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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1658/2022

ATAS/144/2023 du 02.03.2023 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1658/2022 ATAS/144/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 2 mars 2023

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______, Genève, représenté par l’Association pour la permanence de défense des patients et des assurés (APAS)

 

 

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1974, de nationalité suisse, marié et père de deux enfants, a travaillé en qualité de chauffeur de taxi à compter de 2007.

b. Le 14 avril 2019, il a été victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique précentral droit.

c. Le 12 décembre 2019, l’assuré a déposé une première demande de prestations invalidité auprès de l’office cantonal de l’assurance-invalidité en invoquant les suites de l’AVC, un syndrome de Ménière, des douleurs cervicales avec picotements et engourdissements aux niveaux des mains, bras et visage et des problèmes de tension artérielle.

d. Par décision du 12 juillet 2021, l'office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a rejeté cette demande, au terme d’une instruction ayant permis de recueillir, notamment, les éléments suivants :

-          Dans un rapport du 15 janvier 2020, le docteur B______, médecin généraliste, a retenu les diagnostics d’AVC sylvien avec déficits et troubles neurologiques dans le membre supérieur gauche sans irritation de la racine neuro-cervicale. Son patient se plaignait de douleurs à l'épaule gauche et de décharges électriques et engourdissements dans le membre supérieur gauche. Il travaillait trois à quatre heures par jour comme chauffeur de taxi, ce qui impliquait des efforts physiques et des crises d’engourdissement des membres supérieur et inférieur gauches. La capacité de travail était de 50% dans une activité adaptée depuis le 15 novembre 2019.

-          Le 26 mars 2020, le docteur C______, chef de clinique au service d'oto-rhino-laryngologie (ORL) et de chirurgie cervico-faciale des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) a indiqué que l'assuré avait souffert, en 2019, de crises de vertiges compatibles avec la maladie de Ménière. Il avait probablement refait une crise en février 2020. Il rencontrait des problèmes de compréhension dans le bruit et ne pouvait pas travailler en hauteur. Cependant, sa capacité à exercer son activité habituelle était entière, dès lors que les crises [de vertiges] étaient peu fréquentes (deux à trois par an).

-          Dans des rapports des 7 et 8 novembre 2019, 8 janvier, 14 et 26 février, 15 mai, 5 juin et 14 juillet 2020, le docteur D______, spécialiste FMH en neurologie, a attesté que son patient souffrait, suite à l’AVC, d’un hémisyndrome sensitif et moteur gauche. Le médecin a également mentionné, en précisant qu’elles étaient sans répercussion sur la capacité de travail de son patient : une hypertension artérielle, une dyslipidémie et des migraines avec aura probable. S'y ajoutait un syndrome d'apnées du sommeil pouvant expliquer les céphalées et la fatigue (cf. rapport du 26 février 2020). Le pronostic et l’évolution de l’hémisyndrome ont été qualifiés de progressivement lentement favorables. Le médecin a précisé que les restrictions fonctionnelles étaient liées aux céphalées et cervicalgies persistantes, qui n'étaient que partiellement soulagées par le traitement médicamenteux et la physiothérapie. Le médecin évaluait la capacité de travail de son patient à 40%, voire 50% dans une activité adaptée, si l'état clinique s'améliorait (cf. rapport du 14 juillet 2020).

-          Dans un document daté du 24 novembre 2020, le service médical régional de l’OAI (ci-après : le SMR) a retenu comme atteintes à la santé : un status post AVC ischémique sylvien droit avec hémisyndrome sensitivomoteur gauche résiduel, troubles visuels, vertiges, acouphènes et douleurs neurogènes du membre supérieur gauche, ainsi qu’un syndrome d'apnées du sommeil non appareillable en raison des cervicalgies. Le SMR a convenu que la capacité de l’assuré à exercer son activité habituelle semblait définitivement compromise. En revanche, il a considéré que, depuis le 15 janvier 2020, l’assuré avait recouvré une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, c'est-à-dire prenant en considérant les limitations fonctionnelles (fatigabilité, nécessité d’éviter la conduite à titre professionnel, le port de charges de plus de 15 kg ou le port de charges de plus de 5 kg à répétition, le travail en hauteur, la marche prolongée et la marche en terrain irrégulier, les ambiances bruyantes, les positions agenouillée et accroupie, la position bras au-dessus de l'horizontale, possibilité de travailler en position assise de type sédentaire, sans nécessité de vision binoculaire).

-          Dans un rapport du 27 novembre 2020 faisant suite à l’intervention de revascularisation par triple pontage coronaire subie le 15 septembre 2020 par l’assuré, le docteur E______, spécialiste FMH en cardiologie, a attesté du recouvrement de la pleine capacité de son patient à exercer son activité habituelle dès la fin de l’arrêt de travail délivré par le chirurgien, sans limitations fonctionnelles.

-          Le 1er mars 2021, le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie cardiaque et vasculaire, a confirmé que l'évolution post-opératoire était bonne et qu'au-delà de novembre 2020, il n’y avait plus eu de restrictions fonctionnelles.

-          Dans un nouvel avis du 18 mars 2021, le SMR a admis une totale incapacité de travail suite à l’intervention, du 15 septembre au 27 novembre 2020. Il a émis des doutes quant à l'aptitude à la conduite de l'assuré, au moins à titre professionnel et concernant le transport de personnes.

-          Le 26 avril 2021, l'assuré a émis l’avis qu’il pouvait travailler à 50% tout au plus, vu son état d’épuisement, les douleurs, les acouphènes liés au syndrome de Ménière, et une diminution de sa concentration après quelques heures d'activité.

-          Dans des certificats datés des 23 mars et 28 avril 2021, le Dr D______ a attesté d'une incapacité de travail de 50% du 24 mars au 31 mai 2021. Le même médecin, dans des rapports des 29 avril et 27 mai 2021, a mentionné la persistance des douleurs cervicales et hémicorporelles gauches, séquelles de l'AVC.

Au vu de ces éléments, l’OAI a admis une totale incapacité de l’assuré à exercer son activité habituelle de chauffeur de taxi, mais considéré qu’il avait recouvré dès le 15 janvier 2020 une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles.

Le rejet de la demande a été motivé par le fait que la comparaison entre le revenu avant invalidité (CHF 36'644.-) et celui que l’assuré pourrait encore obtenir en exerçant à plein temps (recte : 50%) une activité adaptée selon les statistiques (CHF 67'767.- recte : 33'883.-, cf. détermination du degré d’invalidité [pièce OAI 45]), ne conduisait qu’à une perte de gain de 7,53%, insuffisante pour ouvrir droit à des prestations.

e. Le 5 août 2021, le permis de conduire de l'assuré lui a été retiré par l'Office cantonal des véhicules, en raison de doutes sérieux quant à son aptitude à la conduite.

B. a. Le 30 août 2021, l'assuré a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’OAI, en invoquant les mêmes atteintes que précédemment (AVC, syndrome de Ménière, triple pontage, douleurs cervicales, apnées du sommeil, hypertension, vertiges, perte d'équilibre et troubles visuels).

À l’appui de cette nouvelle demande, l’assuré a produit, notamment :

-          un rapport du Dr E______ du 26 janvier 2021, relatant que l’assuré l’a consulté pour l’apparition, un mois plus tôt, de douleurs thoraciques latéralisées à gauche sous forme de pointes, non corrélées à l'effort et une gêne au niveau de l'hémithorax postérieur gauche d'allure oppressive et irradiant dans le membre supérieur gauche lors de ses marches quotidiennes ; le médecin précise que la symptomatologie est atypique et que l’électrocardiogramme, tout comme l'échographie effectués le même jour sont rassurants ; il dit ne pouvoir formellement écarter une origine ischémique, à investiguer par le biais d’une échographie d'effort qui, si elle se révélait dans les limites de la norme, ouvrirait un diagnostic différentiel entre une douleur d'origine pariétale apparue à distance de l'intervention et une symptomatologie neurologique chez un patient ayant présenté un AVC deux ans auparavant, compliqué de douleurs neurogènes au niveau du membre supérieur gauche ;

-          un rapport du 6 juillet 2021 de la doctoresse G______, spécialiste FMH en pneumologie et médecine interne générale, mentionnant des troubles du sommeil et une fatigue diurne d'origine multifactorielle ;

-          un rapport du 4 août 2021, du Dr D______ mentionnant plusieurs épisodes de vertiges ayant entraîné un changement de médication, en même temps qu’un soulagement d'environ 70% de la douleur de l'hémicorps gauche ;

-          un rapport du 5 octobre 2021 de Madame H______, ergothérapeute, expliquant qu’elle suit l'assuré depuis mai 2019 et que, depuis juin 2019, son état de santé se détériore, en raison notamment, d’apnées du sommeil, qui empêchent un sommeil réparateur ; l’ergothérapeute mentionne que, depuis mi-septembre 2021, elle a constaté un impact psychologique et préconise un soutien sur ce plan ;

-          un rapport du Dr B______ du 18 octobre 2021, retenant les diagnostics d’AVC avec douleurs hémi-corporelles à gauche, de maladie de Ménière, de fibrillation auriculaire, de maladie coronaire ayant fait l’objet d’une chirurgie en septembre 2020 et de syndrome d’apnée du sommeil appareillé ; le médecin fait état d'une dégradation progressive de l'état psychique et physique de son patient (troubles du sommeil, pleurs, troubles de la concentration sévères avec impossibilité de conduire, persistance des douleurs, troubles de l'attention, persistance de la faiblesse au membre supérieur gauche avec fatigue) ; il conclut qu’au vu des douleurs et de la faiblesse ressenties dans les membres supérieurs, des vertiges, des troubles du sommeil, de l’état dépressif et des troubles de la concentration, il est impossible que son patient puisse effectuer son travail de chauffeur de taxi ou être « recyclé » dans une autre activité.

b. Le 3 mars 2022, le SMR a conclu à l’absence d'éléments cliniques objectifs permettant de retenir comme plausible une aggravation de l'état de santé de l'assuré depuis la décision entrée en force.

c. Faisant sien l'avis du SMR, l'OAI a transmis à l'assuré, le 8 mars 2022, un projet de décision dont il ressortait qu’il se proposait de refuser d’entrer en matière sur sa nouvelle demande, faute, d’aggravation plausible de son état de santé depuis la décision du 12 juillet 2021.

d. Le 31 mars 2022, l'assuré a contesté ce projet en produisant un rapport du Dr D______ du 1er avril 2022, rappelant que son patient a été victime, en 2019, d’un AVC avec hémisyndrome à gauche et douleurs neurogènes importantes nécessitant un traitement lourd. Le médecin soulignait que ces douleurs hémicorporelles persistaient et n’étaient que partiellement atténuées par le traitement médicamenteux. L'assuré souffrait également de céphalées et de vertiges pouvant être très intenses, imputables à une maladie de Ménière, associés à des acouphènes. Il concluait de ce fait à une totale incapacité de travail.

e. Le SMR a relevé que les éléments anamnestiques décrits avaient déjà fait l'objet de multiples investigations et étaient connus. Il a rappelé les termes de son évaluation du 24 novembre 2020 et fait remarquer que les limitations fonctionnelles retenues tenaient compte de la fatigue et autres atteintes. Qui plus est, s’agissant des douleurs neurogènes, il a noté que le Dr D______, dans son rapport du 4 août 2021, avait fait état d’une bonne réponse antalgique au traitement. De ce qui précède, il a tiré la conclusion que l'assuré n'avait pas rendu plausible une péjoration durable de son état de santé et que son appréciation du 24 novembre 2020 demeurait d’actualité.

f. Par décision du 21 avril 2022, l'OAI a refusé d'entrer en matière sur la demande de prestations, faute d’aggravation plausible de l’état de santé de l’assuré.

C. a. Par écriture du 23 mai 2022, complétée le 29 juin 2022, l'assuré a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant à l'annulation de la décision querellée et au renvoi de la cause à l'OAI pour instruction. Il soutient que son état de santé s'est péjoré depuis août 2021, avec une aggravation des vertiges, qui peuvent être intenses et accompagnés d'acouphènes.

Il produit un certificat du Dr D______ du 11 mai 2022, au contenu identique à celui du 1er avril 2022, si ce n’est qu’au lieu de faire remonter l’aggravation des vertiges à une année auparavant, le médecin évoque le mois d’août 2021.

b. Invité à se déterminer, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Par écriture du 6 septembre 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

3.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

4.             Le litige porte sur le point de savoir si l'intimé était en droit de refuser d'entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations enregistrée le 17 septembre 2021.

5.       

5.1. 

5.1.1.          Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l'assuré rend plausible que son invalidité ou son impotence s'est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 17 LPGA ; art. 87 al. 3 et 4 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]). Cette exigence doit permettre à l'administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 130 V 64 consid. 5.2.3 ; 125 V 410 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_384/2021 du 25 avril 2022 consid. 3). À cet égard, une appréciation différente de la même situation médicale ne permet pas encore de conclure à l'existence d'une aggravation (ATF 112 V 371 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_748/2013 du 10 février 2014 consid. 4.3).

Sous l'angle temporel, la comparaison des états de fait a pour point de départ la situation telle qu'elle se présentait au moment où l'administration a rendu sa dernière décision entrée en force (ATF 130 V 64 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_676/2018 du 27 novembre 2018 consid. 2.2). Lorsqu'elle est saisie d'une nouvelle demande, l'administration doit commencer par examiner si les allégations de l'assuré sont, d'une manière générale, plausibles ; à ce stade, la maxime inquisitoire de l’art. 43 al. 1 LPGA ne trouve pas application (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_576/2021 du 2 février 2022 consid. 3.2). Si tel n'est pas le cas, l'affaire est liquidée sans autres investigations par un refus d'entrée en matière (arrêts du Tribunal fédéral 9C_576/2021 du 2 février 2022 consid. 2.2 ; 9C_475/2020 du 22 avril 2021 consid. 3.2).

L'administration se montrera d'autant plus exigeante pour apprécier le caractère plausible des allégations de l'assuré que le laps de temps qui s'est écoulé depuis sa décision antérieure est bref. Elle jouit sur ce point d'un certain pouvoir d'appréciation que le juge doit en principe respecter (ATF 109 V 108 consid. 2b). Ainsi, le juge ne doit examiner comment l'administration a tranché la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière en se fondant sur l'art. 87 RAI et que l'assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas nécessaire lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 114 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_789/2012 du 27 juillet 2013 consid. 2.2).

5.1.2. Le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'autorité (cf. art. 43 al. 1 LPGA), ne s'applique pas à la procédure de l'art. 87 al. 3 RAI (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5). Eu égard au caractère atypique de celle-ci dans le droit des assurances sociales, le Tribunal fédéral a précisé que l'administration pouvait appliquer par analogie l'art. 73 aRAI (cf. art. 43 al. 3 LPGA depuis le 1er janvier 2003) – qui permet aux organes de l'AI de statuer en l'état du dossier en cas de refus de l'assuré de coopérer – à la procédure régie par l'art. 87 al. 3 RAI, à la condition de s'en tenir aux principes découlant de la protection de la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 [Cst. - RS 101] ; ATF 124 II 265 consid. 4a). Ainsi, lorsqu'un assuré introduit une nouvelle demande de prestations ou une procédure de révision sans rendre plausible que son invalidité s'est modifiée, notamment en se bornant à renvoyer à des pièces médicales qu'il propose de produire ultérieurement ou à des avis médicaux qui devraient selon lui être recueillis d'office, l'administration doit lui impartir un délai raisonnable pour déposer ses moyens de preuve, en l'avertissant qu'elle n'entrera pas en matière sur sa demande pour le cas où il ne se plierait pas à ses injonctions. Enfin, cela présuppose que les moyens proposés soient pertinents, en d'autres termes qu'ils soient de nature à rendre plausibles les faits allégués. Si cette procédure est respectée, le juge doit examiner la situation d'après l'état de fait tel qu'il se présentait à l'administration au moment où celle-ci a statué (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_789/2012 précité consid. 2 et 9C_708/2007 du 11 septembre 2008 consid. 2.3). Son examen se limite, ainsi, au point de savoir si les pièces déposées en procédure administrative justifient ou non la reprise de l'instruction du dossier (arrêt du Tribunal fédéral 9C_789/2012 précité consid. 4.1).

L'exigence relative au caractère plausible ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent lors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir (Damien VALLAT, La nouvelle demande de prestations AI et les autres voies permettant la modification de décisions en force, RSAS, 2003, p. 396 ch. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 724/99 du 5 octobre 2001 consid. 1c/aa).

5.2.       En l'espèce, le recourant invoque une aggravation, depuis août 2021, des vertiges ressentis en lien avec le syndrome de Ménière, rendant nulle sa capacité de travail.

Il reproche notamment au SMR de n’avoir retenu, du rapport du Dr D______ du 4 août 2021, que l’évolution favorable de ses douleurs, en négligeant le fait que le traitement médicamenteux a dû être interrompu car il provoquait des vertiges. Il rappelle que, selon ce médecin, sa capacité de travail est nulle. Il souligne que tant le Dr B______, que le Dr D______ ont attesté qu'il souffre d'une polypathologie rendant impossible sa réinsertion. Il invoque les rapports des Dr E______ et G______. Il argue que la maladie de Ménière est le motif principal de sa nouvelle demande et que si elle a certes déjà été évoquée auparavant, elle est devenue, depuis août 2021, totalement invalidante.

L’intimé soutient pour sa part que si le traitement de carbamazépine a dû être interrompu en raison des effets secondaires rapportés par l'assuré, il existe d’autres options thérapeutiques ou médicamenteuses, telles que la gabapentine prescrite à l’assuré.

5.3.       Il est vrai que le syndrome de Ménière a été diagnostiqué en 2019 et qu’il était connu de l'intimé lorsque celui-ci a rendu sa décision initiale, le 12 juillet 2021.

Cependant, les crises de vertiges étaient alors décrites comme étant de très courte durée (cf. rapport du Dr D______ du 15 mai 2020) et peu fréquentes (cf. rapport du Dr C______ du 26 mars 2020).

Désormais, ainsi qu’en atteste le Dr D______ dans son rapport du 1er avril 2022, les vertiges sont intenses et persistants et le traitement médicamenteux non satisfaisant. Cette aggravation se retrouve dans l’évaluation de la capacité de travail de l’assuré par ce médecin, qui l’avait jusqu’alors évaluée à 40-50% (cf. rapport du 14 juillet 2020), alors qu’il la juge à présent nulle.

Le Dr B______, dans son rapport d'octobre 2021, fait lui aussi mention de vertiges persistants, ce qui démontre que l'arrêt, en août 2021, de la carbamazépine – laquelle aurait pu être à l'origine des vertiges (cf. rapport du Dr D______ du 4 août 2021) –, n'a pas mis fin aux symptômes.

En outre, Mme H______, ergothérapeute, fait état d'une dégradation sur le plan psychologique depuis mi-septembre 2021, constat partagé par le Dr B______, qui a relevé, en octobre 2021, un état dépressif.

Au vu de ces éléments, bien que la nouvelle demande de prestations ait été formulée fort peu de temps après la décision de refus de l'OAI, il convient d’admettre que le recourant a rendu plausible une aggravation de son état psychique et de ses vertiges, étant rappelé que cela n’augure en rien des conclusions à tirer en termes d’influence sur la capacité de gain et le degré d’invalidité, qu’il conviendra d’investiguer dans un second temps.

6.             Au vu de ce qui précède, le recours est admis, la décision du 21 avril 2022 annulée et la cause renvoyée à l’intimé pour qu’il entre en matière sur la nouvelle demande du recourant.

7.             Aux termes de l’art. 61 let. g LPGA, le recourant qui obtient gain de cause a droit au remboursement de ses frais et dépens dans la mesure fixée par le tribunal. Une indemnité de dépens de CHF 800.- sera dès lors allouée au recourant, qui est représenté par un mandataire professionnellement qualifié et qui obtient gain de cause (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

8.             Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision rendue par l'intimé le 21 avril 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire et décision au fond.

5.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 800.- à titre de dépens à la charge de l'intimé.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le