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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2861/2011

ATAS/1160/2011 (2) du 29.11.2011 ( LPP ) , REJETE

Descripteurs : ; PRÉVOYANCE PROFESSIONNELLE ; AVANCE(EN GÉNÉRAL) ; PONT ; CONTRAT DE RENTE VIAGÈRE ; BONNE FOI SUBJECTIVE
Normes : CST 9
Résumé : En matière de prévoyance professionnelle, les statuts d'une caisse d'assurance peuvent prévoir que le bénéficiaire d'une pension de retraite a droit, jusqu'à l'ouverture de son droit aux prestations de l'AVS, à une avance et que les montants ainsi versés sont remboursables soit viagèrement soit sur une période fixe. En l'espèce, les statuts prévoient que si l'assuré souhaite rembourser l'avance sur un terme fixe, il doit le faire savoir avant d'être au bénéfice de sa pension de retraite. A défaut, le remboursement se fait viagèrement. Dès lors et in casu, l'assuré ne pouvait manquer - en prenant simplement connaissance des statuts et partant en faisant preuve de la diligence nécessaire - se rendre compte immédiatement de ce que le remboursement de l'avance de frais serait soumis à un remboursement viager, à moins de déposer une demande par écrit contraire. Il est en effet peu plausible qu'un assuré ne se préoccupe pas de savoir sur quelle durée portera le remboursement qu'il devra assumer. En conséquence, l'assuré ne saurait se prévaloir d'avoir été insuffisamment renseigné ou d'avoir été renseigné de manière erronée et les conditions en matière de protection de bonne foi de l'administré ne sont pas réalisées.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2861/2011 ATAS/1160/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 novembre 2011

1ère Chambre

 

En la cause

Monsieur P__________, domicilié à Genève

demandeur

 

contre

 

CAISSE D'ASSURANCE DU PERSONNEL DE LA VILLE DE GENEVE ET SERVICES INDUSTRIELS DE GENEVE , sise rue de Lyon 93, case postale 123, 1211 Genève 13

 

défenderesse

 


EN FAIT

Monsieur P__________, né en 1932, a été affilié à la CAISSE D'ASSURANCE DU PERSONNEL DE LA VILLE DE GENEVE ET SERVICES INDUSTRIELS DE GENEVE (ci-après la CAP) le 1er mai 1956. Le 1er janvier 1993, il a été mis au bénéfice d'une pension de retraite CAP. Le décompte de pension établi par l'Office du personnel de la Ville de Genève le 28 octobre 1992 fait état d'une avance AVS versée dès le 1er janvier 1993, qui sera remboursée dès le 1er décembre 1997, soit le premier jour du mois suivant ses 65 ans.

Par courrier du 15 décembre 1997, le Secrétariat de la CAP a confirmé la retenue viagère du remboursement de l'avance AVS à compter du 1er décembre 1997.

Par courrier du 17 décembre 1997, l'intéressé a contesté le principe même du remboursement viager. Il se réfère à un courrier du 18 janvier 1993 aux termes duquel le calcul suivant avait été prévu :

Pension de retraite 3'858 fr. 40

Avance AVS 1'248 fr. 60

Participation assurance-maladie 90 fr.

_________

Total 5'197 fr.

L'intéressé ne comprend pas pour quelle raison son revenu mensuel est diminué de 390 fr. avec le nouveau calcul :

Pension de retraite 3'858 fr. 40

Participation assurance-maladie 90 fr.

AVS 1'490 fr.

- Pension Ville 631 fr. 40

_________

Total 4'807 fr.

Par courrier du 22 décembre 1997, la CAP lui a rappelé que l'avance AVS était remboursable de façon viagère, compte tenu d'un taux d'intérêts de 4%, conformément à l'art. 38 des statuts de la Caisse.

Une note manuscrite figure sur la pièce y relative du chargé CAP, libellée comme suit : "vu l'intéressé le 5 janvier 1998. Il finit par admettre le bien-fondé de notre réponse. Il insiste pour que les futurs retraités non seulement soient informés, mais que l'on s'assure qu'ils aient pris conscience du mécanisme avance AVS."

Le 30 janvier 2001, constatant que les fonctionnaires décédant avant le remboursement ne sont plus à la charge de la CAP, de sorte que celle-ci ne subit aucune perte, l'intéressé a réclamé pour chaque année une situation de la dette, considérant qu'un remboursement viager de l'avance AVS sur dix ans constitue un maximum.

Le 13 février 2001, le Secrétariat de la CAP a expliqué à l'intéressé que le mode de remboursement viager de l'avance AVS avait été fixé au moment du départ à la retraite, et qu'il avait été calculé sur la base d'un taux d'escompte et de l'espérance de vie des retraités.

L'intéressé a fait part de son amertume le 19 février 2001. Il reproche à la CAP de le condamner à travailler jusqu'au dernier jour de sa vie.

Par courrier du 23 juillet 2004, l'intéressé a informé la CAP qu'il souhaitait régler pour le début 2005 sa dette envers elle de façon définitive, étant précisé que "vu les mauvais résultats de mon atelier et le peu d'aide de mes anciens employeurs", il proposait de ne lui accorder que 2% d'intérêts.

Le Secrétariat de la CAP lui a alors communiqué, le 30 juillet 2004, le montant dû pour rembourser en capital l'avance AVS qui lui avait été accordée, à savoir 70'176 fr. 30, et lui a expliqué comment le calcul avait été établi. Il a confirmé ce montant le 11 août 2004 à la demande de l'intéressé.

En mars 2004, la CAP a adressé à tous ses assurés et pensionnés une circulaire, les informant des changements apportés. Le commentaire suivant y est notamment fait :

"Il convient de rappeler que l'avance AVS est une prestation facultative de la CAP dont le pensionné peut bénéficier, s'il en fait la demande. L'avance AVS donne lieu à un remboursement mensuel viager. Les nouvelles bases techniques indiquent un allongement de l'espérance de vie. Dès lors, la retenue mensuelle peut être, en moyenne, opérée plus longtemps, ce qui conduit à légèrement diminuer le montant mensuel à rembourser. Par ailleurs, pour tenir compte des retraites anticipées, le tableau a été étendu aux âges avant 62 ans."

Par courrier du 16 août 2004, l'intéressé a proposé au Président de la CAP de payer le montant de 70'176 fr. 30 en lui cédant une console Louis XV en noyer massif, qu'il avait lui-même assemblée à l'ancienne et sculptée main et dont il estimait la valeur entre 90'000fr. et 100'000 fr.

Par courrier du 24 août 2004, confirmé le 21 octobre 2004, la CAP lui a répondu qu'il ne lui était pas possible d'accepter sa proposition.

Le 25 octobre 2004, l'intéressé s'est indigné de cette réponse et a constaté qu'il ne lui était toujours donné aucune justification sur le montant de 70'176 fr. 30.

Deux courriers ont encore été échangés entre les parties les 1er et 9 novembre 2004.

Par courrier du 1er décembre 2009, l'intéressé a fait état d'un contrat portant sur le remboursement de l'avance AVS conclu en novembre 1992 par l'administrateur de l'époque de la CAP et lui-même. Il allègue qu'un délai de remboursement sur douze ans était prévu dans ce contrat, de sorte qu'il expirait le 30 novembre 2009. Il en conclut qu'il ne doit plus rien à la CAP.

La CAP l'a prié de lui communiquer une copie du contrat en question le 8 décembre 2009.

Le 4 janvier 2010, se référant expressément à son précédent courrier du 1er décembre 2009, l'intéressé a constaté qu'aucun acte notarié n'avait été établi qui permettrait à la CAP de poursuivre ce viager sans motif, et a relevé que sur la feuille établie à l'attention du fisc, la CAP avait changé trois fois d'appellation, passant de "remboursement avance AVS" à "rente viagère" ou encore "remboursement viager". Il a par ailleurs dressé la liste des remboursements annuels auxquels il avait procédé depuis 1997, ainsi que celle des versements reçus de 1992 à 1997. Il constate que la CAP a ainsi réalisé un gain de 15'374 fr. 20 à son détriment. Il sollicite un arrangement.

Le 24 février 2010, il se réfère à nouveau à un délai de remboursement limité à douze ans et estime "avoir rempli mon contrat le 30 novembre 2009. En poursuivant cette ponction sur ma retraite, vous vous mettez dans l'illégalité (vol, escroquerie) punissable (code pénal suisse, usure par métier, tromperie par dol, art. 139, 144bis, 157, 326)".

Le même jour, l'intéressé s'est plaint de la CAP auprès du Directeur du service des ressources humaines de la Ville de Genève. Il explique à cet égard que

"depuis quelques temps, le bénéfice de la CAP se fait en partie sur les retraités qui deviennent trop vieux et qui ont été piégés par l'idée géniale de Monsieur Q__________ de faire participer certains (1 sur 5 environ) avec un mot inconnu en Suisse : "viager" (code pénal - code civil suisse, bibliothèque Uni-Payot, même les notaires n'ont jamais utilisé ce mot inconnu). La seule solution, faire intervenir une fiduciaire et déposer plainte au TA, mais cela coûte de l'argent et certainement beaucoup d'ennuis et cela n'est pas acceptable pour des gens qui ont donné le meilleur de leur vie à l'administration".

Par courrier du 2 mars 2010, le Secrétariat de la CAP a confirmé les termes de ses précédents courriers.

Le 3 mars 2010, la Direction des ressources humaines de la Ville de Genève a indiqué que l'intéressé avait reçu à l'époque toutes les explications nécessaires à une prise de décision.

Le 19 septembre 2011, le Tribunal fédéral a transmis à la Cour de céans comme objet de sa compétence des pièces que lui avait fait parvenir l'intéressé. Celui-ci a, le 20 septembre 2011, confirmé à la Cour de céans que

"la discussion n'étant plus possible entre ma caisse de pension (CAP) et moi-même, je fais appel à vous, afin de dégager une logique dans cette affaire. Je me suis débattu dès le début (peut-être maladroitement). J'ai tout de suite compris à une entourloupe."

Invité à se déterminer par la Cour de céans, la CAP a rappelé, le 3 novembre 2011, que l'intéressé considère avoir conclu en 1992 avec l'administrateur de l'époque de la CAP un accord portant sur le remboursement de l'avance AVS sur douze ans. Elle souligne que l'avance AVS dont l'intéressé a bénéficié était prévue par les art. 33 et 34 des statuts de la CAP, dans leur teneur au 1er janvier 1985, qu'il ressort de ces dispositions que l'avance AVS était une prestation liée à la mise à la retraite, mais octroyée à bien plaire par la Caisse. Elle était facultative, de durée limitée et il appartenait à chaque assuré de décider s'il souhaitait ou non en bénéficier, de sorte qu'un retraité de la CAP pouvait parfaitement renoncer à ladite avance et se contenter de sa pension de retraite jusqu'à la perception de prestations de l'AVS. Selon la CAP, l'avance AVS peut être assimilée à ce que l'on appelle un "pont AVS" entre la pension de retraite CAP accordée généralement avant l'âge réglementaire AVS et les prestations de l'AVS. Elle relève qu'il est usuel qu'une telle prestation se rembourse soit en viager, soit sur une période fixe moyennant une annuité plus importante. Elle précise que le remboursement de l'avance est calculé de manière actuarielle, soit au moyen d'un facteur d'escompte actuariel qui prend en considération les probabilités de décès et de survie. S'agissant du droit à la protection de la bonne foi dont se prévaut l'intéressé, alléguant qu'il aurait obtenu des assurances de l'administrateur de la CAP de l'époque, la CAP souligne que les déclarations de l'intéressé sur ce point sont vagues et surtout contredites par les pièces figurant au dossier. Celui-ci fait en effet état d'un contrat qui aurait été conclu en 1992, mais qui ne figure pas dans son dossier et qu'il n'a pas produit. Au demeurant, la CAP indique que l'intéressé avait la possibilité de solliciter un remboursement de l'avance AVS sur douze ans sur simple avis écrit donné à son administration avant la mise au bénéfice de la pension de retraite, ce conformément à l'art. 34 al. 2 des statuts, dans leur teneur au 1er janvier 1985, de sorte qu'un contrat n'avait aucune raison d'être. La CAP conclut de ce qui précède que c'est à tort que l'intéressé réclame la cessation du remboursement de l'avance AVS.

Ce courrier a été transmis à l'intéressé et la cause gardée à juger.

 

 

EN DROIT

Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du code des obligations ; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 ; art. 142 code civil).

Aux termes de l’art. 73 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP), chaque canton désigne un Tribunal qui connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit. Cette compétence a été conférée à Genève à la Cour de justice, Chambre des assurances sociales, anciennement Tribunal cantonal des assurances sociales, en vertu de l’art. 56V al. 1 let. b LOJ, selon lequel ce Tribunal connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi que des prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du code des obligations ; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 ; art. 142 code civil).

Selon la jurisprudence, la compétence des autorités visées par l'art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : LPP) est doublement définie. Elle l'est, tout d'abord, quant à la nature du litige : il faut que la contestation entre les parties porte sur des questions spécifiques de la prévoyance professionnelle, au sens étroit ou au sens large. Ce sont donc principalement des litiges qui portent sur des prestations d'assurance, des prestations de libre passage (actuellement prestations d'entrée ou de sortie) et des cotisations. En revanche, les voies de droit de l'art. 73 LPP ne sont pas ouvertes lorsque la contestation a un fondement juridique autre que le droit de la prévoyance professionnelle, même si elle devait avoir des effets relevant du droit de ladite prévoyance (ATF 125 V 168 consid. 2, 122 V 323 consid. 2b et les références).

Cette compétence est également limitée par le fait que la loi désigne de manière non équivoque les parties pouvant être liées à une contestation, savoir les institutions de prévoyance, les employeurs et les ayants droit. En ce qui concerne en particulier la notion d'institution de prévoyance au sens de l'art. 73 al. 1 LPP, elle n'est pas différente de celle définie à l'art. 48 LPP. Il s'agit des institutions de prévoyance enregistrées qui participent au régime de l'assurance obligatoire (art. 48 al. 1 LPP), avec la possibilité d'étendre la prévoyance au-delà des prestations minimales (institutions de prévoyance dites "enveloppantes" ; art. 49 al. 2 LPP) ;Ces institutions doivent revêtir la forme d'une fondation ou d'une société coopérative, ou être une institution de droit public (ATF 127 V 29).

La contestation en cause, laquelle porte sur la possibilité de déduire de la rente LPP mensuelle de l’assuré un montant à titre de compensation, relève de la LPP et par là-même des autorités juridictionnelles mentionnées à l’art. 73 LPP.

La compétence de la Cour de céans est dès lors établie pour connaître du présent litige.

Préalablement se pose la question de la recevabilité de la demande, et, dans ce cadre, celui de la capacité pour défendre de la Caisse. En effet, à la lecture de ses statuts, celle-ci ne dispose pas de la personnalité juridique.

S’agissant de la capacité d’ester en justice de l’intimée, elle a déjà été admise tacitement par la jurisprudence fédérale (ATF 113 V 198) et le Tribunal fédéral des assurances (TFA) a récemment confirmé que cette capacité n’était pas douteuse (ATF 127 V 29 ; arrêt du TFA du 1er mars 2001 en la cause B 6/2000). En substance, le TFA a retenu que si la personnalité morale conférait indiscutablement la capacité d'agir en justice, cette capacité pouvait aussi être reconnue par le législateur à des établissements publics qui en sont démunis. En l'occurrence, l'art. 86 al. 1 des statuts actuels de la Caisse (qui ont été adoptés, notamment, par le Conseil municipal de la Ville de Genève et par le Conseil d'Etat du canton de Genève) prévoit que celle-ci est représentée auprès des autorités publiques ainsi qu'en matière judiciaire par le Président du comité de gestion. Cette disposition, qui fait dûment référence à la procédure judiciaire, est suffisamment explicite pour attribuer à la Caisse la capacité d'ester en justice.

Pour le surplus, déposée dans les forme et le délai imposés par les statuts de la Caisse, la demande est recevable.

Le litige porte sur le droit de l'intéressé à mettre un terme à son obligation de rembourser l'avance AVS au 30 novembre 2009.

En l'occurrence, les statuts de la CAP, dans leur teneur en vigueur dès le 1er janvier 1985, sont applicables, l'intéressé ayant été mis au bénéfice de la pension de retraite CAP et de l'avance AVS, le 1er janvier 1993.

Aux termes de l'art. 33 de ces statuts,

"le bénéficiaire d'une pension de retraite a droit jusqu'à l'ouverture de son droit aux prestations de l'AVS à une avance non réversible calculée en fonction de la rente de vieillesse annuelle simple complète maximum de l'AVS.

Cette avance n'est versée que pour autant que le montant des annuités prévues pour son remboursement ultérieur n'excède pas celui de la pension annuelle de retraite.

L'assuré peut, par avis écrit donné à son administration avant la mise au bénéfice de la pension de retraite, renoncer à l'avance."

Cette disposition est complétée par l'art. 34 des statuts, selon lequel

"les montants versés au titre d'avance AVS sont remboursables soit viagèrement, soit en 12 ans, dès que le pensionné a droit à la rente de vieillesse AVS.

Si l'assuré ne se détermine pas par avis écrit donné à son administration quant à la durée du remboursement de l'avance AVS avant la mise au bénéfice de la pension de retraite, le remboursement se fera viagèrement."

L'art. 35 des statuts précise que

"Le taux de l'avance annuelle AVS, ainsi que celui des annuités de son remboursement, sont fixés conformément aux échelles suivantes :

a) avance AVS avec remboursement en 12 ans

Age de la retraite

Taux de l'avance

Taux de remboursement

 

Hommes

Femmes

Hommes

Femmes

 

%

%

%

%

64

89

-

11

-

63

80

-

20

-

62

72

-

28

-

61

65

90

35

10

60

59

82

41

18

59

54

74

46

26

58

49

68

51

32

57

45

62

55

38

56

42

57

58

43

55

39

52

61

48

 

b) avance AVS avec remboursement viager

Age de la retraite

Taux de l'avance

Taux de remboursement

 

Hommes

Femmes

Hommes

Femmes

 

%

%

%

%

64

91

-

9

-

63

84

-

16

-

62

77

-

23

-

61

71

93

29

7

60

66

87

34

13

59

61

81

39

19

58

56

76

44

24

57

52

71

48

29

56

49

67

51

33

55

46

63

54

37

 

Pour les âges intermédiaires, les taux sont déterminés par interpolation linéaire.

Selon l'art. 36 des statuts du règlement d'application concernant l'encouragement à la propriété du logement édicté en vertu de la loi fédérale sur l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle du 17 décembre 1993 et de l'art. 66 des statuts de la CAP,

"le bénéficiaire d'une pension de retraite a droit à une avance remboursable destinée à compléter ses revenus jusqu'à la date précédant le début du versement d'une rente AVS.

Le montant de l'avance versé ne pourra toutefois pas excéder le montant de la rente annuelle simple complète maximum de l'AVS, ni générer une annuité de remboursement supérieure à la pension de retraite annuelle versée.

Dans ces limites, l’assuré détermine lui-même le montant de l'avance qu’il souhaite recevoir, la période pendant laquelle cette avance sera versée ainsi que le mode de remboursement.

L’assuré au bénéfice d’une avance peut en tout temps renoncer à son versement. Le montant à rembourser fera alors l’objet d’un calcul particulier.

L’assuré qui a renoncé à l’avance peut ultérieurement en demander le versement."

Cette disposition est complétée par l'art. 37, aux termes duquel,

"Les montants versés au titre d’avance AVS doivent être remboursés viagèrement dès le début du versement de l’avance AVS. En cas de décès du retraité, le remboursement n’est pas reporté sur les ayants droit.

Le pensionné peut en tout temps demander à rembourser en capital, en lieu et place des annuités de remboursement, l’avance AVS qu’il a reçue ; le montant à rembourser fera l’objet d’un calcul actuariel particulier.

Montant à rembourser viagèrement pour une avance de Frs. 100.-.

Age au début du paiement de la rente

Durée du paiement jusqu'à l'âge de

62 ans 63 ans 64 ans 65 ans

55 ans

38,50

43,00

48,50

53,00

56 ans

34,50

39,50

45,00

49,50

57 ans

29,50

35,00

41,00

46,00

58 ans

24,50

30,50

37,00

42,00

59 ans

19,50

25,50

32,00

38,00

60 ans

13,50

20,00

27,00

33,00

61 ans

7,00

14,00

21,50

27,50

62 ans

-

7,50

15,50

22,00

63 ans

-

-

8,00

15,50

64 ans

-

-

-

8,00

Pour les âges intermédiaires, les montants sont déterminés par interpolation linéaire.

Dans le domaine des assurances sociales, quand bien même la procédure est régie par le principe inquisitoire, ce principe est limité par le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références). Pour autant, elles ne sont pas libérées du fardeau de la preuve, en ce sens qu'en cas d'absence de preuve, la décision sera défavorable à la partie qui voulait déduire un droit de l'état de fait non prouvé (ATF 117 V 264 consid. 3b et les références; RAMA 1999 no U 349 p. 478 consid. 2b).

L'intéressé a été mis au bénéfice d'une pension de la CAP dès le 1er janvier 1993. Il était alors âgé de 60 ans et ne pouvait encore prétendre à l'octroi de prestations de l'AVS. Il s'est vu allouer une avance AVS s'élevant à 1'248 fr. 60 par mois jusqu'au 30 novembre 1997, soit à la fin du mois au cours duquel il a atteint l'âge de 65 ans. Il a accompli ses 65 ans le 17 novembre 1997 et, dès le 1er décembre 1997, a remboursé l'avance AVS à raison de 631 fr. 40 par mois.

Les institutions de prévoyance prévoient soit un remboursement sur une période fixe, soit un remboursement viager (cf. Meinrad PITTET, Les caisses de pension de droit public dans la prévoyance professionnelle suisse, p. 177 notamment). Le montant de l'avance AVS et son remboursement sont déterminés au moyen d'un calcul actuariel fondé sur des données statistiques.

En l'occurrence, selon l'art. 34 des statuts, le remboursement de l'avance AVS se fait soit viagèrement, soit en douze ans. Si l'assuré souhaite rembourser l'avance AVS sur une durée de douze ans, il doit le faire savoir par écrit avant d'être au bénéfice de sa pension de retraite. A défaut, le remboursement se fait viagèrement. La CAP, considérant que l'intéressé ne s'est à l'époque pas manifesté, entend qu'il soit procédé à un remboursement sous forme viagère. La Cour de céans constate en effet que rien dans le dossier ne permet de conclure que l'intéressé ait déposé une demande visant à rembourser l'avance AVS sur une durée limitée. Il ne l'allègue pas au demeurant.

L'intéressé a à plusieurs reprises contesté le principe de ce "remboursement avance AVS" ou "rente viagère" ou "remboursement viager", la première fois, le 17 décembre 1997, à réception du courrier de la CAP lui confirmant la retenue viagère à compter du 1er décembre 1997. En 2004, il a demandé à s'acquitter de sa dette et, après avoir pris connaissance du montant de celle-ci, a notamment proposé à la CAP de lui céder en échange un meuble type console Louis XV, dont il estimait la valeur à 90'000 fr. ou 100'000 fr.

Il a enfin considéré qu'il devait cesser de rembourser l'avance AVS au 30 novembre 2009, se fondant sur un contrat qu'il aurait conclu avec l'administrateur de la CAP de l'époque, selon lequel le remboursement était prévu sur douze ans.

Force est toutefois de constater que ce contrat ne figure pas dans le dossier de l'intéressé. Alors que la CAP lui en a demandé expressément une copie, l'intéressé n'a du reste transmis aucun document. La Cour de céans constate par ailleurs qu'il n'en fait état pour la première fois que dans son courrier du 1er décembre 2009. Il n'en avait jamais fait mention auparavant, considérant même le 30 janvier 2001, qu'un remboursement viager de l'avance AVS sur dix ans constituerait un maximum. Quoi qu'il en soit, on ne comprend pas pour quelle raison il aurait conclu un contrat avec l'administrateur de la CAP de l'époque, puisqu'il lui aurait suffi de déposer une demande par écrit pour solliciter un remboursement sur douze ans de l'avance AVS, ce qu'il n'a pas fait.

L'intéressé allègue implicitement avoir été mal renseigné par la CAP.

A la lecture des nombreux courriers adressés par l'intéressé à la CAP au cours des années, il apparaît en effet qu'il n'avait pas compris qu'il devrait rembourser l'avance AVS sur le mode d'un remboursement viager. La note manuscrite figurant sur le courrier du 22 décembre 1997 de la CAP confirme, si besoin était, que l'intéressé n'avait pas réalisé qu'il devrait rembourser l'avance AVS jusqu'à son décès.

Selon la jurisprudence, l'administration ne peut pas exiger la restitution de prestations indues lorsque sont remplies les conditions posées par la jurisprudence relative au droit constitutionnel à la protection de la bonne foi, cette question devant être clairement distinguée de celle de la remise de l'obligation de restituer (ATFA C 80/05 du 3 février 2006; ATF 116 V 301 sv. consid. 4c et 4d). En effet, si un renseignement erroné donné par l'administration peut, à certaines conditions, conduire au maintien d'un avantage contraire au droit, conformément à l'art. 9 Cst. (cf. ATF 116 V 298 consid. 3), il en va de même, a fortiori, d'une décision erronée, de sorte que les règles relatives à la reconsidération d'une décision entrée en force n'excluent pas celles découlant du droit à la protection de la bonne foi (cf. ATF 114 Ia 106ss consid. 2a, 214 consid. 3b, 113 V 70 consid. 2 et les références; DTA 1999 n°40 p. 237 consid. 3a; RAMA 1988 no K 768 p. 207).

Le droit à la protection de la bonne foi est expressément consacré à l’art. 9 Cst. Selon la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst., qui est toujours valable (ATF 127 I 36 consid. 3a, 126 II 387 consid. 3a ; RAMA 2000 n. KV 126 p. 223), l’administration doit s’abstenir de tout comportement propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part. Le citoyen peut ainsi exiger de l’autorité qu’elle se conforme aux promesses ou assurances qu’elle lui a faites et ne trompe pas la confiance qu’il a légitimement placée dans celles-ci. De la même façon, le droit à la protection de la bonne foi peut aussi être invoqué en présence, simplement, d’un comportement de l’administration susceptible d’éveiller chez l’administré une attente ou une espérance légitime (ATF 129 II 381 consid. 7.1 et les nombreuses références citées).

Pour cela, les conditions cumulatives suivantes doivent être réunies : 1. il faut que l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard de personnes déterminées ; 2. qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de sa compétence ; 3. que l’administré n’ait pu se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement obtenu ; 4. qu’il se soit fondé sur celui-ci pour prendre des dispositions qu’il ne saurait modifier sans subir un préjudice ; 5. que la loi n’ait pas changé depuis le moment où le renseignement a été donné (ATF 121 V 66 consid. 2a et les références). Ces principes s'appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante: que l'administré n'ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu'il n'avait pas à s'attendre à une autre information (ATF 131 V 472 consid. 5).

 

Le droit à la protection de la bonne foi suppose également un lien de causalité entre le renseignement obtenu et les dispositions prises par l'administré. Un tel lien existe si l'on peut admettre que celui-ci se serait comporté autrement sans le renseignement donné par l'autorité. En revanche, tout lien de causalité doit être nié si l'on peut admettre que même sans le renseignement obtenu, l'administré aurait pris les mêmes dispositions (WEBER-DÜRLER, Vertrauensschutz im öffentlichen Recht, Bâle 1983, p. 102; le même auteur, Falsche Auskünfte von Behörden, in: ZBl 1991 p. 16). En ce qui concerne la preuve du lien de causalité, on ne saurait poser des exigences trop strictes. En effet, à partir du moment où l'administré a demandé des renseignements, il en découle la présomption de fait qu'en cas de réponse négative, celui-ci aurait adopté un autre comportement. Dès lors, la preuve du lien de causalité sera considérée comme donnée s'il apparaît vraisemblable, selon l'expérience générale de la vie, que l'administré se serait comporté autrement sans le renseignement obtenu (ATF 121 V 67 consid. 2b; ATFA non publié du 7 mai 2001, déjà cité).

En l'espèce, il est difficile, voire impossible, de déterminer quels sont précisément les renseignements qui ont été donnés à l'intéressé au moment où il a été mis au bénéfice de sa pension de retraite CAP. Il résulte d'un courrier du 27 juillet 1992 adressé par la CAP à l'intéressé qu'un responsable de l'Office du personnel de la Ville de Genève le recevrait, afin de lui fournir tous les renseignements nécessaires. On ignore si cet entretien a effectivement eu lieu, et le cas échéant, si l'intéressé y a reçu des explications utiles concernant en particulier l'avance AVS et son remboursement. Il y a lieu de relever que sur les décomptes de pension valables dès le 1er janvier 1993, établis par la CAP le 28 octobre 1992, est uniquement indiqué le terme de "remboursement avance AVS". Aucune proposition de pension, document sur lequel aurait pu notamment figurer des explications sur le remboursement, n'a été communiquée à l'intéressé, la CAP n'en préparant une que sur demande. Ce n'est que dans son courrier du 15 décembre 1997 que la CAP fait expressément mention d' "une retenue viagère" dès le mois suivant le 65ème anniversaire de l'intéressé, soit dès le 1er décembre 1997.

La question de savoir si la CAP a ou non donné à l'intéressé des informations lacunaires s'agissant du remboursement de l'avance AVS peut toutefois être laissée ouverte dans la mesure où la troisième condition, dont la réalisation est nécessaire dans le cadre de l'examen du droit à la protection de la bonne foi ne peut être considérée comme remplie. Il apparaît en effet que l'intéressé ne pouvait manquer, en faisant preuve de la diligence dont tout homme raisonnable doit faire preuve dans des circonstances semblables, en prenant par exemple connaissance des statuts, de se rendre compte immédiatement de ce que le remboursement de l'avance AVS serait soumis à un remboursement viager, à moins de déposer une demande par écrit contraire. Il lui appartenait en cas de doute de se renseigner. Il paraît à cet égard peu plausible qu'un assuré ne se préoccupe pas de savoir sur quelle durée portera le remboursement qu'il devra assumer. On ne saurait par ailleurs soutenir, sans autre, que l'intéressé aurait, s'il avait su qu'il avait le choix, au moment où il a été mis au bénéfice de sa pension de retraite CAP, entre un remboursement sur 12 ans et un remboursement viager, nécessairement opté pour la première solution, dans la mesure où le montant à rembourser mensuellement aurait été bien plus élevé dans ce cas.

En l'occurrence, les conditions en matière de protection de la bonne foi de l'administré ne sont manifestement pas réalisées. En particulier, il n'a pas été établi, au degré de vraisemblance requis par la jurisprudence, que la CAP ait fourni à l'intéressé aucun renseignement erroné qui permettrait d'exiger d'elle qu'elle reconnaisse à celui-ci le droit de mettre un terme à son obligation de rembourser l'avance AVS au 30 novembre 2009.

La demande est dès lors rejetée.

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare la demande recevable.

Au fond :

La rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Doris GALEAZZI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le