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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/302/2022

ATAS/125/2023 du 28.02.2023 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/302/2022 ATAS/125/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 février 2023

8ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à SAXON, comparant aavec élection de domicile en l'étude de Maître Yero DIAGNE

 

recourante

 

contre

FER CIAM 106.1 - CAISSE INTERPROFESSIONNELLE AVS DE LA FÉDÉRATION DES ENTREPRISES ROMANDES, sise rue de Saint-Jean 98, GENÈVE

B______, sise au PETIT-LANCY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Vincent CARRON

 

intimée

 

appelée en cause

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1982, de nationalité suisse, a été engagée dès le 1er mars 2004 par B______ (ci-après : C______), société sise au Petit-Lancy affiliée auprès de la Caisse INTERPROFESSIONNELLE AVS de la Fédération des Entreprises romandes FER CIAM 106.1 (ci-après : la caisse).

b. À compter du 1er octobre 2017, l'assurée a été détachée auprès de D______ en Afrique du Sud.

c. Licenciée pour raisons économiques avec effet au 31 juillet 2019, elle est revenue en Suisse et s'est inscrite le 25 juillet 2019 à l'office régional de placement du canton du Valais, canton de son domicile.

d. Par courrier du 12 décembre 2019, l'assurée a invité C______ à verser à la caisse les cotisations sociales sur les revenus réalisés en Afrique du Sud, car elle rencontrait des difficultés pour faire valoir ses droits auprès de l'assurance-chômage suisse.

e. Le 7 février 2020, C______ lui a répondu qu'elle n'avait pas été assujettie à l'assurance-vieillesse et survivants suisse (ci-après : AVS) pendant son séjour en Afrique du Sud.

f. Par pli du 8 juin 2020 à la caisse, l'assurée a sollicité une décision relative à son assujettissement à l'AVS pour la période du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019.

B. a. Après que C______ et l'assurée aient pris position à ce sujet et joint divers documents, la caisse a considéré, par décision du 23 avril 2021, que l'assurée s'était constituée un domicile en Afrique du Sud, de sorte qu'elle n'avait pas été obligatoirement assurée à la sécurité sociale suisse du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019, tout en relevant qu'aucune continuation de l'assurance n'avait été sollicitée et octroyée à l'époque. Elle a ajouté que l'indemnité de départ de CHF 166'294.45 que l'assurée avait touchée en août 2019, qui tenait compte de toute la période d'activité au sein de C______, et qui était soumise à cotisations, avait été correctement imputée sur 2017 (janvier à septembre), année pendant laquelle celle-ci était encore assujettie en Suisse.

b. Par lettre du 20 mai 2021, l'assurée s'est opposée à cette décision.

c. Le 30 juin 2021, C______ s'est déterminée sur l'opposition de l'assurée.

d. Par courrier du 6 octobre 2021 à l'assurée, la caisse a indiqué que l'indemnité de départ (soumise à cotisations à hauteur de CHF 43'754.16) avait été affectée par erreur sur l'année 2019, dès lors qu'aucun salaire n'avait été déclaré par C______ d'octobre 2017 à juillet 2019.

e. Par décision sur opposition du 13 décembre 2021, la caisse a confirmé sa décision du 23 avril 2021.

C. a. Par acte du 26 janvier 2022, l'assurée, par l'intermédiaire de son conseil, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre de céans) d'un recours contre la décision sur opposition précitée, en concluant, sous suite de frais et dépens, à la modification de cette décision, en ce sens que la rémunération qu'elle avait perçue entre octobre 2017 et juillet 2019 était soumise à cotisations en Suisse et à ce que C______ reverse à l'intimée les cotisations sociales du premier pilier, part employée et part employeur, afférentes à cette période.

b. Dans sa réponse du 23 février 2022, l'intimée a conclu au rejet du recours.

c. Par ordonnance du 1er avril 2022, la chambre de céans a appelé en cause C______.

d. Dans le délai imparti, dans ses déterminations du 16 mai 2022, C______ a conclu, sous suite de dépens, à la confirmation de la décision entreprise.

e. Par écritures des 7 juillet et 31 août 2022, l'intimée, respectivement la recourante, ont indiqué ne pas formuler d'observations complémentaires.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

1.1 Selon l’art. 84 LAVS, les décisions sur opposition prises par les caisses cantonales de compensation peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal des assurances du canton où la caisse de compensation a son siège, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA.

1.2 En l'espèce, l'intimée, sise dans le canton de Genève, qui a rendu une décision niant l'assujettissement de la recourante à l'AVS pour la période du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019, revêt la qualité de caisse cantonale au sens de l'art. 84 LAVS. La compétence de la chambre de céans à raison de la matière et du lieu pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’AVS réglée dans la première partie, à moins que la présente loi ne déroge expressément à la LPGA.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours (du 26 janvier 2022) a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 et 60 LPGA; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA), le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur l'assujettissement de la recourante à l'AVS pour la période du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019, singulièrement sur le point de savoir si celle-ci a conservé ou non son domicile en Suisse, alors qu'elle a été détachée auprès de D______ en Afrique du Sud tout en demeurant employée de C______ durant la période considérée.

6.             Le litige, quand bien même il présente un caractère transfrontalier, doit être tranché au regard des normes du droit suisse en matière d'AVS exclusivement, dans la mesure où il n'existe pas de convention bilatérale de sécurité sociale entre la Suisse et l'Afrique du Sud (voir également consid. 8 ci-dessous).

7.             L'art. 1a al. 1 let. a LAVS prévoit l'affiliation obligatoire à l'assurance-vieillesse et survivants des personnes physiques qui sont domiciliées en Suisse et qui n'y exercent pas d'activités lucratives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_914/2008 du 31 août 2009 consid. 4).

7.1 Selon l'art. 13 al. 1 LPGA, le domicile d'une personne est déterminé selon les art. 23 à 26 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210).

7.2 Aux termes de l'art. 23 CC (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2013), le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l’intention de s’y établir; le séjour dans une institution de formation ou le placement dans un établissement d’éducation, un home, un hôpital ou une maison de détention ne constitue en soi pas le domicile (al. 1). Nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles (al. 2).

7.2.1 La notion de domicile comporte deux éléments : l'un objectif, la résidence, soit un séjour d'une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits; l'autre, l'intention d'y résider, soit de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d'un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. Le domicile d'une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances. Le lieu où les papiers d'identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales constituent des indices qui ne sauraient toutefois l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l'intéressé (ATF 136 II 405 consid. 4.3).

L'obtention d'une autorisation de séjour ou d'établissement de la part de la police des étrangers n'est pas un critère décisif pour déterminer si une personne s'est valablement constitué un domicile au sens du droit civil (arrêt du Tribunal fédéral 9C_675/2014 du 11 août 2015 consid. 4.3 et les références). L'indication du domicile figurant dans des décisions judiciaires ou des publications officielles constitue également des indices (ATF 125 III 100 consid. 3 et la référence).

Il n’est pas nécessaire qu’une personne ait l’intention de rester au même endroit pendant une longue période. Une résidence, même de courte durée, suffit pour constituer un domicile. Le terme « durable » doit être compris au sens de « non passager ». L’intention de faire d’un lieu déterminé le centre de son existence, de ses rapports personnels, de ses intérêts économiques, familiaux et professionnels suffit (RCC 1982 p. 172; Directives sur l'assujettissement aux assurances AVS et AI établies par l'Office fédéral des assurances sociales, dans leur état au 1er janvier 2021 [ci-après: DAA] ch. 1023). L'intention de s'établir pour une certaine durée ne suppose pas que l'intéressé s'établisse pour toujours en un certain lieu. Il suffit qu'il entende y rester pendant un certain temps, c'est-à-dire jusqu'au moment de la survenance d'un événement nécessitant un changement de domicile (tel un changement d'affectation dans l'entreprise), même si la fin de cette période est d'emblée connue (comme dans le cas d'un artiste ayant un contrat limité à deux ans ou d'un chercheur étranger engagé jusqu'au terme d'une recherche déterminée). Rien n'empêche de se constituer un domicile pour une durée d'emblée limitée (Antoine EIGENMANN, in Commentaire romand, Code civil I, 2010, n. 21 ad art. 23 CC et les références).

Ce n'est pas l'élément de durée qui rend l'intention de s'établir reconnaissable pour les tiers. Il faut s’attacher en premier lieu à la nature et à l’intensité des liens de l’intéressé avec un certain endroit. C’est ce qui est présumé par l’expression « centre de vie ». Ainsi, la personne qui s’établit en un endroit déterminé avec l’intention d’y rester pour une certaine durée y acquiert un domicile dès le premier jour à partir duquel l’on peut reconnaître qu’elle y a fixé le centre de ses relations (EIGENMANN, op cit., n. 23 ad art. 23 CC et les références).

7.2.2 Lorsqu'une personne séjourne en deux endroits différents, il faut tenir compte de l'ensemble de ses conditions de vie, le centre de son existence se trouvant à l'endroit, lieu ou pays, où se focalise un maximum d'éléments concernant sa vie personnelle, sociale et professionnelle, de sorte que l'intensité des liens avec ce centre l'emporte sur les liens existant avec d'autres endroits ou pays (ATF 125 III 100 consid. 3). Le domicile est donc réputé avoir été constitué à l’endroit avec lequel l’intéressé a les attaches les plus étroites (RCC 1960 p. 281). Cet endroit est en règle générale celui où réside la famille (DAA ch. 1028). Par exemple, les personnes professionnellement actives (commerçants, industriels, voyageurs de commerce, instituteurs, etc.) ont en général leur domicile au lieu où réside leur famille, et non là où ils travaillent, pour autant qu’ils passent leur temps libre auprès de leurs proches (EIGENMANN, op cit., n. 25 ad art. 23 CC et la référence).

7.2.3 Le domicile est maintenu lorsque la personne concernée quitte momentanément (p. ex. en raison d'une maladie) le lieu dont elle a fait le centre de ses intérêts; le domicile reste en ce lieu jusqu'à ce qu'un nouveau domicile soit, le cas échéant, créé à un autre endroit (arrêt du Tribunal fédéral 9C_345/2010 du 16 février 2011 consid. 3.2 et la référence). C’est ainsi que, selon les circonstances, une absence du pays peut être relativement longue, sans qu’il soit nécessaire d’admettre pour autant un changement de domicile. Après une telle absence toutefois, l’abandon du domicile en Suisse peut être présumé. Ceci vaut en particulier si l’ensemble des circonstances permet de conclure à un transfert à l’étranger du centre de l’existence et des relations (RCC 1990 p. 261-262; DAA ch. 1030).

À titre d'exemple, le fait d'emmener sa famille avec soi lors d'un séjour professionnel de plusieurs années, tout en prenant des précautions pour faciliter son retour ultérieur en Suisse (notamment, renouvellement du permis d'établissement et maintien du bail du logement), doit être considéré comme déterminant pour retenir un transfert du domicile à l'étranger (Margit MOSER-SZELESS in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 15 ad art. 13 LPGA citant RCC 1982 p. 171).

7.3 En vertu de l'art. 24 CC, toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau (al. 1). Le lieu où elle réside est considéré comme son domicile, lorsque l’existence d’un domicile antérieur ne peut être établie ou lorsqu’elle a quitté son domicile à l’étranger et n’en a pas acquis un nouveau en Suisse (al. 2).

7.4 Les art. 23 ss CC obéissent au principe de la nécessité du domicile: toute personne doit nécessairement avoir un domicile civil. C'est pourquoi l'art. 24 CC établit des règles subsidiaires qui permettent de déterminer un domicile fictif en l'absence d'un domicile volontaire ou légal. L'une de ces règles est que l'intéressé est censé conserver son ancien domicile jusqu'à ce qu'il en ait acquis un nouveau (art. 24 al. 1 CC; arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2008, 2C_572/2008 du 23 septembre 2008 consid. 3.4). L’art. 24 al. 1 CC vise le cas de l’abandon d’un domicile sans création d’un nouveau. En l’absence de création d’un nouveau domicile, le domicile abandonné subsiste donc comme domicile fictif (EIGENMANN, op cit., n. 3-4 ad art. 24 CC et la référence).

8.             En cas de détachement d'un travailleur entre la Suisse et un État tiers, en l’absence de convention bilatérale, la couverture sociale d’une personne se détermine en application du droit interne des États concernés. Des cas de double assurance, en Suisse et dans l’État tiers, ne sont donc pas exclus. À titre d'illustration, une personne, de nationalité suisse, envoyée au Qatar, pour une période de deux ans, par son employeur, dont le siège se trouve en Suisse, est soumise aux législations qatarie et suisse. Sous l'angle du droit suisse, il convient, pour chaque branche d'assurance, d'examiner si la personne détachée remplit ou non les conditions d'assujettissement. En matière d'assurance-vieillesse et survivants, cette personne pourra soit demander à continuer l'assurance obligatoire en invoquant l'art. 1a al. 3 LAVS et en respectant les prescriptions fixées par les art. 5-5c du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101), soit adhérer à l'assurance facultative en application de l'art. 2 LAVS (Stéphanie Perrenoud, La couverture maladie et maternité en cas de détachement de travailleurs, in RSAS 2017 p. 282-283) et en respectant le délai et les modalités d'adhésion fixés à l'art. 8 de l'ordonnance concernant l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité facultative du 26 mai 1961 (OAF - RS 831.111), délai qui peut être prolongé aux conditions de l'art. 11 OAF.

9.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.          

10.1 La recourante expose que son domicile est demeuré en Suisse à Saxon entre octobre 2017 et juillet 2019 même si elle était active en Afrique du Sud durant cette période, au motif qu'elle avait un contrat de travail avec C______ sise en Suisse, que sa mission en Afrique du Sud était d'emblée temporaire et de durée déterminée, si bien qu'elle n'avait aucun autre centre d'intérêt professionnel que cette mission, qu'elle avait dû quitter immédiatement l'Afrique du Sud en juillet 2019 lorsque son « work visa » avait pris fin et qu'elle y était retournée ensuite pour chercher ses affaires avec un « tourist visa », que l'Afrique du Sud la considérait comme une « visitor » et non pas comme une résidente, que des cotisations avaient été prélevées à tort en Afrique du Sud (où elle ne pouvait réclamer aucune indemnité de chômage, en l'absence de résidence et de compte bancaire et du fait de son statut de « contract of service »), que l'arrivée de son ami (devenu son époux par la suite) en Afrique du Sud en février 2018 n'était pas un argument en faveur d'un changement de domicile dès octobre 2017, et que son centre d'intérêts se trouvait en Suisse, où elle s'était mariée, où elle avait séjourné quelques semaines, et où vivaient ses amis et sa famille.

En outre, elle avait toujours manifesté son intention de rester domiciliée en Suisse, car elle n'avait pas annoncé son départ de Saxon. C______ avait établi encore en été 2019 des documents indiquant comme adresse de domicile celle à Saxon, elle avait continué à être assurée à l'assurance obligatoire des soins et à cotiser à la prévoyance professionnelle ainsi qu'au troisième pilier A, et elle avait gardé toutes ses relations bancaires, cartes de crédit et abonnement téléphonique en Suisse. Par ailleurs, elle remplissait la condition du domicile en Suisse selon les autorités en matière d'assurance-chômage, et la caisse de compensation AVS du canton du Valais, considérant qu'elle avait son domicile en Suisse, l'avait interpellée au sujet de son assujettissement durant la période litigieuse.

Ainsi, au vu de tous ces éléments, la présence en un lieu sur une période donnée n'était pas décisive. Un séjour effectué à des fins particulières (ici, la mission professionnelle limitée dans le temps pour C______) même de longue durée ne suffisait pas pour créer un domicile. De plus, elle avait toujours cru que ses cotisations AVS étaient régulièrement payées en Suisse compte tenu des rubriques « Social Security » et « Unemployment Insurance » figurant dans son contrat de travail, et des fiches de salaire relatives à la période en cause faisant état de déductions pour le « Home Country Social Insurance ». Enfin, C______ avait initialement prélevé des cotisations AVS sur l'indemnité de départ payée en été 2019 avant de procéder à des « ajustements » après le début du présent litige, et de considérer que cette indemnité serait un « salaire différé » à imputer sur 2017.

10.2 On ne saurait suivre le raisonnement de la recourante pour les motifs qui suivent.

Le seul fait qu'elle ait travaillé à l'étranger pour une entreprise sise en Suisse ne lui permet pas d'être assujettie à l'AVS pour la période litigieuse du 1er octobre 2017 début de l'activité en Afrique du Sud au 31 juillet 2019, car la continuation de l'assurance selon l'art. 1a al. 3 LAVS est subordonnée en particulier à la présentation d'une requête (art. 5a RAVS). Or, en l'occurrence, à l'époque, aucune requête n'a été présentée à la caisse de compensation compétente (i.e. l'intimée).

Il y a lieu de considérer que, au regard des circonstances du cas particulier, elle avait transféré en Afrique du Sud le centre de son existence durant la période considérée, quand bien même à la base elle ne s'était pas établie dans ce pays pour un temps indéterminé. Le changement de domicile ne nécessite en effet nullement l'intention de se fixer pour toujours en un lieu déterminé.

À cet égard, la recourante se méprend lorsqu'elle affirme ne pas avoir eu le statut de « résidente » en Afrique du Sud, puisqu'elle possédait un permis de séjour provisoire (« temporary residence permit ») valable jusqu'au 3 septembre 2020 lui permettant de travailler auprès de D______ en Afrique du Sud (dossier intimée pièce 20 annexe 1) jusqu'à fin juillet 2019. Du reste, la législation sud-africaine en matière d'immigration selon ses dires, elle avait dû quitter cet État immédiatement à la fin de ses rapports de travail et s'y était rendue ultérieurement au moyen d'un « tourist visa » pour chercher ses affaires personnelles ainsi qu'en matière d'assurance-chômage (elle ne remplissait pas les conditions pour obtenir des indemnités de chômage en Afrique du Sud) n'est pas pertinente pour déterminer si, au regard du droit suisse, elle était assurée ou non à titre obligatoire à l'AVS d'octobre 2017 à juillet 2019. Pas plus que ne l'est le fait que des cotisations aient été prélevées en Afrique du Sud selon le droit interne sud-africain et qu'aucun remboursement de cotisations ne soit possible entre l'Afrique du Sud et la Suisse (en l'absence de convention de sécurité sociale qui réglerait cette question).

Même si la recourante avait conservé un certain lien avec la Suisse (absence d'annonce de départ de Saxon, paiement des assurances sociales et privées suisses [assurance obligatoire des soins, 2ème et 3ème piliers], maintien des relations bancaires et de l'abonnement téléphonique), le centre de son existence, tel qu'il ressort des circonstances reconnaissables pour les tiers, se trouvait en Afrique du Sud du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019, lequel l'emporte sur les liens existant avec la Suisse. Il sied de relever à cet égard que le fait que, d'après la recourante, des autorités suisses en matière d'assurance-chômage, caisse de compensation AVS du canton du Valais considéraient qu'elle avait son domicile en Suisse n'est pas déterminant, pas plus que ne l'est le fait que des documents, notamment établis par C______, mentionnaient comme adresse de domicile l'adresse en Suisse.

La recourante a en effet séjourné en Afrique du Sud, où elle a loué un appartement (dossier appelée en cause pièce 4), pour y travailler, pays passablement éloigné de la Suisse, ce qui plaide en faveur du déplacement du centre de ses intérêts professionnels. À l'inverse, elle ne s'est rendue en Suisse que par intermittence pour les fêtes de fin d'année et pour célébrer son mariage le 21 décembre 2018 (dossier recourante pièces 18 à 20). Vu la distance entre les deux pays, elle n'a pas pu passer (presque) tous les week-ends auprès de sa famille et de ses amis habitant en Suisse.

L'Afrique du Sud est donc le lieu où la recourante, du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019, a exercé une activité économique, dormi, laissé ses affaires personnelles, et passé son temps libre. Elle s'y est établie avec l'intention d'y rester jusqu'à la fin de sa mission avec D______ en Afrique du Sud, de sorte que l'on peut reconnaître qu'elle y a fixé le centre de ses relations professionnelles et personnelles dès le 1er octobre 2017 et non pas dès l'arrivée de son ami en février 2018, postérieure au moment à partir duquel elle avait déjà manifesté sa volonté de faire de l'Afrique du Sud le centre de ses intérêts vitaux. On parviendrait en effet à la même conclusion si la recourante n'avait pas d'ami/époux dans cet État durant la période en cause les autres circonstances demeurant par ailleurs inchangées.

Par conséquent, faute d'être domiciliée en Suisse pendant la période litigieuse, la recourante ne remplit pas la condition de l'art. 1a al. 1 let. a LAVS pour être assurée à titre obligatoire. Aucune cotisation AVS n'est donc due du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019.

Dans la mesure où l'assujettissement à l'AVS (et donc l'obligation de cotiser) découle de la loi, le fait que le contrat de travail entre la recourante et C______ prévoit la déduction de cotisations sociales du salaire et que les fiches de salaire relatives à la période litigieuse fassent état de déductions pour le « Home Country Social Insurance » (AVS; dossier recourante pièces 3) lesquelles, selon les explications de C______, sont, bien que hypothétiques, prises en compte dans le calcul du salaire net de l'employé expatrié (écriture du 16 mai 2022 p. 22) ne modifie pas l'issue du litige. D'autant moins que la rubrique « Social Security » dudit contrat (dossier recourante pièce 1) indique que la déduction des cotisations sociales est subordonnée à l'assujettissement des employés à l'AVS (« All employees being subject to the Swiss Social Security »), ce qui n'est pas le cas en l'espèce pour la période en cause, comme on vient de le voir. Au demeurant, la recourante savait qu'elle n'était pas affiliée à l'AVS durant cette période, ainsi que cela ressort du certificat de la caisse de pension du 16 avril 2019 (dossier recourante pièce 14).

Pour le surplus, la recourante ne peut rien tirer en sa faveur du fait que l'indemnité de départ (CHF 166'294.45) soumise à cotisations à hauteur de CHF 43'754.15 a été imputée sur la dernière année de cotisations (2017). Selon la jurisprudence, il convient de distinguer entre l'obligation de cotiser (qui se fonde directement sur la loi et qui existe dès que les conditions qui la fondent sont réunies [qualité d'assuré, existence d'une activité lucrative]) et le moment déterminant pour la perception des cotisations (le principe de réalisation prescrit simplement à quel moment les cotisations dues doivent être payées; arrêt du Tribunal fédéral 8C_338/2017 du 29 janvier 2018 consid. 4.2 et 4.3). Il est possible que les cotisations soient versées sur un salaire différé, c'est-à-dire sur un salaire qui n'est pas versé immédiatement à la fin de la période pour laquelle il est dû. L'élément déterminant pour l'obligation de cotiser correspond alors à la période où l'activité a été fournie et non celle à laquelle ces rétributions ont été versées. En revanche, le moment déterminant pour le calcul et la perception des cotisations est celui du versement du salaire. Par conséquent, les cotisations se calculent selon les taux, les franchises et les plafonds en vigueur à la date de ce versement (Michel VALTERIO, Droit de l'assurance-vieillesse et survivants [AVS] et de l'assurance-invalidité [AI], 2011, n. 595). En d'autres termes, le fait qu'il a été considéré que l'indemnité de départ versée en 2019 était soumise à cotisations à hauteur de CHF 43'754.15 pour une période d'activité pendant laquelle la recourante était affiliée à l'AVS (de janvier à septembre 2017) n'a aucune conséquence sur le non-assujettissement de celle-ci à l'AVS du 1er octobre 2017 au 31 juillet 2019 pour les motifs exposés supra.

11.         Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté.

12.         La recourante, qui succombe, n'a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

12.1 C______, appelée en cause, conclut à l'allocation de dépens.

12.2 L'appelé en cause doit être considéré comme une partie à part entière à la procédure et peut ainsi se voir allouer des dépens (ATF 127 V 107 consid. 6b; Jean Métral, in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 102 ad art. 61 LPGA).

12.3 Dans la mesure où C______, assistée d'un avocat, a obtenu gain de cause, il se justifie de lui allouer des dépens, fixés en l'espèce à CHF 800.-, à la charge de l'État, dès lors qu'ils ne peuvent être mis à la charge ni de l'assurée recourante conformément au principe de la gratuité de la procédure ancré à l'art. 61 let. a LPGA (art. 61 let. fbis a contrario LPGA depuis le 1er janvier 2021), ni de l'intimée qui a obtenu gain de cause (ATAS/624/2018 du 29 juin 2018 consid. 12; ATAS/895/2016 du 2 novembre 2016 consid. 9b).

13.         Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Alloue à l'appelée en cause une indemnité de dépens de CHF 800.-, à la charge de l'État.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le