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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3391/2014

ATA/554/2015 du 02.06.2015 ( EXP ) , REJETE

Parties : MERCUN Janez / LAVIZZARI Carlo, CONSEIL D'ETAT, PAYOT Olivier Maurice Anthonie, STEINER SA, KAESTLI Jean-Daniel, COORDINATION TECHNIQUE DE CONSTRUCTION COTEC SA, SCHWARZ Patrick, BROLLIET Laure, BROLLIET SA ET CONSORTS, VILLE DE GENEVE
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3391/2014-EXP ATA/554/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 juin 2015

 

dans la cause

 

Monsieur Janez MERCUN
représenté par Me Michael Rudermann, avocat

contre

Madame Laure BROLLIET
BROLLIET SA

COORDINATION TECHNIQUE DE CONSTRUCTION SA « COTEC »
Monsieur Carlo LAVIZZARI
Monsieur Olivier Maurice Anthonie PAYOT
Monsieur Patrick SCHWARZ

représentés par Me François Bellanger, avocat

et

CONSEIL D’ÉTAT

et

Monsieur Jean-Daniel KAESTLI

et

STEINER SA

et

VILLE DE GENÈVE

 



EN FAIT

1) Monsieur Janez MERCUN est propriétaire de la parcelle n° 4’326 d’une surface de 5'134 m2 sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, à l’adresse chemin du Champ-Baron 12, ainsi que de la n° 4'329, de 374 m2, non bâtie, de forme triangulaire, située de l’autre côté du chemin. Les parcelles sont sises en zone de développement 3, base zone 4B protégée.

2) Le 21 juillet 1982, le Conseil d’État a approuvé le plan d’aménagement (ancienne dénomination du plan localisé de quartier, ci-après : PLQ) n° 27’399-255 (ci-après : PLQ 1) portant sur un périmètre situé à l’intersection de la rue Maurice Braillard (anciennement rue du Vidollet) et du chemin des Vignes, sur le territoire de la commune de Genève, section Petit-Saconnex. La construction de trois immeubles était prévue. Le PLQ 1 englobait notamment la parcelle de M. MERCUN.

3) Le 10 août 1983, le Conseil d’État a adopté un plan d’aménagement n° 27’622-255 (ci-après : PLQ 2), lequel a permis la construction rapide de l’un des trois immeubles de logements. L’immeuble de logements, composé de trois bâtiments de, respectivement, 425 m2, 427 m2 et 408 m2, a été construit sur la parcelle n° 4’326.

M. MERCUN a conservé l’entier de la surface des trois bâtiments précités, en attique, pour son domicile.

4) Le PLQ 1, modifié pour partie par le PLQ 2, est en force et prévoit la construction des deux autres immeubles, de six étages sur rez-de-chaussée, plus attiques, destinés au logement.

5) Le premier immeuble du PLQ 1 a été construit dans les années nonante. Il regroupe les adresses 32 à 42 rue Maurice Braillard et 2 et 2 bis ch. des Vignes. Il dispose d’une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 14'220 m2. 75 %, soit 10'631m2 sont des logements au sens de l’art. 15 et ss de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05).

6) Le 31 janvier 2012, Madame Laure BROLLIET, Brolliet SA, DPF Moser & Consorts, Messieurs Carlo LAVIZZARI, Olivier Maurice Anthonie PAYOT et Patrick SCHWARZ, ainsi que Steiner SA (ci-après : les requérants ou les intimés) ont déposé une demande définitive en autorisation de construire auprès de l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC), pour le second immeuble du PLQ 1.

La demande a été enregistrée sous DD 104'826. Elle porte sur la construction d’un immeuble de sept étages sur rez, plus attique, comportant cent soixante-huit logements. Les appartements projetés comprennent nonante-quatre logements au sens de l’art. 15 LGL pour une SBP de 9'289 m2 et septante-quatre logements en propriétés par étage (ci-après : PPE) pour une SBP de 9'651 m2.

7) Le second bâtiment doit s’implanter sur les parcelles :

- n° 2’597 et n° 2'599, propriété de l’État de Genève ;

- n° 2'598, n° 2'600, n° 2'639 et n° 2'640, propriété de la société Steiner SA ;

- n° 2'641, propriété de Monsieur Jean-Daniel KAESTLI ;

- n° 2'642 et n° 2'643, propriété de Madame Laure BROLLIET, Messieurs Carlo LAVIZZARI et Olivier PAYOT, pour la première et les mêmes propriétaires, conjointement avec Monsieur Patrick SCHWARZ, Brolliet SA et Coordination technique de construction SA « Cotec » pour la seconde ;

- n° 3'096, propriété de Monsieur Humberto SUAREZ MANRIQUE DE LARA ;

- n° 2'646, dépendance des parcelles n° 2'639 à 2'645, et

- n° 3'098, dépendance des parcelles n° 2'639 à 2'645 ainsi que des n° 2'598, 2'600 et 3'096.

Les parcelles n° 2'639 à 2'643, sur chacune desquelles est érigée une villa, forment un carré d’une surface de l’ordre de 4'850 m2. Cette surface est bordée au sud par les parcelles n° 2'644 et 2'645, d’une surface totale de 2'228 m2, appartenant à la Ville de Genève (ci-après : la ville), sur lesquelles est construite une école primaire.

8) Des servitudes de restriction aux droits de bâtir, d’affectation et de hauteur de plantation, constituées dans les années 1950, grèvent les parcelles n° 2'639 à 2'645, au profit des parcelles n° 4'326 et 4'329, propriété de M. MERCUN et de la parcelle n° 4'327, propriété de la ville, parcelle sise au nord de la parcelle n° 4'329, à savoir :

- une servitude de restriction au droit de bâtir, inscrite au registre foncier (ci-après : RF) « ID 2004/038539, 39183 » prévoit que «  les constructions à élever sur les parcelles F.S. ne pourront comporter plus d’un étage sur rez-de-chaussée et combles ».

- une servitude de restriction de hauteur des plantations, inscrite au RF « ID 2004/038540, 39184 » prévoit que « la hauteur des plantations qui existeront sur les parcelles F.S. ne pourra pas dépasser 7,50 m ».

- une servitude de restriction d’affectation, inscrite au RF « ID 2004/038541, 39185 » prévoit qu’ « il ne pourra être établi sur les parcelles F.S. aucun café, restaurant, auberge, débit de boissons alcooliques, crèmerie, hôpital, garage, débit d’essence, aucun commerce et industrie bruyante, insalubre, ou de nature à incommoder le voisinage par le bruit, l’odeur ou l’explosibilité ».

9) La ville s’est déclarée d’accord de renoncer aux servitudes profitant à la parcelle n° 4’327, dans le cadre d’une convention passée avec les requérants et l’État de Genève.

10) Des démarches ont été entreprises auprès de M. MERCUN par les propriétaires des parcelles grevées par les servitudes. L’intéressé a refusé de renoncer à celles-ci.

11) Saisi par les requérants, le Tribunal de première instance a constaté que la servitude de restriction de droit à bâtir avait perdu tout intérêt pour la parcelle n° 4'329 et a ordonné au conservateur du RF de la radier.

Les requérants ont été déboutés de leurs conclusions liées au fond dominant n° 4'326. La servitude de restriction au droit de bâtir n’avait rien perdu de son utilité. M. MERCUN conservait un intérêt à bénéficier, devant la parcelle n° 4'326, d’une zone arborisée comportant des constructions de faible hauteur.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la chambre civile de la Cour de justice du 24 février 2012 (ACJC/264/2012).

12) Des échanges ont eu lieu entre l’État de Genève, soit pour lui la direction des opérations foncières du département des constructions et des technologies de l’information, devenu depuis lors le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : le DALE ou le département) et M. MERCUN. Aucune solution amiable n’a été trouvée.

13) Le 25 juin 2012, l’office du logement, devenu depuis lors l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) a donné un préavis favorable au projet de construction enregistré sous DD 104'826. Les plans financiers y relatifs étaient validés. Les logements LGL représentaient une part de 60,7 % des SBP du périmètre concerné.

14) Le 20 février 2013, le Conseil d’État a adopté et déposé un projet de loi au Grand Conseil (PL 11'123) déclarant d’utilité publique la réalisation d’un PLQ situé sur le territoire de la commune de Genève, section Petit-Saconnex, et des bâtiments prévus par ce plan. Au terme de son article unique, la construction des bâtiments prévue par le PLQ 1, dont 60 % au moins des SBP réalisables étaient destinés à l’édification de logements d’utilité publique au sens des art. 15 et ss LGL, était déclarée d’utilité publique. En conséquence, le Conseil d’État pouvait décréter l’expropriation des servitudes qui empêchaient la réalisation des bâtiments prévus par ce plan au profit des propriétaires des parcelles situées à l’intérieur du périmètre de celui-ci, conformément à l’art. 5 de la loi sur l’expropriation pour cause d’utilité publique du 10 juin 1933 (Lex-GE - L 7 05).

15) Le 14 mars 2013, le Grand Conseil a renvoyé le projet de loi à la commission du logement.

16) Le 18 mars 2013, la commission du logement a adopté, à l’unanimité, le PL 11'123.

Compte tenu des SBP liées au premier bâtiment, la SBP totale s’élevait à 33'160 m2, dont 19'920 m2 (10'631 m2 du premier immeuble et 9'289 m2 pour celui à construire) de logements subventionnés en application de l’art. 15 LGL, soit une proportion de 60,7 %.

17) Le 17 mai 2013, le Grand Conseil a voté la loi 11'123.

18) Promulguée par arrêté du Conseil d’État le 24 juillet 2013, publiée dans la feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 26 juillet 2013, la loi 11'123 est entrée en vigueur le 27 juillet 2013, le délai référendaire ayant expiré le 10 juillet 2013.

19) Le 6 août 2013, M. MERCUN a formé un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre la loi 11'123.

20) Par arrêt du 4 mars 2014 (1C_659/2013), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable ledit recours. La loi était une décision incidente ne mettant pas un terme à la procédure et ne causant pas un préjudice irréparable au recourant.

21) Le 17 juin 2014, le département a invité M. MERCUN à renoncer aux servitudes. L’intéressé ne s’est pas déterminé dans le délai fixé au 15 juillet 2014.

22) Par arrêté n° 7’595-2014 du 1er octobre 2014 (ci-après : l’arrêté), le Conseil d’État a décrété l’expropriation, au profit des propriétaires respectifs des parcelles n° 2'639 à 2'645, en vue de la construction du bâtiment de cent soixante-huit logements prévue par le PLQ 1, des trois servitudes précitées et de tous les autres droits qui seraient de nature à empêcher la réalisation desdits bâtiments.

Par même arrêté, le Conseil d’État a, à l’al. 2, déclaré que la construction dudit bâtiment était d’urgence. « En conséquence, le Tribunal administratif de première instance, respectivement la chambre administrative de la Cour de justice, étaient requis, en application de l’art. 81 de la loi sur l’expropriation pour cause d’utilité publique du 10 juin 1933 (LEx-GE - L 7 05) d’ordonner l’envoi en possession anticipée des droits nécessaires à cette réalisation ».

Cet arrêté a été notifié par courrier recommandé avec accusé de réception du 7 octobre 2014 au domicile élu de M. MERCUN.

23) Par acte du 31 octobre 2014, le département a transmis d’office le dossier d’expropriation au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), conformément à l’art. 44 LEx-GE, précisant qu’en cas de recours contre l’arrêté d’expropriation, il appartenait à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) de statuer sur la prise de possession anticipée des droits expropriés.

24) Le 7 novembre 2014, le département a informé M. MERCUN de la transmission dudit dossier au TAPI.

25) Par acte du 7 novembre 2014, M. MERCUN a interjeté recours devant la chambre administrative contre l’arrêté du 1er octobre 2014.

Il a conclu préalablement à la mise en œuvre d’une expertise et un transport sur place. L’arrêté devait être annulé, « sous suite de frais et dépens ».

Les exigences de l’art. 6A de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35) n’étaient pas réalisées en l’espèce. Les chiffres allégués par l’État selon lesquels 60,7 % de la SBP totale de 33'160 m2 seraient des logements d’utilité publique n’avaient jamais été démontrés. Les autorités avaient esquivé la question en ne produisant aucun document justificatif, telle une expertise neutre et impartiale, permettant d’arrêter les SBP à prendre en considération. Le dossier d’autorisation témoignait de chiffres totalement aléatoires. Les affirmations de la commission du logement du Grand Conseil ne suffisaient pas, dès lors qu’il apparaissait que celle-ci avait pris « pour argent comptant les données, au demeurant erronées, qui lui avaient été fournies par le département ». Il ressortait des statistiques officielles du dossier d’autorisation de construire que les SBP du deuxième bâtiment représentaient 19'000 m2 et non 18'940 m2. Seuls 59,96 % des SBP liés aux deux bâtiments seraient alors affectés à des logements au sens de l’art. 15 LGL. Le quota de 60 % exigé par l’art. 6A LGZD n’était pas atteint. L’arrêté du Conseil d’État devait être annulé, non seulement pour défaut d’utilité publique, mais également en raison de l’absence de preuve de données chiffrées.

Par ailleurs, le projet de construction violait le PLQ 1, lequel n’autorisait la construction que de six étages sur rez, plus attique. Or, le projet de construction comporterait sept étages sur rez, plus attique. Il s’agissait d’une modification importante si l’on se référait à la jurisprudence de la chambre de céans. Cela constituerait une gêne grave pour le voisinage, notamment en termes de nuisances supplémentaires induites par de plus nombreux habitants, mais également en termes de diminution de vue et d’ensoleillement, ce d’autant plus que la barre d’immeubles prévue était déjà imposante. Il était possible de comparer avec le premier immeuble, qui respectait le PLQ 1. L’intérêt public actuel à la construction de logements n’était pas contesté, mais on ignorait ce qui se passerait dans le futur. En tous les cas, ledit intérêt ne saurait autoriser un projet de construction consacrant une telle modification du PLQ 1.

Il ressortait d’un arrêt de la chambre administrative qu’elle était compétente, en sus de l’art. 81C al. 3 LEx-GE, pour procéder, au besoin, en lieu et place du TAPI, aux constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité d’expropriation et qu’il lui appartenait d’examiner si une indemnité était due et, le cas échéant, d’en fixer le montant.

En application de la méthode dite de la différence consacrée par la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l’art. 19 let. b de la loi fédérale sur l’expropriation du 20 juin 1930 (LEx - RS 711), dont le principe était applicable par analogie à l’art. 18 al. 1 let. b LEx-GE, il s’agissait de confronter la valeur vénale du fonds au bénéfice du droit avec la valeur vénale après la suppression ou la limitation de ce droit. Il convenait d’apprécier l’ensemble du dommage qui résultait de la perte ou de la diminution d’avantages influant sur la valeur vénale et que la partie restante aurait, selon toute vraisemblance, conservé s’il n’y avait pas eu expropriation. Il convenait donc de prendre aussi en compte les inconvénients de fait qui frappaient le bien-fonds existant.

L’expertise devait aborder non seulement la différence de valeur avant et après l’expropriation de la servitude, au regard notamment de la situation de l’immeuble du recourant avant, pendant et après la construction de l’immeuble projeté, mais elle devait également se prononcer sur le dommage que pourrait représenter la construction de l’immeuble projeté sur les baux en cours dans les immeubles érigés, sur la parcelle n° 4'326. L’expert devrait se prononcer sur le préjudice que pourrait subir M. MERCUN, selon toute vraisemblance, en cours de construction (nuisances induites par le chantier impliquant une réduction de loyers), mais également après la construction en termes d’impact sur les loyers actuels qui pourraient diminuer ou ne pas augmenter, compte tenu notamment de la perte de dégagement et de nuisances induites par l’exploitation de la barre d’immeuble projetée dans un quartier encore préservé.

26) Par réponse du 8 décembre 2014, le Conseil d’État a conclu au rejet du recours, à la confirmation de l’arrêté litigieux et à ce que la chambre administrative ordonne l’ouverture de la procédure d’envoi en possession anticipée des droits expropriés, le tout sous suite de frais et dépens.

L’arrêté d’expropriation constituait une décision finale, en ce sens qu’il mettait fin à la procédure engagée devant l’autorité qui l’avait rendue. En application de l’art. 63 al. 1 LEx-GE, l’État était partie à la procédure, ce que la chambre administrative avait expressément admis en impartissant un délai au Conseil d’État pour présenter ses observations. Nombre des griefs soulevés portaient sur des prétendues violations de prescriptions relevant du droit de la construction et du droit de l’aménagement du territoire. La recevabilité de ces griefs était douteuse. Pour le surplus, le département se rapportait à justice quant à la recevabilité formelle du recours.

La SBP du second bâtiment ressortait du préavis du 25 juin 2012 de l’OCLPF. Le chiffre de 18'940 m2 était contesté par le recourant, lequel retenait 19'000 m2. Ce dernier chiffre ne résultait que du dossier enregistré sous le navigateur Sad consult, lequel avait pour but de fournir une description à son utilisateur, à titre indicatif, de la SBP des futurs bâtiments. La mention de 18'940 m2 était précise. Le recourant n’avait fourni aucun autre élément permettant de douter de la réalité des chiffres retenus par le département dans l’entier du dossier. Une expertise des SBP n’avait aucune raison d’être, sauf à retarder l’avancement de la présente procédure. Le préavis du 25 juin 2012 de l’OCLPF avait force obligatoire et reposait sur des données vérifiées et contrôlées desquelles les autorisations de construire ne sauraient s’écarter. En tous points mal fondé, le grief d’une prétendue violation de l’art. 6A LGZD devait être rejeté.

Le grief relatif à la non-conformité du projet de construction au PLQ 1 était irrecevable, dans le cadre d’un recours formé contre l’arrêté d’expropriation du 1er octobre 2014, en application de l’art. 62 al. 2 LEx-GE. Ces griefs ne pouvaient faire l’objet d’un contrôle judiciaire que dans le cadre d’un recours dirigé contre l’autorisation de construire.

Concernant l’envoi en possession anticipée des droits, le recourant ne s’opposait pas au constat d’urgence du Conseil d’État, pas plus qu’à l’envoi en possession anticipée des droits expropriés. Il devait en être pris acte. Cette mesure était de nature provisionnelle. Il incombait à la chambre administrative d’ordonner l’envoi en possession anticipée des droits dès que les conditions prévues à l’art. 81B LEx-GE étaient remplies, sans attendre que la fixation d’une éventuelle indemnité d’expropriation ne soit entrée en force définitivement. S’il fallait attendre une décision en force pour permettre l’envoi en possession anticipée des droits expropriés, cela reviendrait à vider de son sens ladite institution, comme avait pu le relever le Tribunal fédéral dans sa jurisprudence.

Le recourant ne formulait aucun grief relatif à la garantie de la propriété. De surcroît, les conditions relatives à l’exigence d’une base légale, d’un intérêt public et au respect du principe de la proportionnalité étaient remplies. Toutes les conditions justifiant l’expropriation des servitudes litigieuses étant réalisées, le principe même de l’expropriation ne pouvait qu’être reconnu.

Concernant l’indemnité d’expropriation sollicitée par le recourant, l’État n’était pas partie à la procédure d’estimation des droits expropriés dans l’intérêt d’autrui (art. 45A LEx-GE). Il pouvait assister aux audiences à titre consultatif. Il était permis de se demander si l’État devait se déterminer dans le cadre de la procédure d’estimation des servitudes expropriées, cette estimation concernant au premier chef les parties liées par contrat de servitude. En conséquence, l’autorité intimée n’entendait pas se déterminer plus avant à ce stade de la procédure sans y avoir été au préalable expressément invitée par la chambre de céans. De jurisprudence constante, une servitude de restriction de bâtir n’avait pas de valeur vénale. La renonciation à celle-ci, ainsi que sa radiation ne donnaient pas lieu à une indemnité, à moins que la suppression de la servitude n’entraîne un dommage concret à son titulaire, à charge pour ce dernier de le démontrer à satisfaction de droit. Dans sa correspondance adressée au Grand Conseil le 9 avril 2013, le recourant avait indiqué qu’une éventuelle indemnité d’expropriation ne constituait pas sa préoccupation majeure.

27) Par réponse du 19 décembre 2014, la ville a conclu au rejet du recours comme étant mal fondé, à la confirmation de l’arrêté du Conseil d’État du 1er octobre 2014 et au constat que le recourant n’avait droit à aucune indemnité d’expropriation, le tout sous suite de frais.

Elle soutenait le projet de réalisation du dernier immeuble prévu dans le PLQ 1. Elle n’entendait se déterminer que sur le bien-fondé d’éventuelles conclusions en paiement d’une indemnité d’expropriation. En l’espèce, l’expropriation des servitudes concernées ne causerait aucun dommage au recourant. La parcelle bénéficiant des servitudes expropriées était intégrée à une zone de développement 3 et avait été soumise au contrôle, par l’État, de la valeur du terrain. Cet état de fait était le même avant et après l’expropriation des servitudes et celle-ci n’induisait aucune perte de valeur de la parcelle concernée. En outre, les parcelles appartenant à la ville, grevées par les servitudes, étaient à une distance considérable de celle qui en bénéficiait. Une distance de plus 100 m séparait en effet l’immeuble, propriété du recourant, et les parcelles de la ville. Un immeuble de logement serait en outre construit entre la parcelle de M. MERCUN et celles de la ville. La levée des servitudes en tant qu’elles grevaient les parcelles de la ville ne provoquerait donc ni perte de vue, ni perte d’ensoleillement pour le recourant. M. MERCUN ne subissait aucun dommage du fait de la radiation des servitudes concernées. Par ailleurs et bien que l’intérêt de celui qui bénéficiait de l’expropriation ne soit pas pris en considération, la ville relevait que l’immeuble de logements à construire ne serait pas implanté sur les parcelles de la ville, cette dernière ayant déjà réalisé son projet d’école, construite à la fin des années 1990. Pour sa part, elle avait accepté, sous conditions, de radier gratuitement la servitude de restriction de bâtir dont bénéficiait la parcelle dont elle était propriétaire dans le même secteur. Le recourant n’avait droit à aucune indemnité d’expropriation.

28) Par réponse du 19 décembre 2014, les intimés ont conclu, sur envoi en possession anticipée, à ce qu’ils soient autorisés à prendre possession anticipée, dès le 19 décembre 2014, des servitudes de restriction au droit de bâtir, ainsi que tous les autres droits qui seraient de nature à empêcher la construction des bâtiments sur les parcelles grevées. Les références des servitudes concernées étaient détaillées. Sur le fond, le recours devait être rejeté, l’arrêté du Conseil d’État du 1er octobre devait être confirmé, la chambre administrative devait dire que le TAPI était compétent pour fixer le montant d’une éventuelle indemnité d’expropriation. Les conclusions étaient prises « sous suite de frais et dépens ».

Les intimés avaient essayé de trouver un terrain d’entente avec le recourant, sans toutefois y parvenir. Ils avaient tenté d’obtenir la radiation des servitudes par la voie civile, également sans succès. L’État était ensuite intervenu afin de prier le recourant de renoncer auxdites servitudes en l’avisant que la procédure d’expropriation des servitudes de bâtir en faveur de logements d’utilité publique pouvait être engagée, toutes les conditions en étant remplies. Malgré toutes les démarches, l’expropriation des servitudes n’avait pas pu être évitée. Le recourant ne pouvait ignorer que les conditions légales pour cette expropriation étaient réalisées et que celle-ci allait sa voie. Il avait toutefois préféré s’opposer obstinément et mobiliser, tour à tour, le Grand Conseil, le Tribunal fédéral, le Conseil d’État et désormais la Cour de justice avec des arguments sortant du cadre du litige. À ce stade du « bras de fer », le recours apparaissait très dilatoire.

Le fait que les juridictions civiles n’aient pas levé les servitudes n’avait aucune incidence. Dans une procédure de radiation de servitudes selon le droit civil, le juge appréciait si la servitude avait encore une utilité. Les intimés avaient pris acte de ce que la non-réalisation de leur projet pouvait apporter un probable confort de vue au recourant. En droit public, la réflexion était tout autre. Seul l’intérêt public, à l’exclusion des intérêts privés, guidait la réflexion. En l’occurrence, on opposait une vue dégagée sur le Salève pour les occupants d’un immeuble, à la construction de cent soixante-huit logements, dont 60 % étaient d’utilité publique. Dans ces circonstances, l’intérêt public devait, sans discuter, l’emporter.

Concernant la recevabilité du recours, la plupart des griefs invoqués par le recourant n’étaient pas recevables dans la présente procédure. L’objet de celle-ci n’était pas de contrôler la validité de l’autorisation de construire aux instruments d’aménagement du territoire, d’autant que celle-ci n’avait pas encore été délivrée. La présente procédure avait pour objet de juger du caractère conforme au droit de l’arrêté prononçant l’expropriation des servitudes de restriction de bâtir, d’une part, et de statuer sur l’envoi en possession anticipée, d’autre part. De l’avis des intimés, la présente procédure ne saurait avoir pour objet de fixer l’éventuelle indemnité d’expropriation. Seule l’estimation de celle-ci, pour pouvoir fixer des sûretés en vue de l’envoi en possession anticipée, devait pouvoir être faite par la chambre administrative.

L’acte attaqué était un arrêté du Conseil d’État pris en application de l’art. 30 LEx. Il s’agissait de l’objet du litige. Les griefs matériels qui pouvaient être invoqués à son encontre étaient limités, dans la mesure où ils ne pouvaient avoir trait qu’à la bonne mise en œuvre de l’art. 24 LEx-GE, respectivement à la question de l’utilité public du projet (art. 62 al. 2 LEx-GE).

Le grief relatif à l’art. 6A LGZD ne résistait pas à l’examen. Il n’appartenait pas à l’autorité administrative d’assortir d’expertises les chiffres, estimations et constatations qu’elle produisait afin de les démontrer. L’administration était justement dotée de services spécialisés à cet effet. Il était de la compétence de l’OCLPF de s’assurer de la bonne mise en œuvre des prescriptions de la LGZD et de la LGL en matière de logements d’utilité publique. Cette autorité était à même de calculer les SBP dans les réalisations en zone de développement. Elle n’avait pas à s’adjoindre les services d’un expert neutre. Même en tenant compte de la maxime inquisitoire selon laquelle le juge établissait les faits d’office (art. 19 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), il appartenait aux parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Ceci impliquait en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela pouvait être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquaient de supporter les conséquences de l’absence de preuves. Or, le recourant n’avait pris aucune mesure afin de fonder son argumentation, se limitant à reprendre un chiffre d’une plateforme d’informations destinée à recenser les diverses autorisations de construire, site ne bénéficiant d’aucune foi publique.

Le grief de violation du PLQ par le projet d’autorisation de construire était irrecevable dans la cadre de la présente procédure. Subsidiairement, il était infondé.

Concernant l’envoi en possession anticipée, les intimés ne partageaient pas l’interprétation large de l’art. 81A LEx-GE faite récemment par la chambre administrative. Une décision de la chambre administrative fixant l’indemnité d’expropriation dans un tel cas avait pour effet de priver les parties concernées d’une voie de recours, la chambre de céans statuant dans un tel cas en tant que première autorité sur la valeur de l’indemnité, ce qui n’était conforme ni à l’art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ni à l’art 86 al. 2 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110).

L’objet de la présente procédure consistait uniquement à apprécier la conformité de la procédure d’expropriation aux conditions formelles de la LEx et de l’art. 6A LGZD et à statuer sur l’envoi en possession anticipée des droits aux bénéficiaires de l’expropriation. À ce titre, l’interprétation faite par la chambre administrative était erronée : elle était contraire au texte clair de la loi, selon lequel le TAPI procédait aux constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité d’expropriation. La notion d’estimation s’opposait à celle de fixation ou de détermination de ladite indemnité. Par ailleurs, sur un plan systématique et téléologique, exiger que l’indemnité d’expropriation soit calculée, et non pas estimée, revenait à vider de sa substance la procédure d’envoi en possession anticipée, laquelle était justifiée par l’urgence. S’il fallait attendre que le juge procède à la détermination et au calcul de l’indemnité d’expropriation, expertise à l’appui, aucune décision sur l’envoi en possession anticipée ne pourrait être rendue. En effet, une fois en possession de l’expertise qu’il aurait confiée à un architecte ou à un autre spécialiste, le juge était, en réalité, en mesure de statuer sur le fond de la cause, pour autant que l’on admette qu’il le puisse. Cela étant, la mesure de type « provisionnel » que constituait l’envoi en possession anticipée, en tant qu’elle était rendue pour des motifs d’urgence, ne pouvait alors plus jamais être ordonnée et le mécanisme de versement de sûretés resterait lettre morte, en violation du texte clair de l’art. 81C LEx-GE. En cela, la prise de position du président du Conseil d’État de 1958, citée à l’appui de l’arrêt précité était inconciliable avec le texte clair de la loi, avec l’exposé des motifs à l’appui de celle-ci, également reproduit dans l’arrêt en question, ainsi qu’avec le but de l’institution de l’envoi en possession anticipée, à savoir de permettre, en cas d’urgence déclarée, de commencer la construction de logements d’utilité publique, tout en laissant la procédure servant à déterminer la valeur des biens expropriés suivre son cours.

Les intimés demandaient donc à la chambre administrative qu’elle estime l’indemnité due pour l’expropriation des servitudes en cause et qu’elle ordonne le versement des sûretés à cet effet. Cette estimation et l’ordre de verser des sûretés pouvaient être faits sans tarder. Subsidiairement, si la chambre administrative ne devait pas suivre l’interprétation ci-dessus, les intimés demandaient à la chambre de céans qu’elle ordonne sans tarder les mesures permettant les constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité d’expropriation. De telles mesures devraient prendre, par exemple, la forme d’un simple relevé des gabarits des immeubles en cause afin d’évaluer la prétendue perte de dégagement invoquée par le recourant, ce qui devrait pouvoir être réalisé très rapidement. La chambre administrative devait aussi prendre en compte que, de jurisprudence constante, une servitude de restriction de bâtir n’avait pas de valeur. Pour le surplus, aucune sûreté ne devait être ordonnée pour assurer le paiement d’une indemnité se rapportant aux nuisances dues au chantier. Ces prétentions, que les intimés contestaient fermement, étaient distinctes de la question de l’expropriation des servitudes litigieuses et relevaient uniquement du droit privé pendant le temps limité des travaux. Pour le surplus, les autres conditions à la prise de possession et, partant la prise de position anticipée, étaient réalisées. En particulier, la loi n° 11'123 était en force. Enfin, le recourant ne remettait pas en cause le principe même de l’envoi en possession anticipée, ni la réalisation des conditions à cet effet. Il se contentait de demander qu’une expertise soit tenue pour le calcul de l’indemnité d’expropriation, de sorte que, anticipant la procédure, il se déterminait sur le fond de la question.

29) Par réplique du 2 février 2015, M. MERCUN a persisté dans ses conclusions.

Sur la violation de l’art. 6A LGZD, les quelques documents existants sur les SBP du PLQ 1 faisaient état de chiffres totalement aléatoires. La Cour pourrait en obtenir confirmation en se faisant remettre le dossier d’autorisation pour consultation. Les données chiffrées contestées ne reposaient sur aucun document justificatif et étaient arrêtées par les autorités de manière purement arbitraire. Les chiffres de la commission du logement du Grand Conseil, ayant conduit à l’adoption de la loi 11'123, étaient fondés sur les chiffres de l’OCLPF, résultant du préavis du 25 juin 2012, lequel reposait lui-même sur des données qu’il était impossible de vérifier, faute de documents justificatifs à l’appui. Le dossier ne contenait pas les éléments nécessaires pour un contrôle, par l’autorité de recours, des conditions de l’art. 6A LGZD. Il n’appartenait, pour le surplus, pas à M. MERCUN de démontrer que lesdites conditions étaient remplies, mais bien aux autorités. Le recourant avait apporté un indice de poids, permettant de douter de la réalité des chiffres avancés par les autorités, soit les statistiques officielles du dossier d’autorisation de construire, consultables sur le site internet mis à disposition par l’État à destination des praticiens. La chambre administrative ne pouvait écarter l’offre de preuve du recourant dont le but était de faire contrôler la réalité du pourcentage minimum à l’art. 6A LGZD pour déclarer d’utilité publique la réalisation du PLQ en cause et, par voie de conséquence, l’expropriation des servitudes du recourant, étant rappelé que, selon l’art. 62 al. 2 LEx-GE, les griefs du recours pouvaient porter sur l’utilité publique du projet. Le recourant était fondé à réclamer une expertise neutre et impartiale.

Concernant la non-conformité du projet de construction au PLQ en cause, il apparaissait selon toute vraisemblance, que les calculs des autorités relatifs au pourcentage minimum de logements d’utilité publique, prévus par l’art. 6A LGZD, ne pouvaient plus être repris tels quels si le projet de construction était ramené à des gabarits conformes au PLQ. À aucun moment d’ailleurs, les autorités n’avaient soutenu, à titre subsidiaire, que le pourcentage minimum de l’art. 6A LGZD serait toujours acquis avec un projet conforme au PLQ, soit avec un projet de construction d’un immeuble de six étages plus attique, au lieu des sept étages plus attique projetés. La question de la conformité du projet de construction au PLQ 1 constituait donc une question préjudicielle qu’il appartenait à la Cour de justice de trancher dans le cadre de son examen de l’utilité publique du projet au sens de l’art. 6A LGZD.

M. MERCUN s’en rapportait à justice sur la question de savoir si l’envoi en possession anticipée n’était conditionné qu’à l’estimation de l’indemnité due pour l’expropriation des servitudes en cause et à la constitution de sûretés à cet effet ou à la fixation, par la chambre administrative, de l’indemnité d’expropriation avant la délivrance de l’autorisation de construire.

Concernant l’indemnité d’expropriation, le Conseil d’État avait renoncé à se déterminer. Le recourant n’avait jamais renoncé à une indemnité d’expropriation, conforme à la loi. Les intimés ne s’étant pas déterminés sur l’indemnité d’expropriation, ils n’avaient pas contesté la pertinence de la mise en œuvre d’une expertise sur ce point.

Les éléments propres à calculer un dommage devaient, à l’évidence, être déterminés par expertise, sauf à violer le droit d’être entendu du recourant et conséquemment le droit à la preuve de celui-ci.

30) Par duplique du 25 février 2015, le Conseil d’État a persisté dans ses conclusions.

Concernant la SBP litigieuse, il n’y avait aucune raison de s’écarter du préavis de l’OCLPF du 25 juin 2012. Quant à l’offre de preuve du recourant, l’autorité intimée peinait à voir sur quels éléments précisément l’expertise sur la quantité de SBP devait porter. Elle n’avait pour but que de retarder l’avancement de la présente procédure. Selon la jurisprudence de la chambre administrative, un rapport de la commission parlementaire démontrait à satisfaction que 60 % des logements à construire seraient d’utilité publique. Le grief devait être rejeté.

Le grief relatif à la prétendue non-conformité du projet de construction au PLQ 1 était irrecevable. Il ne s’agissait pas d’une question préjudicielle qu’il appartenait à la chambre de céans de trancher. Seul le respect du pourcentage de logements sociaux, selon l’art. 6A LGZD, était pertinent. Suivre le raisonnement du recourant reviendrait à ce que la chambre administrative s’arroge une compétence du TAPI. De surcroît, contrairement à ce que soutenait le recourant, la proportion de logements subventionnés ne serait pas modifiée, que le projet comporte six ou sept étages, la proportion de 60 % de SBP destinée aux logements d’utilité publique serait appliquée sur six étages plus attique. La part des logements subventionnés dans les étages ne serait pas modifiée pour autant, la proportion de 60 % devant toujours être respectée.

Concernant l’envoi en possession anticipée des droits, le recourant ne s’opposait pas au constat d’urgence du Conseil d’État, pas plus qu’à l’envoi en possession en question. Au vu de l’absence d’opposition du recourant, tant sur le principe que sur les conditions d’application de l’art. 81B LEx, rien ne s’opposait à ce qu’il soit statué sur l’envoi en possession anticipée des droits expropriés.

Concernant l’indemnité d’expropriation, le Conseil d’État n’avait nullement renoncé à se déterminer sur celle-ci. Il n’entendait pas toutefois se déterminer sans y avoir au préalable été expressément invité par la chambre de céans dans le cadre de la procédure d’envoi en possession anticipée, s’agissant de l’estimation des droits expropriés, respectivement par le TAPI dans la cadre de la procédure en fixation de l’indemnité d’expropriation.

31) Par écritures du 23 février 2015, la ville a renoncé à dupliquer.

32) Par écritures du 26 février 2015, les intimés ont persisté dans leurs conclusions.

Concernant la violation hypothétique de l’art. 6A LGZD, les surfaces de référence de 9'289 m2 étaient précises. L’OCLPF avait pris en compte 3'818 m2 en immeubles d’habitation bon marché (ci-après HBM) au titre de logements d’utilité publique (ci-après : LUP), 3'793 m2 d’immeubles habitations mixtes (ci-après : HM) LUP et 1'732 m2 de HM. Le recourant se contentait de les contester en les qualifiant d’aléatoires sans effectuer aucune comparaison avec les plans. Le recours n’avait qu’un caractère appellatoire.

Concernant la conformité au PLQ 1, il était vrai que le projet validé par la loi n° 11'123 prévoyait un étage supplémentaire par rapport à ce que prévoyait le PLQ 1. Un tel procédé était réalisable selon le plan, au sens de l’art. 6A LGZD, puisqu’il intégrait les surfaces supplémentaires autorisées au titre de la haute performance énergétique et qui pouvaient se trouver en attique. Dans ces circonstances, la chambre administrative n’avait pas à procéder à un quelconque autre examen du projet. Les conditions de l’art. 6A LGZD et partant également celles portant sur l’utilité publique du projet étant toutes réalisées. Même si par impossible, le projet devait être examiné, amputé d’un étage, le pourcentage des logements d’utilité publique serait préservé, voire même augmenté puisqu’une réduction proportionnelle des surfaces du bâtiment à bâtir entamerait d’autant moins le pourcentage existant de logements d’utilité publique, compte tenu du premier bâtiment construit et qui comprenait à ce jour 75 % de logements d’utilité publique. Il n’existait aucun élément selon lequel le quota de logements d’utilité publique réalisable selon le plan ne pourrait pas être atteint.

33) Le 26 mars 2015, le recourant a invoqué son droit à la réplique au sens large et découlant de son droit d’être entendu, et s’est brièvement déterminé sur les écritures de ses parties adverses. Le retard de celle-ci était lié à la dépose, dans la case d’avocat au Palais de justice, des dupliques de la ville, du Conseil d’État et des intimés.

Le chiffre de 19'000 m2 apparaissait à plusieurs endroits, à savoir sous la signature de l’architecte qui représentait les intimés dans le cadre du formulaire statistique et demande définitive du 9 novembre 2011, destiné à l’OAC. Il apparaissait aussi dans un document intitulé « avis géotechnique » du 5 août 2011, que l’architecte représentant les intimés avait produit à l’appui de sa demande d’autorisation de construire. Il en ressortait que les SBP totales du projet de construction s’élèveraient à 32'401 m2 [recte : 32'403,8 m2], soit 29'458 m2 selon le PLQ et 2'945,8 m2 correspondant à l’étage supplémentaire, l’agrandissement de l’attique et deux appartements au rez-de-chaussée. D’autres plans étaient produits par l’architecte mentionnant des SBP totales du bâtiment projeté de 18'476,96 m2 et non 18'940 m2. Enfin, dans un document daté du 12 décembre 2012, Steiner SA avait fait valoir que les SBP totales du bâtiment projeté représenteraient 18’841,77 m2. Le montant de 18'940 m2 de SBP à construire, selon les autorités, ne ressortait pas du dossier d’autorisation de construire. D’autre part, les documents à disposition dans ledit dossier faisaient effectivement état de chiffres aléatoires, s’agissant de SBP à prendre en considération. Une expertise était nécessaire.

34) Par décision du 3 mars 2015, le TAPI a suspendu la procédure A/3391/2014.

La procédure devant le TAPI avait pour objet, d’une part, l’envoi en possession anticipée des droits expropriés et, d’autre part, dans un second temps, l’examen et la fixation d’une éventuelle indemnité d’expropriation en faveur de l’exproprié.

La question était donc de savoir si l’une ou l’autre de ces problématiques dépendait de la procédure pendante devant la chambre administrative enregistrée sous la référence A/3391/2014. S’agissant tout d’abord de l’envoi en possession anticipée des droits expropriés, les bénéficiaires de l’expropriation concluaient, eux-mêmes, dans leurs écritures devant la Cour de justice à ce que celle-ci prononce cette décision. De ce point de vue, la suspension de la procédure s’imposait. S’agissant de l’examen et de la fixation d’une éventuelle indemnité d’expropriation en faveur de l’exproprié, les bénéficiaires de l’expropriation contestaient la jurisprudence de la chambre administrative. À supposer que ladite autorité revienne sur cette jurisprudence et constate qu’il appartenait dans tous les cas au TAPI de rendre une telle décision en première instance, il n’empêchait que la juridiction cantonale était seule compétente pour trancher le litige relatif à l’arrêté d’expropriation lui-même. Or, tant que ce dernier n’était pas définitif, le principe même d’une indemnité d’expropriation ne saurait être examiné. Il s’imposait par conséquence, sous cet angle également, de suspendre la procédure devant le TAPI jusqu’à droit connu définitivement au sujet de l’expropriation elle-même. En application de la jurisprudence de la chambre administrative, l’arrêt que rendrait celle-ci trancherait également la question de sa compétence pour examiner l’indemnité d’expropriation et rendrait, cas échéant, sans objet la procédure devant le TAPI.

35) Le 30 avril 2015, en présence des parties, le juge délégué a procédé à un transport sur place. Ses constatations ont fait l’objet d’un procès-verbal adressé par pli recommandé aux parties, précisant qu’à défaut de réaction dans le délai du 15 mai 2015, le procès-verbal serait considéré comme accepté et que la cause serait gardée à juger.

36) Par courrier du 6 mai 2015, le recourant a souhaité un ajout au procès-verbal et a demandé des précisions sur les « aspects de la procédure qu’il était prévu de garder à juger ».

37) Par réponse du 8 mai 2015, le juge délégué a accepté l’ajout précité et précisé que la cause était gardée à juger dans son intégralité. Les parties avaient eu l’occasion de se déterminer sur tous les aspects de la procédure dans un double échange d’écritures. Les parties étaient toutefois libres de faire des observations, suite au transport sur place, dans un délai au 18 mai 2015.

38) a. Par écriture du 18 mai 2015, le recourant a insisté sur le calme et le caractère verdoyant des alentours de son immeuble que les servitudes avaient pour but de préserver. Il n’y avait pas de commerces à proximité, ni aucune nuisance induite par le trafic routier. Le havre de verdure actuel disparaîtrait à jamais pour laisser la place à cent soixante-huit logements, des commerces et du trafic routier. Ces éléments auraient un impact manifeste sur les baux en cours et futurs dans son immeuble, ainsi que sur la valeur vénale de celui-ci. Un tirage de l’état locatif des immeubles sis 8 à 12 chemin du Champ-Baron au 31 avril 2015 était joint. L’utilité publique du projet restait contestée, compte tenu de l’absence d’éléments permettant d’apprécier la réalité ou la justesse des chiffres avancés par l’OCLPF. Une expertise était indispensable.

b. La ville a relevé que le transport sur place avait permis de constater que la levée des servitudes, en tant qu’elles grevaient les parcelles de la ville, ne provoquerait ni perte de vue, ni perte d’ensoleillement pour le recourant qui ne subissait donc aucun dommage. En particulier, l’équipement public prévu sur les parcelles de la ville avait d’ores et déjà été réalisé et un immeuble devait être construit entre la parcelle du recourant et celle de la ville. Le procès-verbal était accepté.

c. Les intimés n’avaient pas de commentaires à formuler sur le procès-verbal. L’envoi en possession anticipée devait être ordonné par la chambre administrative qui avait désormais tous les éléments en mains pour statuer sur ce point. Il appartenait à la chambre administrative uniquement de procéder au relevé nécessaire au calcul ultérieur d’une éventuelle perte de vue ou d’ensoleillement. Les plans des différents bâtiments du secteur permettaient de procéder aux modélisations que le juge chargé de l’estimation pourrait ordonner. Les intimés contestaient toutefois devoir quelque indemnité au recourant. Celui-ci ne pouvait prétendre que l’intimité, la tranquillité et la vue lui étaient définitivement acquises lorsqu’il avait bâti son immeuble, de sorte qu’il ne pouvait réclamer d’indemnité pour ce motif. Ladite prétention était abusive. Concernant l’utilité publique du projet, il était établi que 60 % des SBP réalisables étaient destinés à des logements d’utilité publique. En pratique, l’indication des SBP était transmise par les constructeurs au département. L’autorité déterminait ensuite, au vu des indications obtenues, la SBP qu’elle admettait pour le projet. Il était vrai qu’il existait différentes manières de procéder au calcul de la SBP. Celle valant à Genève était la norme ORL 514’420, intitulée « directives provisoires pour l’aménagement local, régional et national, l’indice d’utilisation et son application, feuille 514'420, Institut ORL-EPF, 1996 », ce qu’avait retenu récemment la chambre administrative dans un arrêt de 2014. C’était ce calcul auquel procédait le département et non les chiffres articulés par les constructeurs qui, au final, faisait foi. Les quatre pièces produites par le recourant faisaient état des chiffres transmis par les constructeurs au département, singulièrement par l’architecte, l’ingénieur géotechnique et l’entreprise générale. Les calculs et valeurs admises par l’OCLPF étaient retenus dans le préavis du 25 juin 2012. Les pièces transmises par le recourant n’étaient pas pertinentes, car elles ne remettaient pas en cause le calcul effectué par l’OCLPF. À titre subsidiaire, le calcul de l’architecte du recourant parvenait à une surface de 9'294,27 m2 pour les HBM et HM LUP, ainsi que les HM, soit une surface supérieure à celle de l’OCLPF. De surcroît, la procédure n’avait pas pour objet d’examiner la conformité au PLQ de l’autorisation de construire à délivrer aux intimés. L’objet du recours consistait à apprécier la conformité de l’arrêté du Conseil d’État à la LEx-GE et à l’intérêt public de l’art. 6A LGZD.

Les bénéficiaires de l’expropriation s’opposaient à toute suspension de la procédure, de surcroît impossible en application de la jurisprudence, au prétexte que la solution au présent litige dépendrait de celle relative à l’autorisation de construire. De même, aucune indemnité, ni sûreté n’étaient dues. Référence était faite à un arrêt du Tribunal fédéral du 1er avril 2015 destiné à la publication dans lequel le Tribunal fédéral avait ajouté une condition supplémentaire à l’indemnisation pour l’expropriation matérielle, à savoir celle d’un dommage imprévisible, spécial et particulièrement grave.

39) Par réplique du 26 mai 2015, le recourant a persisté dans ses conclusions. Le préavis de l’OCLPF était antérieur à la jurisprudence de la chambre administrative entérinant l’utilisation de la norme ORL 514'420. Rien n’indiquait que ledit préavis se fondait sur cette norme. L’expertise était nécessaire.

Le calcul des SBP avait été fait en fonction du gabarit de l’immeuble projeté et non en fonction d’un immeuble conforme au gabarit prévu par le PLQ 1. La chambre administrative devait soit trancher cette question préjudicielle elle-même soit suspendre la procédure de recours dans l’attente d’une décision du département puis, le cas échéant, de l’issue d’une éventuelle procédure de recours.

Une expertise était nécessaire pour fixer l’indemnité due au recourant. Les servitudes litigieuses existaient bien avant l’adoption du PLQ 2.

40) La cause a été gardée à juger, conformément à ce qui avait été annoncé aux parties le 8 mai 2015.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire - LOJ - E 2 05 ; art. 81C al. 3 LEx-GE ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) La présent recours est interjeté contre l’arrêté du Conseil d'État du 1er octobre 2014 et tend à son annulation.

3) Le recourant conclut préalablement à la mise sur pied d’une expertise. Les intimés s’y opposent.

Selon la jurisprudence fondée sur l'art. 29 al. 2 de la Cst., le droit d’être entendu comprend pour l’intéressé celui d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b ; 127 III 576 consid. 2c ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/755/2012 du 6 novembre 2012 ; ATA/432/2008 du 27 août 2008).

En l'espèce, le recourant a conclu à deux expertises distinctes au cours de la procédure. Dans son recours, il a invoqué la nécessité d’ordonner une expertise en se référant exclusivement à la quotité de l’indemnité d’expropriation et en précisant sur quels points l’expert devrait se prononcer, notamment la différence de valeur entre avant et après l’expropriation de la servitude, le dommage que pourrait représenter la construction de l’immeuble sur les baux en cours ou son propre préjudice. Il n’a toutefois pas conclu à ce qu’une expertise soit ordonnée aux fins d’établir la SBP dans le cadre de son recours. Il s’est limité à tenir grief au Conseil d’État de ne pas avoir produit de documents chiffrés à même de prouver la réalité des SBP, à l’instar, par exemple d’une expertise.

Ce n’est que dans sa réplique du 2 février 2015 que le recourant a, en réponse aux intimés, évoqué une expertise pour faire contrôler si le pourcentage minimum de SBP prévu à l’art.  6A LGZD était réalisé. Il n’a toutefois pas pris de conclusions formelles à ce titre. Il s’est référé à la maxime inquisitoire et a persisté dans ses précédentes conclusions, tout comme il l’a fait dans ses écritures des 26 mars, 18 mai et 26 mai 2015.

L’expertise sur les conséquences de l’expropriation et le dommage éventuel du recourant est de la compétence du TAPI en application de l’art. 81C al. 1 LEx-GE et du changement jurisprudentiel développé ci-après. Il ne sera en conséquence pas donné suite à cette conclusion préalable du recourant.

La question de la recevabilité des conclusions en expertise relative à la détermination des SBP peut rester ouverte, dès lors qu’en tous les cas dite expertise n’est pas nécessaire. La chambre administrative dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige et de se prononcer sur les griefs soulevés en toute connaissance de cause.

La conclusion préalable du recourant est rejetée.

4) Le droit d’expropriation pour cause d’utilité publique peut être exercé pour des travaux ou des opérations d’aménagement qui sont dans l’intérêt du canton ou d’une commune. Il ne peut être exercé que dans la mesure nécessaire pour atteindre le but poursuivi (art. 1 LEx-GE).

Peuvent faire l’objet de l’expropriation : les droits réels immobiliers (propriété et droits réels restreints), les droits immobiliers résultant des dispositions légales en matière de rapports de voisinage et les droits personnels portant sur des immeubles, qu’ils appartiennent à des communes, à des établissements publics ou à des particuliers (art. 2 al. 1 LEx-GE). L’expropriation peut être totale ou partielle, définitive ou temporaire (art. 2 al. 2 LEx-GE).

La constatation de l’utilité publique ne peut résulter que d’une loi déclarant de manière générale ou ponctuelle l’utilité publique de travaux, opérations d’aménagement ou mesures d’intérêt public (art. 3 LEx-GE).

Lorsque l’utilité publique a été constatée par le Grand Conseil, le Conseil d’État décrète l’expropriation des immeubles et des droits dont la cession est nécessaire à l’exécution du travail ou de l’ouvrage projeté (art. 30 LEx-GE). Lorsque le recours est interjeté contre un arrêté du Conseil d’État au sens de l’art. 30 LEx-GE, le recourant peut faire valoir des griefs portant sur l’utilité publique du projet (art. 62 al. 2 LEx-GE).

5) Le recourant a interjeté recours contre l’arrêté du Conseil d’État du 1er octobre 2014. Il ne conteste pas l’urgence, mais remet en cause l’utilité publique de l’ouvrage.

6) Dans un premier argument, il invoque une violation de l’art. 6A LGZD, singulièrement le non-respect de la SBP exigée par l’article précité.

a. Afin d’éviter les effets de servitudes de restriction à bâtir, le Grand Conseil peut déclarer d’utilité publique la réalisation d’un PLQ pour autant qu’au moins 60 % des surfaces de plancher, réalisables selon ce plan, soient destinées à l’édification de logements d’utilité publique au sens des art. 15 ss LGL. La déclaration d’utilité publique s’applique uniquement à la levée des servitudes de restriction à bâtir (art 6A LGZD).

Les catégories d’immeubles admises au bénéfice de la LGL sont les HBM (art. 16 LGL al. 1 let. a), les immeubles d’habitation à loyers modérés (ci-après : HLM) (let. b) et les immeubles d’HM, comprenant des logements avec subvention proportionnelle aux revenus des locataires et des logements sans subvention (let. d).

b. Il est de jurisprudence constante que les servitudes de droit privé ne peuvent faire obstacle à l’adoption de PLQ conformes à la zone, même si la réalisation de ces derniers est subordonnée à la levée de ces servitudes par la voie privée ou par celle de l’expropriation (arrêt du Tribunal fédéral 1P.546/1993 du 11 novembre 1994 ; ATA/320/2007 du 19 juin 2007).

La question de savoir si la quantité de SBP de logement sera suffisante, lors de la réalisation des constructions projetées, pour permettre à l’autorité intimée de lever lesdites servitudes par le biais d’une déclaration d’utilité publique au sens de l’article 6A LGZD est examinée au stade de la délivrance des autorisations de construire et ne relève pas de la procédure d’adoption du plan (ATA/200/2008 du 29 avril 2008 ; ATA/176/2008 du 15 avril 2008 ; ATA/619/2007 du 4 décembre 2007).

7) En l’espèce, le recourant émet deux critiques : les chiffres varieraient selon les documents et, en tous les cas, le 60 % de logements au sens de l’art. 15 LGL ne serait pas atteint.

8) S’il est exact qu’il semblerait que selon certains documents les SBP ne soient pas strictement identiques, la différence alléguée par le recourant porte sur quelques 40 m2 (19'000 m2 en lieu et place des 18'960 m2 allégués par le Conseil d’État) sur un total de 33'160 m2.

Conformément à la jurisprudence précité, cette question devra être analysée au stade de la délivrance des autorisations de construire et ne relève pas de la présente procédure.

De surcroît, les chiffres retenus par le Conseil d’État ont été établis par les services spécialisés de l’État, conformément aux directives professionnelles applicables que la chambre de céans a récemment confirmées dans l’ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014. Le préavis de l’OCLPF du 25 juin 2012 est précis, détaillé et technique. Il fait référence à d’autres documents, encore plus détaillés avant de retenir que la SBP de l’immeuble litigieux se monte précisément à 18'940 m2, respectivement 3'818 m2 de HBM LUP, 3'793 m2 de HM LUP, 1'732 m2 de HM, 9'550 m2 de ZD PPE et 102 m2 d’activités. Ces chiffres sont ceux qui ont été présentés et dûment discutés à la commission du logement du Grand Conseil qui a adopté le projet de loi à l’unanimité. Ils ont aussi été validés par le Grand Conseil qui a adopté la loi 11’123. Ils sont détaillés tant dans le préavis de l’OCLPF que dans le rapport de la commission du logement précitée. Ils sont constants tout au long du dossier. En conséquence, il n’appartient ni aux intimés, ni, notamment, au Conseil d’État ou à la ville, dans le cadre de la présente procédure, de faire la preuve plus détaillée des chiffres de SBP retenus après l’examen approfondi effectué par l’OCLPF. La surface retenue par le Conseil d’État et par le Grand Conseil, est établie à satisfaction de droit, sans qu’il ne soit nécessaire de procéder à une expertise.

Ceci est aussi conforme à la jurisprudence de la chambre de céans qui avait retenu que les chiffres de la commission de logement n’avaient pas à être prouvés (ATA/294/2013 du 5 mai 2013 consid. 5 ; ATA/78/2012 du 8 février 2012, consid. 4).

Le recourant fait référence au site Sadconsult. La mention de 19'000 m2 n’est cependant, à l’évidence, qu’une approximation. Le chiffre est rond, pour une surface élevée. Le site n’indique que quelques chiffres, d’ordre général, en lien avec ce projet. Selon le descriptif fait par le site concerné « SAD-Consultation est un site Intranet/Internet permettant de faire de la recherche sur le Suivi Administratif des dossiers de l'Office de l'urbanisme (OU - plans d'affectation), de l'Office des autorisations de construire (requêtes en autorisations de construire) et de l'Office du patrimoine et des sites (OPS) » (http://ge.ch/amenagement/media/amenagement/files/fichiers/images/documents/sad_consultation_aide.pdf consulté le 30 avril 2015). Sa finalité ne consiste en conséquence pas à informer sur des détails techniques du projet. Les autres documents auxquels fait référence le recourant ne sont pas pertinents s’agissant de documents antérieurs au préavis susmentionné de l’OCLPF (avis géotechnique du 5 août 2011, formulaire statistique et demande définitive du 9 novembre 2011) ou d’un calcul fait par un seul des intimés sur un tableau de quelques 10 lignes, peu détaillé.

Enfin, la différence de SBP ne représente que 0,1 % de la SBP totale, soit 40 m2 sur 33'160 m2. Elle est en conséquence infime, voire non pertinente, représentant quelque 23 cm2 par logement.

Le grief du recourant est irrecevable.

9) Dans un second argument, le recourant fait grief à l’arrêté contesté de violer le PLQ 1, le bâtiment à construire prévoyant un étage supplémentaire à ce que prévoit ledit PLQ.

La question de la conformité du bâtiment projeté au PLQ doit être analysée dans le cadre de l’autorisation de construire et non dans le cadre de la présente procédure (ATA/294/2013 précité). Le TAPI est compétent, en première instance, et non la chambre de céans.

L’argument que le recourant tente d’en déduire sur l’utilité publique, à savoir qu’avec un étage de moins, aucune garantie n’est donnée du respect des 60 % voulus par la LGL, n’est pas pertinent. La loi votée par le Grand Conseil impose le 60 %. Le Conseil d’État a indiqué que même avec un étage de moins, le pourcentage serait respecté. Aucun élément concret ne vient étayer une thèse contraire.

Le grief du recourant est irrecevable.

10) Le grief d’absence d’utilité publique étant infondé, se pose la question de la prise de possession anticipée et de l’éventuelle indemnisation y relative dès lors que l'art. 2 de l'arrêté du Conseil d'État déclare d'urgence la construction des bâtiments de logements prévus sur les parcelles n° 2'597 à 2'599, 2'600, 2'639 à 2’643 et requiert en conséquence du TAPI, respectivement de la chambre administrative, d'ordonner l'envoi en possession anticipée des droits nécessaires à cette réalisation.

11) Selon l'art. 81C al. 3 LEx-GE, si un recours a été introduit conformément à l’art. 62 let. b LEx-GE [recte : 62 al. 2], c'est-à-dire contre un arrêté d'expropriation du Conseil d'État, au moment où la procédure de prise de possession anticipée est ouverte, la chambre administrative, ou le président de celle-ci, prend les décisions prévues à l'art. 81C al. 1 et 2 LEx-GE ; au besoin, la chambre administrative fait elle-même les constatations prévues à l’art. 81B let. a [recte : let. b ; ATA/294/2013 du 7 mai 2013 consid. 14] LEx-GE.

Conformément à la jurisprudence de la chambre administrative (ATA/294/2013 précité), dès lors que le présent recours a pour objet l’arrêté d'expropriation du Conseil d'État, il incombe concrètement à la chambre de céans de :

- vérifier que la loi déclarant d’utilité publique l’expropriation des terrains ou des droits nécessaires à l’exécution du projet est entrée en vigueur (art. 81B let. a LEx-GE) ;

- faire les constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité d’expropriation (art. 81B let. b LEx-GE ; ATA/294/2013 précité) ;

- si l'équité l'exige, ordonner le versement d'acomptes, ou, le cas échéant, de la totalité de l'indemnité d'expropriation arrêtée par elle (art. 81C al. 1 in fine LEx-GE) ;

- constater que l’expropriant a fourni des sûretés d’un montant convenable garantissant le paiement des indemnités d’expropriation (art. 81B let. c LEx-GE) et au besoin fixer, à la requête de l’expropriant, le montant et la nature de ces sûretés (art. 81C al. 1 ab initio LEx-GE).

12) Au vu de ce qui précède, la chambre administrative constate que les conditions pour l’envoi en possession anticipé sont réunies, à savoir :

- la loi 11’123 déclarant d’utilité publique l’expropriation des terrains ou des droits nécessaires à l’exécution du projet est entrée en vigueur (art. 81B let. a LEx-GE) ;

- les constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité d’expropriation (art. 81B let. b LEx-GE ; ATA/294/2013 précité) ont été faites lors du transport sur place du 30 avril 2015 et le procès-verbal, agrémenté de photographies, approuvé par les parties, est versé au dossier ;

- l'équité n’exige en l’espèce pas que le versement d’acomptes soit ordonné. Non seulement, prima facie, l’expropriation de droits à bâtir ne justifie, selon la jurisprudence (ATA/294/2013 précité et les références citées), pas d’indemnité, mais le débiteur potentiel étant les bénéficiaires de l’expropriation, rien ne permet de penser que leur solvabilité soit douteuse ; le recourant ne l’allègue d’ailleurs pas (art. 81C al. 1 in fine LEx-GE ) ;

- il n’est en conséquence pas nécessaire de constater que l’expropriant a fourni des sûretés d’un montant convenable garantissant le paiement des indemnités d’expropriation (art. 81B let. c).

Pour le surplus, l’urgence n’est pas contestée.

13) Reste la question de la fixation de l’éventuelle indemnité d’expropriation.

14) Dans l’ATA/294/2013 précité, il avait été décidé, après une interprétation de l’art. 81B let. b LEx-GE, que le renvoi exprès de l'art. 81C al. 3 à l'art. 81B let. b LEx-GE devait être interprété comme donnant la compétence à la chambre de céans de fixer le montant de l'indemnité d'expropriation.

Cette jurisprudence est contestée par les intimés. Le recourant s’en rapporte à justice sur cette question.

Il convient en conséquence de traiter des griefs élevés par les intimés.

15) a. L’ATA/294/2013 précité faisait suite à l’ATA/79/2012 opposant les mêmes parties, cassé, sur un autre point, par l’arrêt du Tribunal fédéral du 26 juin 2012 (cause 1C_148/2012). Entre les deux arrêts de la chambre de céans, celle-ci a prononcé, le 30 octobre 2012, l’ATA/717/2012 suivant les mêmes développements que ceux de l’ATA/79/2012.

b. La chambre de céans s’était interrogée sur la portée exacte de l'art. 81B let. b LEx-GE, afin de savoir si cette disposition avait pour but d'enjoindre au TAPI - voire à la chambre de céans - de fixer le montant de l'indemnité, ou seulement de procéder à une estimation prima facie de cette indemnité.

Elle s’était fondée sur les travaux préparatoires d’où il ressortait le commentaire suivant relatif à cette disposition : « Afin que les intérêts et les droits du propriétaire soient entièrement sauvegardés, il est évidemment nécessaire que la commission d'estimation ait pu faire les constatations utiles à la fixation de l'indemnité et à la révision éventuelle de celle-ci par l'instance de recours. Il est également prévu que l'expropriant doit fournir des sûretés (consignation, constitution de gages, etc.) garantissant le paiement ultérieur des indemnités d'expropriation ; ainsi, les intérêts de l'exproprié sont protégés aussi bien que lorsque le paiement de l'indemnité précède la prise de possession et le transfert de propriété » (Rapport du Conseil d'État, MGC 1958 2/I p. 139).

M. Dutoit, alors président du Conseil d'État, s'était référé à l'art. 81B LEx-GE en ces termes : « Je vous rappelle encore que la déclaration d'urgence étant décrétée par le Conseil d'État, il faut, selon l'art. 81 de la loi qui vous est soumise actuellement, que l'indemnité soit fixée et cette indemnité est fixée non pas par le Conseil d'État, encore moins par le département des travaux publics, mais par la commission de conciliation et d'estimation. Je vous renvoie au projet de loi que vous avez sous les yeux, art. 81 let. b. La commission cantonale de conciliation et d'estimation a fait les constatations nécessaires à l'estimation de l'indemnité d'expropriation et à la révision éventuelle de cette indemnité par la Cour de justice. Autrement dit, avant que l'État ne prenne possession des terrains selon la forme accélérée de la prise de possession anticipée, il faut non seulement que l'utilité publique ait été décrétée, que la décision soit passée en force mais, si même on voulait tenter comme on a l'air de le craindre, un coup de force, ce coup de force est freiné inéluctablement par l'intervention de la commission cantonale de conciliation et d'estimation qui doit fixer le montant de l'indemnité, lequel peut faire l'objet d'un recours à la Cour de justice si l'exproprié n'est pas satisfait de la somme allouée » (MGC, 1958 16/II p. 1’549-1’550).

La chambre administrative en avait déduit que la volonté du législateur était ainsi de permettre la délivrance de l'autorisation de prise de possession anticipée pour autant que les droits de l'exproprié soient préservés, autrement dit d'empêcher qu'une prise de possession anticipée ne soit autorisée avant que l'indemnité d'expropriation n'ait été fixée et/ou garantie par des sûretés ou des avances. Partant, l'art. 81B let. b LEx-GE impliquait que le montant de l'indemnité d'expropriation soit calculé avant la délivrance de l'autorisation, ces deux éléments étant indissociablement liés. Le renvoi exprès de l'art. 81C al. 3 à l'art. 81B let. b LEx-GE devait être interprété comme donnant la compétence à la chambre de céans de fixer le montant de l'indemnité d'expropriation. Cette interprétation était conforme à l'art. 86 al. 2 LTF exigeant que les cantons instituent comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral des tribunaux supérieurs. En effet, cette disposition n'imposait pas aux cantons d'instituer une double instance de recours, une instance judiciaire unique (tel un tribunal administratif ou un tribunal cantonal intégrant une cour de droit public) constituant automatiquement un tribunal supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 2C_270/2011 du 20 avril 2011 consid. 2 et les références citées).

16) Il convient cependant de modifier cette jurisprudence dès lors qu’il est possible d’autoriser une prise de possession anticipée avant que l'indemnité d'expropriation n'ait été fixée et/ou garantie par des sûretés ou des avances, compte tenu des motifs qui suivent :

a. Le texte de l'art. 81B let. b LEx-GE est clair. Il appartient au TAPI de faire les constatations nécessaires à l’estimation de l’indemnité, celle-ci pouvant être revue par la chambre de céans. En cas de recours, au sens de l’art. 81C al. 3 LEx-GE, la chambre administrative fait elle-même, au besoin, les constatations nécessaires précitées. À aucun moment, le texte légal ne mentionne, dans le cadre de la procédure de prise de possession anticipée des art. 81A ss LEx-GE, la fixation de l’indemnité d’expropriation, à l’exception d’une troisième alternative prévue à l’art. 81C al. 1 LEx-GE, à savoir qu’à la requête de l’expropriant, le TAPI fixe le montant et la nature des sûretés que celui-ci doit fournir. Si l’équité l’exige, le TAPI peut ordonner le versement d’acomptes ou, le cas échéant, de la totalité de l’indemnité d’expropriation arrêtée par le TAPI ou par la chambre administrative.

b. Conformément à l’art. 43 al. 1 LEx-GE, le TAPI est l’autorité compétente pour fixer les indemnités d’expropriation. Il n’y aurait aucune raison de déroger à cette règle lors d’une prise de possession anticipée, au contraire. Au vu de l’urgence, condition nécessaire de ladite procédure, celle-ci doit pouvoir être menée rapidement indépendamment des questions d’indemnisation, à l’instar de ce que pratique la commission fédérale d’estimation (arrêts du Tribunal administratif fédéral des 29 août 2013, cause A-3172/2013 ; 12 avril 2012 cause A-6969/2011) où la pratique permet que l’envoi en possession anticipé soit ordonné dans les sept mois, délai entre le dépôt de la requête et le prononcé de l’arrêt du Tribunal administratif fédéral. La doctrine d’ailleurs citée par les arrêts du Tribunal administratif fédéral rappelle que « l’envoi en possession anticipé permet à l’expropriant d’acquérir les droits expropriés avant la fixation et le paiement de l’indemnité. Il constitue ainsi une restriction indirecte de droit public de la propriété » (Heinz HESS / Heinrich WEIBEL, Das Enteignungsrecht des Bundes, vol. I, 1986, p. 586 n. 2).

Cette même position est défendue par Raphaël EGGS (Les « autres préjudices » de l’expropriation, 2013, p. 183) qui rappelle que « l’institution de l’envoi en possession anticipé est en effet une exception au principe selon lequel l’indemnisation est une condition préalable à l’expropriation formelle ».

À juste titre, le Conseil d’État mentionne différentes jurisprudences du Tribunal fédéral rappelant que, s’il fallait attendre une décision en force pour permettre l’envoi en possession anticipée des droits expropriés, cela reviendrait à vider de son sens l’institution (ATF 133 II 130 consid. 3.3 et 1C_ 148/2012 du 26 juin 2012 consid. 4.5 in fine).

c. Avant l’entrée en vigueur de l’art. 29a Cst et des modifications de la LOJ, l’ancienne commission cantonale de recours de conciliation et d’estimation en matière d’expropriation pouvait autoriser la prise de possession anticipée et réserver la fixation de l’indemnité éventuellement due pour l’expropriation, distinguant les deux étapes et permettant la rapidité voulue par la première décision (art. 62 LEx-GE dans sa teneur avant le 27 septembre 2011 ; ACOM/76/2006 du 31 août 2006). À ce titre, la décision en fixation de l’indemnité était prise en première instance et pouvait faire l’objet d’un recours auprès du Tribunal administratif.

Même à faire une interprétation historique, les propos rapportés par le mémorial n’empêchent pas une interprétation laissant à la chambre administrative, en cas de recours, la compétence d’ordonner l’envoi en possession anticipée et laissant au TAPI le soin de fixer l’éventuelle indemnité d’expropriation, la chambre de céans, fonctionnant alors comme autorité de recours (art. 132 LOJ). L’extrait du mémorial date de 1958 alors même que la pratique genevoise depuis lors a autorisé la prise de possession anticipée avant la fixation de l’indemnité.

d. Les possibilités de recours relatives à la fixation de l’indemnité contre, par exemple, la nomination d’un expert, risquent de ralentir la procédure d’envoi en possession anticipée de façon incompatible avec le but de l’institution. Les deux procédures doivent donc être clairement distinguées, contrairement à ce que l’ATA critiqué avait préconisé.

e. Le TAPI bénéficie par ailleurs d’une composition particulière pour fixer l’indemnité, prévue par l’art. 36 LEx-GE, lequel mentionne que, lorsqu’il statue en application de la LEx-GE, le TAPI siège dans la composition d’un juge, qui le préside et de deux juges assesseurs spécialisés en matière immobilière.

f. À juste titre, les intimés relèvent aussi que, si la chambre administrative devait être compétente pour fixer l’indemnité d’expropriation, le mécanisme mis en place avec le versement de sûretés resterait lettre morte, en violation claire de l’art. 81C LEx-GE, lequel n’aurait alors pas lieu d’être.

g. De surcroît, les parties ne sont pas identiques entre les deux phases de la procédure, puisque l’État n’est pas partie à la procédure d’estimation des droits expropriés dans l’intérêt d’autrui. Il peut cependant assister aux audiences à titre consultatif (art. 45A al. 1 LEx-GE)

h. Ainsi, il ressort de ce qui précède que la prise de possession anticipée peut être ordonnée indépendamment de la fixation de l’éventuelle indemnité d’expropriation. Dans ces conditions, il est conforme à la loi que l’indemnité soit fixée par l’autorité de première instance, expressément prévue par l’art. 43 LEx-GE, et ne soit que revue, sur recours, par la chambre administrative (art. 62 LEx-GE).

La chambre administrative ayant précédemment jugé qu’elle était compétente compte tenu de l’interdépendance des deux problématiques, la jurisprudence doit être modifiée dans le sens qui précède.

17) Il en résulte que l'autorisation de prise de possession anticipée de la servitude peut être délivrée à Mme BROLLIET, MM. LAVIZZARI, PAYOT et SCHWARZ, Brolliet SA et Coordination technique de Construction SA « Cotec ».

La chambre administrative en fixera les effets à compter du 10 juin 2015. Dès cette date, l’indemnité d’expropriation éventuellement due portera intérêts à 5 % (art. 81E al. 1, LEx-GE ; ACOM/76/2006 du 31 août 2006).

18) Le dossier est renvoyé au TAPI pour déterminer si une indemnité d’expropriation est due et le cas échéant en fixer le montant.

19) Le sort des frais de la procédure en fixation de l’indemnité d’expropriation restera réservé, le dossier étant transmis au TAPI pour détermination des droits de M. MERCUN à une éventuelle indemnisation.

En l’état, aucun émolument ni indemnité de procédure ne seront mis à la charge du recourant malgré le fait qu’il succombe dans son recours contre l’arrêté du Conseil d’État, compte tenu de la jurisprudence antérieure qui retenait la compétence de la chambre de céans pour fixer l’indemnité d’expropriation.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 novembre 2014 par Monsieur Janez MERCUN contre l’arrêté du Conseil d'État du 1er octobre 2014 ;

au fond :

confirme l’arrêté du Conseil d’État du 1er octobre 2014 décrétant l’expropriation de servitudes de restriction de bâtir et d’autres droits, grevant les parcelles n° 2’639 à 2’645, plan 66, commune de Genève, section Petit-Saconnex, au profit des parcelles n° 4’326 et 4’329, même plan, même commune, même section.

autorise Madame Laure BROLLIET, Messieurs Carlo LAVIZZARI, Olivier Maurice Anthonie PAYOT et Patrick SCHWARZ, Brolliet SA et Coordination technique de Construction SA « Cotec » à prendre possession anticipée dès le 10 juin 2015 des servitudes de restriction au droit de bâtir inscrites au registre foncier sous ID 2004/038539 (RS 39183), ID 2004/038541 (RS 39185) et ID 2004/038540 (RS 39184) grevant en charge, au profit de Monsieur Janez MERCUN, propriétaire des parcelles n° 4’326 et 4’329, plan 66, commune de Genève, section Petit-Saconnex, les parcelles n° 2’639 à 2’645, même plan, même commune, même section, ainsi que tous les autres droits qui seraient de nature à empêcher la construction des bâtiments sur les parcelles grevées.

réserve les droits éventuels des expropriés et des tiers intéressés parmi lesquels Monsieur Janez MERCUN à une indemnité du fait de l’envoi en possession anticipé ;

dit que l’indemnité d’expropriation éventuellement due portera intérêts à 5% dès le 10 juin 2015 ;

transmet le dossier au Tribunal administratif de première instance pour fixer le montant d’une éventuelle indemnité d’expropriation ;

réserve les frais de la procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michael Rudermann, avocat du recourant, à Me François Bellanger, avocat de Madame Laure BROLLIET, Brolliet SA, Coordination technique de construction SA « Cotec », Messieurs Carlo LAVIZARRI, Olivier Maurice Anthonie PAYOT, Patrick SCHWARZ, au Conseil d'État, à Monsieur Jean-Daniel KAESTLI, à Steiner SA, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Dumartheray et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges, M. Fiechter, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :