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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4383/2010

ATA/582/2011 du 13.09.2011 ( FPUBL )

Descripteurs : FONCTIONNAIRE; COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE; INTERPRÉTATION(SENS GÉNÉRAL); LICENCIEMENT ADMINISTRATIF
Normes : LFOJ.9
Résumé : Recours contre un licenciement. Arrêt sur partie. Compétence de la CJCA admise, le rapport de travail unissant la Fondation officielle de la jeunesse et le recourant étant soumise au droit public tant en raison de l'art. 9 LFOJ que du contenu de la relation de travail, largement emprunté à la fonction publique, notamment pour les évaluations périodiques et la possibilité de déplacer unilatéralement le travailleur.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4383/2010-FPUBL ATA/582/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt sur partie du 13 septembre 2011

 

 

dans la cause

 

Monsieur X______
représenté par Me Pascal Rytz, avocat

contre

FONDATION OFFICIELLE DE LA JEUNESSE
représentée par Me Anne Troillet Maxwell, avocate



EN FAIT

1. La Fondation officielle de la jeunesse (ci-après : FOJ) est une fondation de droit public, gérée par une commission administrative, placée sous la surveillance du Conseil d'Etat (art.1 al. 1 et 3 de la loi sur la fondation officielle de la jeunesse du 28 juin 1958 - LFOJ - J 6 15).

Elle a pour but d’assurer l’accueil d’enfants et d’adolescents, tout spécialement de ceux qui, pour des raisons d’ordre éducatif, ne peuvent être élevés dans leur famille (art. 2 LFOJ).

2. Le projet institutionnel de la FOJ est reconnu par l’Etat comme étant d’utilité publique. L’Etat et la FOJ ont ainsi conclu un contrat de prestations pour la période 2008/2010, conformément à la loi sur les indemnités et les aides financières du 15 décembre 2005 (LIAF - D 1 11).

3. La FOJ était membre de l’association genevoise des organismes d’éducation et de réinsertion (ci-après : AGOER). De ce fait, la FOJ est soumise à la convention collective de travail pour le personnel des organismes genevois d’éducation et de réinsertion (ci-après : CCT AGOER).

4. En sus des établissements et foyers qu’elle gérait déjà, la FOJ a intégré, dès le 1er janvier 2008, quatre foyers pour mineurs (« Les Ecureuils », « Le Chalet SATIGNY », « Pierre-Grise » et « Le Pont »), qui étaient auparavant sous la direction de l’Hospice général (ci-après : HG).

5. Le 19 septembre 2007, un protocole d’accord a été signé par la FOJ, l’HG et les syndicats impliqués s’agissant des modalités de passage des foyers de l’HG à la FOJ, et en particulier, de l'harmonisation du statut des membres du personnel des foyers intégrés à la FOJ.

L’ensemble du personnel transféré serait soumis aux dispositions de la CCT AGOER. Durant une période de sept ans dès le 1er janvier 2008, la FOJ appliquerait, par analogie, à l’ensemble de son personnel, les dispositions de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) en matière de fin des rapports de service, soit les art. 21, 22 et 23 LPAC (art. 2 du protocole).

Ceci concernait uniquement les modalités de la résiliation (art. 21), la définition du motif fondé (art. 22) et le cas particulier de la suppression d’un poste (art. 23). Les principes relatifs à la fin des rapports de travail feraient l’objet d’un règlement interne à la FOJ. En cas de modification des articles concernés de la LPAC, des négociations paritaires seraient organisées.

6. Sur la base de ce protocole, la FOJ a adopté un « règlement d’application par la Fondation officielle de la jeunesse du protocole d’accord FOJ-HG-CPHG-SIT-SSP du 19 septembre 2007 ». Ce règlement concrétisait au sein de la FOJ les art. 21, 22 et 23 LPAC. Il prévoyait en particulier la possibilité de résilier les rapports de service d’un collaborateur pour un motif fondé et fixait les modalités de cette résiliation (art. 4 du règlement). En cas de modification des dispositions pertinentes de la LPAC, les parties contractantes devaient examiner l’opportunité d’introduire ces modalités dans le protocole d’accord (art. 9 du règlement).

7. Par lettre du 21 mars 1995, la FOJ, soit pour elle, Monsieur Olivier Larequi, président et Madame Monique Vali, secrétaire générale, a engagé Monsieur X______ en tant qu'éducateur spécialisé à partir du 1er juillet 1995. Il devait exercer son activité au foyer « F______ ».

Ce document précisait que suite à la décision du département de l'instruction publique (ci-après : DIP) et du département de justice et police, devenu depuis le département de la sécurité, de la police et de l’environnement (ci-après : le département), de rattacher le foyer « F______ » à la FOJ, l'intéressé était engagé pour une durée indéterminée, conformément à la CCT AGOER.

M. X______ a commencé à travailler en classe 15, position 05.

L'intéressé devait renvoyer à la FOJ, pour accord, un double de ce courrier dûment daté et signé, ce qu'il a fait.

8. Depuis 2001, M. X______ a poursuivi sa carrière d'éducateur spécialisé au foyer « S______ ».

9. En novembre 2002, il a présenté sa candidature pour un poste de directeur au sein du foyer « L'Etape ». Celle-ci n'a pas été retenue.

10. En décembre 2008, il a postulé pour une place de responsable pédagogique au « Chalet Satigny». Sa candidature n'a pas été retenue.

11. Il a été régulièrement soumis à des entretiens d'évaluation et de développement des compétences, effectués par son supérieur hiérarchique. Le résultat de ces évaluations a été consigné sur un formulaire préimprimé contenant des grilles d'évaluation comportant les objectifs, les compétences ainsi que les critères d'évaluation. Les deux dernières évaluations ont eu lieu le 3 mai 2004 et le 4 décembre 2007. Elles ont été effectuées par Monsieur D______, supérieur hiérarchique de l'intéressé, puis transmises au service des ressources humaines (ci-après : RH).

12. M. X______ a été convoqué à un entretien le 13 octobre 2010 en présence de M. D______ et de Monsieur Olivier Baud, secrétaire général de la FOJ. A cette occasion, un certain nombre de reproches lui ont été adressés. Ses supérieurs lui ont imputé une part de responsabilité dans les dysfonctionnements observés dans le foyer où il travaillait. Il devait envisager de ne plus continuer à travailler au foyer « S______ ». Un autre rendez-vous lui a été fixé le 20 octobre 2010 afin qu'il fasse « des propositions relatives à son avenir ».

13. Par pli du 19 octobre 2010, un avocat s'est constitué pour M. X______ et a indiqué à la FOJ qu'il accompagnerait ce dernier lors du prochain entretien.

14. Cette entrevue avec MM. Baud et D______ a finalement eu lieu le 11 novembre 2010. M. X______ était accompagné de son conseil. Un certain nombre de griefs ont été soulevés à son encontre. MM. Baud et D______ lui ont confirmé qu'il ne pourrait plus travailler à « S______ ». Ils lui ont proposé un transfert au foyer « Calanque » ou à celui du « Toucan », précisant qu'à défaut d'acceptation, la FOJ mettrait un terme à son engagement. A cette occasion, M. X______ a demandé expressément qu'on lui indique par écrit ce qui lui était reproché et qu'on lui transmette copie des pièces du dossier.

15. Par courrier du 15 novembre 2010, la FOJ a énoncé les griefs retenus à l'encontre de l'intéressé.

Madame R______, une collègue éducatrice de l'intéressé, l'avait dénoncé auprès du groupe de confiance de la FOJ, se disant victime d'un « harcèlement psychologique horizontal » de la part de ce dernier. De plus, il avait eu des propos inconvenants touchant à son intégrité professionnelle en absence de celle-ci, critiquant également le fait qu'elle exerçait son activité à temps partiel. Il avait émis des réflexions méprisantes à l'encontre de M. D______. Lors de colloques et de collaborations avec Mme R______ et d'autres professionnels, il avait adopté des attitudes déplacées. Enfin, il prétendait contrôler tous les éléments de la vie quotidienne du foyer « S______ » en édictant ses propres règles, qu'il tentait d'imposer aux autres.

Ces faits démontraient « l'inadéquation du positionnement personnel et professionnel » de l'intéressé à « S______ ». Un transfert aux foyers « Calanque » ou « Toucan » lui était proposé. S'il n'acceptait pas une de ces deux alternatives, il serait licencié. Un délai au 19 novembre 2010 lui était imparti pour se déterminer.

16. Le 18 novembre 2010, M. X______ a sollicité de M. Baud une prolongation du délai au 10 décembre 2010, pour se déterminer. Il a contesté les reproches précités et a demandé à consulter son dossier et à pouvoir se déterminer par écrit à leur sujet.

17. Par pli recommandé du 24 novembre 2010, la FOJ, sous la seule signature de M. Baud, a licencié M. X______ avec effet au 28 février 2011, conformément aux art. 5 al. 1c et 6 al. 1 et 3 du chapitre III de la CCT AGOER. Il était libéré avec effet immédiat de l'obligation de travailler.

Le rapport de confiance entre M. X______ et la FOJ était rompu et le premier n'avait pas accepté la proposition de transfert.

18. Dans un courrier du 7 décembre 2010, M. X______ a informé la FOJ qu'il s'opposait au licenciement au sens de l'art. 336b al. 1 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), dès lors qu'elle prétendait que les rapports de travail étaient fondés sur le droit privé, ce qu'il contestait formellement, la FOJ étant une fondation de droit public.

Son droit d'être entendu avait été violé et le licenciement consacrait également une violation de l'art. 6 al. 4 de la CCT AGOER-SSP/VPOD-SIT. Les accusations contenues dans la lettre du 15 novembre 2010 étaient mensongères et le licenciement abusif. Enfin, le comportement de M. Baud était constitutif de mobbing. En conséquence, il invitait la FOJ à retirer le congé qui lui avait été signifié.

19. Par acte du 21 décembre 2010, M. X______ a recouru auprès du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), contre son licenciement. Il a conclu principalement, à la constatation de la nullité de la décision de licenciement du 24 novembre 2010 et subsidiairement, à la condamnation de la FOJ au versement de CHF 56'523,30 à titre d'indemnité pour licenciement abusif.

La FOJ étant une fondation de droit public, les relations de service avec ses employés étaient régies par le droit public. La juridiction de céans était compétente pour connaître du litige. Pour le surplus, le courrier du 24 novembre 2010 était une décision au sens de l'art. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Le licenciement était nul parce que son droit d'être entendu avait été violé. La FOJ ne lui avait pas permis de se déterminer sur les accusations formulées à son encontre. Malgré ses demandes réitérées, elle ne lui avait jamais communiqué les pièces qui étayaient ces griefs et lui avait dénié tout accès à son dossier.

La LFOJ ne réglant pas les rapports de la FOJ avec ses employés, et la fondation ne disposant pas d'un statut du personnel, c'était le CO qui s'appliquait à titre de droit public supplétif. La résiliation des rapports de travail était abusive. En le licenciant sur la base d’accusations fallacieuses et en le privant de la possibilité de s'expliquer, M. Baud avait porté une grave atteinte à ses droits de la personnalité.

Un décompte de salaire du mois d'octobre 2010 était joint au recours. Il ressortait de ce document que le recourant était employé en classe 15, annuité 19 pour un salaire mensuel brut de CHF 8'628,55.

20. La FOJ a répondu le 14 février 2011.

a. Elle ne faisait pas partie des entités entrant dans le champ d’application de la LPAC. La LFOJ ne contenait pas de disposition soumettant ses employés à un statut de droit public. Enfin, la FOJ n’avait pas adopté de statut du personnel qui renverrait à l’application de la LPAC ou qui soumettrait ses employés à un statut de droit public. Seuls les art. 22 à 23 LPAC, qui avaient été inclus dans le protocole d’accord signé entre l’HG et la FOJ, étaient applicables par analogie aux rapports de travail au sein de la FOJ. Ils avaient fait l’objet d’un règlement d’application interne à la FOJ.

b. Les relations de travail entre la FOJ et ses employés étaient régies par la CCT AGOER, et cela depuis le 1er janvier 1997. Cette convention ne prévoyait pas non plus une soumission des employés à la LPAC. Elle empruntait certains éléments à la fonction publique (classes de fonction, rémunération) sans que cela ne soit déterminant. Plusieurs critères permettaient d’établir la nature privée des relations de travail au sein de la FOJ, notamment l’engagement, qui faisait l’objet d’un contrat individuel de travail et non d’une décision ou d’une nomination. Les modifications des conditions de travail étaient discutées avec l’employé, l’accord des deux parties était nécessaire et faisait l’objet d’un avenant au contrat de travail. L’art. 3 CCT AGOER instaurait un temps d’essai de trois mois, mais aucune période probatoire n’était prévue. La CCT AGOER ne soumettait une résiliation à aucune condition semblable à celles existant dans le droit de la fonction publique relatives à l’existence d’un motif fondé. La CCT AGOER prévoyait la possibilité de procéder à des licenciements collectifs. Enfin, la FOJ n’était pas en mesure de prononcer des sanctions disciplinaires à l’encontre de ses employés et elle n’était pas soumise à la loi sur la responsabilité civile de l’Etat.

c. Le fait que les rapports de travail soient régis par le droit privé ressortait également des négociations ayant entouré le transfert des foyers de l’HG à la FOJ et de l’adoption du protocole d’accord du 19 septembre 2007. Le licenciement de M. X______ n’était pas fondé sur le droit public, mais sur le protocole d’accord du 19 septembre 2007 et sur la CCT AGOER. Le litige entre la FOJ et M. X______ n’était donc pas de la compétence de la chambre administrative mais bien du ressort de la juridiction des prud'hommes. La FOJ concluait ainsi à ce que la demande de M. X______ soit déclarée irrecevable. A titre subsidiaire, elle concluait au rejet du recours. Les rapports entre la FOJ et ses employés étaient régis par la CCT AGOER, dont l’art. 6 ne prévoyait aucune restriction en matière de licenciement. Suite aux négociations ayant entouré le transfert des foyers de l’HG à la FOJ, les art. 21 à 23 LPAC étaient également applicables par analogie, un règlement d’application de ceux-ci ayant été adopté par la FOJ et qui était entré en vigueur le 1er janvier 2008.

Selon l’art. 4 dudit règlement, les rapports de service pouvaient être résiliés pour un motif fondé. L’existence d’un motif fondé impliquait que la poursuite des rapports de service n’était plus compatible avec un bon fonctionnement au sein de l’employeur. De jurisprudence constante, des difficultés d’ordre relationnel pouvaient constituer un motif de licenciement de l’employé.

En l’espèce, le licenciement respectait le délai de congé de trois mois. Il avait été motivé, tant oralement, lors des entretiens, que par courrier du 15 novembre 2010. Enfin, préalablement à la résiliation des rapports de travail, la FOJ avait proposé au recourant un transfert dans deux foyers, au choix de celui-ci.

d. Les rapports de travail entre la FOJ et le recourant ayant été soumis au droit privé, les principes constitutionnels régissant le droit administratif, tel que le droit d’être entendu (art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), n’étaient pas applicables. Ce nonobstant, la FOJ avait eu deux entretiens avec le recourant les 13 octobre et 11 novembre 2010.

En conséquence, aucun motif ne justifiait l'annulation du licenciement.

21. Dans leur réplique et leur duplique respectives des 15 mars et 13 avril 2011, les parties ont persisté dans leurs conclusions et ont repris en substance l'argumentation déjà développée dans leurs premières écritures. Il y sera fait référence ci-après, en tant que de besoin.

22. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 2 septembre 2011.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ).

2. Toutefois, dans le cas d'espèce, la juridiction de céans ayant été saisie avant le 1er janvier 2011, soit avant l'entrée en vigueur de la nouvelle LOJ, il convient d'appliquer, s'agissant de la recevabilité du recours, les dispositions de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (aLOJ) en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010 (ATA/362/2010 du 1er juin 2010 par analogie).

3. a. Selon l'art. 56A al. 2 aLOJ, le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. d et 57 LPA.

A teneur de l'art 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l’art. 1 LPA, les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

b. La chambre administrative connaît en instance unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 56A al. 2 aLOJ et qui découlent d'un contrat de droit public (art. 56G al. 1 aLOJ).

Depuis le 1er janvier 2011, ces dispositions légales se retrouvent à l’art. 132 al. 2 et 3 LOJ.

c. Conformément à l'art. 63 al. 1 let. a LPA, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010, le recours a été interjeté dans le délai de trente jours.

4. Dans sa réponse, l'intimée a soulevé l'exception d'incompétence ratione materiae, faisant valoir que les parties étant liées par un contrat de droit privé, la juridiction de céans n'était pas compétente pour statuer, le présent litige étant du ressort de la juridiction des prud'hommes. Au vu de ce qui précède, l'examen de la recevabilité implique de déterminer si le rapport de travail liant le recourant à la FOJ relève du droit public ou du droit privé.

a. Pour déterminer si un rapport juridique relève du droit privé ou du droit public, on ne peut pas se fonder sur la qualification juridique utilisée par les parties. Ce qui est décisif, c'est le contenu réel du rapport de droit (Arrêt du Tribunal fédéral 2P_136/2005 du 14 décembre 2005, consid. 3.1.1 ; F. HAFNER, Rechtsnatur der öffentlichen Dienstverhältnisse, in Personalrecht des öffentlichen Dienstes, éd. par P. HELBLIG et T. POLEDNA, Berne 1999, p. 181 ss, p. 201/202). Si une autorité est partie audit rapport de droit, le droit public est présumé applicable (Arrêt du Tribunal fédéral 2P_136/2005 précité, consid. 3.1.2 ; R. RHINOW, Der verwaltungsrechtliche Vertrag, in Staats - und verwaltungsrechtliches Kolloquium 14.-16. April 1986 in Interlaken, Berne 1986, p. 1 ss, p. 4). En outre, les conditions d'engagement dans le secteur public sont en principe fixées par des décisions soumises à acceptation (Arrêt du Tribunal fédéral 2P_151/2005 du 9 février 2006 consid. 5 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2P_136/2005 précité, consid. 3.2 ; F. HAFNER, op. cit., p. 189).

b. Les fonctionnaires et les autres agents soumis au droit public sont nommés par décision. La nomination est un acte unilatéral soumis à l'accord de l'intéressé. L'acte d'engagement ne contient pas les clauses qui fixeraient un régime individuel, mais soumet le fonctionnaire nommé aux normes générales régissant la fonction publique. Il ne renferme de spécifique que ce qui est nécessaire à l'individualisation de la charge à remplir ou de certaines prestations particulières (P. MOOR, Droit administratif, vol. 3, 2ème éd., 1992, ch. 5.1.2.1 et 5.1.3.1).

c. Le Tribunal fédéral admet le principe de l’application du droit privé dans la relation de travail entre un agent public et une collectivité publique pour autant qu’une base légale expresse le prévoie (ATF 118 II 213, JT 1993 I 634, consid. 3 ; G. AUBERT/F. BELLANGER/ T. TANQUEREL, Fonction publique : vers une privatisation ? Journées de droit administratif 4 et 5 mars 1999, Zurich, Schulthess, 2000, p. 51-52). En principe, les rapports entre l'Etat et ses agents doivent être soumis au droit public, des rapports de droit privé étant seulement admissibles dans des circonstances exceptionnelles, par exemple s'il s'agit de tâches de trop courte durée pour être confiées à des fonctionnaires et même à des employés ou, en cas de tâches spéciales, voire s'il est nécessaire d'individualiser le rapport juridique (JAAC 2000 III 64.64 consid. 1.b.aa ; ATA/362/2010 du 1er juin 2010).

5. L'intimée a rappelé dans sa réponse qu'à Genève, l'engagement du personnel par des entités de droit public peut revêtir des formes très diverses.

Les employés des entités visées par l'art. 1 al. 1 LPAC sont soumis à la LPAC et, à l'issue d'une période probatoire, deviennent fonctionnaires (art. 5 LPAC) et sont liés à l'Etat par un rapport de droit public.

Certains textes légaux fondant des entités de droit public soumettent les employés à un statut de droit public en faisant référence à la LPAC. Tel est le cas de la loi relative à l'office cantonal des assurances sociales du 20 septembre 2002 (LOCAS - J 7 04, art. 6 let. h) ou de la loi sur l'Hospice général du 17 mars 2006 (LHG - J 4 07, art. 16 al. 2 let. 1).

Enfin, la loi relative aux centres de loisirs et de rencontres et à la fondation genevoise pour l'animation socioculturelle du 15 mai 1998 (LCLFASe - J 6 11) crée une fondation de droit public placée sous l'autorité du Conseil d'Etat dont les rapports avec les employés sont soumis au droit privé. L'art. 14 LCLFASe prévoit expressément un contrat individuel de travail de droit privé ainsi qu'une convention collective de travail. Il en va de même de la caisse mutuelle d'assurance « Rentes genevoises », constituée sous la forme d'un établissement de droit public dont les employés sont engagés sous un statut de droit privé à teneur de l'art. 10 al. 2 de la loi concernant les Rentes genevoises - Assurance pour la vieillesse du 3 décembre 1992 (LRG - J 7 35).

6. La FOJ ne fait pas partie des entités entrant dans le champ d'application de la LPAC. Cependant, la LFOJ ne contient aucune référence au droit privé. En revanche, l'art. 9 LFOJ, intitulé « personnel » dispose que la commission nomme, rétribue et révoque le personnel administratif et domestique qui lui est nécessaire (al. 1). Ce personnel fait partie de la caisse de prévoyance du personnel enseignant de l’instruction publique et des fonctionnaires de l’administration (ci-après : CIA) (al. 2).

Les termes nomination, rétribution et révocation sont caractéristiques d'une relation de travail soumise au droit public et se retrouvent dans la LPAC. Ils traduisent sans équivoque la volonté du législateur de soumettre les rapports de travail entre la FOJ et ses employés au droit public. Au-delà de la formulation quelque peu désuète, on peut s'interroger sur la dénomination « personnel administratif et domestique » pour savoir si celle-ci s'étend à tout le personnel de la FOJ. Selon les travaux préparatoires, une grande importance a été accordée à la notion de « maisons familiales » insérée lors de la rédaction de la loi à l'art. 3 traitant des établissements (MGC 1956 I 55-60, part. 55 et 58). En conséquence, l'expression personnel domestique désignait tout employé destiné à s'occuper des jeunes dans le cadre de ces maisons, quelle que soit la profession, par opposition au personnel ayant un rôle purement administratif. Lors de l'adoption de la loi, la locution « maisons familiales » a disparu, alors que la terminologie « personnel domestique » est restée dans le texte légal. Il s'ensuit que les termes « nomination, rétribution et révocation » s'appliquent à tout le personnel de la FOJ et sont caractéristiques d'un rapport de droit public. Par ailleurs, le personnel de la FOJ est affilié de par la loi à la CIA, ce que la chambre des prud'hommes de la Cour de justice a considéré comme un indice plaidant en faveur du rattachement au droit public (CAPH/158/2007 du 11 octobre 2007).

7. Il ressort des exemples de réglementations régissant les établissements publics cités ci-dessus que lorsque la relation de travail est soumise au droit privé, cela résulte clairement de la loi. En cas de silence de celle-ci, il faudrait se référer aux critères élaborés par la doctrine pour opérer la distinction entre droit public et droit privé, soit les critères de l'intérêt prépondérant, de la subordination et du sujet (CAPH/158/2007 précité ; ATA M. du 10 octobre 1995 consid 6 ; B. KNAPP, Précis de droit administratif , 1991, 4e édition, n. 68 et ss). En l'espèce cependant, la LFOJ emprunte une terminologie de droit public pour traiter de l'engagement du personnel et affilie celui-ci à la CIA. Il découle ainsi de la loi que les relations des parties sont soumises au droit public. Selon les jurisprudences précitées (ATF 118 II 213 ; ATA/362/2010), l'application du droit privé dans une relation de travail impliquant une collectivité publique est admissible uniquement dans la mesure où elle est prévue par une base légale. En vertu du principe du parallélisme des formes, il aurait fallu procéder à une modification de l'art. 9 LFOJ pour que les relations de la FOJ avec ses employés puissent relever du droit privé. Cependant, l'intimée évoque certains éléments ayant caractérisé la relation entre les parties pour en conclure que celle-ci est régie par le droit privé.

8. La lettre d'engagement contresignée par le recourant fait expressément référence à la CCT AGOER. L'intimée y voit une confirmation de la thèse selon laquelle les rapports de travail du recourant et de la FOJ sont soumis au droit privé, la CCT étant une source de droit privé. Cet élément n'est pas décisif. En effet, le Tribunal fédéral n'avait pas jugé déterminant le fait que les relations de travail d'un médecin avec des hôpitaux publics soient soumises à un contrat type de travail, alors même qu'il s'agissait d'une autre source de droit privé (P. TERCIER, Les contrats spéciaux, 4e édition, 2009 p. 619 n. 4142). Le Tribunal fédéral avait estimé que celles-ci ne relevaient pas du droit privé mais du droit public (ATF 118 II 213 précité).

9. L'intimée déduit des négociations ayant entouré le transfert des foyers de l'HG à la FOJ et de l'adoption du protocole d'accord du 19 septembre 2007 la confirmation du fait que les rapports entre la FOJ et ses employés étaient soumis au droit privé. Cet élément n'est pas déterminant. Ces négociations et cet accord sont intervenus parce que les employés de l'HG étaient soumis à la LPAC alors que ceux de la FOJ ne l'étaient pas. Il n'en résulte pas pour autant que ceux de la FOJ étaient soumis au droit privé.

10. Selon l'intimée, l'engagement du recourant avait pris la forme d'un contrat. C'est oublier que même dans le secteur public les engagements revêtent la forme d'une décision soumise à acceptation. Une lettre d'engagement contresignée répond ainsi tant à la définition d'un contrat qu'à celle de la décision soumise à acceptation. Cet argument doit donc également être écarté.

11. Enfin, s'il est vrai que la CCT AGOER se réfère à certaines notions de droit privé, d'autres sont clairement empruntées au droit public comme les mesures en cas de suppression de postes (art. 11), l'obligation de respecter le secret de fonction (art. 15), l'existence des classes de fonction calquées sur le catalogue des fonctions type, établi par l'Etat de Genève (art. 27), l'affiliation à la CIA. En l'occurrence, le recourant a été régulièrement soumis à des évaluations périodiques effectuées par son supérieur hiérarchique selon une grille d'évaluation très similaire à celle des fonctionnaires de l'Etat de Genève, ce qui est un élément caractéristique de la fonction publique. De même, le transfert dans d'autres foyers, décidé unilatéralement par la hiérarchie, est également spécifique aux rapports de travail relevant de la fonction publique. En conséquence, il faut admettre que le rapport de travail liant le recourant à la FOJ est soumis au droit public.

12. Pour le surplus, le cas d'espèce diffère de celui tranché par la chambre de céans dans son arrêt du 1er juin 2010 concernant la directrice d'une crèche (ATA/362/2010). En effet, dans ce dernier cas, la recourante avait été employée d'abord et pendant plusieurs années par une fondation de droit privé. Lorsque, pour une période déterminée, la gestion de la crèche avait été reprise par la commune, les conditions de travail de la directrice n'avaient pas été modifiées ni adaptées aux principes salariaux de la commune, raison pour laquelle le rapport contractuel était resté soumis au droit privé.

13. Au vu de ce qui précède, les relations de travail entre le recourant et la FOJ relèvent du droit public. Elles sont également soumises à la CCT AGOER dans la mesure où il y a été fait référence de manière explicite lors de l'engagement du recourant. La chambre de céans est ainsi compétente pour statuer.

14. Statuant sur partie, la chambre administrative déclarera recevable le recours interjeté par M. X______ contre la décision de la FOJ du 24 novembre 2010. Le sort des frais sera réservé jusqu’à droit jugé au fond.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

statuant sur partie :

déclare recevable le recours interjeté le 21 décembre 2010 par Monsieur X______ contre la décision de la Fondation officielle de la jeunesse du 24 novembre 2010 ;

réserve le sort des frais jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les articles 113 et suivants LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du demandeur ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du demandeur, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pascal Rytz, avocat du recourant, ainsi qu'à Me Anne Troillet Maxwell, avocate de la Fondation officielle de la jeunesse.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Hurni, Mme Junod, M. Dumartheray, juges, M. Bellanger, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :