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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2849/2013

ATA/809/2015 du 11.08.2015 sur JTAPI/445/2014 ( ICC ) , ADMIS

Recours TF déposé le 22.09.2015, rendu le 23.08.2016, REJETE, 2C_837/15
Descripteurs : OBJET DU LITIGE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; MOTIVATION DE LA DÉCISION ; IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL ; TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE ; DÉDUCTION DU REVENU(DROIT FISCAL) ; DÉDUCTION POUR FRAIS D'ENTRETIEN D'IMMEUBLE ; FARDEAU DE LA PREUVE ; GARANTIE DE LA PROPRIÉTÉ ; EFFET CONFISCATOIRE DE L'IMPÔT
Relations : Cst.29.al2; LHID.53; LPFisc.59; aLIPP-V.4.ch2; aLIPP-V.6.al4; aLIPP-V.9.letd; LIPP.34.letd; LIPP.38.letd; Cst.26.al1
Résumé : Contestation des bordereaux de rappel d'impôt ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010. L'objet du litige se limite à la conformité au droit des rappels d'impôt, à l'exclusion de l'ICC fixé par taxations ordinaires. Possibilité d'opérer, dans le cadre du rappel d'impôt, des déductions sans lien de connexité avec les éléments justifiant le rappel ? Question controversée en doctrine et non tranchée par le Tribunal fédéral. La chambre administrative laisse la question ouverte, la contribuable n'ayant pas apporté la preuve des frais médicaux et d'entretien d'immeuble allégués. Rappel de la jurisprudence fédérale et cantonale en matière d'impôt confiscatoire. Il faut prendre en compte l'ensemble des circonstances du cas d'espèce et l'imposition totale du contribuable pour évaluer le caractère confiscatoire de l'imposition. En l'espèce, la contribuable n'a pas établi sa situation fiscale globale. Bordereaux de rappel d'impôt confirmés.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2849/2013-ICC ATA/809/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 août 2015

 

dans la cause

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

Mme A______
représentée par Me Daniel Peregrina, avocat

et

Mme A______
représentée par Me Daniel Peregrina, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 (JTAPI/445/2014)


EN FAIT

1.1) Par courrier du 9 juillet 2004, Mme A______ a demandé à l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) de l'imposer de manière illimitée pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) à Genève, séparément de son époux, M. A______, décédé en 2012 et auparavant assujetti dans le canton de Zurich, et d'accepter l'imposition commune des époux A______ dans ce dernier canton pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD).

Les conjoints étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Domiciliée à B______, Mme A______ était, sur le plan économique, totalement indépendante de son mari, assumant seule les frais liés à sa demeure genevoise et ses dépenses personnelles. Son domicile fiscal se trouvait à Genève. Son époux avait conservé son centre de vie et son domicile fiscal à Zurich. Les principaux intérêts personnels et économiques du couple se trouvaient à Zurich.

2.2) Par courrier du 25 août 2004, l'AFC-GE a adhéré aux termes du courrier du 9 juillet 2004, acceptant l'existence de domiciles fiscaux séparés des époux A______, l'assujettissement illimité de Mme A______ à Genève pour l'ICC et la taxation du couple à Zurich pour l'IFD.

3.3) Par bordereau du 19 juillet 2006, l'AFC-GE a fixé le montant dû par Mme A______ pour l'ICC 2005 à CHF 2'433'008.75, le total des impôts et taxes avant imputations s'élevant à CHF 2'960'845.90, pour un revenu et une fortune imposables CHF 3'152'349.- et CHF 208'957'834.-. Des charges et frais d'entretien d'immeuble de CHF 38'087.- et des frais bancaires de CHF 150'848.- étaient déduits du revenu brut.

4.4) Par bordereau rectificatif du 7 mars 2007, l'AFC-GE a fixé le montant dû pour l'ICC 2004 CHF 2'397'754.45, le total des impôts et taxes avant imputations se montant à CHF 2'842'209.35 et le revenu et la fortune imposables à CHF 3'224'675.- et CHF 194'067'325.-. Des charges et frais d'entretien de CHF 116'319.- et des frais bancaires de CHF 138'291.- étaient déduits du revenu brut.

5.5) Par bordereau du 18 septembre 2007, l'AFC-GE a fixé le montant dû pour l'ICC 2006 à CHF 2'523'113.20, le total des impôts et taxes s'élevant, avant imputations, à CHF 3'102'450.70, pour un revenu et une fortune imposables de CHF 3'285'285.- et CHF 219'525'112.-. Les charges et frais d'entretien d'immeuble déduits du revenu brut se montaient à CHF 156'751.- et les frais bancaires à CHF 165'544.-.

6) Le 18 août 2008, la contribuable a transmis à l'AFC-GE sa déclaration fiscale pour l'année 2007, indiquant être séparée du point de vue fiscal et sans faire valoir de déduction pour frais médicaux.

7.7) Par bordereau du 7 novembre 2008, l'AFC-GE a fixé le montant dû pour l'ICC 2007 à CHF 2'581'404.05, le total des impôts et taxes se montant à CHF 3'269'456.55 avant imputations et le revenu et la fortune imposables à CHF 3'834'180.- et CHF 219'172'144.-. Des charges et frais d'entretien d'immeuble de CHF 51'394.- et des frais bancaires de CHF 194'467.- étaient déduits du revenu brut.

8.8) Le 20 septembre 2010, l'intéressée a communiqué à l'AFC-GE sa déclaration fiscale pour la période fiscale 2009, demandant la déduction du salaire de ses deux jardiniers, de CHF 123'600.- chacun, comme frais d'entretien d'immeuble.

9.9) Le 27 mai 2011, la contribuable a transmis à l'AFC-GE sa déclaration fiscale 2010, sollicitant à nouveau la déduction du salaire des jardiniers, de CHF 123'600.- chacun, ainsi que de la part employeur des cotisations à l'assurance-vieillesse et survivants (ci-après : AVS) et au deuxième pilier, d'un total de CHF 28'993.-, en tant que frais d'entretien d'immeuble.

10.10) Par bordereaux rectificatifs du 13 juillet 2012, l'AFC-GE a fixé les montants dus pour l'ICC 2009 et 2010 à CHF 1'995'993.80 et CHF 2'003'715.20, le total des impôts et taxes avant imputations se montant à CHF 2'716'759.40 en 2009 et CHF 2'756'619.10 en 2010 et le revenu et la fortune imposables s'élevant à CHF 3'321'114.- et CHF 177'954'351.- en 2009 ainsi que CHF 3'501'667.- et CHF 176'248'483 en 2010. Les charges et frais d'entretien d'immeuble déduits du revenu brut s'élevaient à CHF 383'108.- en 2009 et CHF 146'484.- en 2010 et les frais bancaires à CHF 113'060.- en 2009 et CHF 146'945.- en 2010.

Les salaires des jardiniers et les cotisations employeur à l'AVS et à la prévoyance professionnelle n'étaient pas déductibles au titre de charges et frais d'entretien.

11.11) Par jugement du 21 octobre 2012 (JTAPI/1300/2012), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a déclaré le recours interjeté contre ces bordereaux rectificatifs le 9 août 2012 par l'intéressée irrecevable.

12.12) Dans une annonce spontanée du 30 novembre 2012, Mme A______ a signalé à l'AFC-GE des éléments de fortune mobilière et de revenu, détenus dans un compte bancaire géré à Genève et involontairement omis dans les déclarations fiscales des années 2003 à 2011.

13.13) a. Par courrier du 13 décembre 2012, la contribuable a demandé à l'AFC-GE de tenir compte, dans le cadre de la révision des taxations, de déductions de frais médicaux à hauteur de CHF 1'624'245.- pour l'année fiscale 2007 et des frais d'entretien d'immeuble - salaire des deux jardiniers et charges sociales supportées par l'employeur - de respectivement CHF 276'193.- et CHF 247'200.- pour les années fiscales 2009 et 2010.

La décision de taxation, qui faisait suite à une annonce spontanée ou à un rappel d'impôt, ouvrait à nouveau la taxation et permettait au contribuable de faire valoir ses droits comme dans la procédure ordinaire.

b. Elle a joint à son courrier une liste de frais médicaux pour 2007, indiquant la nature et le montant de chaque poste de frais.

14.14) Par courrier du 22 février 2013, l'AFC-GE a informé l'intéressée de l'ouverture d'une procédure en rappel d'impôt et d'une procédure pénale pour soustraction d'impôt pour l'ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010.

Les reprises sur le revenu net, après déduction des frais, et sur la fortune s'élevaient à CHF 2'196.- et CHF 2'261'672.- pour 2004, CHF 3'614.- et CHF 4'399'459.- pour 2005, CHF 3'574.- et CHF 3'335'451.- pour 2006, CHF 2'998.- et CHF 2'168'104.- pour 2007, CHF 2'688.- et CHF 3'054'799.- pour 2009 ainsi que CHF 3'310.- et CHF 2'850'180.- pour 2010. Des bordereaux de rappel d'impôt, comprenant des intérêts de retard, seraient édités.

15.15) Par bordereaux de rappel d'impôt ICC du 19 avril 2013, l'AFC-GE a fixé le montant du rappel d'impôt à CHF 22'206.85 pour 2004, CHF 42'993.80 pour 2005, CHF 32'855.30 pour 2006, CHF 21'566.65 pour 2007, CHF 29'908.10 pour 2009 et CHF 29'795.90 pour 2010, le total des impôts avant et après imputations s'élevant à CHF 2'864'416.20.- et CHF 2'419'921.30 en 2004, CHF 3'003'839.70 et CHF 2'503'088.25 en 2005, CHF 3'135'306.- et CHF 2'555'968.45 en 2006, CHF 3'291'023.20 et CHF 2'602'970.70 en 2007, CHF 2'746'667.50 et CHF 2'025'841.90 en 2009 ainsi que CHF 2'786'415.- et CHF 2'033'501.10 en 2010.

Le revenu et la fortune imposables se montaient à CHF 3'226'871.- et CHF 196'328'967.- en 2004, CHF 3'155'963.- et CHF 213'357'215.- en 2005, CHF 3'288'859.- et CHF 222'860'516.- en 2006, CHF 3'837'178.- et CHF 221'340'217.- en 2007, CHF 3'323'802.- et CHF 181'009'067.- en 2009 ainsi que CHF 3'504'977.- et CHF 179'271'087.- en 2010. La fortune nette et le rendement net de la fortune étaient de CHF 203'851'443.- et CHF 2'345'733.- en 2004, CHF 221'548'587.- et CHF 2'250'271.- en 2005, CHF 231'714'768.- et CHF 2'369'263.- en 2006, CHF 230'857'191.- et CHF 2'905'384.- en 2007, CHF 191'859'073.- et CHF 2'453'647.- en 2009 ainsi que CHF 190'703'638.- et CHF 2'576'361.- en 2010.

16.16) Par décision du même jour, l'AFC-GE a prononcé la non-punissabilité de la contribuable pour l'amende et pour toutes les infractions commises dans le but de soustraire des impôts en relation avec les périodes fiscales 2004 à 2007, 2009 et 2010.

17.17) Par courrier du 22 mai 2013, Mme A______ a élevé réclamation à l'encontre de ces bordereaux de rappel d'impôt, concluant à leur annulation.

L'ICC représentait 88,8 % de ses revenus imposables en 2004, 95,2 % en 2005, 95,3 % en 2006, 85,8 % en 2007, 82,8 % en 2009 et 79,5 % en 2010. Vu le taux très élevé du niveau d'impôt, sa durée d'application de plus de sept ans, l'absence de déductions exceptionnelles pouvant réduire la base imposable et l'impossibilité de transférer les impôts sur des tiers, l'impôt était confiscatoire. Elle pouvait faire valoir, dans le cadre de son annonce spontanée, la déduction, non sollicitée auparavant, des frais médicaux dépassant 1 % de son revenu net ainsi que du salaire et de la part employeur des cotisations à l'AVS et au deuxième pilier pour ses jardiniers, s'agissant de frais d'entretien de jardin servant à maintenir la valeur de l'immeuble. Il n'existait pas de différence entre l'utilisation de prestataires externes ou de jardiniers employés, de sorte que la qualification fiscale devait rester la même.

18.18) Par décision du 2 août 2013, l'AFC-GE a rejeté la réclamation.

La prise en compte de déductions sans lien de connexité avec les éléments justifiant le rappel d'impôt, qui auraient pu être invoquées dans le cadre de la procédure de taxation, était exclue. La contribuable n'avait pas fait valoir la déduction des frais médicaux dans sa déclaration fiscale pour l'année 2007 et la décision de taxation était entrée en force sans avoir été contestée. Le refus de prise en compte des salaires des jardiniers et de la part employeur charges sociales y afférentes pour les périodes fiscales 2009 et 2010 avait été confirmé par décisions sur réclamations, entrées en force suite au jugement d'irrecevabilité du TAPI.

La fortune nette de l'intéressée était composée à 70 % de comptes bancaires et placements financiers, à 10 % d'immeubles, à 4 % de métaux précieux et à 16 % de contrats d'assurance de rente viagère avec valeur de rachat et s'était accrue entre 2004 et 2007 d'environ 10 %, nonobstant la charge fiscale. La baisse de son portefeuille de titres durant les périodes 2008 et suivantes était essentiellement due à la baisse boursière et à la moins-value de l'euro. Sa charge fiscale n'avait pas empêché le développement ou le maintien de son patrimoine. Ayant laissé entrer en force les taxations ordinaires, elle avait admis l'absence de caractère confiscatoire de l'imposition.

19.19) Par acte du 3 septembre 2013, la contribuable a recouru auprès du TAPI contre cette décision sur réclamation, concluant à son annulation et, principalement, à la constatation du caractère confiscatoire de l'imposition, ou, subsidiairement, à la déduction des frais médicaux et d'entretien d'immeuble.

Elle a repris et complété l'argumentation formulée auparavant.

Le rappel d'impôt constituant un moyen de rectification indépendant, il y avait lieu de procéder à une appréciation globale des éléments imposables, de sorte que la déduction des frais médicaux et de jardiniers devait être admise. Il ne s'agissant pas d'ouvrir à nouveau une taxation définitive mais d'apprécier la capacité contributive adéquate d'une personne sur la base de l'ensemble de ses revenus et charges déductibles.

20.20) Par réponse du 16 janvier 2013 (recte : 2014), l'AFC-GE a conclu au rejet du recours, reprenant et précisant son argumentation précédente.

Les calculs de l'intéressée ne prenaient en compte que ses éléments de revenu et fortune déclarés à Genève. Malgré l'accord fiscal de 2004, les époux A______ demeuraient mariés, de sorte que leur situation fiscale globale était déterminante. L'intéressée n'avait pas démontré le caractère confiscatoire des bordereaux attaqués. Même à prendre en considération les seuls éléments de revenu et fortune déclarés à Genève par l'intéressée, sa fortune, très importante, avait augmenté de 11 % de 2004 à 2007. La baisse de son portefeuille de titres dès 2008 devait être relativisée car elle pourrait revenir à meilleure fortune en cas d'amélioration des rendements boursiers et du cours du change. La contribuable avait investi la majorité de sa fortune dans des produits majoritairement orientés vers un gain en capital, générant de faibles rendements. Elle se trouvait dans une situation identique avant les rappels d'impôts. Sa légitimité à invoquer le caractère confiscatoire de son imposition dans le cadre des procédures en rappel d'impôt était douteuse.

La déduction des frais médicaux et des frais d'entretien d'immeuble avait été tranchée définitivement dans le cadre de la procédure ordinaire et ne faisait pas l'objet des rappels d'impôt. Même à considérer les requêtes de l'intéressée comme des demandes de révision des taxations, elles seraient irrecevables et manifestement infondées.

21.21) Par jugement du 28 avril 2014, notifié à l'AFC-GE le 5 mai 2014 et expédié pour notification à la contribuable le même jour, le TAPI a partiellement admis le recours, annulé les bordereaux de rappel d'impôt ICC 2004 à 2006 et confirmé les bordereaux de rappel d'impôt ICC 2007, 2009 et 2010.

Le rappel d'impôt n'avait porté que sur les revenus de la fortune mobilière. La contribuable demandait de revenir sur les éléments de ses taxations, entrées en force, qui n'étaient pas en lien avec ces revenus. L'AFC-GE avait à bon droit refusé d'opérer les déductions demandées.

L'intéressée ne pouvant remettre en cause la taxation résultant des bordereaux entrés en force, seuls les suppléments d'impôt litigieux pouvaient être annulés s'ils étaient confiscatoires après addition avec les impôts initiaux. La fortune de la contribuable avait crû de près de CHF 15'000'000.- de 2004 à 2007 puis baissé à CHF 176'248'483.- entre 2008 et 2010, notamment en raison de la crise financière de 2008. Si cette dernière n'était pas contrainte, à cause de la charge fiscale, à entamer sa fortune pour vivre, les impôts dépassant le taux de 70 % étaient confiscatoires. L'ICC fixé par l'AFC-GE représentait 75 % des revenus imposables en 2004, 95,18 % en 2005, 77,72 % en 2006, 67,84 %, en 2007, 60,95 % en 2009 et 58,02 % en 2010.

22.22) Par acte du 4 juin 2014, l'AFC-GE a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation en relation avec les années fiscales 2004 à 2006, à sa confirmation pour le surplus et, principalement, à la confirmation de la décision sur réclamation du 2 août 2013, ou, subsidiairement, au renvoi de la cause au TAPI pour instruction et décision prenant en compte l'ensemble des éléments imposables des époux A______.

Elle a repris et complété l'argumentation développée précédemment.

Le TAPI n'avait pas examiné la question de la nécessité, pour l'examen du caractère confiscatoire de l'imposition, de prendre en compte la situation fiscale globale des époux A______. La cause devait lui être renvoyée pour préserver le double degré de juridiction.

Les époux A______ formaient toujours une union conjugale, de sorte que leur situation fiscale globale, incluant les éléments de revenu et fortune imposés dans le canton de Zurich, était déterminante. Le couple disposant d'une grande fortune, la contribuable avait la possibilité de reporter l'impôt sur son mari. Le TAPI avait implicitement reconnu que le noyau essentiel de la propriété privée n'avait pas été touché et il avait à tort et de manière arbitraire appliqué le taux de 70 %. En reconnaissant le caractère confiscatoire de l'imposition dans le cadre des procédures en rappel d'impôt, le TAPI avait avantagé l'intéressée par rapport à un contribuable ayant déclaré l'ensemble de ses revenu et fortune dans le cadre de la procédure de taxation ordinaire et ne pouvant plus invoquer le caractère confiscatoire de son imposition par la suite.

23.23) Par acte du même jour, Mme A______ a également recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, concluant à sa confirmation concernant les périodes fiscales 2004 à 2006, à son annulation relativement aux années fiscales 2007, 2009 et 2010, à la constatation du caractère confiscatoire et à l'annulation des taxations ICC 2007, 2009 et 2010 ainsi qu'à la déduction des frais médicaux pour l'année 2007 et des frais d'entretien d'immeuble pour les périodes fiscales 2009 et 2010, avec suite de frais et « dépens ».

Elle a repris et précisé les arguments avancés antérieurement.

L'impôt était confiscatoire dès qu'il dépassait 60 % des revenus imposables. L'augmentation de fortune entre 2004 et 2008 n'avait été possible qu'en raison de la perception de rentes viagères annuelles de CHF 2'000'000.- à CHF 2'500'000.-, de sorte que l'évolution du niveau de la fortune n'était pas un critère pertinent.

Pour calculer le pourcentage pertinent, il fallait prendre en compte l'ICC total et non le montant dû après imputations.

Ayant déclaré spontanément des revenus ne figurant pas dans sa déclaration initiale, elle pouvait faire valoir les déductions omises, à concurrence des nouveaux revenus déclarés. L'acceptation des nouveaux éléments tant de revenu que de déduction constituait la seule manière de permettre un certain équilibre entre la contribuable et l'AFC-GE. Elle était légitimée à demander la déduction des frais médicaux et de jardin.

24.24) Le 13 juin 2014, le TAPI a transmis son dossier à la chambre administrative, sans formuler d'observations.

25.25) Par réponse du 8 juillet 2014, la contribuable a conclu au rejet du recours de l'AFC-GE, avec suite de frais et « dépens ».

Elle a développé certains points de son argumentation précédente.

Malgré les rentrées de liquidités de CHF 34'600'000.- de 2004 à 2010, sa fortune avait diminué de CHF 17'000'000.-, la charge fiscale de CHF 16'122'511.80 ayant contribué à cette diminution.

Les époux A______ vivaient sous le régime de la séparation de biens et avaient pris des mesures successorales pour une séparation financière. La contribuable occupait une résidence séparée dans un autre canton, était totalement indépendante de son mari du point de vue financier et subvenait seule à l'entier de ses besoins, sous réserve de la charge marginale de l'IFD. La taxation séparée avait été acceptée et apparaissait dans chacune de ses déclarations d'impôts. Les conjoints A______ avaient choisi de vivre de manière indépendante sur les plans financier et fiscal.

26.26) Par réponse du 9 juillet 2014, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours de Mme A______.

Elle a repris l'argumentation formulée auparavant et souligné que les rentes viagères de l'intéressée ne justifiaient pas à elles seules l'augmentation de sa fortune mobilière.

27.27) Par réplique du 2 septembre 2014, la contribuable a persisté dans l'intégralité de ses conclusions, reprenant l'argumentation exposée précédemment.

28.28) a. Par courrier du 16 avril 2015, en réponse à une demande de renseignements de la chambre administrative du 2 septembre 2014, Mme A______ a affirmé que la diminution de sa fortune n'était pas une conséquence du marché mais de l'effet de l'impôt confiscatoire.

L'impôt était déjà confiscatoire en tenant compte uniquement de l'ICC, sans prise en considération de l'IFD, que son époux prenait entièrement à sa charge. Elle-même ne supportait que l'ICC. La prise en compte de l'IFD théorique afférant à ses revenus ne ferait qu'accroître sa charge fiscale et le caractère confiscatoire de l'imposition, le rapport entre l'impôt et le revenu imposable se montant, dans cette configuration, à 100,27 % en 2004, 106,68 % en 2005, 106,83 % en 2006, 97,27 % en 2007, 94,14 % en 2009 et 91 % en 2010.

Les dépenses de Mme A______ correspondaient essentiellement à des dépenses d'entretien de sa propriété immobilière, des frais bancaires et des dépenses médicales, pour un total moyen d'environ CHF 2'300'000.- par année, soit CHF 13'800'000.- au total pour les années considérées. Ses dépenses représentaient environ 44 % de ses revenus, apparaissaient proportionnées à ceux-ci et n'étaient pas susceptibles à elles seules d'engendrer un appauvrissement. Pour les périodes en cause, l'impôt représentait environ 56 % de ses dépenses et apparaissait le facteur essentiel de l'érosion de sa fortune. Le rendement global de sa fortune sur la période s'élevait à CHF 15'500'000.-, soit un rendement très supérieur au taux de 1 %, démontrant ainsi une gestion de patrimoine efficace et une performance de gestion supérieure aux standards.

b. Elle a versé à la procédure le relevé de la performance de sa fortune pour chaque année litigieuse ainsi qu'un tableau de ses dépenses pour chaque année concernée, évaluées selon la méthode déductive, soit par évaluation approximative en retirant des avoirs bancaires les gains et pertes sur portefeuille additionnés aux revenus bruts de l'année considérée.

29.29) a. Dans ses déterminations du 11 mai 2015, l'AFC-GE a persisté dans l'intégralité de ses conclusions, reprenant certains éléments déjà exposés et développant son argumentation.

La méthode utilisée pour établir le montant des dépenses ne permettait pas d'établir ses réelles dépenses annuelles et donc de prouver que la contribuable avait dû entamer sa fortune. Si elle affirmait que ses dépenses, constituées essentiellement des frais d'entretien de ses propriétés immobilières, bancaires et médicaux, s'élevaient à CHF 2'300'000.- par an, il ressortait de ses déclarations fiscales que les frais annuels d'entretien de ses biens immobiliers s'élevaient en moyenne à CHF 148'690.- et ses frais bancaires annuels à CHF 151'526.-. Elle n'avait par ailleurs annoncé aucuns frais médicaux dans ses déclarations fiscales, sous réserve de la somme de CHF 1'663'411.- alléguée dans le cadre de la présente procédure pour l'année 2007. Le total de ses dépenses essentielles selon ses taxations et allégations s'élevait donc à CHF 3'464'709.- pour toutes les années en cause, montant bien éloigné des CHF 13'800'000.- invoqués par
Mme A______. Sa fortune brute mobilière s'était accrue en 2011, 2012 et 2013. Sa charge fiscale n'avait pas épuisé largement la substance de l'objet imposable ni empêché la reconstitution de son patrimoine.

La contribuable n'avait pas apporté de réponse précise en relation avec l'IFD. Du fait de l'union conjugale qu'elle formait avec son époux, la situation fiscale globale du couple était déterminante pour l'analyse du caractère confiscatoire de l'imposition.

b. À l'appui de ses déterminations, l'AFC-GE a versé à la procédure les déclarations fiscales de la contribuable pour les années fiscale 2011 à 2013, démontrant que la fortune brut de cette dernière avait augmenté durant ces années.

30.30) Dans son écriture du 17 juin 2015, la contribuable a maintenu sa position.

La diminution de fortune ressortait directement des avis de taxation émis par l'AFC-GE. Son portefeuille avait, pour les années en cause, enregistré une performance positive de CHF 53'000'000.-, de sorte que la diminution de fortune de près de CHF 2'000'000.- était d'autant plus incontestable. Sa fortune aurait pu atteindre CHF 55'000'000.- en cas de performance neutre. Il ne se justifiait pas d'isoler les années 2004 à 2007, années les plus fastes. Avec une performance de CHF 42'000'000.-, l'augmentation de fortune alléguée par l'AFC-GE cachait en réalité une érosion du patrimoine de 19 %. La méthode de calcul des dépenses n'était pas contestable et la question n'était pas la déductibilité des dépenses sur le plan fiscal. Si ses dépenses étaient inférieures au montant calculé, cela démontrait d'autant mieux que la diminution de la fortune avait été causée par la charge fiscale.

31.31) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.1) Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours de l'AFC-GE et de la contribuable sont recevables (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.2) Il ne ressort pas clairement des conclusions de la contribuable si elle entend remettre en cause l'ensemble des taxations ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010 ou uniquement les rappels d'impôt, de sorte qu'il convient d'examiner l'objet du litige.

a. L'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). L'acte de recours contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d'irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

b. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/744/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2a ; ATA/751/2013 du 12 novembre 2013 consid. 6). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés (ATA/744/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2a ; ATA/336/2014 du 13 mai 2014 consid. 4a ; ATA/790/2013 du 3 décembre 2013 consid. 4 ; ATA/560/2006 du 17 octobre 2006 consid. 5b). Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/744/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2a ; ATA/336/2014 du 13 mai 2014 consid. 4a ; ATA/163/2010 du 9 mars 2010 consid. 2c ; ATA/503/2009 du 6 octobre 2009 consid. 2b).

c. En l'espèce, la contribuable a élevé réclamation, puis recouru auprès du TAPI et de la chambre administrative en remettant en cause les bordereaux du
19 avril 2013 prononçant des rappels d'impôt pour l'ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010, alors que les taxations ordinaires pour l'ICC des années en cause étaient entrées en force. L'objet du litige se limite donc à la conformité au droit des rappels d'impôt, à l'exclusion de l'ICC fixé par taxations ordinaires.

Le litige porte par conséquent sur la conformité au droit du jugement du TAPI confirmant le refus de déduction, dans le cadre des rappels d'impôt, des frais médicaux en 2007 ainsi que des frais de jardiniers en 2009 et 2010 et constatant le caractère confiscatoire des taxations en rappel d'impôt ICC 2004 à 2006 ainsi que l'absence de caractère confiscatoire des bordereaux en rappel d'impôt ICC 2007, 2009 et 2010.

3.3) Dans un grief d'ordre formel, l'AFC-GE reproche au TAPI une motivation lacunaire de son jugement, car ce dernier n'aurait pas traité dans la partie « en droit » de son argumentation relative à la nécessité de prendre en compte la situation globale des époux A______ pour examiner le caractère confiscatoire de l'ICC dû par la contribuable.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 p. 157 ; 138 V 125 consid. 2.1 p. 127 ; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197 ; 136 I 265 consid. 3.2 p. 272 ; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1 ; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1). Le droit d'être entendu ne contient toutefois pas d'obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant. Il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 138 IV 81 consid. 2.2 p. 84 ; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités ; 133 II 235 consid 5.2 p. 248 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1).

b. Le droit d'être entendu implique également l'obligation pour l'autorité de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 133 III 439 consid. 3.3 p. 445 et les arrêts cités). Il suffit cependant, selon la jurisprudence, que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 138 IV 81 consid. 2.2 p. 84; 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1 ; 2C_997/2011 du 3 avril 2012 consid. 3 ; 1C_311/2010 du 7 octobre 2010 consid. 3.1).

c. En l'espèce, le TAPI a exposé l'argument de l'AFC-GE dans le partie « en fait » de son jugement. S'il n'est ensuite pas expressément revenu sur cet argument dans la partie « en droit », il a examiné le caractère confiscatoire de l'impôt dû par la contribuable en prenant en compte uniquement ses revenus et sa fortune, rejetant par là même l'argumentation de l'AFC-GE.

Dans ces circonstances, l'AFC-GE était à même d'attaquer le jugement querellé en toute connaissance de cause et le grief de violation de son droit d'être entendu sera écarté.

4.4) Il convient préalablement d'examiner le droit applicable au litige.

a. Les règles sur le rappel d'impôt en vigueur au moment de l'ouverture de la procédure par l'AFC-GE, soit en février 2013, sont applicables à la procédure de rappel d'impôt (ATA/369/2015 du 21 avril 2015 consid. 3a).

b. En ce qui concerne le droit matériel, les prétentions découlant du rappel d'impôt sont régies par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses (arrêt du Tribunal fédéral 2A.568/1998 du 31 janvier 2000 consid. 2.1 ; ATA/790/2013 du 3 décembre 2013 consid. 2 ; ATA/505/2008 du 30 septembre 2008 consid. 3 ; ATA/93/2005 du 1er mars 2005 consid. 3d et les références citées).

Les cinq anciennes lois sur l'imposition des personnes physiques, entrées en vigueur le 1er janvier 2001 (art. 17 al. 1 de l'ancienne loi sur l'imposition des personnes physiques - objet de l'impôt - assujettissement à l'impôt du 22 septembre 2000 - aLIPP-I ; art. 9 de l'ancienne loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques du 31 août 2000 - aLIPP-II ; art. 17 de l'ancienne loi sur l'imposition des personnes physiques - impôt sur la fortune du 22 septembre 2000 - aLIPP-III ; art. 11 de l'ancienne loi sur l'imposition des personnes physiques - impôt sur le revenu [revenu imposable] du 22 septembre 2000 - aLIPP-VI ; art. 21 de l'ancienne loi sur l'imposition des personnes physiques - détermination du revenu net - calcul de l'impôt et rabais d'impôt - compensation des effets de la progression à froid du 22 septembre 2000 - aLIPP-V), ont été abrogées avec l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2010, de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08 ; art. 69 al. 1 let. c LIPP). La LIPP s'applique pour la première fois pour les impôts de la période fiscale 2010. Les impôts relatifs aux périodes fiscales antérieures demeurent régis par les dispositions de l'ancien droit, même après l'entrée en vigueur de la LIPP (art. 72 al. 1 LIPP).

Le litige concernant en l'espèce les périodes fiscales 2004 à 2007, 2009 et 2010, l'ancien droit est applicable pour l'ICC 2004 à 2007 et 2009, tandis que la LIPP- sans toutefois son art. 60, relatif au « bouclier fiscal » et entré en vigueur le 1er janvier 2011 - s'applique pour l'ICC 2010.

5) Sans remettre en cause le principe de la procédure en rappel d'impôt, la contribuable reproche à l'AFC-GE d'avoir refusé dans ce cadre la déduction de frais médicaux pour l'ICC 2007 ainsi que du salaire des jardiniers et des cotisations employeur à l'AVS et au deuxième pilier pour l'ICC 2009 et 2010.

a. Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque-là inconnus de l'autorité fiscale lui permettent d'établir qu'une taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou qu'une taxation entrée en force est incomplète, ou qu'une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou un délit commis contre le département, ce dernier procède au rappel de l'impôt qui n'a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 53 al. 1 1ère phr. de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID -
RS 642.14 ; art. 59 al. 1 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17). Cette législation est similaire à la législation fédérale en matière de rappel d'impôt (art. 151 al. 1 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 ; ATA/369/2015 du 21 avril 2015
consid. 3a). Le rappel d'impôt constitue la perception après coup d'impôts qui n'ont, à tort, pas été perçus dans le cadre de la procédure de taxation
(ATF 121 II 257 consid. 4b p. 265 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_104/2008 du
20 juin 2008 consid. 3.3 ; ATA/167/2012 du 27 mars 2012 ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, n. 7 ss p. 486 ss ; Hugo CASANOVA in Danielle YERSIN/Yves NOËL [éd.], Impôt fédéral direct, Commentaire de la LIFD, 2008, n. 1 ss ad art. 151).

b. Selon la jurisprudence, le rappel d'impôt n'équivaut pas à un nouvel examen complet de la taxation, mais ne porte que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale dispose de nouveaux éléments. L'existence d'un rappel d'impôt ne saurait ainsi autoriser le contribuable à revenir librement sur l'ensemble de sa taxation. Sous réserve d'une erreur manifeste, celui-ci peut uniquement demander que la taxation soit reprise en sa faveur sur les points qui, précisément, font l'objet du rappel d'impôt (ATF 98 Ia 22 consid. 2 p. 25 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_277/2008 du 26 septembre 2008 consid. 5.3 ; ATA/57/2014 du 4 février 2014 consid. 3 ; ATA/86/2008 du 26 février 2008 consid. 2a).

c. La question se pose toutefois de savoir si, pour pouvoir être pris en compte dans la procédure en rappel d'impôt, des faits diminuant la dette fiscale du contribuable doivent avoir une connexité avec les éléments justifiant le rappel. Ce point est controversé dans la doctrine (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 et 2C_124/2012 du 8 août 2012 consid. 7.3 ; 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.3). Certains auteurs jugent qu'il doit y avoir une connexité suffisante (Hugo CASANOVA in Danielle YERSIN/Yves NOËL [éd.], op. cit., n. 7
ad art. 153 ; Hugo CASANOVA, Le rappel d'impôt, RDAF 1999 II 3 p. 17 ; Peter KUBLI, Nachsteuerrecht und Nachsteuerverfahrensrecht mit Nachsteuersicherstellungsrecht erläutert am Zürcher Steuergesetz über die direkten Steuern, 1984, § 17 n. 2 p. 38 ss.; Thomas MEISTER, Rechtsmittelsystem der Steuerharmonisierung, Der Rechtsschutz nach StHG und DBG, 1995, p. 243), d'autres qu'un tel élément n'est pas requis (Klaus A. VALLENDER/Martin E. LOOSER in Martin ZWEIFEL/Peter ATHANAS [éd.], Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, I/2b, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer (DBG), 2ème éd., 2008, n. 14
ad art. 151).

Le Tribunal fédéral n'a pas tranché la question (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 et 2C_124/2012 du 8 août 2012 consid. 7.3 ; 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.3), relevant toutefois qu'un argument pouvait être invoqué à l'appui de la seconde opinion : dès lors que le rappel constituait une nouvelle taxation, obéissant aux mêmes règles que la procédure initiale, l'exigence de la connexité avec les éléments justifiant le rappel devrait être réduite au minimum, afin que la nouvelle taxation respecte la capacité contributive du contribuable (arrêt du Tribunal fédéral 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.3).

6.6) a. Le revenu net se calcule en défalquant du total des revenus bruts les déductions générales et les frais mentionnés aux art. 2 à 8 aLIPP-V
(art. 1 aLIPP-V).

b. Les frais provoqués par la maladie, les accidents ou l'invalidité du contribuable ou d'une personne à sa charge sont déductibles lorsque le contribuable supporte lui-même ces frais et que ceux-ci excèdent 1 % des revenus imposables diminués des déductions prévues aux art. 2 à 8 aLIPP-V (art. 4 ch. 2 aLIPP-V).

c. Les frais nécessaires à l'entretien de l'immeuble sont déductibles du revenu imposable (art. 6 al. 4 aLIPP-V ; art. 34 let. d LIPP) au contraire des frais d'acquisition, de production ou d'amélioration d'éléments de fortune (art. 9
let. d aLIPP-V ; art. 38 let. d LIPP). Le droit fédéral contient une réglementation similaire (art. 32 al. 2 et 34 let. d LIFD). La jurisprudence rendue en matière d'IFD est également valable pour l'application des dispositions cantonales harmonisées correspondantes (ATF 140 II 88 consid. 10 p. 101 et les références citées ; 130 II 65 consid. 3.1 et 3.2 p. 69 s.).

En substance, si des travaux effectués sur un immeuble contribuent à l'amélioration de celui-ci, ils ne sont pas déductibles. On parle dans ce cas de travaux de plus-value puisque leurs coûts entraînent une augmentation correspondante de la valeur de l'immeuble. S'ils n'aboutissent pas à une valorisation du bien, ils contribuent alors uniquement au maintien de son état et donc à la continuation de sa fonction génératrice de revenu. On les qualifie ainsi de travaux d'entretien, déductibles du revenu imposable (ATA/832/2014 du 28 octobre 2014 consid. 6 ; Nicolas MERLINO in Danielle YERSIN/Yves NOËL [éd.], op. cit., p. 563 ad art. 34).

Ces principes ont été précisés par l'AFC-GE dans une information du 30 janvier 2007 (AFC-GE, Information no 2/2007, Déductibilité des charges et frais d'entretien des immeubles, 30 janvier 2007), remplacée, dès l'année fiscale 2010, par une nouvelle information (AFC-GE, Information no 1/2011, Déductibilité des frais d'entretien des immeubles privés, 1er février 2011, n. 5), ainsi que dans une notice du 1er février 2007 (AFC-GE, Notice no 1/2007, Déductibilité des charges et frais d'entretien des immeubles, 1er février 2007), également remplacée par une nouvelle notice (AFC-GE, Notice no 1/2011, Déductibilité des frais d'entretien des immeubles privés, 1er février 2011).

Les frais de jardinier pour la taille des haies, l'élagage des arbres et la tonte du gazon, à l'exclusion des frais d'embellissement et d'agrément, l'abattage et le remplacement obligatoires d'arbres et le remplacement de la clôture naturelle -thuya, etc.- sont des frais d'entretien déductibles. La première plantation d'arbres et de haies et l'amélioration du sol - drainage, étayage, mise en place de terre végétale, etc. - constituent des frais d'acquisition, de production ou d'amélioration d'éléments de la fortune non déductibles. Les frais d'embellissement et d'agrément - fleurs, jardin potager, etc. - correspondent à des autres frais non déductibles des revenus (AFC-GE, Notice no 1/2007, n. 8.1 ; AFC-GE, Notice no 1/2011, n. 8.1).

d. En matière fiscale, il appartient à l'autorité fiscale de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve (ATF 133 II 153 consid. 4.3 p. 158 ; 121 II 257 consid. 4c/aa p. 266 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_89/2014 du 26 novembre 2014 consid. 7.2 ; 2C_319/2014 du 9 septembre 2014 consid. 2.2 ; 2C_111/2012 du 25 juillet 2012 consid. 4.4 ; 2C_574/2009 du 21 avril 2010 consid. 4.2 ; ATA/234/2015 du 3 mars 2015 consid. 5e ; ATA/112/2015 du 27 janvier 2015 consid. 5f ; ATA/8/2013 du 8 janvier 2013 consid. 4 ; ATA/483/2012 du 31 juillet 2012 consid. 6 ; ATA/283/2011 du 10 mai 2011 consid. 5d). Ces règles s'appliquent également à la procédure devant les autorités de recours en matière fiscale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_47/2009 du 26 mai 2009 consid. 5.4 ; ATA/112/2015 du 27 janvier 2015 consid. 5f ; ATA/8/2013 du 8 janvier 2013 consid. 4).

7.7) En l'espèce, la contribuable n'a pas fait valoir ses frais médicaux dans sa déclaration fiscale pour l'année 2007, de sorte que sa taxation pour l'ICC 2007 est entrée en force sans prise en compte de cette déduction. De même, si la contribuable a déclaré le salaire payé à ses jardiniers et la part employeur des charges sociales dans ses déclarations fiscales 2009 et 2010, l'AFC-GE a persisté à refuser leur déduction par décisions sur réclamations, lesquelles sont entrées en force suite au jugement d'irrecevabilité du TAPI. Elle invoque à présent ces déductions dans le cadre de la procédure en rappel d'impôt, laquelle concerne des éléments de fortune mobilière et de revenu dénoncés spontanément par l'intéressée sans lien direct avec les déductions sollicitées. La question de la possibilité de demander de telles déductions dans le cadre du rappel d'impôt peut toutefois rester indécise, vu ce qui suit.

8.8) En ce qui concerne ses allégations de frais médicaux, l'intéressée a uniquement versé à la procédure une liste indiquant la nature et le montant des frais, sans produire de pièces en démontrant l'existence, en dépit du fait que, s'agissant d'un élément réduisant sa charge fiscale, le fardeau de la preuve des différents frais médicaux lui incombait. La taxation pour l'année en cause étant entrée en force et vu les présentes circonstances, il ne pouvait en tout état de cause pas échapper à la contribuable qu'elle devait d'emblée fournir les preuves de ses frais afin que la déduction puisse, le cas échéant, être envisagée.

Par conséquent, vu l'absence de preuve à l'appui de frais médicaux allégués par la contribuable, l'AFC-GE et le TAPI ont en tout état de cause à juste titre refusé leur déduction dans le cadre de l'ICC 2007. Le grief sera écarté.

9.9) En relation avec les frais de jardinier, l'intéressée demande la déduction du salaire versé à deux jardiniers employés à plein temps en 2009 et 2010 et de la part employeur des charges sociales y afférentes. Elle affirme que ces frais seraient déductibles, s'agissant de frais d'entretien du jardin ne différant pas de ceux engendrés en cas de travail effectué par une entreprise de jardinerie. Ce faisant, la contribuable perd de vue que toute les dépenses effectuées en lien avec des travaux de jardinerie ne sont pas déductibles, seules les dépenses d'entretien l'étant. Or, si elle allègue qu'il s'agirait de frais d'entretien d'immeuble, elle n'affirme pas expressément que ses jardiniers auraient fourni exclusivement un travail d'entretien du jardin, ni ne le démontre, alors que le fardeau de la preuve lui incombe, s'agissant d'une déduction.

Dans ces circonstances, l'AFC-GE et le TAPI ont en tout état de cause à bon droit refusé la déduction des salaires et des cotisations sociales des jardiniers dans le cadre de l'ICC 2009 et 2010, de sorte que le grief sera écarté.

10.10) L'AFC-GE soutient que le TAPI aurait constaté à tort le caractère confiscatoire des taxations en rappel d'impôt ICC 2004 à 2006. La contribuable reproche quant à elle au TAPI de ne pas avoir également considéré l'imposition des années 2007, 2009 et 2010 comme confiscatoire.

a. La garantie de la propriété (art. 26 al. 1 Cst.) ne va, en matière fiscale, pas au-delà de l'interdiction d'une imposition confiscatoire, cette dernière portant atteinte à l'institution même de la propriété privée (ATAF 2007/23 du 3 mai 2007 consid. 7.4.1 p. 279 ; ATA/584/2013 du 3 septembre 2013 consid. 3 ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., 2010, n. 2043 ; Klaus A. VALLENDER/Peter HETTICH in Bernhard EHRENZELLER/Benjamin SCHINDLER/Rainer J. SCHWEIZER/Klaus A. VALLENDER [éd.], Die schweizerische Bundesverfassung, St-Galler Kommentar, vol. I, 3ème éd., 2014, n. 34 ss ad art. 26 Cst. ; Jörg Paul MÜLLER/Marcus SCHEFER, Grundrechte in der Schweiz : im Rahmen der Bundesverfassung, der EMRK und der UNO-Pakte, 4ème éd., 2008, p. 1041).

b. Pour juger si une imposition a un effet confiscatoire, il faut examiner la charge que représente l'imposition sur une assez longue période, en faisant abstraction des circonstances extraordinaires. À cette fin, il y a lieu de prendre en considération l'ensemble des circonstances concrètes, la durée et la gravité de l'atteinte, ainsi que le cumul d'autres taxes ou contributions et la possibilité de reporter l'impôt sur d'autres personnes (ATF 122 I 305 consid. 7a p. 321 s. ; 128 II 112 consid. 10b/bb p. 126 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_579/2009 du 26 juin 2010 consid. 6.2).

Le Tribunal fédéral fait montre d'une grande retenue dans l'admission du caractère confiscatoire d'une imposition. Il n'en a en effet constaté qu'à une seule reprise, dans le cadre d'une rente viagère constituée par disposition pour cause de mort, et relativement à laquelle l'impôt sur les successions et l'impôt sur le revenu, combinés, représentaient 55 % du montant des rentes d'une personne ayant une capacité contributive réduite (Danielle YERSIN, Les protections constitutionnelles et légales contre les impositions confiscatoires, in Publications de l'Institut suisse de droit comparé, vol. 12, 1990, p. 278 ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 44).

Le Tribunal fédéral a notamment admis que le noyau essentiel de la propriété privée n'était pas touché si, pendant une courte période, le revenu à disposition ne suffisait pas à s'acquitter de la charge fiscale sans entamer la fortune (ATF 106 Ia 342 consid. 6c p. 353 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.139/2004 du 30 novembre 2004 consid. 4.1 ; 2C_277/2008 du 26 septembre 2008 consid. 4.1). En particulier dans les cas où la fortune ne produit que peu ou pas de rendement, l'imposition ne saurait être jugée confiscatoire si le contribuable renonce volontairement à un rendement suffisant en raison de relations familiales ou dans l'attente d'une réalisation future bien supérieure au revenu de la fortune (ATF 106 Ia 342 consid. 6c p. 353).

11.11) a. Le 1er janvier 2011 est entré en vigueur l'art. 60 LIPP, qui prévoit le « bouclier fiscal », soit une limite fixe de taxation en pourcents. Pour les contribuables domiciliés en Suisse, les impôts sur la fortune et sur le revenu - centimes additionnels cantonaux et communaux compris - ne peuvent excéder au total 60 % du revenu net imposable. Toutefois, pour ce calcul, le rendement net de la fortune est fixé au moins à 1 % de la fortune nette (art. 60 al. 1 LIPP).

Le bouclier fiscal est un mécanisme correctif mis en place par le législateur genevois, qui détermine un montant de charge maximale visant à mettre en oeuvre le principe de l'interdiction de l'imposition confiscatoire, tout en permettant d'éviter les abus, en prévoyant un rendement net de la fortune à au moins 1 % de la fortune nette (Xavier OBERSON, op. cit, p. 206).

b. La chambre administrative a déjà eu l'occasion de préciser que s'agissant de la détermination du pourcentage de la charge fiscale admissible, il n'apparaissait pas arbitraire de s'inspirer du nouvel art. 60 LIPP pour les périodes antérieures à son entrée en vigueur (ATA/584/2013 du 3 septembre 2013 consid. 4 ; ATA/818/2012 du 4 décembre 2012 consid. 9 ; ATA/771/2011 du
20 décembre 2011 consid. 9).

c. Dans l'ATA/771/2011 précité, la chambre administrative a constaté que l'imposition totale - fédérale, cantonale et communale - des contribuables équivalait à 98,56 % de leur revenu imposable. Cela portait gravement atteinte à leur propriété, car ils étaient contraints de vivre sur leur fortune une fois leur impôt acquitté. L'atteinte s'inscrivait en outre dans la durée. L'impôt était dès lors confiscatoire. Les contribuables ayant conclu à ce que leur imposition soit limitée à 70 %, la chambre administrative a renvoyé le dossier à l'AFC-GE pour nouvelle imposition n'excédant pas 70 % du revenu net (consid. 7 à 9). Dans l'ATA/818/2012 également précité, la chambre administrative a considéré que la taxation totale - fédérale, cantonale et communale - de la contribuable, s'élevant à 92,36 % du revenu imposable, était confiscatoire. Dans le cadre de la détermination du pourcentage de la charge fiscale admissible, elle a retenu le taux de 70 %, du fait que l'art. 60 LIPP n'était pas directement applicable à la cause et que cette solution permettait de respecter le principe de proportionnalité tout en restant en-dessous du seuil - élevé - posé par la jurisprudence fédérale pour reconnaître le caractère confiscatoire de l'impôt (consid. 6 à 9).

12.12) Dans un autre canton, le Tribunal administratif zurichois a admis qu'un taux d'imposition sur le revenu de 88 %, et à plus forte raison de 97,5 %, obligeait le contribuable à entamer la substance de son patrimoine pour payer ses impôts, et s'avérait confiscatoire si cet état de choses perdurait (arrêt du Tribunal administratif du canton de Zurich du 2 février 2011 in StE 2011 A 22 n3).

13.13) En l'espèce, l'AFC-GE soutient que la contribuable ne pourrait pas invoquer le caractère confiscatoire de l'impôt dans le cadre de sa taxation en rappel d'impôt. Toutefois, comme le TAPI l'a constaté, si elle ne peut, dans le cadre du présent litige, revenir sur la totalité de ses taxations pour les années 2004 à 2007, 2009 et 2010, entrées en force, elle peut remettre en cause les compléments d'impôt prononcés par bordereaux de rappel d'impôt du 19 avril 2013, de sorte qu'il convient d'examiner si la charge fiscale imposée à la contribuable dans le cadre de ces rappels d'impôt est admissible.

Pour évaluer le caractère confiscatoire de l'imposition, il faut, selon la jurisprudence, prendre en compte l'ensemble des circonstances du cas d'espèce et l'imposition totale du contribuable, y inclus l'imposition fédérale.

La contribuable affirme cependant que sa taxation ICC devrait déjà à elle seule être qualifiée de confiscatoire, que la prise en compte de la taxation IFD ne ferait qu'accroître la charge fiscale, exacerbant le caractère confiscatoire de son imposition, et qu'il ne serait ainsi pas nécessaire d'appréhender sa situation au niveau fédéral. Ce faisant, elle oublie le fait que, si l'accord fiscal de 2004 prévoit sa taxation séparée quant à l'ICC, il prévoit également sa taxation commune avec son époux pour l'IFD. Dès lors, la contribuable demeure liée à son mari sur le plan fiscal, de sorte que le revenu et la fortune globaux des époux et le total des impôts dus par ces derniers, tant en ICC qu'en IFD, sont nécessaires pour appréhender l'ensemble de la situation fiscale de la contribuable et évaluer le caractère confiscatoire ou non de son imposition.

La contribuable n'a toutefois produit aucun élément quant à la situation fiscale globale des époux - revenus et fortunes bruts et imposables, impôts totaux. Or, en invoquant le caractère confiscatoire de sa taxation en rappels d'impôt ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010, elle demande la réduction de sa charge fiscale. S'agissant dès lors d'éléments diminuant sa taxation, le fardeau de la preuve lui incombait. La contribuable s'étant contentée de contester l'argumentation de l'AFC-GE sur la nécessité de prendre en compte la situation fiscale des époux dans son ensemble sans apporter les éléments nécessaires à établir sa situation fiscale, elle n'a pas prouvé que son imposition serait confiscatoire et supporte les conséquences de l'échec de la preuve.

Au vu de ce qui précède, l'imposition en rappel d'impôt de la contribuable pour l'ICC 2004 à 2007 ainsi que 2009 et 2010 ne peut être qualifiée de confiscatoire. Le grief de l'AFC-GE relatif aux années 2004 à 2006 sera admis et celui de la contribuable quant aux années 2007, 2009 et 2010 écarté.

14.14) Dans ces circonstances, le recours de l'AFC-GE sera admis et celui de Mme A______ rejeté. Le jugement du TAPI sera annulé en tant qu'il annule les rappels d'impôt ICC 2004 à 2006 et sera confirmé en tant qu'il confirme les rappels d'impôts ICC 2007, 2009 et 2010. Les bordereaux de rappel d'impôt ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010 ainsi que la décision sur réclamation du 2 août 2013  seront confirmés.

15.15) Vu l'issue du litige, un émolument de 2'000.- sera mis à la charge de la contribuable (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 juin 2014 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 ;

déclare recevable le recours interjeté le 4 juin 2014 par Mme A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 ;

au fond :

admet le recours interjeté le 4 juin 2014 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 ;

rejette le recours interjeté le 4 juin 2014 par Mme A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2014 en tant qu'il annule les rappels d'impôt ICC 2004 à 2006 ;

le confirme en tant qu'il confirme les rappels d'impôt ICC 2007, 2009 et 2010 ;

confirme les bordereaux de rappel d'impôt ICC 2004 à 2007, 2009 et 2010 du 19 avril 2013 et la décision sur réclamation du 2 août 2013 ;

met à la charge de Mme A______ un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Daniel Peregrina, avocat de Mme A______, à l'administration fiscale cantonale, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :