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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4153/2015

ATA/495/2017 du 02.05.2017 sur JTAPI/656/2016 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 08.06.2017, rendu le 12.10.2017, REJETE, 2C_528/2017
Descripteurs : RESSORTISSANT ÉTRANGER ; DROIT DES ÉTRANGERS ; AUTORISATION DE SÉJOUR ; REGROUPEMENT FAMILIAL ; CAS DE RIGUEUR ; DÉLAI ; INTÉRÊT DE L'ENFANT ; MODIFICATION DES CIRCONSTANCES
Normes : LEtr.43.al1 ; LEtr.43.al3 ; LEtr.47 ; LEtr.47.al1 ; LEtr.47.al3.letb ; LEtr.47.al4 ; LEtr.30.al1.letb ; CEDH.8 ; CDE.3 ; CDE.10 ; OASA.75
Résumé : Confirmation de la décision de refus d'octroi d'autorisation d'établissement au titre du regroupement familial de deux enfants auprès de leur père. Pas de raisons familiales majeures permettant de justifier une autorisation de séjour car pas de réel changement des circonstances dans la prise en charge des enfants en Macédoine. Malgré le prétendu abandon de la mère, qui n'est pas totalement prouvé, les enfants ne seraient pas livrés à eux-mêmes en Macédoine car plusieurs membres de leur famille y vive. Le fait que les enfants se trouvent déjà en Suisse ne change rien au risque d'encourager la politique du fait accompli.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4153/2015-PE ATA/495/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mai 2017

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______, agissant pour son compte et pour le compte de ses enfants mineurs B______ et C______
représentés par le Centre de Contact Suisse-Immigrés, mandataire

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
23 juin 2016 (JTAPI/656/2016)


EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1976 à Glaznja est un ressortissant macédonien.

Il est père de trois enfants :

- B______, née le ______ 2002 et C______, né le ______ 2006, tous deux nés à Kumanovo et issus de sa relation avec une compatriote, Madame D______, domiciliée en Macédoine ;

- E______, né le ______ 2015 à Genève, issu de son union avec Madame F______.

Les trois enfants sont ressortissants macédoniens.

2. a. Le 8 mars 2005, M. A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour, obtenue dans le cadre d'un regroupement familial suite à son mariage, le 17 octobre 2003, à Slupcane en Macédoine, avec Madame G______, domiciliée à Genève et titulaire d'un permis d'établissement.

b. En 2004, dans le cadre de la demande concernant l'autorisation de séjour précitée, Mme G______ avait répondu par l'affirmative, sur un questionnaire de l’office cantonal de la population, devenu l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), à la question de savoir si son époux avait des enfants. Elle avait précisé l'identité de l'enfant comme étant B______, née ______ 2002 à Kumanovo. À la question relative à l'intention de son époux de faire venir celle-ci en Suisse, elle avait répondu : « non pour le moment ». À la question « dans le cas contraire, avec qui vivront-ils et qui s'occupera d'eux », elle avait indiqué « les grands-parents ».

3. Le 10 mars 2010, une autorisation d'établissement a été délivrée à M. A______.

4. Le 7 janvier 2011, le divorce de M. A______ et de Mme G______ a été prononcé.

5. Le 21 novembre 2013, M. A______ a déposé à l'OCPM deux demandes de regroupement familial en faveur de ses enfants B______ et C______. À teneur des demandes, les enfants étaient arrivés à Genève le 2 novembre 2013.

Était joint un courrier dans lequel il précisait avoir été dans l'obligation de prendre ses enfants avec lui à Genève dans la mesure où, suite à différents problèmes familiaux, personne ne pouvait veiller sur eux.

Il a également produit un extrait des actes de naissance de ses deux enfants, délivrés le 29 octobre 2013, indiquant qu'il en était le père.

6. Le 9 janvier 2014, M. A______ a épousé à Lipkovo en Macédoine,
Madame F______, ressortissante macédonienne née le ______1980.

Cette dernière s'est vu délivrer une autorisation de séjour en date du
15 juillet 2015 dans le cadre du regroupement familial avec M. A______.

7. Le 28 mai 2014, M. A______ a indiqué, répondant à une demande de renseignement de l'OCPM, que jusqu'à l'arrivée de ses enfants en Suisse, le
2 novembre 2013, il avait maintenu le contact avec eux par des visites et des téléphones. Depuis lors, ceux-ci pouvaient rendre visite à leur mère durant les vacances. Celle-ci n'était pas en mesure de subvenir financièrement à leurs besoins et refusait de s'occuper d'eux. Elle s'était engagée personnellement par écrit, devant la justice, à lui accorder leur garde. Il n'avait pas d'autres enfants. Il travaillait chez J______ et gagnait CHF 4'600.- par mois. Étaient joints ses fiches de salaires, une lettre de la mère des enfants concernant leur garde ainsi qu'un courrier de son épouse, dans lequel celle-ci indiquait accepter que les enfants vivent avec eux.

8. Par courrier du 10 novembre 2014, M. A______ a précisé à l'OCPM, en réponse à une demande de renseignements complémentaires, qu'au sein de la communauté albanophone de Macédoine, les règles sociales régissant la vie familiale différaient encore largement des dispositions légales. Ainsi, les enfants reconnus, même nés hors mariage, étaient considérés comme appartenant à la famille du père, raison pour laquelle un second mari, tout comme sa famille, n'acceptait pas de prendre en charge des enfants nés d'une précédente relation de l'épouse. Une femme élevant seule ses enfants n'avait donc aucune possibilité de se remarier. C'était dans ces circonstances que la mère de ses enfants avait décidé de les confier à leurs grands-parents paternels. Ayant souhaité se marier et construire une vraie vie de famille, elle avait depuis lors refusé de s'occuper d'eux. Ils avaient été bouleversés par l'abandon de leur mère. Depuis leur arrivée à Genève, ils avaient pu se reconstruire auprès de leur père et de leur belle-mère, dans des conditions garantissant qu'ils puissent grandir et se développer le plus normalement possible. Un renvoi éventuel en Macédoine leur causerait un traumatisme supplémentaire, en plus du fait que leur prise en charge quotidienne n'y était pas assurée.

Auparavant, ses enfants ne s'étaient jamais rendus en Suisse. C'était dans l'urgence qu'il avait décidé de les faire venir. Il était à la recherche d'un appartement plus grand afin de répondre aux exigences commandées par un regroupement familial. S'agissant de l'autorité parentale et du droit de garde, une copie de l'extrait de la loi macédonienne y relative était jointe à son courrier. Il en ressortait que les droits parentaux étaient égaux et conjoints. En outre, comme en attestait une déclaration de la mère de ses enfants, également annexée à son courrier avec sa traduction, celle-ci les lui avait confiés. Selon ce document, soit la traduction officielle d'un acte notarié du 21 octobre 2013, Mme D______, domiciliée à Opae (Macédoine), avait déclaré qu'elle n'avait pas « de conditions » de prendre soin et de s'occuper de ses enfants mineurs B______ et C______ et était d'accord pour qu'ils puissent vivre avec leur père, lequel leur apporterait support, protection, éducation et scolarisation.

9. Par courrier électronique du 15 décembre 2014, M. A______ a transmis à l'OCPM une analyse de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés du 24 novembre 2004 portant sur « La signification des traditions dans le Kosovo d'aujourd'hui ». S'agissant du droit de garde des enfants après un divorce, il y était notamment précisé que la femme perdait le droit de garde sur les enfants lorsqu'elle se remariait.

10. Le 27 août 2015, l'OCPM a fait part à M. A______ de son intention de refuser la demande de regroupement familial formée en faveur de ses enfants C______ et B______.

Cette demande n'avait pas été déposée dans les délais légaux. Il ne pouvait dès lors y être accédé que pour des raisons personnelles majeures. Il invoquait comme motif pour sa demande le fait que la mère de ses enfants avait décidé de ne plus s'occuper d'eux du jour au lendemain et les avait déposés chez leur
grands-parents paternels. Cette dernière souhaitait refaire sa vie et la famille de son mari n'accepterait jamais de s'occuper d'enfants issus d'une relation précédente. Il avait donc agi dans l'urgence en faisant venir ses enfants à Genève sans respecter les procédures idoines. Or, il apparaissait, selon les documents découlant de la demande de regroupement familial déposée en sa faveur par son ex-épouse en 2004, que les grands-parents paternels s'occupaient déjà de B______ à ce moment, de même qu'ils s'étaient occupés de C______ à sa naissance en 2006. Cela faisait ainsi bientôt dix ans que les enfants étaient élevés par leurs grands-parents, de sorte que le caractère d'urgence ne résistait pas à l'examen. La seule vieillesse des grands-parents ne pouvait être interprétée comme un changement notable des capacités de prise en charge éducative à l'étranger, ce d'autant qu'aucune solution alternative n'avait été examinée, alors qu'il s'agissait d'un élément essentiel pour invoquer un regroupement familial au-delà des délais légaux.

Enfin, il vivait avec son épouse dans un appartement de deux pièces, non susceptible de loger convenablement cinq personnes.

11. Par courrier du 28 septembre 2015, M. A______, faisant usage de son droit d'être entendu, a rappelé que les grands-parents paternels ne pouvaient, compte tenu de leur âge avancé, assumer la prise en charge et l'éducation de deux enfants, dont l'une était devenue adolescente.

On ne pouvait déduire du formulaire rempli par son ex-épouse en 2004 que c'étaient les grands-parents qui s'occupaient déjà de B______ en 2004. La question posée à cette dernière concernait en effet l'avenir et non le présent. Avant 2013, la mère de B______ n'était pas d'accord de confier la prise en charge de sa fille, puis de son fils, aux grands-parents paternels. Certes, les enfants demeuraient parfois plusieurs jours, voire des semaines chez ceux-ci, mais ils n'y avaient jamais vécu de façon continue jusqu'à il y avait environ trois ans. En outre, lorsque leur mère avait constaté que les grands-parents n'étaient plus capables de s'occuper des enfants de manière convenable, en raison de leur âge et de leurs problèmes de santé, elle avait cessé de les laisser seuls avec eux. Ce n'était qu'en 2013 qu'elle les avait laissés devant la porte des grands-parents.

Son épouse et lui offraient à B______ et C______ un cadre familial sécurisant et chaleureux, ainsi que de côtoyer leur petit frère, né récemment. Les enfants ne pourraient bénéficier d'un tel cadre familial en Macédoine. Cette solution correspondait ainsi à leur intérêt supérieur.

Enfin, la famille était sur le point d'obtenir un appartement de cinq pièces auprès des fondations immobilières de droit public.

12. Par décision du 28 octobre 2015, l'OCPM a refusé la demande de regroupement familial sollicitée par M. A______.

Celle-ci avait été déposée hors délai. M. A______ n'avait pas documenté ses affirmations selon lesquelles la mère des enfants s'en était occupée après 2004. Dès lors, le caractère d'urgence de la situation ne résistait pas à l'examen. Le libre choix de la mère de ne plus s'occuper des enfants ne pouvait pas être considéré comme une raison personnelle majeure. Par ailleurs, jusqu'à leur venue en Suisse, il entretenait des contacts peu étroits avec ses enfants, de sorte qu'il ne pouvait plus se prévaloir de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Enfin, un appartement de deux pièces était inapproprié pour loger une famille de cinq personnes.

Dès lors qu'il ne ressortait pas du dossier que le renvoi des enfants ne serait pas possible, pas licite ou pas raisonnablement exigible, un délai au 28 janvier 2016 leur était imparti pour quitter la Suisse.

13. Par acte du 24 novembre 2015, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à la délivrance d'autorisations d'établissement en faveur de ses enfants.

La décision de refus était infondée. En outre, l'OCPM avait procédé à des déductions insoutenables et rendu une décision qui heurtait de manière choquante le sentiment de justice et d’équité. Celle-ci était donc à considérer comme arbitraire.

Reprenant les observations qu'il avait déjà livrées à l'OCPM, il a rappelé que les enfants étaient arrivés en Suisse le 2 novembre 2013, suite à leur abandon par leur mère. La demande d'autorisation en leur faveur avait été déposée peu après leur arrivée. Comme il l'avait expliqué à l'OCPM, il y avait alors eu une modification notable de leur prise en charge, leur mère les ayant déposés devant la porte des grands-parents paternels alors que ceux-ci n'étaient plus en mesure de s'occuper d'eux, car trop âgés et malades. La jurisprudence en matière de regroupement familial mentionnée par l'OCPM était ancienne et ne mentionnait pas les dernières évolutions en la matière.

Les attestations de l'école que fréquentaient B______ et C______ en Macédoine ainsi que celles de la Policlinique Zana de Kumanovo indiquaient sans équivoque que les enfants avaient vécu auprès de leur mère jusqu'au mois de novembre 2013 et que c'était elle qui s'était alors occupée d'eux et avait assumé leur prise en charge éducative. Partant, la situation d'urgence dans laquelle il avait agi, alors que ses enfants s'étaient retrouvés du jour au lendemain sans encadrement adéquat, devait être reconnue.

L'OCPM ne pouvait être suivi lorsqu'il déclarait qu'il aurait mieux valu, pour les enfants, une autre solution que celle consistant, dans ces circonstances, à les réunir avec leur père.

Ses voyages fréquents en Macédoine, attestés par les tampons douaniers dans son passeport confirmaient qu'il avait toujours maintenu une relation étroite avec ses enfants avant leur venue en Suisse.

Son épouse et lui offraient depuis deux ans un cadre familial sécurisant et chaleureux à B______ et à C______, qui avaient en outre récemment eu un petit-frère. Un tel cadre familial ne pourrait pas leur être assuré en Macédoine. Dans ces circonstances, il n’y avait aucun doute que la décision de leurs parents de les faire vivre à Genève au sein de la nouvelle famille de leur père ne pouvait être vue comme manifestement contraire à leurs intérêts supérieurs.

Pour ces mêmes raisons, l’octroi des titres de séjour sollicités était également indiqué sur la base de l’art. 8 CEDH, car, conformément à la pesée des intérêts prescrite dans ce cadre, ceux des enfants de continuer à vivre auprès de leur père en Suisse étaient prépondérants par rapport aux intérêts publics que la Suisse pourrait invoquer pour justifier leur renvoi.

Enfin, il avait obtenu un bail pour un appartement suffisamment grand.

Étaient jointes les pièces suivantes :

- la traduction officielle d'une attestation du 2 novembre 2015 de l'école primaire Jeronim de Rada, à Çerkez, Kumanovo (Macédoine), selon laquelle C______ y avait été scolarisé en tant qu'élève régulier jusqu'au 2 novembre 2013 et que c'était sa mère qui prenait soin de lui et suivait sa scolarité ;

- la traduction d'une attestation médicale, signée par un médecin, datée également du 2 novembre 2015 indiquant qu'C______ « a été traité et guéri à l'établissement privé de la santé Zana à Kumanovo dès le 13.11.2006, sous la tutelle de sa mère D______ du même village » ;

- la traduction d'un certificat médical du 13 novembre 2015 concernant son père, Monsieur H______, né le ______ 1935, précisant que celui-ci souffrait de « Dg Hypertensio art. CMP chr Tacchycardia paroxismalis » et listant les médicaments lui étant prescrits ;

- la copie d'un contrat de bail d'une durée d'un an, du 16 novembre 2015 au 30 novembre 2016, portant sur un appartement de 5 pièces à Onex en faveur de M. A______ et de son épouse ;

- la copie de pages de son passeport sur lesquelles étaient apposés de nombreux timbres des autorités douanières de Macédoine portant des dates s'échelonnant entre 2011 et 2014 ;

- la copie d'un courrier adressé à l'OCPM par Mme A______ indiquant qu'elle avait accepté que les enfants du recourant vivent sous son toit et qu'elle s'engageait à s'occuper d'eux.

14. Dans ses observations du 1er février 2016, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Se référant à sa décision, il a indiqué que les arguments développés par le recourant n'étaient pas de nature à modifier sa position.

15. Par jugement du 23 juin 2016, le TAPI a rejeté le recours.

Dans la mesure où les enfants ne pouvaient pas se prévaloir d'un droit manifeste à résider en Suisse avec leur père, celui-ci ne pouvait les y faire venir et les installer chez lui avant même le dépôt d'une demande d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial et dans l'attente de l'issue de la procédure y relative. Il devait en être tenu compte sous peine d'encourager la politique du fait accompli et, par conséquent, porter atteinte au principe de l'égalité par rapport aux nombreux étrangers qui respectaient les procédures établies pour obtenir un titre de séjour en Suisse.

M. A______ n'avait pas respecté les délais légaux en déposant sa demande huit ans et demi après avoir obtenu son autorisation de séjour, ce qu'il ne contestait d'ailleurs pas. L'admissibilité du regroupement familial devait donc tout d'abord être examinée sous l'angle des raisons familiales majeures. À teneur du dossier, rien ne permettait d'admettre qu'il avait maintenu avec ses enfants une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation et de la distance. Par ailleurs, les raisons familiales majeures invoquées pour justifier le regroupement familial, soit le fait que la mère des enfants ne souhaitait plus s'occuper d'eux et que les grands-parents paternels étaient trop âgés et malades pour les prendre en charge, n'étaient pas suffisantes. Le Tribunal fédéral avait déjà jugé dans un cas similaire qu'une mère ne pouvait valablement invoquer les us et coutumes de son pays pour manquer à ses obligations légales vis-à-vis de ses enfants. De plus,
M. A______ n'avait pas établi que les grands-parents des enfants, en particulier leur grand-mère, n'étaient pas en mesure de veiller sur eux, le cas échéant avec le soutien de leur mère. Aucune preuve n'avait été apportée concernant l'état de santé de sa mère, tandis que le seul et unique certificat médical produit s'agissant de son père, dont il ressortait qu'il était âgé de 81 ans et était sujet à un traitement médical, n'apparaissait pas suffisant.

Il n'était enfin pas établi que l'intérêt supérieur des enfants était de quitter leur pays et leur famille proche, avec qui ils avaient jusqu'ici vécu, même si leur mère ne souhaitait visiblement plus satisfaire à ses obligations. Leurs attaches sociales et culturelles se situaient en Macédoine, puisqu'ils y avaient vécu durant la majorité de leur vie, avec leur mère et/ou leurs grands-parents. Leur père pouvait continuer à leur rendre visite dans ce pays et maintenir des contacts réguliers par téléphone, lettres, messagerie électronique et vidéos à distance. Il pouvait également les soutenir financièrement depuis la Suisse et restait libre de retourner en Macédoine, dont son épouse actuelle était également originaire, pour se rapprocher d'eux. Le fait que, depuis presque trois ans, les enfants vivaient en Suisse et s'y intégraient sans doute découlait du choix de ce dernier de les faire venir sans autorisation et ne pouvait revêtir une portée déterminante, sous peine d'encourager la politique du fait accompli.

16. Par acte du 14 juillet 2016, M. A______ a recouru à l'encontre du jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation ainsi qu'à la délivrance d'autorisations d'établissement en faveur de B______ et C______.

Contrairement à ce que retenait le TAPI, ses enfants avaient le droit au regroupement familial. Il avait respecté les procédures légales en faisant d'abord entrer en Suisse ses enfants, puis en déposant une demande de regroupement familial. Aucun comportement répréhensible ne pouvait lui être reproché. L'OCPM s'était d'ailleurs abstenu de rendre une décision de renvoi à l'égard des enfants afin qu'ils attendent la fin de la procédure en Macédoine.

Le TAPI se référait à plusieurs arrêts du Tribunal fédéral s'agissant de l'exigence de la recherche de solutions alternatives dans le pays d'origine pour que l'enfant y demeure. Or, ces arrêts concernaient tous des enfants adolescents au moment du dépôt de la demande, ce qui avait grandement influencé les juges dans leur décision de refus du regroupement familial. S'agissant de la jurisprudence citée par le TAPI selon laquelle une mère ne pouvait valablement invoquer les us et coutumes de son pays pour manquer à ses obligations légales, c'était également en raison de l'âge avancé des enfants que les juges avaient considéré comme indispensable la recherche de solutions alternatives pour permettre aux enfants de rester dans leur pays d'origine.

B______ et C______ étaient quant à eux âgés de 11 ans et 7 ans au moment du dépôt de la demande. Leurs grands-parents étaient quant à eux âgés de 81 ans et 71 ans et avaient tous deux des problèmes de santé. L'inexistence de solutions alternatives de garde des enfants dans leur pays d'origine avait ainsi été démontrée. Sa volonté d'assurer le bien-être de ses enfants ainsi que le fait qu'ils les prennent réellement et quotidiennement en charge depuis presque trois ans prouvaient que la relation qu'il entretenait avec ses enfants était importante déjà au moment du dépôt de la demande de regroupement familial et était devenue prépondérante depuis lors. Le TAPI avait ainsi violé la jurisprudence selon laquelle les autorités ne devaient pas substituer leur appréciation à celle des parents s'agissant du lieu de séjour et de l'intérêt de l'enfant. Le TAPI avait mené un examen partiel, arbitraire et tendancieux sur ce dossier, rendant une décision contraire aux intérêts des enfants.

Étaient notamment jointes les pièces suivantes :

- la traduction officielle d'une attestation du 2 novembre 2015 de l'école primaire Jeronim de Rada, à Çerkez, Kumanovo (Macédoine), selon laquelle B______ y avait été scolarisée en tant qu'élève régulière jusqu'au 2 novembre 2013 et que c'était sa mère qui prenait soin d'elle et suivait sa scolarité ;

- la traduction d'un certificat médical du 13 novembre 2015 concernant sa mère, Mme I______, née le ______ 1945, précisant que celle-ci souffrait de « Dg Hypertensio art. Gonarthrosis bill » et listant les médicaments lui étant prescrits.

17. Le 18 juillet 2016, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

18. Dans ses observations du 15 août 2016, l'OCPM a conclu au rejet du recours se référant à sa décision et au jugement du TAPI.

Les enfants pouvaient effectivement entrer et séjourner en Suisse pendant trois mois sans autorisation. En revanche, lorsqu'il était prévu, comme en l'espèce, que le séjour dure plus de trois mois, les ressortissants macédoniens devaient solliciter et obtenir une autorisation avant l'entrée en Suisse.

Pour le surplus, il n'avait pas été établi, avec preuve à l'appui, que les enfants se trouveraient livrés à eux-mêmes dans leur pays d'origine. Ils avaient d'ailleurs sollicité et obtenu des visas de retour valables du 1er juillet 2016 au
30 août 2016 pour y passer leurs vacances.

19. Dans sa réplique du 14 septembre 2016, M. A______ a persisté dans son recours et produit des pièces complémentaires, à savoir les copies des pages de passeports tamponnées de Mme et M. A______ relatives à leur voyage en Macédoine en 2016. Les enfants avaient passé leurs vacances d'été 2016 en Macédoine accompagnés de leur belle-mère. Leur père les avait rejoints au début et à la fin de celles-ci.

Vu l'âge des enfants au moment de leur venue en Suisse, l'exigence de la recherche de solutions alternatives de garde dans leur pays d'origine et la preuve de l'inexistence de celles-ci devaient être largement relativisées.

20. Lors de l'audience de comparution personnelle du 30 mars 2017,
M. A______ a indiqué que ses parents, son frère et ses trois sœurs vivaient en Macédoine. Vivaient également en Macédoine la mère de B______ et C______,
Mme D______, ainsi que ses parents et l'un de ses frères. Avant que ses deux enfants ne le rejoignent en Suisse, il allait pratiquement chaque mois en Macédoine pour les voir. Il avait par ailleurs des contacts téléphoniques avec eux et leur mère pratiquement chaque jour. Ils leur versaient chaque mois entre CHF 200.- et CHF 500.-, par l'intermédiaire de proches, ou leur laissait de l'argent lorsqu'il allait leur rendre visite. Lorsque les enfants vivaient encore en Macédoine, c'était leur mère qui gérait l'école et les rendez-vous chez le pédiatre. À cette époque, les enfants voyaient leurs grands-parents paternels une à deux fois par mois ainsi que pendant les vacances. Leurs domiciles respectifs étaient séparés d'environ 15 km.

M. A______ a également versé deux documents à la procédure à la faveur desquels il apparaissait qu'C______ était aujourd’hui scolarisé en 6P tandis que B______ était dans une école de formation préprofessionnelle. Les deux enfants parlaient très bien le français. Ils avaient par ailleurs d'excellentes relations avec leur frère E______.

Il n'y avait à sa connaissance pas de jugement fixant le droit de visite de la mère de B______ et C______ ou qui définissait plus précisément ses droits. Celle-ci pouvait toutefois voir ses enfants quand elle le souhaitait. En 2016, elle avait vu ses enfants à Genève durant une journée, peu avant Nouvel-An, alors qu'elle rendait visite à son frère domicilié à Genève. Elle les avait également vus en Macédoine durant les vacances d'été. Durant l'année 2017, ils ne s'étaient pas encore vus. À sa demande, les enfants appelaient en revanche leur mère une à deux fois par mois. Mme D______ envoyait également des cadeaux pour l'anniversaire de B______ et C______. Il n'avait actuellement pratiquement plus aucun contact avec Mme D______, mais en avait avec le frère de celle-ci qui résidait à Genève. Il ignorait si elle s'était remariée. Il ne se rendait en Macédoine plus que pour les vacances d'été

En novembre 2013, Mme D______ l'avait contacté en lui expliquant qu'elle n'avait plus les moyens financiers de s'occuper de leurs enfants. Elle n'avait pas d'appartement ou de maison, pas de travail et vivait des aides sociales. Elle habitait chez ses parents où logeait également un de ses frères avec sa famille. Cette situation créait des tensions vu le nombre de personnes vivant dans une petite maison de trois chambres. Lors de leur séparation, il avait laissé les enfants à Mme D______ qui souhaitait les garder. Compte tenu des explications fournies par cette dernière, il avait toutefois décidé de les prendre en 2013. Il était possible que son projet de remariage ait suscité la réaction de Mme D______ de lui confier les enfants.

21. À l'issue de l'audience du 30 mars 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n’a toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), à savoir notamment s’il s’agit d’une mesure de contrainte prévue par le droit des étrangers (art. 10 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr -
F 2 10), hypothèse non réalisée en l’espèce.

3. Le recourant conclut à l’octroi d’une autorisation d'établissement en faveur de ses enfants B______ et C______ au titre du regroupement familial.

4. a. La loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA -
RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEtr), ce qui est le cas pour les ressortissants de Macédoine.

b. À teneur de la LEtr, le conjoint étranger d’une personne titulaire d’une autorisation d’établissement ainsi que ses enfants célibataires étrangers de moins de dix-huit ans ont droit à l’octroi d’une autorisation de séjour en Suisse à condition qu’ils vivent en ménage commun avec celle-ci (art. 43 al. 1 LEtr). Les enfants de moins de douze ans ont droit à l’octroi d’une autorisation d’établissement (art. 43 al. 3 LEtr).

c. En vertu de l'art. 47 LEtr, le regroupement familial doit être demandé dans les cinq ans. Pour les enfants de plus de douze ans, le regroupement doit intervenir dans un délai de douze mois (al. 1). Pour les membres de la famille d'étrangers, les délais commencent à courir lors de l'octroi de l'autorisation de séjour ou d'établissement ou lors de l'établissement du lien familial (al. 3 let. b). Passé ce délai, le regroupement familial différé n'est autorisé que pour des raisons familiales majeures. Si nécessaire, les enfants de plus de quatorze ans sont entendus (al. 4).

5. En l'espèce, il apparaît que le délai prévu par l’art. 47 al. 1 à 3 LEtr pour demander le regroupement familial a été dépassé, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par le recourant. Le regroupement familial ne peut donc être autorisé que pour des raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 LEtr.

6. a. Aux termes de l’art. 75 OASA, des raisons familiales majeures peuvent être invoquées lorsque le bien de l’enfant ne peut être garanti que par un regroupement familial en Suisse. Tel est notamment le cas lorsque des enfants se trouveraient livrés à eux-mêmes dans leur pays d’origine, par exemple en cas de décès ou de maladie de la personne qui en a la charge (ATF 126 II 329). Dans ce contexte, l’intérêt de l’enfant, et non les intérêts économiques, comme la prise d’une activité lucrative, priment (Message concernant la loi sur les étrangers, FF 2002 3469 p. 3549), les autorités ne devant, au surplus, faire usage de l’art. 47
al. 4 LEtr qu’avec retenue, conformément aux directives du SEM (Domaine des étrangers, directives LEtr, 2013, état au 6 mars 2017, n. 6.10.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_897/2013 du 16 avril 2014 ; 2C_1198/2012 du 26 mars 2013 consid. 4.2 ; 2C_555/2012 du 19 novembre 2012 consid. 2.3).

La reconnaissance d'un droit au regroupement familial suppose qu'un changement important de circonstances, notamment d'ordre familial, se soit produit, telle qu'une modification des possibilités de la prise en charge éducative à l'étranger (ATF 130 II 1 consid. 2 ; 124 II 361 consid. 3a). Lorsque le regroupement familial est demandé en raison de changements importants des circonstances à l'étranger, notamment dans les rapports de l'enfant avec le parent qui en avait la charge, il convient d'examiner s'il existe des solutions alternatives, permettant à l'enfant de rester où il vit ; cette exigence est d'autant plus importante pour les adolescents (ATF 133 II 6 consid. 3.1.2). D'une manière générale, plus le jeune a vécu longtemps à l'étranger et se trouve à un âge proche de la majorité, plus les motifs propres à justifier le déplacement de son centre de vie doivent apparaître sérieux et solidement étayés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_473/2014 précité consid. 4.3 ; 2C_1198/2012 précité consid. 4.2 ; 2C_132/2012 du 19 septembre 2012 consid. 2.3.1).

Le parent qui demande une autorisation de séjour pour son enfant au titre du regroupement familial partiel doit disposer (seul) de l'autorité parentale (ou au moins du droit de garde). En cas d'autorité parentale conjointe, il doit obtenir l'accord exprès de l'autre parent auprès duquel l'enfant vit à l'étranger (ATF 136 II 177 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_132/2011 du 28 juillet 2011 consid. 4). Le risque est en effet que le parent résidant en Suisse utilise les dispositions de la LEtr en matière de regroupement familial pour faire venir un enfant auprès de lui, alors qu'il n'a pas l'autorité parentale sur celui-ci ou, en cas d'autorité parentale conjointe, lorsque la venue en Suisse de l'enfant revient de facto à priver l'autre parent de toute possibilité de contact avec lui. Or, le regroupement familial doit être réalisé en conformité avec les règles du droit civil régissant les rapports entre parents et enfants, et il appartient aux autorités compétentes en matière de droit des étrangers de s'en assurer (ATF 136 II 78 consid. 4.8). En d'autres termes, le parent qui considère qu'il est dans l'intérêt de l'enfant de venir le rejoindre en Suisse doit, sous réserve de cas exceptionnels, être en droit de vivre avec son enfant selon les règles du droit civil (ATF 125 II 585 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_132/2011 précité consid. 4).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue sous l’ancien droit mais encore pertinente, la reconnaissance d'un droit au regroupement familial suppose que le parent établi en Suisse ait maintenu avec ses enfants une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation et de la distance (ATF 133 II 6 consid. 3.1). On peut notamment admettre qu'il y a une relation familiale prépondérante entre les enfants et le parent vivant en Suisse lorsque celui-ci a continué d'assumer de manière effective pendant toute la période de son absence la responsabilité principale de leur éducation, en intervenant à distance de manière décisive pour régler leur existence sur les questions essentielles, au point de reléguer le rôle de l'autre parent à l'arrière-plan. Pour autant, le maintien d'une telle relation ne signifie pas encore que le parent établi en Suisse puisse faire venir ses enfants à tout moment et dans n'importe quelles conditions. Il faut, comme dans le cas où les deux parents vivent en Suisse depuis plusieurs années séparés de leurs enfants, réserver les situations d'abus de droit, soit notamment celles dans lesquelles la demande de regroupement vise en priorité une finalité autre que la réunion de la famille sous le même toit. Par ailleurs, indépendamment de ces situations d'abus, il convient, surtout lorsque la demande de regroupement familial intervient après de nombreuses années de séparation, de procéder à un examen d'ensemble des circonstances portant en particulier sur la situation personnelle et familiale de l'enfant et sur ses réelles possibilités et chances de s'intégrer en Suisse et d'y vivre convenablement. Pour en juger, il y a notamment lieu de tenir compte de son âge, de son niveau de formation et de ses connaissances linguistiques. Un soudain déplacement de son centre de vie peut en effet constituer un véritable déracinement pour lui et s'accompagner de grandes difficultés d'intégration dans le nouveau cadre de vie ; celles-ci seront d'autant plus probables et potentiellement importantes que son âge sera avancé (ATF 133 II 6 consid. 3.1.1 ; ATF 129 II 11 consid. 3.3.2).

b. Le regroupement familial partiel suppose également de tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, comme l'exige l'art. 3 par. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989 et approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996 (instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 - CDE - RS 0.107). Il faut donc se demander si la venue en Suisse d'un enfant au titre du regroupement familial partiel n'entraînerait pas un déracinement traumatisant, ne reviendrait pas de facto à le couper de tout contact avec la famille résidant dans son pays d'origine et n'interviendrait pas contre la volonté de celui-ci. Certes, déterminer l'intérêt de l'enfant est très délicat. Les autorités ne doivent pas perdre de vue qu'il appartient en priorité aux parents de décider du lieu de séjour de leur enfant, en prenant en considération l'intérêt de celui-ci. En raison de l'écart de niveau de vie par rapport au pays d'origine, il est certes possible que les parents décident de la venue de l'enfant en Suisse sur la base de considérations avant tout économiques. Pour autant, les autorités compétentes en matière de droit des étrangers ne sauraient, en ce qui concerne l'intérêt de l'enfant, substituer leur appréciation à celle des parents, comme une autorité tutélaire peut être amenée à le faire. Leur pouvoir d'examen est bien plutôt limité à cet égard : elles ne doivent intervenir et refuser le regroupement familial que si celui-ci est manifestement contraire à l'intérêt de l'enfant (ATF 136 II 78 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_909/2015 du 1er avril 2016, consid. 4.4).

L’art. 10 CDE prévoit en outre que toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d'entrer dans un État partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale doit être considérée par les États parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence. Cette disposition n’accorde toutefois ni à l’enfant ni à ses parents un droit justiciable à une réunification familiale ; la Suisse y a d’ailleurs émis une réserve (Message du Conseil fédéral sur l'adhésion de la Suisse à la CDE du 29 juin 1994, FF 1994 V p. 35 ss ; Directives et commentaires du SEM, Domaine des étrangers – version au 6 mars 2017, ch. 0.2.2.9).

c. Enfin, les raisons familiales majeures pour le regroupement familial ultérieur doivent être interprétées d'une manière conforme au droit fondamental au respect de la vie familiale (art. 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 et 8 CEDH ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2013 du 17 avril 2014 consid. 3.1).

Aux termes de l'art. 8 CEDH, toute personne a notamment droit au respect de sa vie privée et familiale. Cette disposition ne confère cependant pas un droit à séjourner dans un État déterminé. Le fait de refuser un droit de séjour à un étranger dont la famille se trouve en Suisse peut toutefois porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par cette disposition (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 ; ATF 135 I 153 consid. 2.1). Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue, en vertu de l'art. 8 CEDH, un droit d'entrée et de séjour. Ainsi, lorsqu'un étranger a lui-même pris la décision de quitter sa famille pour aller vivre dans un autre État, ce dernier ne manque pas d'emblée à ses obligations de respecter la vie familiale s'il n'autorise pas la venue des proches du ressortissant étranger ou qu'il la subordonne à certaines conditions (arrêts 2C_793/2011 du 22 février 2012 consid. 2.1; 2C_553/2011 du 4 novembre 2011 consid. 2.1 et les références citées).

La protection accordée par l'art. 8 CEDH suppose que la relation avec l'enfant – qui doit être étroite et effective – ait préexisté (arrêts du Tribunal fédéral 2C_537/2009 du 31 mars 2010 consid. 3 ; 2C_490/2009 du 2 février 2010
consid. 3.2.3). On ne saurait accorder le regroupement familial si le regroupant et le regroupé n'ont jamais vécu ensemble, sous réserve de la situation dans laquelle le regroupant fait établir le lien de filiation ultérieurement (Eric BULU, Le regroupement familial différé, in Actualité du droit des étrangers, les relations familiales, 2016, p. 88).

7. En l'espèce, M. A______ a exposé à l'appui de sa demande de regroupement familial en faveur de B______ et C______ qu'il avait dû prendre ses enfants avec lui en Suisse, leur mère, Mme D______, n'étant pas en mesure de subvenir financièrement à leurs besoins. Il a allégué que celle-ci, ayant l'intention de refaire sa vie, ne souhaitait plus s'occuper de leurs enfants et les auraient abandonnés en 2013 chez les grands-parents paternels, lesquels étaient trop âgés pour s'en occuper. Dans son audition, le recourant a toutefois indiqué que
Mme D______ l'avait contacté en novembre 2013 pour lui dire qu'elle n'avait plus les moyens financiers nécessaires pour s'occuper des enfants et que, suite à ses explications, il avait décidé de les prendre.

À titre préalable, et comme le relève à juste titre le TAPI, il apparaît que
M. A______ dispose conjointement avec la mère des enfants, avec laquelle il ne s'est jamais marié, de l'autorité parentale et du droit de garde sur B______ et C______. La mère des enfants a par ailleurs autorisé leur venue en Suisse auprès de leur père. Par ailleurs, les enfants, âgés respectivement de 11 ans et 7 ans au moment du dépôt de la demande de regroupement familial, n'étaient alors clairement pas des adolescents, pour lesquels les conditions permettant d'autoriser un regroupement familial hors délai sont plus strictes encore.

En revanche, à teneur du dossier, il n’est pas établi qu'un réel changement important de circonstances se soit produit concernant la prise en charge des enfants en Macédoine. En effet, par acte notarié du 21 octobre 2013, Mme D______ a indiqué qu'elle n'avait pas « de conditions » de prendre soin et de s'occuper de ses enfants et qu'elle était d'accord pour qu'ils puissent vivre avec leur père, lequel leur apporterait support, protection, éducation et scolarisation. Il apparaît que la venue des enfants en Suisse relevait ainsi principalement d'une volonté de leur apporter de meilleures perspectives financières et éducatives. S'agissant des projets de remariage invoqués, selon M. A______, par Mme D______ en 2013 pour « abandonner » ses enfants, rien ne permet de prouver leur véracité. D'ailleurs, M. A______ a indiqué lors de son audition qu'il ne savait pas si Mme D______ s'était remariée et rien au dossier ne permet de considérer que tel est le cas. En effet, il n’a pas été mentionné que la mère des enfants aurait évoqué un mariage ou un nouveau compagnon ni lors des vacances d’été, ni lors de sa visite en décembre 2016.

Par ailleurs, si la recherche de solution alternative pour la prise en charge d'enfants mineurs dans le pays d'origine doit être examinée avec beaucoup de rigueur lorsque ceux-ci sont proches de la majorité, il ne doit pas pour autant y être renoncé s'agissant de jeunes enfants. Lors de l'audience de comparution personnelle du 30 mars 2017, M. A______ a indiqué que ses parents, son frère et ses trois sœurs vivaient en Macédoine. Vivaient également en Macédoine la mère de B______ et C______, Mme D______, ainsi que ses parents et l'un de ses frères. À teneur des explications de M. A______, les domiciles des grands-parents respectifs sont distants d'environ 15 km. Ainsi, il existait incontestablement une possibilité de prise en charge alternative des enfants dans leur pays d'origine, avec l'aide économique de leur père au besoin. À cet égard, il sera relevé que les enfants ont d'ailleurs vécu plusieurs années avec leurs grands-parents maternels, lesquels les hébergeaient eux-mêmes ainsi que leur mère. De plus, ils ont également déjà séjourné, à teneur des écritures de M. A______ à l'OCPM, plusieurs jours, voire plusieurs semaines, chez leurs grands-parents paternels, chez qui ils ont d'ailleurs passé toutes les vacances d'été 2016 en compagnie de leur belle-mère. S'il est vrai que ces derniers sont âgés de 82 ans, respectivement 72 ans, et souffrent de problèmes d'hypertension et de tachycardie, cela ne signifie pas qu'ils ne pourraient pas, dans une mesure limitée, prendre soin de leurs petits-enfants. Il n'apparaît ainsi pas que les enfants seraient livrés à eux-mêmes en Macédoine, pays dans lequel ils ont toujours vécu et dans lequel ils étaient scolarisés jusqu'à leur arrivée en Suisse en novembre 2013.

De surcroît, la jurisprudence est très stricte. Le seul fait de posséder encore de la famille sur place implique quasiment un refus du regroupement familial ultérieur. Un examen minutieux d’une solution de prise en charge alternative doit être effectué. Or, la venue en Suisse, en 2013, des enfants n’a manifestement pas permis cet examen. Il en découle que les enfants se trouvent sur territoire helvétique depuis trois ans environ où ils ont créé des attaches et notamment y ont été scolarisés. Cette situation est toutefois contraire à la législation qui impose d’attendre à l’étranger le résultat de la demande de regroupement familial. Même s'il ne l'invoque pas, le recourant ne peut déduire aucun droit de ce que ses enfants se trouvent déjà en Suisse. Tenir compte de ce fait dans la présente cause reviendrait à encourager la politique du fait accompli et, par conséquent, à porter atteinte au principe de l'égalité par rapport aux nombreux étrangers qui respectent les procédures établies pour obtenir un titre de séjour en Suisse (arrêt 2C_161/2012 du 1er avril 2013 consid. 1.4.2).

De surcroît, B______ se trouve actuellement scolarisée dans une école de formation préprofessionnelle, réservée aux élèves en difficulté importante d’apprentissage, ce qui laisse à penser que son adaptation au système scolaire suisse n'est pas aisée, quand bien même elle-même et son frère s'expriment très bien en français selon leur père.

Ainsi, le départ de Macédoine des enfants du recourant, alors qu'ils y étaient scolarisés et y vivaient auprès de leur mère, pour rejoindre leur père avec lequel ils n'avaient que peu, respectivement jamais vécu, était manifestement contraire à la législation suisse applicable, une prise en charge alternative étant au surplus envisageable dans leur pays d'origine.

Au demeurant, même à suivre complètement l’argumentation du recourant, à savoir que la mère aurait subitement souhaité ne plus s’occuper des enfants, ce que l’attitude peu présente de celle-ci depuis semble confirmer, la rigueur de la jurisprudence précitée ne permettrait pas d’arriver à une autre solution. Compte tenu du nombre de membres de la famille se trouvant en Macédoine, et de l’application, voulue exceptionnelle, de l’art. 47 al. 4 LEtr, la décision de l’OCPM resterait conforme au droit. L’audition de B______, envisagée par la chambre de céans, ne modifierait pas la solution juridique.

8. Les recourants ne peuvent pas non plus tirer argument de la CEDH.

Même à considérer comme prouvées les allégations du père selon lesquelles il aurait effectivement entretenu des relations avec ses enfants lorsqu'ils vivaient encore en Macédoine, notamment en leur rendant visite fréquemment, en communiquant par téléphone et via internet, allégations pour lesquelles le recourant a versé de nombreuses pièces pertinentes à la procédure, ainsi qu’en contribuant régulièrement à leur entretien, on ne saurait retenir l'existence d'une relation familiale prépondérante au sens de la jurisprudence stricte relative à l’art. 8 CEDH en la matière, en dépit de la séparation et de la distance.

En effet, d'une part, le recourant, qui a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse le 8 mars 2005 suite à son mariage le 17 octobre 2003 avec Mme G______, n'a jamais vécu avec son fils C______, né en septembre 2006. D'autre part, c'est bien Mme D______, et non le recourant, qui a pris en charge de manière effective les enfants jusqu'à leur arrivée en Suisse en 2013, soit notamment pour les questions liées à l'école ou à leur santé.

Pour le surplus, il sera relevé que M. A______ peut continuer d'entretenir des relations avec ses enfants par téléphone et via internet ainsi qu'en se rendant régulièrement en Macédoine, comme il le faisait avant l'arrivée des enfants en Suisse en 2013.

La décision de refus querellée ne viole en conséquence pas la CEDH.

9. Enfin, la décision de l'OCPM est également conforme au droit sous l'angle de la CDE, cette dernière n'accordant d'ailleurs aucun droit à une réunification familiale.

10. Même la présence, à Genève, d’un frère, avec qui les recourants vivent depuis trois ans, ne peut être déterminante. Les liens que les enfants ont pu développer l’ont été grâce à la présence, non autorisée, des recourants mineurs.

11. Au vu de ce qui précède et notamment de l’ampleur de la famille, grands-parents, oncles et tantes, voire mère, qui reste en Macédoine, la condition des raisons familiales majeures au sens de l’art. 47 al. 4 LEtr n’est pas réalisée, de sorte que le regroupement familial sollicité ne peut être admis, ce qui, au regard des principes et des circonstances susmentionnés, est conforme à la LEtr, à la CDE et à la CEDH. Pour ces raisons, l'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant au recourant une autorisation d'établissement au titre du regroupement familial pour ses enfants B______ et C______, ce que le TAPI a, à juste titre, confirmé.

12. a. Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée. Le renvoi d’un étranger ne peut être ordonné que si l’exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEtr). L’exécution n’est pas possible lorsque l’intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEtr). Elle n’est pas licite lorsqu’elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEtr). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

b. En l’espèce, M. A______ n’allègue pas que le retour de B______ et C______ dans leur pays d’origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de l’art. 83 LEtr et le dossier ne laisse pas apparaître d’éléments qui tendraient à démontrer le contraire. C’est ainsi à bon droit que leur renvoi a été prononcé.

13. Le recours doit en conséquence être rejeté.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 juillet 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 juin 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt au Centre de Contact Suisse-Immigrés, mandataire des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.