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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/402/2014

ATA/338/2014 du 13.05.2014 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉCISION INCIDENTE ; DOMMAGE ; DOMMAGE IRRÉPARABLE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : LPA.57.letc ; Cst.29.al2
Résumé : Une décision de suspension et d'ouverture d'enquête administrative est une décision incidente. L'atteinte à l'image et à la personnalité doit être mise en balance avec l'intérêt public de l'autorité. Par conséquent, recours irrecevable en l'absence de dommage irréparable impliquant le défaut de qualité pour recourir.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/402/2014-FPUBL ATA/338/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 mai 2014

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Thierry Sticher, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE

 



EN FAIT

1) Monsieur A______ est employé à la Ville de Genève (ci-après : la ville) en tant que « gestionnaire ressources humaines 3 ». Il a été nommé tout d’abord assistant ressources humaines (RH) au service B______ (ci-après: B______) le 1er novembre 2008 puis Le 1er septembre 2009, l'intitulé de son poste a été modifié en « gestionnaire RH ». Le 1er décembre 2011, la dénomination de son poste a changé pour prendre la dénomination actuelle.

2) Le 29 janvier 2014, Mme C______, directrice du département de l'environnement urbain et de la sécurité (ci-après: le département), et Monsieur D______, supérieur hiérarchique direct de M. A______, ont convoqué ce dernier. Il lui a été communiqué que de graves accusations pesaient contre lui. Une décision prononçant la suspension de deux jours avec effet immédiat lui a été signifiée et remise en mains propres. Il n'a pas eu l'occasion de s'expliquer.

Auparavant, l'ordinateur de M. A______ avait été saisi afin de vérifier la présence possible de données répréhensibles.

A teneur de la décision, la direction de l'école de commerce F______ (ci-après : la direction) avait informé Mme C______ que M. A______ aurait eu des gestes et des paroles inappropriées à l'égard d'une stagiaire de maturité professionnelle commerciale (ci-après : la stagiaire) au service d’incendie et de secours (ci-après : B______), dont il avait la responsabilité.

M. A______ aurait également été en état d'ébriété sur le lieu de travail. Il aurait également violé la directive relative à l'utilisation des systèmes d'information et de communication de la Ville de Genève (ci-après: la directive).

Le Conseil administratif de la Ville de Genève (ci-après : le conseil administratif) avait été saisi du dossier et lui ferait part de sa décision.

3) Par décision exécutoire nonobstant recours du 30 janvier 2014, le conseil administratif a ouvert une enquête administrative à l'encontre de M. A______. Il a également confirmé la suspension d'activité, mesure provisionnelle jusqu'au prononcé d'une éventuelle sanction ou licenciement.

Le département de l'instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP) l'avait informé que M. A______ avait eu un comportement inadéquat à plusieurs reprises, en particulier le 21 janvier 2014, sur son lieu de travail, notamment à l'égard d’une stagiaire.

Une série de faits avait été portée à la connaissance du conseil administratif :

-          M. A______ n'aurait pas respecté son horaire de travail ;

-          il aurait été à plusieurs reprises en état d'ébriété sur son lieu de travail, notamment le 21 janvier 2014 ;

-          il aurait adopté à maintes reprises un comportement inapproprié à l'endroit de collaboratrices de l'administration municipale ;

-          il aurait négligé la formation et l'encadrement de la stagiaire, dont il avait la responsabilité ;

-          il aurait eu des propos sexistes en présence de la stagiaire et eu une attitude et des gestes déplacés à son endroit, notamment le 21 janvier 2014 ;

-          il aurait rédigé un courrier au nom d'un tiers et incité la stagiaire à imiter une signature ;

-          il aurait contrevenu à de multiples reprises à la directive ;

-          il aurait utilisé le matériel informatique de la ville pour stocker et consulter des fichiers à caractère pornographique ou/et érotique ;

-          il aurait sciemment confronté la stagiaire à des images à caractère pornographique ou/et érotique ;

-          il aurait ainsi adopté un comportement incompatible avec le statut d'employé de la ville susceptible de porter préjudice aux intérêts de la ville mais également à la considération et à la confiance dont la fonction publique doit être l'objet.

Ces manquements, s'ils étaient avérés, constituaient une violation grave des devoirs généraux de l'employé et, dès lors, étaient susceptibles d'une sanction disciplinaire et pouvaient également fonder un licenciement.

Ce courrier a été envoyé à l'intéressé par pli recommandé et pli simple, à l'adresse enregistrée dans la base de données de la ville.

4) Le 31 janvier 2014, M. A______, à sa demande, a reçu par courrier électronique copie de la décision du conseil administratif.

5) Le 5 février 2014, par l'intermédiaire de son conseil, M. A______ a demandé à avoir une copie de l'intégralité de son dossier ainsi qu’à avoir accès à la dénonciation du DIP, mentionnée dans la décision du conseil administratif du 30 janvier 2014.

6) Le 6 février 2014, la ville a répondu au conseil de M. A______, par le biais de Madame E______, enquêtrice administrative, que ce dernier pouvait retirer une copie du dossier auprès de la ville. Rendez-vous lui était fixé le jour-même pour qu'il puisse le consulter sur place.

7) Le 10 février 2014, une audience de comparution personnelle de M. A______ a eu lieu dans le cadre de l'enquête administrative.

8) Le même jour, M. A______ a recouru contre les décisions de la directrice du département du 29 janvier 2014 et du conseil administratif du 30 janvier 2014 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à leur annulation.

Aucun reproche ne lui avait été fait jusqu'au 29 janvier 2014.

Il ne contestait pas l'ouverture d'une enquête administrative qui lui permettrait de se défendre et de fournir la preuve de son innocence. En revanche, il contestait les décisions de suspension qui portaient atteinte à sa personnalité.

Les décisions avaient été prises en violation de son droit d'être entendu, ce qui entraînait leur nullité. Lors de l'entrevue du 29 janvier 2014 avec Mme C______ et M. D______, les accusations ne lui avaient été que vaguement exposées. Il ne lui avait pas été demandé de se déterminer à leur sujet.

Le conseil administratif ne l'avait pas entendu le 29 janvier 2014, avant de rendre sa décision.

Il n'avait pas reçu la décision du 30 janvier car elle avait été envoyée à son ancienne adresse, alors que la ville devait connaître la nouvelle.

En outre, les reproches invoqués manquaient de substance. Ils ne comportaient pas de détails. Aucune plainte formelle et signée n'avait été déposée. La mesure était donc disproportionnée et contraire au droit. De plus, l'ensemble du personnel semblait être au courant des accusations d'ordre sexuel portées à son encontre, ce qui entraînait une importante atteinte à sa personnalité. La stagiaire était en congé maladie. Dès lors, la réintégration du recourant ne risquait pas d'entraîner une confrontation entre eux. Finalement, M. A______ n'était pas le seul employé auquel on reprochait des comportements déplacés. L'un de ses subordonnés directs, se voyait reprocher le même type de comportement, sans qu'il soit suspendu.

9) Le 27 février 2014, la ville a conclu à l'irrecevabilité des recours de M. A______ et subsidiairement à leur rejet.

Le recourant avait été remis à l'ordre par M. D______ suite à des comportements inappropriés à l'égard des candidates et des collaboratrices du B______.

Ce même jour, le DIP avait dénoncé les agissements de l'intéressé, notamment à l'encontre de la stagiaire, à la direction des ressources humaines de la ville.

La décision du conseil administratif n'avait pas pu être notifiée le 29 janvier 2014, jour de la délibération, pour des raisons organisationnelles. Dès lors, Mme C______ lui avait notifié le jour en question une décision de suspension de 48 heures, précisant que le conseil administratif avait été saisi du dossier et qu'il notifierait ultérieurement sa décision au recourant.

M. A______ n'avait jamais informé la ville de son changement d'adresse alors que c'était son devoir.

Il avait eu tout loisir de se défendre efficacement. Il avait pu consulter son dossier et en lever copie le 6 février 2014. Ce dossier comprenait la dénonciation du DIP. Il avait pu s'exprimer sur les faits reprochés lors de la comparution personnelle dans le cadre de l'enquête administrative, le 10 février 2014. Le rapport d'enquête lui serait transmis et il pourrait s'exprimer avant la décision finale du conseil administratif.

Même si ce n'était pas pertinent, il était précisé que les situations du recourant et de son collaborateur direct étaient différentes.

Les décisions querellées étaient des décisions incidentes. Pour que les recours fussent recevables il fallait soit que la décision pût causer un préjudice irréparable ou que l'admission du recours conduisît à une décision finale évitant ainsi une procédure probatoire longue et coûteuse, ce qui n'était pas le cas.

Le recourant percevait toujours son salaire. Il n'avait pas démontré l'existence d'un préjudice irréparable et n'avait fait qu'affirmer sans démonstration que l'ensemble du personnel semblait être informé des accusations d'ordre sexuel portées à son encontre. La levée de la suspension ne changerait rien à la décision qui suivrait l'enquête administrative.

Le droit d'être entendu n'avait pas été violé, et, si tel devait être le cas, cette éventuelle violation avait été réparée par le dépôt de ses recours.

Les mesures provisionnelles étaient proportionnées vu la gravité des faits reprochés et la position hiérarchique du recourant. Elles permettaient également d'éviter un contact entre la stagiaire et l'intéressé.

10) Le 4 mars 2014, le recourant, par le biais de son conseil, a indiqué que la stagiaire ne travaillait plus au B______. La suspension du recourant était donc disproportionnée.

11) Le 18 mars 2014, le recourant a rappelé que la suspension portait atteinte à sa personnalité. La ville n'envisageait pas l'innocence du recourant dans la décision du 30 janvier 2014. Cela violait gravement ses intérêts.

12) Le 21 mars 2014, la cause a été gardée à juger.

13) Le 25 mars 2014, le recourant a indiqué que, suite à l'audition de témoins dans le cadre de l'enquête administrative, il apparaissait que des rumeurs circulaient sur les raisons de sa suspension, lui causant un préjudice irréparable.

14) Le 30 avril 2014, le recourant a fait état de rumeurs au sein du B______ qui l'accusaient de détournements financiers, ce qui confirmait la teneur des courriers des 18 et 25 mars 2014.

EN DROIT

1) Les recours sont recevables relativement à la compétence de la chambre administrative (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2) Selon la jurisprudence constante rendue par la chambre de céans, une décision de suspension provisoire d’un fonctionnaire est une décision incidente contre laquelle un recours est ouvert dans les dix jours, même si l'art. 103 du Statut du personnel de la Ville de Genève du 29 juin 2010 indique un délai de trente jours (art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 LPA -  E 5 10 ; ATA/97/2014 du 18 février 2014 consid. 6 ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 1).

Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, le délai expire le premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA).

3) En l'espèce, les recours ont été déposés le lundi 10 février 2014, premier jour utile après l'échéance des délais respectifs. Les recours sont donc aussi recevables de ce point de vue.

4) En vertu de l’art. 57 let. c LPA, sont susceptibles d’un recours les décisions incidentes, si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.

Cette disposition légale a la même teneur que l’art. 93 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un préjudice est irréparable au sens de cette disposition lorsqu’il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 ; 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2 ; 133 II 629 consid. 2.3.1). Un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l’économie de la procédure peut constituer un tel préjudice (ATF 127 II 132 consid. 2a ; 126 V 244 consid. 2c ; 125 II 613 consid. 2a). Le simple fait d’avoir à subir une procédure et les inconvénients qui y sont liés ne constitue toutefois pas en soi un préjudice irréparable (ATF 133 IV 139 consid. 4 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_149/2008 du 12 août 2008 consid. 2.1 ; ATA/305/2009 du 23 juin 2009 consid. 2b et 5b et les références citées). Un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n’est notamment pas considéré comme un dommage irréparable de ce point de vue (ATF 133 IV 139 précité consid. 4 ; 131 I 57 consid. 1 ; 129 III 107 consid. 1.2.1 ; 127 I 92 consid. 1c ; 126 I 97 consid. 1b).

5) La chambre administrative a précisé à plusieurs reprises que l’art 57. let. c LPA devait être interprété à la lumière de ces principes (ATA/97/2014 du 18 février 2014 précité consid. 3 ; ATA/715/2013 du 29 octobre 2013 consid. 3 ; ATA/65/2012 du 31 janvier 2012).

En matière d'enquête administrative, elle a déclaré irrecevable, pour défaut de préjudice, un recours contre une décision d'ouverture d'une enquête administrative (ATA/305/2009 précité), de même qu'un recours contre une décision de l'enquêteur administratif d'entendre en qualité de témoins des collaborateurs d'une autorité ayant requis du Conseil d'Etat l'ouverture de l'enquête administrative (ATA/715/2013 du 29 octobre 2013 consid. 3).

Elle a également nié l'existence d'un préjudice irréparable en cas d'ouverture d'une procédure de reclassement, une telle décision étant au contraire destinée, dans l’hypothèse où le reclassement aboutirait, à éviter ou à atténuer les effets de la décision de licencier envisagée (ATA/825/2013 du 17 décembre 2013 consid. 8 ; ATA/293/2013 du 7 mai 2013 consid. 10).

6) Le Tribunal fédéral (Arrêt 2P.183/2005 du 19 juillet 2005) a rejeté un recours dirigé contre un arrêt du Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du 29 juin 2005. Cette juridiction avait déclaré irrecevable un recours contre une décision de refus d'audition de témoins dans le cadre d'une enquête administrative au motif qu'une telle décision prise en matière d'administration des preuves ne pouvait causer un préjudice irréparable. La notion de décision incidente créant un dommage irréparable, prévue par le droit de procédure administrative cantonale pour régir les conditions de recevabilité d'un recours contre une décision incidente, avait été interprétée par cette instance conformément à celle prévue par le droit fédéral (art. 45 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 - PA - RS 172.021) et le jugement attaqué ne pouvait être qualifié d'arbitraire.

7) En l'espèce, le recourant remet en cause sa suspension, expliquant qu'elle lui cause un préjudice irréparable.

Cependant, il conserve son traitement pendant sa suspension, ce qui exclut une quelconque atteinte à ses intérêts économiques. Les rumeurs concernant sa suspension sont certes regrettables, mais doivent être mises en balance avec les intérêts de la ville au bon fonctionnement de ses services, au maintien de la confiance des administrés envers le service public et à la protection de ses employés. Or, les faits reprochés sont graves et, sans présumer de la suite de l'enquête, ne semblent pas, prima facie, dénués de tout fondement. Même si la stagiaire ne travaille plus au B______, la ville a agi par mesure de précaution. Le retour au travail du recourant est à même de mettre en péril le bon fonctionnement du service. En outre, une décision finale suite à l'enquête administrative, dans l'hypothèse qu'elle soit entièrement favorable au recourant, permettrait de réparer l'atteinte à sa personnalité.

8) La seconde hypothèse de l'art. 57 let. c LPA, à savoir l’obtention immédiate d'une décision finale permettant d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse en cas d’admission des recours n'est pas davantage réalisée. Elle ne serait en effet pas susceptible d’éviter la procédure d'enquête administrative en cours.

Vu ce qui précède, les recours seront déclarés irrecevables.

Dès lors, la question de l'intérêt actuel à recourir de M. A______ contre la décision du 29 janvier 2014 peut souffrir de rester ouverte.

9) Même s’il n'y conclut pas clairement, le recourant évoque la nullité des décisions pour une violation grave du droit d'être entendu. En tout état de cause, la chambre doit constater d'office s'il y a nullité d'une décision (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 929 p. 313).

a. Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est en principe pas nulle, mais annulable (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.207/2001 du 12 novembre 2001 consid. 5a ; ATA/195/2014 du 1er avril 2014 consid. 5 ; ATA/32/2010 du 11 mai 2010 ; Thierry TANQUEREL, op. cit. n. 916, p. 312).

Selon la jurisprudence fondée sur l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend pour l’intéressé celui d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b ; 127 III 576 consid. 2c ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2).

L'art. 29 al. 2 Cst. n'a, dans le cadre d'une procédure concernant des mesures provisoires, pas la même portée que s'agissant de la procédure au fond (ATF 139 I 189 consid. 3.3 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_631/2010 du 8 septembre 2010 consid. 3.2 ; 2P.103/2006 du 29 mai 2006 consid. 3.1).

b. La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, est possible lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure (ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 6 ; Pierre MOOR, Droit administratif, Les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2ème éd., Berne 2002, ch. 2.2.7.4 p. 283). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/735/2013 consid. 6).

10) La décision nulle, qui n’a que l’apparence d'un tel acte, est censée n’avoir jamais existé. La nullité d'un acte ne peut être admise qu’exceptionnellement car elle crée une grande insécurité juridique. Elle n’est reconnue que si le vice dont la décision est entachée est particulièrement grave, s’il est manifeste ou du moins facilement décelable, et si en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit (ATF 132 II 21 consid. 3.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_34/2013 du 21 janvier 2013 consid. 6.3). Ces conditions sont cumulatives et elles ont pour conséquence que la nullité n’est que très rarement admise (Thierry TANQUEREL, op. cit. p. 312).

11) En l'espèce, la décision de suspension de deux jours infligée par la directrice a été notifiée au recourant le 29 janvier 2014. La décision du conseil administratif lui a été envoyée le 30 janvier 2014. L'adresse du recourant n'était pas correcte. Il n'est pas nécessaire de savoir si cette erreur relevait du fait de la ville ou du recourant, ce dernier ayant pris connaissance de la décision le 31 janvier 2014. Il a pu ainsi faire valoir ses droits dès cette date. Il a eu accès au dossier dès le 6 février 2014, dans le délai de recours de dix jours. Il a en outre pu s'exprimer dans le cadre de l'enquête administrative. Finalement, la chambre a reçu et a pu examiner les documents envoyés par le recourant dans le cadre de la présente procédure. Dès lors, il n'y a pas violation grave du droit d'être entendu et même s'il existait une violation de celui-ci, cette dernière a été réparée.

12) Ainsi, les décisions querellées ne sont pas nulles.

13) Au vu de ce qui précède, les recours sont irrecevables. Un émolument de CHF 500.- est mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Il ne lui est alloué aucune indemnité.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevables les recours interjetés le 10 février 2014 par Monsieur A______ contre les décisions, respectivement, de la directrice du département de l'environnement urbain et de la sécurité de la Ville de Genève du 29 janvier 2014 et du Conseil administratif de la Ville de Genève du 30 janvier 2014 ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Thierry Sticher, avocat du recourant ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :