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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1607/2003

ATA/251/2004 du 23.03.2004 ( CE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : JONCTION DES CAUSES; QUALITE POUR AGIR; ASSOCIATION; FORME DU RECOURS; PLANS; PLANS SPECIAUX; ZONES DE BRUIT; ZONES; DEGRES DE SENSIBILITE; POUVOIR D'EXAMEN; ENQUETE PUBLIQUE; POUVOIR D'APPRECIATION; PREAVIS; CE
Normes : LPE.7; LPE.24; OPB.43; OPB.44; LALAT.13 al.1 litt.f; LALAT.19 al.2; LALAT.35 al.1; LALAT.35 al.2; LALAT.35 al.3; LCI.145 al.3; LPA.65 al.2; LPA.70; LEXT.5 al.6; LaLPE.15 al.3; LaLPE.17; RCPB.3
Résumé : Attribution par le Conseil d'Etat des degrés de sensibilité de bruit (DS) aux zones de 16 communes genevoises par l'adoption de 16 plans d'affectation spéciaux. Jonction des causes. Qualité pour agir reconnue à une association qui s'était vue dénier cette qualité moins de deux ans plus tôt par le même tribunal. Celle-ci remplit aujourd'hui les conditions structurelles et organisationnelles qui lui faisaient auparavant défaut. Portée de l'exigence des 3 ans d'activité imposés aux associations par la LALAT et la LALPE. Les conditions de la qualité pour agir des associations ne doivent pas être jugées trop sévèrement dans les domaines de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement. Examen attentif de ces conditions en l'espèce. Exigences de forme minimales que doit remplir l'acte de recours. But de ces exigences. Les vices formels figurant dans l'acte d'opposition préalable au recours ont été guéris en l'espèce car l'autorité chargée de statuer sur l'opposition n'a pas invité la recourante à y remédier. Application par analogie de l'art. 65 al. 1 LPA à la procédure d'opposition préalable. Des plans d'attribution de degrés de sensibilité (DS) qui attribuent massivement le DS II à la zone 4B protégée et qui, suite à l'enquête publique, leur attribue pour une grande part le DS III subissent une modification essentielle justifiant une nouvelle enquête publique. Pouvoir d'examen du tribunal limité à l'excès ou l'abus par l'autorité d'application de son pouvoir d'appréciation. Exposé des normes de la LPE et de l'OPB relatives à la protection contre le bruit. Les notions figurant à l'art. 43 al. 1 let. c OPB et 19 al. 2 LALAT ne doivent pas être confondues. Il doit être considéré que la 4ème zone de l'art. 19 al. 2 LALAT répond aux critères de l'art. 43 al. 1 let. b OPB et non à la lettre c de cette dernière disposition. Cette interprétation est la seule compatible avec le principe de prévention contenu dans l'art. 11 LPE. La possibilité d'un déclassement d'un DS offerte par l'art. 43 al. 2 OPB doit être utilisée avec la plus grande retenue ; une exposition de la zone au bruit du trafic routier ne peut en tout cas pas constituer un critère de déclassement automatique. Il convient, pour procéder à un tel déclassement, de démontrer l'absence de possibilités d'assainissement raisonnables. La méthode d'attribution des DS utilisée peut conduire à des résultats très différents selon la manière dont sont interprétées les notions qu'elle contient. Le préavis du service cantonal compétent qui ne porte que sur cette méthode et non sur la manière dont elle a été appliquée en l'espèce n'est pas utilisable. Le délai imposé par l'art. 44 OPB est un pur délai d'ordre. Sur les 16 plans contestés, trois sont confirmés, 12 sont renvoyé pour nouvelle mise à l'enquête publique parce qu'ils ont subis des modifications essentielles suite à la première enquête. Le dernier plan est annulé pour violation du pouvoir d'appréciation (l'autorité n'a pas démontré l'absence de possibilité d'assainissement justifiant un déclassement de la zone 4B protégée en DS III).
En fait
En droit

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 23 mars 2004

 

 

 

dans la cause

 

 

FAQH

 

 

 

 

contre

 

 

 

 

CONSEIL D'ETAT

 



EN FAIT

 

 

1. Du 17 août au 16 octobre 1998, le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : DAEL) du canton de Genève a mis à l'enquête publique 45 plans d'attribution des degrés de sensibilité au bruit (ci-après : DS), en application de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41).

 

Ces plans concernaient chacun l'une des 45 communes du canton.

 

2. Dans le cadre de cette enquête, la FAQH (ci-après : FAQH) a formulé différentes observations.

 

3. Les autorités ayant décidé de scinder l'adoption de ces plans en plusieurs procédures, une première série de plans concernant les communes d'Anières, Avusy, Carouge, Collonge-Bellerive, Cologny, Confignon, Corsier, Hermance, Lancy, Onex, Presinge, Puplinge, Troinex, Veyrier et ville de Genève, a été adoptée.

 

4. En juin 2000, six associations, dont la FAQH, ont recouru contre ces plans auprès du Tribunal administratif.

 

5. Par arrêt du 19 juin 2001, le Tribunal administratif a admis les recours et annulé lesdits plans.

Le Conseil d'Etat n'avait pas assez tenu compte, dans sa méthode d'attribution, des possibilités d'assainissement. Les zones concentrant l'habitat devaient être classées en principe en DS II et les bâtiments requérant une protection particulière (hôpitaux notamment) en DS I. L'absence de possibilités d'assainissement pouvait fonder un déclassement mais les nuisances sonores imputables au trafic motorisé ne pouvaient constituer un critère de déclassement automatique; c'était inverser les termes de la loi que d'attribuer, par principe, le DS III aux zones exposées au bruit et le DS II lorsque ce bruit apparaissait inférieur aux valeurs limites de planification. La situation du canton de Genève, du point de vue des nuisances sonores, devenait dramatique pour une grande partie de la population. Cette situation justifiait que l'on s'écarte de la solution retenue par le Tribunal fédéral (TF) dans un arrêt de 1994 où il avait été admis que le Conseil d'Etat n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation en assimilant la 2ème zone à bâtir à une zone mixte au sens de l'article 43 alinéa 1 lettre c OPB, permettant l'attribution du DS III. Une attribution systématique du DS III à ces zones devait désormais être considérée comme contraire à la LPE. Les éléments à l'appui de la mixité pouvant justifier un classement en DS III n'avaient pas été établis, dans le cas d'espèce, à satisfaction de droit.

 

6. La qualité pour agir de la FAQH n'a pas été remise en cause dans cet arrêt.

 

7. Parallèlement à ce recours, la procédure relative à la deuxième série de plans concernant les communes d'Aire-la-Ville, Avully, Bardonnex, Bernex, Cartigny, Chancy, Choulex, Dardagny, Gy, Jussy, Laconnex, Meinier, Perly-Certoux, Russin, Soral et Vandoeuvres s'est poursuivie.

 

8. Dans le cadre de cette procédure, plusieurs des 16 communes concernées ont émis des réserves dans leurs préavis. Beaucoup d'entre elles demandaient l'attribution du DS III en lieu et place du DS II au motif que ce dernier DS n'était pas compatible avec la présence d'entreprises sises sur leurs territoires ou de celles dont l'installation était souhaitée à l'avenir.

 

9. Seul le conseil municipal (ci-après : CM) de Vandoeuvres a formulé la demande inverse, soit l'extension du DS II à une partie habitée de la zone agricole et aux zones longeant les axes routiers principaux. Le CM de Choulex a préavisé sans réserve. A Bernex, l'attribution du DS III a été demandée uniquement pour quatre bâtiments existants où des activités bruyantes étaient exercées.

10. Suite à ces préavis, les 16 plans concernés ont été modifiés. Cette modification a conduit à attribuer le DS III au lieu du DS II à l'essentiel de la zone 4B protégée, zone principale prévalant dans les villages concernés.

11. Les plans modifiés n'ont pas été remis à l'enquête publique.

 

12. Le 12 juin 2003, le service cantonal de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants a rendu son préavis sur l'attribution des DS à ces 16 communes.

 

Compte tenu de l'ampleur du territoire concerné, il ne pouvait donner son préavis que sur le principe. La méthode adoptée était conforme aux exigences de l'OPB. Les objectifs de protection contre le bruit et ceux de l'aménagement étaient conformes aux principes du développement durable et d'utilisation rationnelle du sol. Les DS devaient en principe être attribués par zone et non par bâtiments. En ce sens, les plans s'écartaient du système prévu par l'article 43 OPB lorsqu'ils attribuaient un DS à un hôpital, à une école ou à un établissement médico-social (ci-après : EMS). Les DS attribués devaient permettre la mise en place rapide des mesures de protection contre le bruit, aussi bien en ce qui concernait l'assainissement des installations existantes que des installations et logements à venir.

 

13. En date du 4 mars 2000, la FAQH s'est opposée à ces 16 plans d'attribution.

 

Dans des termes peu clairs, elle se référait à sa "précédente opposition", dont le contenu s'appliquait aux nouveaux plans concernés et ajoutait "ceci bien entendu pour autant qu'une école s'y trouvant ait reçu un DS supérieur à II ou exceptionnellement II déclassé III (ci-après : IIdIII) ou/et un établissement hospitalier ou EMS un DS différent de I ou éventuellement I déclassé II (ci-après : IdII)". Suivaient des considérations peu compréhensibles sur l'attribution du DS I.

14. Le Conseil d'Etat n'a pas exigé de la recourante qu'elle complète son acte d'opposition.

 

15. a. Le 23 juillet 2003, il a rejeté l'opposition et adopté, par 16 arrêtés distincts, les plans d'attribution des 16 communes en cause.

 

b. Du point de vue de la recevabilité de l'opposition, les conditions de la qualité pour agir ne semblaient pas remplies, la FAQH s'étant fait dénier cette qualité par le Tribunal administratif dans un arrêt de 2002, au motif que son organisation était des plus floues.

 

c. Il était douteux que l'acte d'opposition du 4 mars 2000, déposé par la recourante, ait conservé un objet au moment de son rejet, car les modifications intervenues entre cette date et la décision sur opposition avaient donné droit à ses revendications.

 

d. A supposer qu'un objet ait encore subsisté, l'opposition susmentionnée désignait la décision attaquée de manière insuffisamment claire pour satisfaire aux exigences de l'article 65 alinéa 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

 

e. Ces questions étaient néanmoins laissées ouvertes, compte tenu de la réponse apportée au fond.

 

f. Le projet de plan d'attribution avait pour seul but d'attribuer dans un délai raisonnable, bien que dépassé, les DS en fonction des zones existantes, qu'il n'était pas possible de "miter" en faisant une affectation bâtiment par bâtiment. Des plans localisés de quartier subséquents pouvaient modifier ultérieurement l'affectation, si besoin était, conformément à l'article 15 alinéa 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LALPE - K 1 70).

g. Ces plans étaient de surcroît conformes à la jurisprudence du TF rendue au sujet de l'article 43 OPB.

 

h. A la suite de l'arrêt du Tribunal administratif du 19 juin 2001 annulant la première série de plans, plusieurs discussions avaient eu lieu entre les autorités, les administrés et les milieux intéressés afin de donner à l'attribution des DS une plus grande publicité et en faciliter la compréhension par le public.

 

i. Ces discussions avaient débouché notamment sur la création d'une commission cantonale de protection contre le bruit composée des membres représentatifs des milieux concernés.

16. Les arrêtés d'approbation relatifs à ces plans ont été publiés dans la Feuille d'avis officielle (FAO) le 30 juillet 2003, à l'exception de l'arrêté relatif à la commune de Gy qui, suite à une inadvertance de la Chancellerie, a été publié séparément, le 5 septembre 2003.

 

17. Le 26 août 2003, la FAQH a recouru contre les arrêtés concernant les communes d'Aire-la-Ville, Avully, Bardonnex, Bernex, Cartigny, Chancy, Choulex, Dardagny, Jussy, Laconnex, Meinier, Perly-Certoux, Russin, Soral et Vandoeuvres.

 

18. En date du 2 octobre 2003, elle a recouru contre l'arrêté concernant la commune de Gy.

 

19. a. L'association recourante conclut à l'annulation des 16 plans concernés et à leur modification par le tribunal de céans.

 

b. Contrairement à ce que soutenait le Conseil d'Etat dans l'arrêt attaqué, la qualité pour agir devait lui être reconnue. Elle était active depuis 1980 et avait régularisé sa situation depuis l'arrêt du Tribunal administratif de 2002 en adoptant de nouveaux statuts.

 

c. Du point de vue procédural, les plans avaient subi des modifications importantes après l'enquête publique, qui justifiaient une nouvelle mise à l'enquête. De surcroît, ces modifications n'avaient pas été publiées dans la FAO au stade de la procédure d'opposition. Cette absence de publication avait trompé la population.

 

d. Sur le fond, tant l'opposition que le recours avaient conservé un objet, car hormis l'attribution du DS II aux bâtiments d'enseignement, il n'avait pas été fait droit à ses revendications.

 

e. En particulier, le Conseil d'Etat n'avait pas modifié sa position suite à l'arrêt du Tribunal administratif rendu lors de l'adoption des premiers plans. Il avait ainsi agi contrairement aux considérants de cet arrêt dans la nouvelle série des plans contestés.

 

f. Conformément aux recommandations de l'office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP), il fallait attribuer sans exception le DS II aux zones affectées essentiellement à l'habitation. Le DS III ne devait être attribué qu'aux territoires où l'affectation à l'habitation jouait un rôle secondaire. La méthode appliquée par le Conseil d'Etat s'écartait de cette solution et attribuait le DS III à ces zones de manière généralisée, au point que plusieurs des communes concernées ne comportaient plus aucune trace de DS II. Ce faisant, le Conseil d'Etat avait violé le principe de prévention contenu dans la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01).

 

20. a. Dans sa réponse, le Conseil d'Etat a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

b. Son argumentation sera reprise dans la mesure où elle complète le raisonnement développé dans l'arrêté querellé.

 

c. La méthode utilisée pour l'attribution des DS aux zones concernées avait nécessité un important travail et était particulièrement sophistiquée. Elle comportait six arbres de décisions pour chaque type de zone considérée. Elle avait été élaborée en collaboration avec le service spécialisé en matière de protection de l'environnement qui avait attesté de sa conformité aux objectifs de l'OPB. Un représentant de l'OFEFP avait également attesté de cette conformité.

 

d. Pour attribuer les DS, il fallait se baser sur le niveau de bruit compatible avec la zone concernée, qui était fonction des activités autorisables, et prendre en compte le fait que le classement prévu par l'article 43 alinéa 1 OPB était nécessairement schématique.

 

e. Parallèlement à ces attributions de DS, un plan de mesures d'assainissement du bruit routier avait été adopté, rendant public plusieurs mesures envisagées pour réduire les nuisance sonores à Genève.

 

f. Enfin, l'audition du service cantonal de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants était sollicitée, dans le cas où le recours était jugé recevable.

 

EN DROIT

 

 

1. Compte tenu qu'elles se rapportent à une situation presque identique, les deux procédures (n° A/1927/2003 et A/1607/2003) seront jointes, en application de l'article 70 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

 

2. Selon les articles 13 alinéa 1 lettre f et 35 alinéa 1 et 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LALAT - L 1 30), les décisions par lesquelles le Conseil d'Etat adopte les plans d'affectation spéciaux attribuant les degrés de sensibilité au bruit visés par la LALPE peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif dans les 30 jours, dès la publication de la décision dans la FAO (art. 35 al. 2 LALAT).

 

Les deux recours ayant été déposés devant l'autorité compétente dans le délai imparti, ils sont recevables à cet égard.

 

3. a. Selon l'autorité intimée, la FAQH ne dispose pas de la qualité pour agir dans la présente procédure.

 

b. Aux termes des articles 35 alinéa 3 LALAT (en relation avec 13 al. 1 let. f LALAT) et 17 LALPE (en relation avec 15 LALPE), conjointement applicables, les associations d'importance cantonale ou actives depuis plus de trois ans qui, aux termes de leurs statuts, se vouent par pur idéal à l'étude de questions relatives à l'aménagement du territoire, à la protection de l'environnement ou à la protection des monuments, de la nature et des sites ont qualité pour recourir. Cette disposition a la même teneur que l'article 145 alinéa 3 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

c. Le Tribunal administratif a déjà jugé que la qualité pour agir d'une association ne saurait être appréciée une fois pour toutes. Il convient notamment de vérifier, périodiquement au moins, si les conditions d'existence des associations sont réalisées, si les buts statutaires sont en rapport avec la cause litigieuse et si la décision d'ester en justice a bien été prise par l'organe compétent (ATA H. E. S.A. du 5 novembre 2002).

 

d. Dans l'arrêt précité, statuant sur la recevabilité d'un recours interjeté contre une autorisation de construire, le tribunal de céans a dénié à la FAQH la qualité pour recourir au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions de l'article 145 alinéa 3 LCI.

e. Il a été considéré à cette occasion que, bien qu'elle manifestait une certaine activité, l'organisation de la recourante, telle qu'elle ressortait de l'article 4 de ses statuts en vigueur au moment du dépôt du recours, manquait de clarté; il n'était fait nulle part mention d'une assemblée générale comme organe de l'association, celle-ci se confondant avec l'assemblée des délégués. La compétence des organes était floue, et la manière dont les assemblées étaient convoquées, ainsi que le rythme auquel elles se réunissaient n'apparaissait pas dans les statuts. De plus, ces assemblées, qui manquaient de tout formalisme, étaient fréquentées par un minimum de participants (4 ou 5 personnes). Ce peu de fréquentation tendait à démontrer un certain désintérêt de la part des membres pour l'activité de l'association, conforté par un paiement irrégulier des cotisations.

 

f. Il convient donc d'examiner si la situation de la recourante s'est améliorée depuis cette date, au point de lui conférer aujourd'hui la qualité pour recourir.

 

g. Il est constant, tout d'abord, que la recourante n'est pas d'importance cantonale, puisqu'elle est essentiellement composée d'associations d'habitants et de quartiers situés en ville de Genève, à l'exception des communes de Chêne-Bourg, Grand-Saconnex et Vernier (ATA FAQH du 8 mai 1991, confirmé par ATF du 27 juin 1991, 1P. 379/1991).

 

h. Le 1er octobre 2002, la FAQH a modifié ses statuts. Dans leur teneur actuelle, ceux-ci mentionnent expressément l'assemblée générale comme organe de l'association (art. 4 des statuts), son mode de convocation et le rythme auquel elle se réunit (art. 5 des statuts). La situation des compétences des différents organes de l'association a également été clarifiée, "l'assemblée des délégués" devenant "le comité", avec des tâches distinctes de celles de l'assemblée générale (art. 4, 6 et 8 des statuts). Parmi ses buts satutaires figurent ceux de participer "à l'amélioration de la qualité de vie dans les quartiers de l'ensemble des communes du canton de Genève" et de "s'opposer à des projets de loi contraires à ses buts" (art. 2 des statuts). La décision de recourir contre les plans querellés découle expressément d'une décision prise par l'assemblée générale le 1er octobre 2002. Lors de cette assemblée, parmi les 20 associations membres, huit ont été représentées, une a été excusée et une invitée. Quant au paiement des cotisations, il est demeuré irrégulier.

 

i. Dans ces circonstances, on peut admettre que la recourante, qui se voue, par pur idéal, à l'étude de questions relatives à l'aménagement du territoire et à la protection de l'environnement au sens des articles 35 alinéa 3 LALAT et 17 LALPE, remplit aujourd'hui les conditions structurelles et organisationnelles imposées par la loi. Le paiement irrégulier des cotisations n'est pas de nature, à lui seul, à remettre en cause ce constat. Quant à la fréquentation de l'assemblée générale (huit membres), elle est suffisante au regard du nombre de membres composant l'association (vingt membres).

 

j. Demeure la question litigieuse de savoir si la recourante "est active depuis plus de trois ans" au sens des dispositions précitées et peut se prévaloir de la date de sa constitution (1980).

 

k. Contrairement à d'autres lois cantonales - comme l'article 45 alinéa 6 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) -, la LALAT et la LALPE ne limitent pas la qualité pour recourir aux associations d'importance cantonale. Cette situation témoigne du rôle accru qui est donné aux associations dans la pesée des intérêts publics multipolaires qui caractérise les domaines de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement (cf. Pierre MOOR, Droit administratif, 2ème éd., Vol. 2, p. 654). La collaboration des associations dans le contrôle juridictionnel de l'activité étatique permet de mieux mesurer l'ensemble des enjeux pris en compte dans ces domaines. Elle est en synergie avec l'évolution des impératifs toujours plus pressants du droit de l'environnement et favorise par ailleurs les compromis au stade de la procédure non contentieuse. Il convient donc, dans ces domaines, de ne pas se montrer trop sévère dans l'examen de ces conditions.

 

l. Constituée en 1980, la recourante a plus de 20 ans d'existence et d'activité. Sa situation a beaucoup varié durant ces nombreuses années. En fonction des différentes actions qu'elle a menées, le type et le nombre d'adhérents, ainsi que sa structure et son organisation ont fluctué (cf. ATA FAQH du 8 mai 1991). On ne saurait cependant, au motif que la recourante a connu des périodes sans grande activité, ne pas lui reconnaître au moins trois ans d'activité et une certaine représentativité.

 

m. D'ailleurs, en adoptant le règlement instituant une commission cantonale de protection contre le bruit (K 1 70.11) le 20 août 2002, soit peu après qu'ait été rendu l'arrêt précité, l'autorité intimée a reconnu à la recourante une certaine activité et représentativité.

 

n. En effet, à teneur de l'article 3 de ce règlement, la commission instituée est composée de huit représentants de divers milieux, dont un représentant de la FAQH (art. 3 al. 1 let. c du règlement). Aux termes de son article 2, la commission précitée est chargée de formuler des propositions sur les questions importantes dans le domaine du bruit (art. 2 al. 1 let. a). Elle est consultée dans le cadre de l'élaboration des plans spéciaux d'attribution des DS (art. 2 al. 1 let b) et chargée de suivre et d'évaluer la mise en oeuvre des plans adoptés, de formuler des propositions quant à leur révision (art. 2 al. 1 let. c). Il est expressément prévu dans le règlement que ces propositions peuvent porter sur les critères d'attribution des DS (art. 2 al. 1 let. c). Enfin, cette commission est consultée sur les projets importants d'assainissement du bruit (art. 2 al. 1 let d), est chargée d'en suivre et d'en évaluer la mise en oeuvre et peut faire des propositions lors de leur révision (art. 2 al. 1 let e).

 

o. En adoptant ce règlement en 2002, le Conseil d'Etat a reconnu une importante représentativité à la recourante en matière de plans d'attribution des DS. Il a implicitement admis qu'elle était active dans ce domaine depuis plusieurs années. Certes, cette situation ne suffit pas à fonder la qualité pour agir de la recourante. En particulier, elle ne la dispense pas du devoir de respecter les exigences structurelles et organisationnelles visant à garantir le sérieux de ses activités. Toutefois, les efforts fournis à cet égard depuis 2002 par la recourante, les activités qu'elle mène depuis plus de vingt ans et les tâches qu'elle assume dans le cadre de la commission cantonale de protection contre le bruit conduisent le Tribunal administratif à admettre sa qualité pour agir dans la présente cause.

 

4. a. L'autorité intimée considère encore que l'opposition de la recourante du 4 mars 2002 contrevenait à l'article 65 alinéa 1 LPA parce qu'elle ne désignait pas de manière suffisamment précise la décision attaquée.

b. Selon l'article 5 alinéa 6 de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 (LEXT - L 1 40), applicable par renvoi de l'article 15 alinéa 3 deuxième phrase LALPE, toute personne, organisation ou autorité qui dispose de la qualité pour recourir contre le plan peut déclarer son opposition, par acte écrit et motivé, au Conseil d'Etat, dans les 30 jours à compter de la première publication du plan.

 

c. De son côté, l'article 65 alinéa 1 LPA indique que l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. Selon l'alinéa 2 de cette disposition, l'acte de recours contient notamment l'exposé des motifs; à défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d'irrecevabilité.

 

d. Les exigences formelles posées par le législateur n'ont d'autre but que de permettre à une juridiction administrative de déterminer l'objet du litige qui lui est soumis et de donner l'occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre (ATA F. du 8 septembre 1992).

 

e. L'article 65 LPA concerne les actes de recours, soit les procédures où une juridiction administrative est saisie. Cette disposition doit cependant s'appliquer par analogie aux procédures d'opposition, en gardant à l'esprit que dans ce dernier cas, l'autorité saisie est la même que celle qui a pris la décision et que les exigences de motivation peuvent être légèrement atténuées, en particulier lorsque la procédure a donné lieu à des échanges auxquels l'autorité saisie a elle-même participé.

 

f. En l'espèce, l'acte d'opposition était écrit et désignait l'ensemble des plans adoptés le 23 juillet 2003, dans une liste comportant les numéros d'attribution de chacun des plans concernés. L'autorité intimée ne pouvait pas ne pas comprendre quelles étaient les décisions attaquées. De ce point de vue, l'opposition respectait la première exigence posée par l'article 5 alinéa 6 LEXT et par l'article 65 alinéa 1 LPA.

 

g. S'agissant de la motivation, elle apparaît disséminée dans deux écritures, dont l'une concerne formellement une autre procédure. Vu la réponse apportée à l'opposition dans l'arrêt attaqué, on pourrait même se demander si, sur certains points, l'acte d'opposition ne se réfère pas aux échanges de correspondance ou aux échanges verbaux ayant eu lieu au cours des années d'élaboration des plans litigieux. De ce point de vue, l'acte d'opposition ne respectait pas les exigences de formes imposées par la loi. Cela étant, la recourante n'ayant pas été amenée par l'autorité intimée à compléter son opposition et le présent recours respectant pour sa part les exigences de formes imposées par l'article 65 LPA, le recours est considéré comme recevable de ce point de vue.

 

5. a. L'autorité intimée nourrit des doutes sur la question de savoir si l'opposition de la recourante conservait encore un objet au moment où l'arrêté a été rendu, les modifications intervenues postérieurement au dépôt de l'opposition ayant, selon elle, donné droit à l'entier des demandes de la recourante. Cette dernière conteste formellement cet allégué.

 

b. Cette situation tient à l'insuffisance de motivation contenue dans l'acte d'opposition de la recourante qui, si l'on ne tient pas compte du renvoi qu'il contient à sa précédente écriture, laisse penser que l'opposition se limite aux attributions de DS faites aux écoles, EMS et établissements hospitaliers. Or, ces établissements se sont vus attribuer le DS II suite au dépôt de l'opposition, comme l'avait demandé la recourante. Cela étant, ce n'est pas ainsi que l'autorité intimée a compris l'acte d'opposition, puisque dans la partie en droit de ses arrêtés, elle ne s'est pas limitée à l'examen de cette question. Au contraire, elle a intégré dans son analyse l'intégralité des griefs soulevés par la recourante tant dans l'acte d'opposition que dans la précédente écriture à laquelle celui-là renvoyait.

 

c. En conséquence, il doit être admis qu'au moment où l'autorité intimée a statué, l'opposition comportait encore un objet. Celui-ci demeure litigieux.

 

6. Partant, les recours sont considérés comme recevables à la forme.

 

7. a. La recourante met en doute la régularité de la procédure. Elle considère que le Conseil d'Etat aurait dû soumettre les projets de plans querellés à une nouvelle enquête publique du fait des modifications apportées consécutivement à celle-ci.

 

b. Selon les articles 15 alinéa 3 LALPE et 5 LEXT, le projet de plan est soumis à une enquête publique d'au moins 30 jours annoncée par voie de publication dans la FAO. Ces dispositions confèrent aux personnes indirectement touchées par la décision un droit spécial d'être entendu. Dans ce sens, elles vont plus loin que les garanties minimales accordées aux seules parties par l'article 29 alinéa 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. féd. - RS 101) (art. 4 aCst).

c. Selon la jurisprudence - appliquée au cas de propriétaires ayant la qualité de parties au sens de l'article 6 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021) - une modification essentielle du premier projet, qui peut être assimilée à un projet nouveau, doit être soumis aux mêmes conditions que le projet lui-même (ATF 98 Ia 475 consid. 2a p. 478, ATA B. du 30 mai 2000). Cette exigence s'applique au cas d'espèce et découle du fondement même de l'institution de l'enquête publique. En effet, la procédure de l'enquête publique institue un droit spécial d'être entendu qui remplit diverses fonctions dont, notamment, celle de garantir une utilisation judicieuse du sol à laquelle la collectivité est tenue de veiller (P. MOOR, Droit administratif, vol. 2, 2ème éd., Berne 2000, p. 439, n. 4.1.1.3). Elle permet également, dans le cas des plans d'affectation spéciaux, tels que ceux faisant l'objet de la procédure, de pallier le déficit démocratique lié à l'absence de compétence des organes parlementaires et de référendum communal ou cantonal.

 

d. Il serait erroné de penser que les droits découlant de l'enquête publique sont préservés par l'institution de la voie de l'opposition. En effet, cette dernière voie n'est ouverte qu'aux personnes directement touchées dans un intérêt digne de protection au sens de l'article 7 alinéa 2 LPA (art. 5 al. 6 LEXT). Cette voie n'est pas ouverte, comme l'enquête publique, à tout un chacun.

 

e. Il découle de ces considérations que seule l'ampleur des modifications que le projet a subies est déterminant; le moment (avant ou après l'opposition) est indifférent (ATA B. du 30 mai 2000).

 

f. En l'espèce, sur les 16 plans faisant l'objet du présent recours, 12 ont subi des modifications essentielles. Il s'agit des plans relatifs aux communes d'Aire-la-Ville, Bardonnex, Cartigny, Chancy, Dardagny, Gy, Jussy, Laconnex, Meinier, Perly-Certoux, Russin et Soral. Au stade de la procédure d'enquête publique, ces territoires se sont vus attribuer le DS II pour une très grande part. Suite à la modification intervenue, plus de la moitié des surfaces habitées ont été déclassées en DS III. Pour l'essentiel, les parcelles concernées sont des villages qui concentrent l'habitat de la commune. De ce fait, le nombre des personnes touchées par ces modifications est considérable et le Conseil d'Etat ne pouvait, sans vider de sa substance l'article 5 alinéa 6 LEXT, procéder à ces modifications sans soumettre le projet modifié à une nouvelle enquête publique.

 

g. En conséquence, les arrêtés du Conseil d'Etat relatifs à ces plans devront être annulés.

 

8. Demeurent les plans des communes d'Avully, Bernex, Choulex et Vandoeuvres, au sujet desquels les arguments au fond de la recourante doivent être examinés.

 

9. Il convient tout d'abord de souligner que les mesures de planification figurant dans la légende des plans concernés, relatives aux zones agricole, de bois et forêts, de verdure, de protection des rives du Rhône, ainsi que l'attribution du DS II aux bâtiments d'enseignement, aux hôpitaux et cliniques, ainsi qu'aux établissements médico-sociaux, ne sont pas litigieuses.

 

10. L'attribution du DS II en zone de construction 5 (villa) est requise par la recourante, mais dans les plans concernés qui demeurent litigieux, ce DS leur a été attribué.

 

11. Demeure la question de l'attribution du DS III à la zone de construction 4, essentiellement 4B protégée. Fondamentalement, la recourante conteste la méthodologie ayant conduit à attribuer massivement le DS III à ces zones. Pour elle, les villages et hameaux touchés par la série de plans faisant l'objet de son recours comportent des bâtiments à usage sensible au bruit et devraient se voir attribuer par principe le DS II. En particulier, elle considère que le trafic routier, qui peut être assaini, ne devrait pas entrer en ligne de compte dans l'attribution des DS. Cela étant, cette argumentation concerne "en bloc" les 16 plans attaqués. Or, les quatre plans dont la validité au fond est examinée sont précisément ceux dont les zones ne se sont pas vues massivement attribuer le DS III par la modification intervenue après l'enquête publique. Ne reste donc de litigieuse que l'attribution du DS III au centre de ces quatre villages, situés en zone 4B protégée, ainsi qu'aux quelques zone 4A, B ou B protégées situées en périphérie.

 

12. En matière d'attribution par l'autorité cantonale des DS au bruit, le TF, statuant sur recours de droit administratif, a limité son pouvoir d'examen à l'excès ou l'abus, par l'autorité cantonale, de son pouvoir d'appréciation (ATF 115 Ib 347 JdT 1991 I 470 c. 2e; ATF non publié du 25 mai 1994 dans la cause 1A.249/1992 Société coopérative de constructions urbaines contre Conseil d'Etat de Genève, consid. 3c/bb).

 

C'est également sous cet angle que le tribunal de céans examinera les plans contestés.

 

13. La LPE compte parmi ses buts la protection des hommes contre les atteintes nuisibles ou incommodantes (art. 1). Au nombre de ces atteintes figure notamment le bruit (art. 7 al. 1), qui est mesuré au sortir des installations (émissions) et au lieu de ses effets (immissions; art. 7 al. 2). La loi impose la limitation des émissions (art. 11-12) et des immissions (art. 13-15), et prévoit à cet effet l'obligation de procéder à des assainissements (art. 16 et 18), laquelle peut cependant connaître des allégements dans certains cas particuliers (art. 17).

 

La loi édicte encore en matière de bruit des règles complémentaires concernant la fixation de valeurs d'alarme et de planification, l'isolation acoustique des immeubles et les conditions posées à la délivrance d'autorisations de construire et au zonage, ainsi qu'à la construction de nouvelles sources fixes de bruit. Elle dispose que de nouvelles constructions affectées au séjour ne peuvent être édifiées que si les valeurs limite d'émission ne sont pas dépassées (art. 22 al. 1). Symétriquement, elle dispose que de nouvelles zones à bâtir destinées à la construction de logements ne peuvent être prévues qu'en des endroits où les immissions causées par le bruit ne dépassent pas les valeurs de planification (art. 24 al. 1). Elle permet malgré tout la construction lorsque des mesures complémentaires de lutte contre le bruit ont été prises (art. 22 al. 2), et le zonage lorsque des mesures de planification, d'aménagement ou de construction permettent de respecter les valeurs de planification dans la plus grande partie de ces zones (art. 24 al. 2). Enfin, les nouvelles installations fixes ne peuvent être construites que si le bruit qu'elles émettent ne dépasse pas les valeurs de planification dans le voisinage, une exception étant prévue pour les voies de communication, les installations publiques et les installations présentant un intérêt public prépondérant (art. 25).

 

14. a. L'ordonnance sur la protection contre le bruit et ses annexes déterminent notamment les divers degrés de sensibilité.

 

b. L'article 43 alinéa 1 OPB fixe quatre degrés de sensibilité (DS) aux différentes zones d'affectation au sens de l'article 14 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700) :

 

- DS I dans les zones qui requièrent une protection accrue contre le bruit, notamment les zones de détente;

 

- DS II dans les zones où aucune entreprise gênante n'est autorisée, notamment dans les zones d'habitation ainsi que dans celles réservées à des constructions et installations publiques;

 

- DS III dans les zones où sont admises des entreprises moyennement gênantes, notamment dans les zones d'habitations et artisanales (zones mixtes) ainsi que dans les zones agricoles;

 

- DS IV dans les zones où sont admises des entreprises fortement gênantes, notamment dans les zones industrielles.

c. La même disposition prévoit la possibilité de déclasser d'un degré les parties de zones d'affectation du DS I ou II lorsqu'elles sont déjà exposées au bruit (art. 43 al. 2).

 

15. Les annexes à l'OPB règlent les méthodes de mesure et fixent les valeurs limites d'exposition au bruit du trafic routier (annexe 3), des chemins de fer (annexe 4), des aéroports (annexe 5), de l'industrie, des arts et métiers (annexe 6), des stands de tir (annexe 7) et des aérodromes.

 

16. Les quatre zones auxquelles se réfère l'article 43 OPB ne coïncident pas avec les zones du droit fédéral, et encore moins avec celles du droit genevois. Cela résulte du caractère nécessairement schématique de la réglementation en matière de protection contre le bruit (ATF 120 Ib 456 JdT 1996 I 478 c. 4c).

 

L'article 14 LAT définit en effet les plans d'affectation et prévoit la distinction des zones à bâtir, des zones agricoles et des zones à protéger.

 

17. Les zones du droit genevois se subdivisent quant à elles en zones ordinaires, de développement et protégées (art. 12 LALAT).

 

L'article 19 alinéa 2 LALAT dispose que la 4ème zone est destinée principalement aux maisons d'habitation, comportant en principe plusieurs logements. Lorsqu'elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage et le public, des activités peuvent également y être autorisées (art. 19 al. 2, 2ème phrase LALAT). Les zones protégées constituent quant à elles des périmètres délimités à l'intérieur d'une zone à bâtir ordinaire ou de développement qui ont pour but la protection de l'aménagement et du caractère architectural des quartiers et localités considérés (art. 12 al. 5 LALAT). Les villages protégés sont soumis à des règles particulières, essentiellement du point de vue du droit de la construction (art. 106 LCI).

 

18. a. Selon le TF, il convient dans un premier temps, pour déterminer le DS applicable à la zone, d'examiner le type d'activités qui peut y prendre place. Dans un deuxième temps, on peut examiner l'éventualité d'un déclassement lorsque ladite zone est déjà exposée au bruit (ATF CFF c/ Conseil d'Etat du 25 mai 1994). Contrairement à ce que pense l'autorité intimée, cette jurisprudence n'implique pas qu'il faille confondre les notions figurant dans les articles 43 alinéa 1 lettre c OPB et 19 alinéa 2 LALAT.

 

b. A teneur de l'article 19 alinéa 2 LALAT, 2ème phrase, des activités peuvent être autorisées dans la 4ème zone "lorsqu'elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage et le public". Cette disposition vient renforcer le principe de planification énoncé dans la première phrase, selon lequel "la 4ème zone est destinée principalement aux maisons d'habitation". Il en découle que les activités autorisées doivent, du point de vue du bruit qu'elles produisent, s'adapter aux exigences de ces zones d'habitation et - si nécessaire - assainir leurs installations. Un raisonnement inverse irait à l'encontre des buts d'intérêt public énoncés par la LPE.

 

c. Ainsi, en principe, il doit être considéré que la 4ème zone répond aux critères de l'article 41 alinéa 1 lettre b selon lequel le DS II est à appliquer "dans les zones où aucune entreprise gênante n'est autorisée, notamment dans les zones d'habitation" et non à ceux de la lettre c de cette disposition. Celle-ci doit être réservée aux zones qui poursuivent un objectif de mixité où l'habitat n'est pas considéré comme prépondérant (zones mixtes "d'habitation et artisanales").

 

d. Cette interprétation est conforme à l'article 11 LPE qui prescrit qu'il importe, à titre préventif, de limiter les émissions dans la mesure que permettent l'état de la technique et les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit économiquement supportable et que les émissions doivent être limitées plus sévèrement s'il appert ou s'il y a lieu de présumer que les atteintes, eu égard à la charge actuelle de l'environnement, seront nuisibles ou incommodantes.

 

19. Selon le plan de mesures d'assainissement du bruit routier d'août 1998 versé à la procédure, le canton de Genève est l'un des endroits le plus motorisé au monde. Un quart environ de la population genevoise est exposée au bruit du trafic routier au-delà des limites acceptables, et les doléances au sujet du bruit, qui représentent 25 % des plaintes en matière d'environnement, sont en constante augmentation (ibid. pp. 8 ss.). Les effets du bruit sur la santé sont délétères (ibid., pp. 56 ss.). Le coût social des nuisances sonores dépasserait les 2,5 milliards de francs par an à l'échelle de la Suisse (ibid., pp. 8 et 89 ss.).

La source la plus importante des nuisances subies par les habitants dans les villages en cause ne relève pas tant des activités qui y sont exercées que du trafic routier, ainsi qu'il ressort manifestement de ce document. Or, dans son arrêt du 19 juin 2001, le tribunal de céans a déjà eu l'occasion de dire que les nuisances dues au trafic routier ne constituent pas un critère admissible pour fonder une attribution de principe d'une zone concentrant l'habitat en DS III.

 

20. Certes, la possibilité de déclassement d'un DS prévue par l'article 43 alinéa 2 OPB demeure, mais ainsi que l'a rappelé le tribunal de céans dans l'arrêt précité, cette faculté doit être utilisée avec la plus extrême retenue, sous peine de capituler face au bruit (ATA FAQH du 19 juin 2001; OFEFP, Commentaire relatif à l'ordonnance sur la protection contre le bruit, Berne, 1992, p. 15).

 

Ainsi, l'autorité abuse de son pouvoir d'appréciation si elle use massivement de ce moyen. Dans sa pesée des intérêts, elle ne doit pas vider de leur substance les garanties accordées par la LPE. Quant au souhait des communes de conserver ou de développer la mixité dans les villages concernés, il doit s'envisager, autant que possible, en relation avec les possibilités d'assainissement des installations existantes ou à venir.

 

21. En l'espèce, la méthode élaborée n'est pas en elle-même contraire à la LPE ou à l'OPB, s'agissant de la 4ème zone. Cependant, du fait des notions indéterminées qu'elle contient, son application peut conduire à des résultats extrêmement différenciés. Ainsi en va-t-il, tout particulièrement, des notions de mixité ("affectation réelle") ou d'exposition au bruit. Les faits eux-mêmes attestent du caractère flou de ces critères : dans leur première version, comme dans leur deuxième, les plans étaient conformes à ladite méthode. Or, les modifications apportées en ont changé radicalement la portée. La manière dont la méthode est appliquée aux territoires concernés est déterminante. L'examen de la méthode elle-même ne suffit pas pour garantir la conformité des plans à la loi.

22. C'est ce qu'a méconnu le service cantonal du service de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants. Le préavis émis par cette autorité n'est pas utilisable pour cette raison. En effet, ce service se fonde sur l'étude de la méthode utilisée, telle qu'elle découle des documents fournis à la juridiction de céans. Or, en affirmant que l'attribution des DS va renforcer et accélérer la protection du bruit dans les 16 zones concernées, ce dernier démontre qu'il n'a pas porté attention à cette application. En effet, on voit mal, avec l'attribution généralisée du DS III, d'où découlerait cette protection alors qu'on se trouve en zone rurale. L'audition sollicitée par l'autorité intimée n'est pas à même de réparer cette absence d'examen approfondi. Il ne lui sera donc pas donné suite.

 

La même remarque s'impose s'agissant du satisfecit décerné par le service spécialisé en matière de protection de l'environnement et par le représentant de l'OFEFP lors de l'élaboration de la méthode utilisée.

23. Il résulte de l'examen des dossiers relatifs aux communes de Bernex, Choulex et Vandoeuvres, que l'autorité intimée a en principe attribué le DS II aux zones de construction 4 et a usé avec retenue de la possibilité de déclassement offerte par l'article 43 alinéa 2 OPB. Les arrêtés relatifs à ces trois communes seront donc confirmés.

 

24. Dans le cas de la commune d'Avully, l'extension du DS III opérée sur la partie est de la zone 4 B protégée, suite au préavis communal, touche une zone encore non construite. Un tel déclassement doit être justifié. En l'espèce, aucun motif précis n'est avancé pour justifier cette mesure dérogatoire. Le plan fourni ne comporte pas d'indications sur la présence d'entreprises existantes gênantes ou d'immissions que des mesures raisonnables d'assainissement ne permettraient pas de réduire suffisamment pour atteindre les niveaux de bruit prescrits par le DS II. Ce plan sera donc annulé.

 

25. Enfin, s'agissant du délai de 10 ans imparti par l'article 44 OPB aux cantons pour veiller à ce que les degrés de sensibilité soient attribués aux zones d'affectation, ce dernier est échu le 1er avril 1997. Selon la doctrine, ce délai est un pur délai d'ordre (A.-C. FAVRE, La protection contre le bruit dans la loi sur la protection de l'environnement, Zurich, Bâle, Genève, 2002, p. 222).

 

Bien que ce retard soit insatisfaisant, il ne saurait mettre en danger la recherche d'une solution conforme au droit dans un domaine où sont en cause la santé, l'environnement et la qualité de vie de la population de tout un canton. Il faut noter encore que la première enquête publique relative à ces plans n'a commencé qu'en août 1998, alors que le délai était déjà dépassé et que, dans ces circonstances, il est malvenu au Conseil d'Etat d'invoquer l'échéance de ce délai pour hâter l'approbation de ces plans.

 

26. La recourante, qui plaide en personne, n'a pas droit à une indemnité (art. 87 al. 2 LPA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - E 5 10.03).

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevables les recours interjetés les 26 août et 2 octobre 2003 par la FAQH contre les arrêtés du Conseil d'Etat du 23 juillet 2003 rejetant son opposition et adoptant les plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 

- Aire-la-Ville (plan n° 29010/01-501)

- Avully (plan n° 29010/03-503)

- Bardonnex (plan n° 29010/05-505)

- Bernex (plan n° 29010/07-507)

- Cartigny (plan n° 29010/09-508)

- Chancy (plan n° 29010/11-510)

- Choulex (plan n° 29010/14-513)

- Dardagny (plan n° 29010/20-519)

- Gy (plan 29010/24-521)

- Jussy (plan n° 29010/26-523)

- Laconnex (plan n° 29010/27-524)

- Meinier (plan n° 29010/29-525)

- Perly-Certoux (plan n° 29010/32-528)

- Russin (plan n° 29010/37-533)

- Soral (plan n°29010/39-536)

- Vandoeuvres (plan n° 29010/42-539)

 

préalablement :

 

ordonne la jonction des procédures A/1927/2003 et A/1607/2003;

 

au fond :

 

admet partiellement les recours;

 

confirme les arrêtés du Conseil d'Etat du 23 juillet 2003 rejetant les oppositions et adoptant le plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 

- Bernex (plan n° 29010/07-507)

- Choulex (plan n° 29010/14-513)

- Vandoeuvres (plan n° 29010/42-539)

 

annule les arrêtés du Conseil d'Etat du 23 juillet 2003 rejetant les oppositions et adoptant les plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 

- Aire-la-Ville (plan n° 29010/01-501)

- Avully (plan n° 29010/03-503)

- Bardonnex (plan n° 29010/05-505)

- Cartigny (plan n° 29010/09-508)

- Chancy (plan n° 29010/11-510)

- Dardagny (plan n° 29010/20-519)

- Gy (plan 29010/24-521)

- Jussy (plan n° 29010/26-523)

- Laconnex (plan n° 29010/27-524)

- Meinier (plan n° 29010/29-525)

- Perly-Certoux (plan n° 29010/32-528)

- Russin (plan n° 29010/37-533)

- Soral (plan n°29010/39-536)

renvoie la cause au Conseil d'Etat pour qu'il soumette à une nouvelle enquête publique les plans des communes de

 

- Aire-la-Ville (plan n° 29010/01-501)

- Bardonnex (plan n° 29010/05-505)

- Cartigny (plan n° 29010/09-508)

- Chancy (plan n° 29010/11-510)

- Dardagny (plan n° 29010/20-519)

- Gy (plan 29010/24-521)

- Jussy (plan n° 29010/26-523)

- Laconnex (plan n° 29010/27-524)

- Meinier (plan n° 29010/29-525)

- Perly-Certoux (plan n° 29010/32-528)

- Russin (plan n° 29010/37-533)

- Soral (plan n°29010/39-536)

renvoie la cause au Conseil d'Etat pour qu'il établisse un nouveau plan de la commune d'Avully;

 

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité;

dit que, conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par la voie du recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, auprès du Tribunal fédéral. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire de recours sera adressé, en trois exemplaires, au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14;

communique le présent arrêt à la FAQH ainsi qu'au Conseil d'Etat.

 


Siégeants : M. Thélin, président, MM. Paychère, Schucani, Mmes Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président :

 

C. Del Gaudio-Siegrist Ph. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci