aune d’un marché équilibré du travail, dans le cas d’un assuré ayant subi des fractures des deux poignets entraînant des limitations fonctionnelles liées aux travaux exigeant de la force et l'utilisation répétitive de ces deux articulations (arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017).

11.4 Au plan psychique, le Dr D______ a indiqué dans son rapport du 11 décembre 2019 que le recourant décrivait une évolution plus favorable sur le plan psychique que sur le plan somatique. Il voyait un psychiatre et une psychologue depuis environ dix mois. Un psychotrope lui avait été prescrit au début, qu'il avait arrêté depuis quatre mois car il estimait aller mieux. Ses plaintes spontanées étaient avant tout les douleurs du poignet. Son moral avait été très bas quelque temps auparavant, car il avait du mal à accepter et se voyait définitivement handicapé. Cependant, grâce notamment au traitement psychiatrique et à la médication, il avait pu commencer à faire un deuil et à essayer de vivre avec son handicap. Il conservait quand même quelques inquiétudes quant à son avenir, notamment sur les plans professionnel et financier. Alors qu’auparavant, il avait tendance à rester cloitré chez lui, à s’isoler, il était redevenu plus actif, sortait et avait recommencé à se socialiser régulièrement. Il décrivait un moral bon la plupart du temps. Il n’exprimait aucune culpabilité et ne signalait pas de fatigue particulière. Il signalait des oublis fréquents, mais pas vraiment de problème de concentration. Le sommeil était bon. Les ruminations concernant l'avenir n’étaient pas envahissantes, ni quotidiennes. Elles étaient en phase avec le contexte existentiel particulier et pouvaient être considérées comme normales. À l’issue de son examen, le Dr D______ n’a retenu aucun diagnostic psychique. La capacité de travail du recourant était totale au plan psychique. Il a précisé qu'il avait noté lors de l’examen une exclusion/non utilisation quasiment complète des deux membres supérieurs, ce qui pourrait être le signe d’un processus d’invalidation.

11.5 Le rapport du Dr D______ doit également se voir reconnaître une pleine valeur probante, ce médecin l’ayant rédigé après avoir pris connaissance du dossier, en décrivant l’anamnèse et les doléances du recourant, et en décrivant ses constatations objectives. En outre, ses conclusions sont claires. Le rapport du 10 février 2020 du docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et médecin traitant du recourant, ne suffit pas à les remettre en cause. En effet, ce dernier y a diagnostiqué un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F 32.2), signalant que le recourant restait handicapé des deux mains, avec des douleurs persistantes, et qu’il se plaignait d’insomnies avec des réveils nocturnes en raison des douleurs. Selon le psychiatre, qui préconisait un stage d’observation, le recourant n’avait plus de ressources psycho-cognitives ni de capacités d’adaptation pour se confronter aux exigences du monde professionnel. Ce rapport n’emporte pas la conviction, dès lors que les plaintes du recourant qui y sont relatées semblent essentiellement relever du registre somatique, de sorte qu’on comprend mal sur quels éléments le diagnostic d’épisode dépressif sévère se fonde. Il paraît en outre contradictoire, en tant qu’il nie toute ressource et possibilité d’adaptation du recourant, en recommandant simultanément un stage d’observation.

Ainsi, au vu des conclusions du Dr D______ quant à l’absence d’atteinte psychique incapacitante, l’examen d’un lien de causalité naturelle et adéquate entre l’accident et l’état de santé psychique du recourant s’avère inutile.

12.         L’intimée a procédé au calcul d’invalidité suivant dans sa note du 7 mai 2020. Le gain de valide a été fixé à CHF 72'780.- (soit CHF 32.30 par heure, multiplié par 40 heures par semaine, multiplié par 52 semaines, plus un 13ème salaire). Le gain avec invalidité était fondé sur l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2018, dans un niveau de compétence 2, soit un salaire annuel de CHF 67'788.-. Adapté à la durée normale de travail de 41.7 heures, le revenu après atteinte était de CHF 70'688.99, et de CHF 71'377.45 une fois indexé à 2020. Un abattement de 5 % portait ce revenu à CHF 67'809.-, ce qui aboutissait à une perte de gain de 6.83 %, arrondie à 7 %.

S’agissant du gain avant invalidité, il correspond aux indications données par l’ancien employeur lors d’un entretien téléphonique du 26 février 2020, et le recourant a admis le montant pris en compte à ce titre dans sa réplique du 1er juillet 2021.

En ce qui concerne le revenu après invalidité, le recourant s’en prend essentiellement au niveau de compétence 2 retenu par l’intimée, et au degré d’abattement. Il fait valoir qu’il ne dispose d’aucune autre formation que celle de monteur-électricien, que ses acquis scolaires sont très faibles et qu’il maîtrise mal le français. Le niveau de compétence 1 des statistiques ESS s'applique dès lors. Selon lui, si l’intimée prend en compte un niveau de compétence 2, elle doit procéder à un abattement en raison de son manque d'expérience professionnelle dans les activités correspondantes. Le salaire après invalidité doit faire l’objet d’un abattement également en raison de ses importantes limitations fonctionnelles et du fait qu’il n’a travaillé qu’en tant que monteur-électricien depuis le début de sa vie, et il faut donc tenir compte des années de service. Ces critères doivent conduire à un abattement d'à tout le moins 15 %.

L’intimée fait quant à elle valoir que les connaissances linguistiques sont un facteur étranger à l’invalidité. Le recourant est en Suisse depuis 30 ans et a travaillé pour différentes entreprises, de sorte que le niveau de compétence 2 s’applique. Elle affirme que ce niveau est selon la jurisprudence applicable aux personnes ayant accompli des études ou une formation équivalente, pour autant qu'elles disposent des connaissances nécessaires de la matière et de la profession considérée ou des connaissances professionnelles spécialisées qui pourraient leur être utiles dans d'autres secteurs professionnels, ainsi qu’aux assurés au bénéfice d'un diplôme de commerce ou d'une maturité ou à un cadre inférieur. L’intimée souligne que l’arrêt rendu par la chambre de céans dans la cause opposant le recourant à l’OAI n’a pas d’effet contraignant à son encontre. La différence de 10 % dans les abattements respectivement retenus par la chambre de céans et l’intimée ne choque d’ailleurs pas.

On relèvera que la chambre de céans a statué par arrêt du 22 juin 2021 (ATAS/646/2021) dans la procédure opposant le recourant à l’OAI sur son droit aux prestations de l’assurance-invalidité pour les seules atteintes consécutives à son accident. Dans le cadre de la présente procédure, l’intimée a été en mesure de prendre connaissance des considérants de cet arrêt, qu’elle a commentés dans ses observations du 22 septembre 2021.

La chambre de céans y a établi le degré d’invalidité à 20.11 %, tenant compte d’un revenu sans invalidité de CHF 72'753.- en 2019, conformément aux indications de l’employeur, d’un revenu après invalidité fondé sur le revenu statistique tiré d’activités simples et répétitives pour un homme (ESS 2018, TA1_tirage_skill_level, niveau 1), et d’un abattement de 15 %, étant précisé que l’OAI n’a pour sa part admis aucune réduction sur le revenu statistique dans la décision querellée.

Certes, la détermination du degré d’invalidité par l’assurance-invalidité n’a pas nécessairement d’effet contraignant pour l’assureur-accidents, a fortiori lorsque la décision (judiciaire) est entrée en force postérieurement à sa décision sur opposition. Cela étant, comme l’a souligné la jurisprudence, lorsque l’assureur-accidents répond des mêmes atteintes que l’assurance-invalidité, comme c’est le cas ici, une évaluation divergente doit reposer sur des motifs suffisants. De tels motifs n’existent pas en l’espèce.

En ce qui concerne le niveau de compétence 2 que l’intimée a appliqué, eu égard au fait que le recourant est titulaire d’un CFC en qualité de monteur-électricien, sa motivation ne convainc pas. S’il est vrai que le Tribunal fédéral a admis un tel niveau de compétence lorsque l’assuré dispose de certaines qualifications ou compétences qui peuvent être transposées dans d’autres domaines, on ne peut retenir que tel soit le cas du recourant. Ses qualifications sont en effet spécifiques à son métier de monteur-électricien, qu’il ne peut plus exercer. Il n’est pas établi qu’il aurait acquis dans l’exercice de cette profession des compétences transversales, étant souligné qu’il a exclusivement été occupé comme employé et n’a ainsi pas pu, par exemple, développer des connaissances en matière administrative ou comptable qu’il pourrait mettre à profit dans un autre secteur d’activité. Le rapport des EPI souligne en outre que le recourant débute dans l’informatique. L’intimée ne donne d’ailleurs aucun exemple d’activités de niveau de compétence 2 auxquelles la formation du recourant permettrait ou à tout le moins faciliterait l’accès. Il y a ainsi lieu de donner raison au recourant et de retenir à titre de revenu d’invalide le salaire statistique tiré d’activités simples et répétitives, soit le revenu tiré de l’ESS 2018 (TA1_tirage_skill_level, niveau 1), généralement applicable selon la jurisprudence. Ce revenu était de CHF 5'417.- par mois et de CHF 65'004.- par an en 2018. Compte tenu de l’indexation et de l’adaptation à la durée normale de travail de 41.7 heures, il est de CHF 68'448.- en 2020. En ce qui concerne l’abattement, il n’y a pas non plus lieu de revenir sur celui retenu par la chambre de céans dans la procédure face à l’OAI, soit 15 %. Au vu des limitations fonctionnelles significatives du recourant et de la jurisprudence, cette réduction reflète en effet sa situation de manière plus adéquate que l’abattement de 5 % consenti par l’intimée. Cela porte le revenu après atteinte à la santé à CHF 58'179.10. La comparaison au gain sans invalidité de CHF 72'780.- aboutit à un degré d’invalidité de 20.06 %, qui sera arrondi à 20 % selon les règles mathématiques (ATF 130 V 121 consid. 3.2).

Ce taux ouvre le droit à une rente de 20 % dès le 1er mai 2020.

13.         S’agissant enfin de l’indemnité pour atteinte à l'intégrité, l’intimée s’est comme on l’a vu rangée à l’appréciation du Dr E______, qui l’a estimée à 14 % en tenant compte du fait que les deux poignets du recourant étaient atteints.

La chambre de céans lui en donnera ainsi acte.

14.         Le recours est admis.

Le recourant a droit à des dépens, qui seront fixés à CHF 2'500.- (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision de l’intimée du 10 novembre 2020.

4.        Dit que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 20 % dès le 1er mai 2020.

5.        Prend acte de l’accord de l’intimée de verser au recourant une indemnité pour atteinte à l'intégrité globale de 14 %, sous déduction du montant déjà versé à ce titre.

6.        L’y condamne en tant que de besoin.

7.        Condamne l’intimée à verser au recourant une indemnité de dépens de CHF 2'500.-.

8.        Dit que la procédure est gratuite.

9.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le