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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1518/2003

ATAS/169/2005 du 01.03.2005 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1518/2003 ATAS/169/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

1ère chambre

du 1er mars 2005

 

En la cause

Monsieur B________, domicilié à Genève, mais comparant par l’association FORUM SANTE en les bureaux de laquelle il élit domicile

recourant

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L’ASSURANCE-INVALIDITE, sis rue de Lyon 97 à Genève

intimé

 


EN FAIT

Monsieur B________, né en 1952, égyptien domicilié à Genève, marié et père de deux enfants, a travaillé à plein temps (45 heures par semaine) en tant qu’agent de sécurité auprès de l’entreprise X________ SA à Genève du 1er juillet 1986 au 2 octobre 1994. A ce titre, il percevait un salaire annuel de 62'739 fr. en 1994.

Du 14 au 19 septembre 1994, puis dès le 3 octobre 1994, l’assuré a été en incapacité de travailler à 100 % en raison d’importantes migraines à répétitions l’empêchant d’assumer son emploi d’agent de sécurité. Il a consulté la doctoresse S________, spécialiste en neurologie ainsi que le docteur T________, spécialiste en médecine interne. Sur mandat de la première, le docteur U________ a effectué une imagerie par résonance magnétique (IRM) cervicale et cérébrale le 14 septembre 1994 et a conclu à un examen cérébral dans les limites normales ainsi qu’une discrète protusion discale sans phénomène compressif au niveau C3-C4, C5-C6 et C6-C7. Suite à une nouvelle IRM lombaire du 13 juillet 1995, ce même praticien a diagnostiqué une hernie discale postérieure para-médiane gauche au niveau L3-L4.

Le 14 février 1996, il a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité auprès de l’Office cantonal de l’assurance-invalidité de Genève (ci-après l’OCAI) en sollicitant une orientation professionnelle ainsi qu’un reclassement dans une nouvelle profession.

Le 28 mai 1996, le docteur T________ a rédigé un rapport à l’attention de l’OCAI dans lequel il a diagnostiqué un diabète non insulinodépendant de type II n’entraînant aucune incapacité de travail.

Le 15 août 1996, la doctoresse S________ a également rédigé un rapport à l’attention de l’OCAI en décrivant l’état de santé de l’assuré comme stationnaire, celui-ci étant en incapacité totale de travailler depuis septembre 1994. Elle a posé les diagnostics de crises céphalalgiques de type Cluster Headache, de céphalées de tension, de diabète non insulinodépendant et de lombosciatalgies gauches sur hernie discale postérieure paramédiane gauche L3-L4 non opérée. L’assuré présentait trois à quatre épisodes par mois, fréquemment nocturnes, de crises céphalalgiques qu’ils coupait par des injections de Sumatripan en quelques minutes. L’entreprise de sécurité qui l’employait auparavant avait refusé sa reprise de travail dans la mesure où il y avait un risque occasionnel de devoir s’absenter de la place de sécurité afin d’effectuer une injection en cas de crise. L’assuré ne pouvait en outre pas envisager un travail de force en raison du syndrome lombosciatalgique apparu en juillet 1995. Le médecin traitant a encore relevé que son patient souffrait d’un état anxiodépressif lié aux troubles professionnels, ce qui entraînait des difficultés familiales et financières et qu’il s’était plaint de douleurs sous les talons à la marche.

Le 27 février 1998, l’assuré a été auditionné par la division de réadaptation professionnelle de l’OCAI. Il a expliqué qu’il avait perdu tout espoir de trouver un emploi et a relevé qu’il refusait de poursuivre ses recherches. Il a exposé qu’il n’était pas en mesure de travailler ni debout ou en marchant pendant plus de trente minutes, ni assis pendant plus de vingt minutes, qu’il n’était pas capable de porter des charges ni de s’exprimer par écrit en français et que, en raison de ses migraines, il devait s’arrêter de travailler pendant une heure entre 9 et 14 fois par mois pour se faire des injections. Il a également fait état de problèmes aux hanches et aux pieds. Il a ensuite relevé qu’il était prêt à accepter un travail tenant compte de toutes ses limitations, pour autant qu’il lui rapporte au moins 65'000 fr. par année. Suite à ces déclarations contredisant le rapport médical rédigé par son médecin traitant et du fait de l’ancienneté des pièces figurant au dossier, la division de réadaptation professionnelle de l’OCAI a préconisé d’ordonner une expertise dans un centre d’observation médical de l’assurance-invalidité (ci-après COMAI).

Le 14 décembre 1998, les docteurs V________, W________, G________ et H________, experts de la policlinique médicale universitaire de Lausanne agissant comme COMAI, ont rédigé un rapport à l’attention de l’OCAI. Après avoir pris connaissance du dossier de l’assuré, l’avoir examiné le 16 septembre 1998 et l’avoir soumis à un consilium de psychiatrie le même jour, puis à un consilium de rhumatologie le 24 septembre 1998, ils ont diagnostiqué des crises céphalalgiques de type Cluster-headache, des céphalées tensionnelles, des lombosciatalgies droites non déficitaires sur hernie discale postérieure paramédiane gauche au niveau L3-L4, des nodules plantaires sur maladie de Dupuytren, un diabète de type II non insulino-requérant ainsi que des troubles de l’adaptation avec humeur dépressive. Les experts ont estimé que la capacité de travail raisonnablement exigible dans l’ancienne activité de l’assuré était de 80 %, compte tenu de l’atteinte à la santé du point de vue psychiatrique de 20 %. Dans le dernier emploi exercé, à savoir agent de sécurité, les lombosciatalgies ne constituaient pas une incapacité significative, ce genre de travail étant bien adapté aux limitations rencontrées. En ce qui concernait les céphalalgies, la seule limitation semblait consister en la nécessité de pouvoir s’absenter occasionnellement pendant quelques minutes et, correctement gérée, une telle limitation devrait pouvoir être négociée avec l’employeur. L’état de santé était dès lors compatible avec l’activité d’agent de sécurité, en répondant aux limitations fonctionnelles (éviter les stations debout ou assises prolongées), pour autant que les absences occasionnelles de quelques minutes (pour effectuer les injections en cas de migraines) soient négociables. On pouvait raisonnablement conclure que la capacité de travail avait été au moins de cet ordre au début de l’atteinte à la santé en 1994. Les experts ont par ailleurs relevé qu’une amélioration de l’atteinte psychique pouvait être espérée par une prise en charge psychothérapeutique, pour autant que l’assuré soit motivé pour une telle approche.

Le 4 février 1999, la doctoresse S________ a rectifié quelques imprécisions constatées dans le rapport COMAI. Ainsi, elle a notamment relevé que, concernant les céphalalgies et le fait que la limitation due à celles-ci pouvait être négociée avec l’employeur, elle avait elle-même effectué la démarche, malheureusement en vain, l’employeur ayant toujours refusé les absences occasionnelles de quelques minutes. Elle a expliqué qu’il semblait que la fonction d’agent de sécurité ne permettait aucun moment d’absence.

Le 23 février 1999, le docteur I________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique a rédigé un certificat médical dans lequel il a diagnostiqué une migraine importante avec crises rapprochées, une maladie de Dupuytren des deux mains, une maladie de Lederhose des deux pieds ainsi qu’un affaissement de la voûte plantaire. Il a expliqué qu’une reprise de travail était possible dans un travail se faisant en position assise et debout alternée avec des petits déplacements mais sans port de charge.

Le 9 novembre 1999, l’assuré a consulté le docteur J________, spécialiste en chirurgie de la main, lequel a confirmé le diagnostic de maladie de Dupuytren bilatérale à prédominance gauche tout en soupçonnant un syndrome du tunnel carpien bilatéral, puis a posé le diagnostic de neuropathie ulnaire au coude droit.

Le 2 décembre 1999, le docteur MYERS, neurologue, a également examiné l’assuré et a retenu une discrète atteinte sensitivo-motrice du nerf médian au niveau du tunnel carpien des deux côtés prédominant légèrement à gauche. Il était possible que se surajoute une discrète polyneuropathie sensitivo-motrice valorisée par des troubles sensitifs distaux, une hypoallesthésie et des réflexes légèrement appauvris.

Le 7 décembre 1999, l’assuré a encore consulté le docteur K________, spécialiste en médecine interne et hématologie, lequel l’a adressé au docteur L________ pour une suspicion de syndrome des apnées du sommeil. Ce dernier a effectivement posé le diagnostic de sévère syndrome d’apnées du sommeil en date du 11 février 2000. Le 3 mars 2000, le docteur M________, spécialiste oto-rhino-laryngologiste, a confirmé ce diagnostic tout en précisant qu’il existait également des rhinites chroniques.

Le 24 mars 2000, l’OCAI a informé l’assuré qu’il envisageait de rendre une décision de refus de prestations de l’assurance-invalidité dans la mesure où il n’existait pas de contre-indication à une reprise de travail à 80 % dans son ancienne activité. Par ailleurs, cette diminution de sa capacité de travail ne constituait pas une invalidité. L’OCAI a également relevé que les motifs pour lesquels l’assuré n’avait pas repris son ancienne activité n’avaient pas de lien avec son atteinte à la santé.

Suite à une audition du 6 avril 2000 de l’assuré contestant le projet de décision en produisant les rapports médicaux postérieurs au premier COMAI, l’OCAI a mandaté une seconde expertise COMAI afin d’évaluer si les nouveaux éléments modifiaient l’appréciation faites lors de la précédente expertise. L’assuré a derechef été examiné au COMAI de Lausanne le 4 juillet 2001.

Le 20 juin 2002, les docteur N________, O________ et P________, respectivement, médecin-chef, médecin-chef adjoint et chef de clinique adjoint, ont rédigé un rapport COMAI après avoir discuté des conclusions du rapport dans le cadre d’une décision multidisciplinaire réunissant également le docteur AB________, spécialiste en médecine interne et la doctoresse CD________, psychiatre ayant effectué le consilium de psychiatrie. Les experts ont diagnostiqué un syndrome somatoforme douloureux persistant sous forme de polyarthralgies et lombalgies, un état dépressif d’intensité moyenne, une anxiété généralisée, des troubles mixtes de la personnalité avec traits immatures et narcissiques, un syndrome d’apnées du sommeil et une maladie de Dupuytren (diagnostics avec influence essentielle sur la capacité de travail) ainsi qu’un diabète de type II, des migraines et une maladie de Lederhose (diagnostics sans influence sur la capacité de travail). Les experts ont relevé que la doctoresse EF________, spécialiste en rhumatologie ayant examiné l’assuré le 14 août 2001, avait estimé que, malgré la multiplicité des plaintes de l’intéressé, les constatations objectives demeuraient modérées, avec en fin de compte peu de répercussions fonctionnelles. Dans ce contexte, du point de vue strictement rhumatologique, la capacité de travail résiduelle pouvait être évaluée à 70 % dans un travail adapté, évitant l’exigence de mouvements fins et répétitifs des mains ainsi que les mouvements de porte-à-faux du rachis. Quant à la doctoresse CD________ ayant examiné l’assuré en consilium de psychiatrie du 7 août 2001, les experts ont précisé que cette dernière avait expliqué que les affections diagnostiquées (syndrome somatoforme douloureux persistant, anxiété généralisée, état dépressif d’intensité moyenne et trouble mixte de la personnalité avec traits immatures et narcissiques) dépassaient le cadre d’un simple trouble de l’adaptation, en réaction à des facteurs de stress psychosociaux. Les ressources adaptatives de l’assuré avaient été jugées épuisées. La situation psychiatrique semblait ainsi plus marquée que lors de l’expertise COMAI précédente en 1998, ce qui conduisait la psychiatre à considérer que la capacité résiduelle de travail n’était actuellement plus que de 30 % dans un poste adapté. Par ailleurs, elle avait relevé que l’assuré n’était pas accessible à une démarche psychothérapeutique. Les experts ont conclu qu’il était apparu que deux pathologies essentiellement influençaient la capacité de travail, soit le syndrome d’apnées du sommeil et les troubles psychiatriques qui avaient certainement évolué depuis le 16 septembre 1998. Le pronostic quant à une éventuelle amélioration de son état de santé était vraiment sombre, tout comme celui d’une amélioration de sa capacité de travail. La capacité résiduelle de travail globale était dès lors de 30 % tout au plus, dans le cadre d’un emploi d’aide-gardien ou d’autres tâches d’exécution simple, car l’assuré ne paraissait guère en mesure de pouvoir assumer de réelles responsabilités. Des mesures de réadaptation professionnelles n’étaient par ailleurs pas envisageables chez l’intéressé qui présentait la conviction d’être incapable de travailler et qui était bien adapté à sa précédente profession. Les experts ont encore expliqué que la baisse de la capacité résiduelle de travail, progressive, existait depuis le 16 septembre 1998, date de la première expertise COMAI, où la capacité de travail avait été évaluée à 80 %, mais qu’il n’était guère possible de préciser une date. Ils ont proposé de fixer le début de la capacité résiduelle de travail de 30 % au plus au 11 février 2000, date de l’examen pneumologique ayant permis de déterminer que l’assuré souffrait d’un syndrome d’apnées du sommeil, pathologie influençant certainement la capacité de travail. S’agissant du pronostic, les experts ont relevé qu’il demeurait très réservé, la poly pathologie de type rhumatologique et psychiatrique étant en soi un mauvais pronostic. S’y ajoutaient ensuite des facteurs étrangers à l’invalidité qui étaient l’émigration, l’âge critique de la maturescence et surtout la très longue période d’inactivité liée à une absence de projet professionnel, Il n’y avait pas de perspectives définissables d’amélioration de l’état.

Le 30 septembre 2002, le docteur MEYER, médecin-conseil de l’OCAI du Jura (ci-après l’OCAI-JURA) à qui le dossier avait été transmis pour décharger l’OCAI de Genève, a estimé que la capacité de travail résiduelle de l’assuré ne dépassait pas 30 %, l’invalidité étant justifiée par les pathologies psychiatriques ne lui laissant aucune ressource.

Par projet du 30 septembre 2002, l’OCAI-JURA a informé l’assuré qu’il envisageait de lui accorder une rente entière d’invalidité dès le 1er septembre 1999, basée sur un taux d’invalidité de 70 %. Son état de santé ne lui permettait plus d’exercer son activité qu’à 30 % depuis le mois de septembre 1998 conformément à ce qui avait été mis en évidence dans l’expertise COMAI du 21 juin 2002, raison pour laquelle le droit à la rente était fixé au 1er septembre 1999, soit après un délai d’attente d’une année.

Par courrier du 25 octobre 2002, l’assuré a protesté quant à la fixation du début du droit à la rente, soit le 1er septembre 1999 en relevant que son incapacité de travail remontait à plus longtemps. Il s’est réservé le droit de recourir contre la décision finale.

Par décision du 18 mars 2003, l’OCAI-JURA lui a octroyé une rente entière d’invalidité d’un montant de 1'342 fr. dès le 1er mars 2003 ainsi qu’une rente complémentaire pour son conjoint de 403 fr. et pour ses deux enfants de 537 fr., fondée sur un taux d’invalidité de 70 %. Il a précisé que la décision pour la période du 1er septembre 1999 au 28 février 2003 suivrait prochainement. Les moyens de droit indiquaient qu’un recours pouvait être adressé à la Commission cantonale de recours en matière d’assurance-invalidité à Genève (ci-après la Commission).

Par courrier du 31 mars 2003, l’assuré a interjeté recours contre cette décision auprès de la Commission en contestant la fixation du début du droit à la rente au 1er septembre 1999 en soulignant que sa demande avait été déposée en 1996 et qu’il était en incapacité totale de travailler depuis cette date. Il a précisé que son incapacité de travail n’avait pas varié depuis lors, raison pour laquelle il y avait lieu de retenir la date du dépôt de la demande pour le début du droit à la rente.

Le 4 avril 2003, la Commission a reçu de l’OCAI-JURA un exemplaire de la décision rendue par cet office accompagnée de la motivation indiquant que le début du droit à la rente avait été fixé au 1er septembre 1999. La motivation était signée par l’OCAI de Genève.

Par décision du 10 juin 2003, l’OCAI-JURA a encore octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er septembre 1999 au 28 février 2003 ainsi que des rentes complémentaires pour son conjoint et ses deux enfants fondée sur un degré d’invalidité de 70 %. L’ensemble du rétroactif pour cette période, soit 114'590 fr. a été versé directement au Centre d’action sociale de Genève qui avait versé des prestations sociales à l’assuré dans l’attente de la décision de rente.

Le 20 août 2003, la cause a été transmise d’office au Tribunal cantonal des assurances sociales. Un délai au 22 septembre 2003 a été fixé à l’OCAI-JURA pour faire parvenir ses observations.

Par préavis du 29 septembre 2003, l’OCAI-JURA a proposé le rejet du recours en expliquant qu’il ressortait de la seconde expertise COMAI que la capacité de travail de l’assuré avait été de 80 % durant plusieurs années, puis, avait progressivement diminué dès le 16 septembre 1998 jusqu’à n’atteindre plus que 30 %. C’était dès lors bien dès le 1er septembre 1999 que l’assuré avait le droit à une rente entière de l’assurance-invalidité et non avant.

Par réplique du 23 octobre 2003, l’assuré, par l’entremise de son conseil, a précisé que, dans la partie conclusive du deuxième rapport COMAI du 20 juin 2002, on pouvait lire que le syndrome d’apnée du sommeil était l’une des pathologies influençant principalement la capacité de travail. Or, il souffrait de ce syndrome depuis plus de trois ans ainsi que l’attestait le rapport médical du docteur M________ du 3 mars 2000. C’était dès lors de manière erronée que la rente lui avait été octroyée à partir du 1er septembre 1999 seulement, puisque son incapacité de travail était en réalité plus élevée que celle retenue lors du premier COMAI en 1998.

Par duplique du 31 octobre 2003, l’OCAI-JURA a expliqué qu’il avait déjà pris position en date du 29 septembre et qu’il maintenait ses conclusions.

Par entretien téléphonique et courrier du 7 juillet 2004, le Tribunal de céans lui a réclamé l’intégralité du dossier d’assurance-invalidité dès lors que certains documents manquaient au dossier, et notamment le premier rapport du COMAI du 16 septembre 1998. Le 19 juillet 2004, l’OCAI-JURA a fait parvenir une partie du dossier au Tribunal, sans lui communiquer les pièces demandées. Il est apparu lors d’un entretien téléphonique ultérieur du 13 octobre 2004 que les pièces manquantes étaient demeurées à l’OCAI de Genève, raison pour laquelle le Tribunal de céans l’a requis, le 21 octobre 2004, de lui faire parvenir les documents manquants en lui impartissant un délai au 8 novembre 2004.

Après deux nouveaux rappels en décembre 2004 et janvier 2005, les pièces manquantes sont finalement parvenues au Tribunal de céans le 5 février 2005.

Pour le surplus, les allégués pertinents des parties seront repris, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » ci-après.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l’art. 3 al.3 des dispositions transitoires de la loi modifiant la loi sur l’organisation judiciaire du 14 novembre 2002, les causes introduites avant l’entrée en vigueur de la loi et pendantes devant la Commission cantonale de recours ont été transmises d’office au Tribunal de céans, statuant en instance unique sur les contestations en matière d’assurance invalidité notamment (cf. art. 56V LOJ). Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

La LPGA, qui a entraîné des modifications de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI) et de son règlement du 17 janvier 1961(RAI), n’est pas applicable en l’espèce, dès lors que le juge des assurances sociales n’a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de l’état de fait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 127 V 467, consid. 1, 121 V 386, consid. 1b ; cf. également dispositions transitoires, art. 82 al. 1 LPGA). Le présent litige sera en conséquence examiné à la lumière des dispositions de la LAI et de son règlement en vigueur jusqu’au 31 décembre 2002 . Les dispositions légales seront dès lors citées dans leur ancienne teneur.

En outre, interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 69 LAI et 84 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS)).

En premier lieu, bien que ce point ne soit pas litigieux, la question se pose de savoir si la décision dont est recours, soit celle du 18 mars 2003 (et non celle du 10 juin 2003 contrairement à ce que prétend l’intimé dans son préavis du 29 septembre 2003), semblant émaner de l’OCAI-JURA, est valable dès lors que l’assuré résidait à ce moment-là, et réside toujours, à Genève.

a) Selon l’art. 55 LAI, l’office de l’assurance-invalidité (office AI) compétent est, en règle générale, celui du canton dans lequel l’assuré est domicilié au moment où il exerce son droit aux prestations. Le Conseil fédéral règle la compétence dans les cas spéciaux. L’art. 40 al. 1 let. a RAI précise qu’est compétent pour enregistrer et examiner les demandes l’office AI dans le secteur d’activité duquel les assurés sont domiciliés. L’office AI compétent lors de l’enregistrement de la demande le demeure durant toute la procédure (art. 40 al. 3 RAI).

b) En l’espèce, la décision litigieuse paraît de prime abord provenir de l’OCAI-JURA. Or, si l’on prend connaissance de manière attentive de ce document, on constate que, s’il est effectivement rédigé sous la forme d’un « formulaire sans signature » au nom de l’OCAI-JURA, il est néanmoins accompagné d’une motivation complète émanant de l’OCAI de Genève et signé par le directeur de cet office. Par ailleurs, les voies de droit indiquent clairement qu’il convient de s’adresser à la Commission cantonale de recours en matière d’assurance-invalidité de Genève. Le recourant ne s’y est d’ailleurs pas trompé puisqu’il a précisément adressé son recours du 31 mars 2003 à cette Commission, alors même qu’il n’était à l’époque pas encore pourvu d’un conseil.

Au vu de ces éléments, il apparaît ainsi que la décision litigieuse a effectivement été rendue par l’OCAI de Genève et non par l’OCAI-JURA, de sorte qu’elle est pleinement valable.

Il convient également de se demander si l’objet du présent litige, soit la fixation au 1er septembre 1999 comme départ du droit aux prestations du recourant, fait réellement partie de la décision rendue le18 mars 2003, bien que ce point n’ait pas été remis en doute par les parties.

En effet, ladite décision octroie une rente entière d’invalidité au recourant à partir du 1er mars 2003 en précisant que « la décision pour la période du 1er septembre 1999 au 28 février 2003 suivrait prochainement ». C’est le lieu de constater que l’OCAI a effectivement octroyé une rente d’invalidité entière au recourant pour la période susmentionnée dans une autre décision du 10 juin 2003 contre laquelle ce dernier n’a pas formellement recouru.

Point n’est cependant besoin de s’y attarder davantage dès lors que la fixation du point de départ de la rente d’invalidité du recourant au 1er septembre 1999 a été abordée dans la motivation de la décision litigieuse, si bien que le recourant a estimé qu’il devait recourir sous peine de ne plus pouvoir le faire. La motivation d’une décision faisant partie intégrante de celle-ci, il y a lieu d’entrer en matière sur ce point.

Le litige porte sur le point de savoir à partirde quelle date le recourant a droit à la rente entière d'invalidité, étant précisé qu’aucune des parties ne remet en cause les appréciations médicales figurant au dossier ni ne conteste le caractère invalidant du trouble somatoforme douloureux dont souffre le recourant (en comorbidité psychiatrique avec un état dépressif d’intensité moyenne, une anxiété généralisée et des troubles mixtes de la personnalité avec traits immatures et narcissiques).

a) L’art. 4 al.1 LAI stipule que l’invalidité est la diminution de la capacité de gain, présumé permanente ou de longue durée, qui résulte d’une atteinte à la santé physique, ou mentale provenant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. Selon l'art. 4 al. 2 LAI, l'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération. Ce moment doit être déterminé objectivement, d'après l'état de santé; des facteurs externes fortuits n'ayant pas d'importance. Il ne dépend en particulier ni de la date à laquelle une demande a été présentée, ni de celle à partir de laquelle une prestation a été requise, et ne coïncide pas non plus nécessairement avec le moment où l'assuré apprend, pour la première fois, que l'atteinte à sa santé peut ouvrir droit à des prestations d'assurance (ATF 118 V 82 consid. 3a et les références).

En vertu de l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est invalide à 66 2/3% au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins. Aux termes de l'art. 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date à partir de laquelle l'assuré présente une incapacité de gain durable de 40% au moins (let. a) ou à partir de laquelle il a présenté, en moyenne, une incapacité de travail de 40% au moins pendant une année sans interruption notable (let. b).

L’incapacité de travail déterminante pour la période de carence selon l’art. 29 LAI est une diminution du rendement imputable à une atteinte à la santé dans la profession exercée jusqu’alors ou dans le domaine d’activité habituel (ATF 105 V 159 consid. 2a, ATFA non publié du 22 juillet 2003 en la cause I 304/03). Selon le chiffre 2019 de la Circulaire concernant l’invalidité et l’impotence dans l’assurance-invalidité (CIIAI), édicté par l’office fédéral des assurances sociales (OFAS), pour la détermination de l’incapacité de travail moyenne pendant le délai d’attente, les motifs de santé auxquels l’incapacité de travail doit être attribuée importent peu. Ces causes peuvent être de différente nature et intervenir successivement ou de manière cumulative.

b) En l’espèce, le recourant relève en substance qu’il a déposé sa demande de prestation de l’assurance-invalidité en 1996 déjà et qu’il était à cette époque en incapacité totale de travailler, raison pour laquelle il convenait de lui octroyer une rente depuis cette date. Quant à l’intimé, il estime que l’incapacité de travail de 70 % n’a été mise en évidence qu’à partir du 16 septembre 1998, soit après la date du premier COMAI et que le délai d’une année prévu par la loi pour le versement des prestations avait commencé à courir depuis cette date.

En premier lieu, il sied de relever qu’il convient de se baser principalement sur les informations médicales contenues dans le rapport COMAI du 20 juin 2002 dont la pleine valeur probante ne fait aucun doute dès lors qu’il remplit en tout point les critères requis par la jurisprudence en la matière. En effet, ce rapport se fonde sur des examens complets (p. 11 à 17) , prend en considération les plaintes du recourant (cf. p. 8 et 9) et a été établi en pleine connaissance de l’anamnèse (p. 5 à 11). Par ailleurs, la description du contexte médical est claire, les points litigieux ont fait l'objet d'une étude circonstanciée (p. 18 à 21) et les conclusions des experts sont parfaitement motivées (p. 18 à 23) (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).

Or, selon ce rapport COMAI, la capacité résiduelle de travail globale est de 30 % tout au plus (soit une incapacité de travail de 70 % au moins), ce dès le mois d’août 2001, date des examens rhumatologique (14 août 2001) et psychiatrique (7 août 2001). Par ailleurs, les experts ont expliqué que la baisse de la capacité résiduelle de travail avait été progressive et existait depuis le 16 septembre 1998, date de la première expertise COMAI, où la capacité de travail avait été évaluée à 80 %, mais qu’il n’était guère possible de préciser une date. Ils ont dès lors proposé de fixer le début de la capacité résiduelle de travail de 30 % au plus au 11 février 2000, date de l’examen pneumologique ayant permis de déterminer que l’assuré souffrait d’un syndrome d’apnées du sommeil, pathologie influençant certainement la capacité de travail.

Force est de constater qu’en tenant compte d’une incapacité de travail de 70 % dès le 16 septembre 1998, l’intimé s’est montré généreux puisque, à suivre l’avis des experts du COMAI du 20 juin 2002, la dégradation de la capacité de travail s’est faite progressivement, à partir de cette date. Devant la difficulté à fixer avec certitude la date à partir de laquelle le recourant a présenté une incapacité de travail de 70 %, l’OCAI a certainement privilégié le 16 septembre 1998, soit juste après les examens effectués par les médecins du premier COMAI, plutôt que de tenter de chiffrer aléatoirement une incapacité de travail entre septembre 1998 et août 2001. De même, il a écarté la proposition des experts du second COMAI qui préconisaient de retenir le 11 février 2000, date du diagnostic du syndrome des apnées du sommeil posé par le docteur L________, probablement en tenant compte du fait que la santé du recourant s’était déjà dégradée avant cette date.

Le Tribunal de céans estime que cette manière de faire n’est pas critiquable dans le cas d’espèce, tant il est vrai qu’il est extrêmement difficile, voire impossible, de déterminer avec précision à partir de quand le recourant a présenté une incapacité de travail de 40 % au moins dans la mesure où aucun médecin appelé à se déterminer sur ce point ne serait à même de fixer une date précise. Ce difficile débat a d’ailleurs déjà été mené par les experts du COMAI dans leur rapport du 20 juin 2002, lesquels ont conclu à l’unanimité que la baisse de la capacité de travail résiduelle avait été progressive sans pouvoir déterminer de date exacte, se bornant à proposer la date du 11 février 2000.

On relèvera encore que s’il fallait se baser sur cette date proposée par les experts, ou même sur une date antérieure, mais au-delà du 16 septembre 1998, le calcul du taux d’invalidité moyenne du recourant permettrait de fixer un délai de carence après le 1er septembre 1999. Compte tenu de ce résultat, le Tribunal de céans pourrait dès lors reporter le début du droit à la rente du recourant à une date ultérieure, en procédant à une reformatio in pejus de la décision attaquée. Il ne s'agit toutefois que d'une faculté (ATF 119 V 249 consid. 5), dont il convient de renoncer à faire usage en l'espèce, au vu de l'ensemble des circonstances et de la difficulté de déterminer avec certitude le moment à partir duquel le recourant a présenté un taux d’incapacité de 70 % au moins, conformément à ce qui a déjà été mis en évidence ci-avant (cf. ATFA non publié du 22 avril 2003 en la cause U 334/02.

Pour tous ces motifs, le recours sera rejeté et la décision du 18 mars 2003 confirmée.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours du 31 mars 2003 recevable.

Au fond :

Le rejette.

Confirme la décision du 18 mars 2003.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

La greffière :

 

 

Marie-Louise QUELOZ

 

La Présidente :

 

 

Doris WANGELER

 

 

 

La secrétaire-juriste : Flore PRIMAULT

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le