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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/670/2000

ATA/615/2000 du 10.10.2000 ( TPE ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : MARCHES PUBLICS; VALEUR LIMITE(EN GENERAL); TPE
Normes : LAIMPU.3
Résumé : La valeur-seuil (art.7 AIMP) est celle des offres et non pas celle estimée par l'appel d'offres. Recours irrecevable, la valeur-seuil n'étant pas atteinte.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 10 octobre 2000

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur Jean-Luc B.

 

et

 

 

Monsieur Pierre E.

 

et

 

 

F. et D. S.A.

 

et

 

 

M., D., B. S.A.

représentés par Me Yves Mermier, avocat

 

contre

 

 

VILLE DE L.

représentée par Me Christian Luscher, avocat



EN FAIT

 

1. Les 3 et 5 avril 2000, la Ville de L. a fait paraître, dans la Feuille d'Avis Officielle de la République et Canton de Genève (F.A.O.), un avis de soumission publique portant sur la construction d'écoles enfantines et primaires, locaux de service communaux et salle omnisports à réaliser sur le territoire de la commune, dans le périmètre route de Chancy/chemin des Clochetons/chemin de la Solitude/avenue Louis-Bertrand.

 

Les marchés concernaient les prestations d'ingénieur civil, béton armé et structure métallique. Le montant estimé du mandat était fixé à CHF 500'000.-. Le délai d'inscription venait à échéance le 14 avril 2000.

 

2. Par courrier du 10 avril 2000, les ingénieurs civils associés P. E. et J.-L. B./ M., D., B. S.A./F. & D. S.A. (ci-après : les ingénieurs associés) ont déposé leur inscription pour le mandat d'ingénieur civil.

 

3. A l'ouverture publique des offres, le 23 mai 2000, dix-neuf candidats ont été annoncés comme suit :

 

1) A. & B. S.A. : CHF 320'810,87

2) BG B. & G. : CHF 320'810,87

3) B. & S. S.A. CHF 398'086,91

4) C. & R. H. + F. CHF 398'183.42

5) E. + B. S.A. CHF 299'423,48

6) E. et D. S.A. +

S. et C. CHF 454'000.--

7) P. E. & J.-L. B.

M., D., B. S.A. CHF 360'114,92

8) F. C. S.A. CHF 374'814,41

9) F. & A. CHF 463'472,06

10) G. & T. CHF 432'405,16

11) J. A. & R. A. CHF 459'778,56

12) J. T. CHF 299'423,48

13) L. J. - A. Ph. CHF 350'000.--

14) P. M. CHF 381'374,24

15) P. S.A. CHF 428'411,16

16) P. & M. S.A. CHF 374'279,35

17) P. S.A., S. & B. S.A. CHF 430'461,11

18) S. S.A. & I. S.A. CHF 323'336,34

19) U. & Associés S.A. CHF 397'930,47

 

 

4. L'adjudication a été prononcée le 31 mai 2000 en faveur de l'entreprise A. & B. S.A. Les ingénieurs associés en ont été informés par courrier du 7 juin 2000. Après évaluation des dossiers et analyse de leur offre par rapport aux critères d'adjudication, ils avaient été classés au deuxième rang sur les dix-neuf candidats ayant rendu l'offre. Le bureau adjudicataire avait présenté l'offre économiquement la plus avantageuse et remplissait pleinement les conditions pour être admis comme adjudicataire selon le règlement sur la passation des marchés publics en matière de construction du 19 novembre 1997 (L 6 05.01). Ledit courrier précisait encore que l'adjudication des prestations n'était pas soumise à l'accord GATT/OMC, ni à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - RS 172.06.4), car le marché en question n'atteignait pas la valeur-seuil de ces accords. Par conséquent, la présente décision n'était pas sujette à recours.

 

5. Par acte posté le 19 juin 2000, les ingénieurs associés ont recouru contre la décision précitée devant le Tribunal administratif en concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif et, au fond, à l'annulation de la décision attaquée. Contrairement à ce qu'affirmait la Ville de L., la décision était sujette à recours, car soumise à l'AIMP, la valeur-seuil présumée du marché publié dans la F.A.O. étant fixée à CHF 500'000.-. Sur le fond, l'adjudication procédait d'un abus du pouvoir d'appréciation de l'autorité adjudicatrice. Ils ont conclu au renvoi de la cause au pouvoir adjudicataire avec instruction de respecter l'article 13 lettre d AIMP lors de l'examen de leur soumission, sous l'angle des critères d'adjudication C et D, avec suite de frais et dépens à charge de la Ville de L..

 

6. a. Le 26 juin 2000, la Ville de L. a décidé de soumettre l'adjudication à l'accord GATT/OMC et à l'AIMP, ainsi qu'au règlement genevois d'application et cela, quand bien même la valeur de la prestation adjugée était inférieure à la somme de CHF 383'000.-. Cette décision était guidée par le souci que chacun puisse faire valoir ses droits, s'il s' y estimait fondé. La Ville de L. confirmait toutefois qu'en vertu des différents critères prévus par les accords et la réglementation susmentionnée, le marché avait été adjugé au bureau d'ingénieurs civils A. et B. S.A. Cette lettre devait être considérée comme une nouvelle notification d'une décision d'adjudication avec les droits de recours prévu par la loi. Ainsi, la voie de recours au Tribunal administratif était indiquée.

 

Ce courrier, adressé notamment aux ingénieurs associés, a également été acheminé au Tribunal administratif.

 

b. Interpellés par le Tribunal administratif, les ingénieurs associés ont déclaré maintenir leur recours, la nouvelle décision prise par la Ville de L. le 26 juin 2000 ne tenant pas compte des autres critères soulevés dans leur recours.

 

7. Invitée à se déterminer sur la question de la restitution de l'effet suspensif, la Ville de L. a conclu au rejet de la demande.

 

8. Par décision du vice-président du 10 juillet 2000, le tribunal de céans a rejeté la demande d'octroi de l'effet suspensif en relevant que, prima facie, la recevabilité du recours paraissait douteuse et que l'intérêt public à la poursuite de la procédure de soumission était prépondérant.

 

9. Le 14 septembre 2000, la Ville de L. a complété ses écritures. La moyenne des offres présentées était de CHF 382'000.-, soit inférieure à la valeur-seuil de CHF 383'000.- fixée par l'annexe 3 du règlement genevois sur la passation des marchés publics en matière de construction. Le recours était donc irrecevable. En tout état, et même si le Tribunal administratif annulait la décision querellée, la Ville de L. pourrait alors et à nouveau adjuger le marché à A. et B. S.A., sans que cette nouvelle décision fasse l'objet d'un recours, dès lors que la valeur-seuil désormais avérée du marché était inférieure à CHF 383'000.-. Compte tenu de cette observation, les recourants n'avaient plus aucun intérêt juridique au recours, ce qui constituait un second motif d'irrecevabilité. Sur le fond, il était absolument insoutenable de prétendre que la Ville de L. aurait commis un abus de son pouvoir d'appréciation, de sorte que le recours devait être rejeté, avec suite de frais et dépens à charge des ingénieurs associés.

 

 

EN DROIT

 

1. En matière de décision relative à l'attribution de marchés publics, le recours au Tribunal administratif n'est recevable que dans la mesure où une disposition légale, réglementaire ou statutaire spéciale le prévoit expressément (art. 56 B al. 4 lettre c de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05).

 

2. L'article 3 de la loi du 12 juin 1997 autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (LAIMPu - L 6 05.0) prévoit que le Tribunal administratif est l'autorité compétente au sens de l'article 15 AIMP pour statuer sur recours contre la décision d'adjudication.

 

L'AIMP s'applique notamment aux offres si la valeur estimée du marché public à adjuger atteint pour les fournitures et les services le seuil de CHF 383'000.- hors taxes, soit sans TVA (art. 7 al. 1 lettre b AIMP).

 

3. Il faut admettre que le recours a été interjeté en temps utile, la nouvelle décision d'adjudication du 26 juin 2000 annulant et remplaçant celle du 7 juin 2000 pour ce qui est de l'assujettissement de la décision aux accord GATT/OMC et à l'AIMP, mais confirmant l'adjudication au bureau A. et B. S.A.

 

4. En l'espèce, le marché public litigieux porte sur des travaux estimés, dans la publication dans la F.A.O. à CHF 500'000.-, mais dont la moyenne des offres présentées atteint la somme de CHF 382'000.-.

 

Il ressort de la jurisprudence du Tribunal administratif, que la valeur-seuil n'est pas tant la valeur estimée par l'appel d'offres que celle des offres effectivement enregistrées (ATA V. du 5 octobre 1999).

 

En l'espèce, la moyenne des offres n'atteint pas la valeur-seuil de CHF 383'000.-, de sorte que le recours doit être déclaré irrecevable (ATA S. du 29 août 2000 et les références citées).

 

5. Les recourants soutiennent que seul le règlement sur la passation des marchés publics en matière de construction serait applicable au cas d'espèce et ce, selon les articles 1 et suivants.

 

Or, selon l'article 50 dudit règlement, les décisions rendues dans le cadre de l'adjudication d'un marché non soumis à l'accord intercantonal ne sont pas sujettes à recours.

 

6. Au vu de ce qui précède, le recours doit donc être déclaré irrecevable.

 

Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge des ingénieurs associés, pris conjointement et solidairement. Une indemnité en CHF 1'000.- à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, sera allouée à la Ville de L. qui a pris des conclusions dans ce sens.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif :

déclare irrecevable le recours interjeté les 19 juin et 7 juillet 2000 par Monsieur Jean-Luc B., Monsieur Pierre E., F. & D. S.A., et par M., D., B. S.A. contre la décision de la Ville de L. du 7 juin 2000;

 

met à la charge des ingénieurs associés, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-;

 

alloue une indemnité de procédure, en CHF 1'000.- à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement;

 


communique le présent arrêt à Me Yves Mermier, avocat des recourants, ainsi qu'à Me Christian Luscher, avocat de l'intimée.

 


Siégeants : M. Schucani, président, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, MM. Thélin, Paychère, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président :

 

V. Montani D. Schucani

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci