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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4197/2013

ATA/200/2014 du 01.04.2014 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : ; DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE ; ÉTABLISSEMENT DE DROIT PUBLIC ; CONTRAT DE TRAVAIL ; CONTESTATION CIVILE ; COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE
Normes : LOJ.132; LPA.4; LEPM.1; LEPM.5; LPAC.1.al2.lete; LPAC.4.al1; LPAC.33; RSM.74.al1; RSM.75; RSM.77; RSM.92; RSM.94
Résumé : La soumission au droit privé des rapports de travail entre les HUG, établissement de droit public, et les médecins chefs de clinique, telle que découlant du règlement des services médicaux adopté par le conseil d'administration des HUG et approuvé par le Conseil d'Etat, est conforme aux exigences posées par la jurisprudence et la doctrine, de sorte que la chambre administrative n'est pas compétente pour connaître du présent litige.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4197/2013-FPUBL ATA/200/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er avril 2014

 

dans la cause

 

Madame X______
représentée par Me Joanna Burgisser-Bueche, avocate

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Pierre Martin-Achard, avocat



EN FAIT

1) a. Le 29 juin 2012, Madame X______, au bénéfice d’un titre post-grade fédéral de spécialiste en ophtalmologie délivré en 2004 par la Fédération des médecins suisses (ci-après : FMH), a été engagée, par contrat de droit privé de durée indéterminée prenant effet le 1er juillet 2012, par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) en qualité de « cheffe de clinique avec FMH » au département des E______, service d’A______, pour un taux d’activité de 60 %, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 7'300,40 correspondant à la classe 24 de l’échelle des traitements du personnel de l’Etat de Genève et des établissements hospitaliers. Ce contrat prévoyait l’affiliation de l’intéressée à la caisse de prévoyance des établissements publics médicaux et renvoyait à l’application des textes suivants, consultables sur le site Internet des HUG : « le règlement des services médicaux des HUG (en particulier le titre IV, chapitre IX, et le titre V), le statut du personnel des HUG (en particulier les titres I à V, à l’exception des art. 7, 8 et 12) et les directives d’application du règlement des services médicaux ». Il portait la signature, pour les HUG, de Messieurs S______, chef du département des E______, et B______, responsable des ressources humaines.

Un cahier des charges y était annexé, aux termes duquel la fonction de chef de clinique avec FMH consistait en substance à assurer, en étroite collaboration avec le supérieur hiérarchique, la direction d’une unité de soins, la coordination des activités pratiques, les interventions cliniques, thérapeutiques ou chirurgicales des patients confiés, à contribuer à la formation des médecins internes et candidats médecins ainsi qu’à se former pour le titre de spécialisation envisagé ou la conservation de celui-ci.

b. Mme X______ avait précédemment été engagée dans la même fonction par deux contrats de durée déterminée ayant respectivement pris effet le 1er janvier 2011 et le 1er décembre 2011, suite à des pourparlers avec Monsieur H______, médecin chef du service d’A______ aux HUG, qui l’avait approchée en 2010 pour lui confier le poste de médecin adjoint, ce qui n’a pu se faire pour des raisons d’organisation interne.

Durant ses études, elle avait déjà été employée par les HUG en qualité de médecin assistant de 1998 à 2001, de médecin interne de 2001 à 2002, puis de cheffe de clinique adjointe de 2002 à 2003.

2) En septembre 2012, Madame T______ a été engagée en qualité de médecin adjoint et nommée responsable de l’unité du « segment postérieur » du service d’A______, devenant la supérieure hiérarchique de Mme X______.

3) Mme X______ a fait l’objet d’une évaluation de ses activités, jugées globalement comme bonnes, voire excellentes sur certains points, en date du 22 avril 2013, dont le contenu est retranscrit dans le document « Evaluation préliminaire des médecins internes, des chefs de clinique et de leurs remplaçants » établi le même jour. Outre ces éléments, il y est fait mention d’une divergence de vue avec Mme T______ s’agissant des « capacités de synthèse et de vision globale ». Des objectifs à moyen terme étaient fixés à Mme X______ en vue de l’obtention d’un poste de médecin adjoint. La rubrique consacrée aux commentaires du médecin évalué comporte la mention « conditions de travail difficiles, je me sens en régression. D’autres discussions sont prévues ».

4) A partir du mois de mai 2013, suite à une réorganisation du service par sa supérieure hiérarchique d’une manière ne convenant pas à Mme X______, ce dont elle a fait part à M. H______ lors d’une réunion au mois de juin 2013, les relations de l’intéressée avec Mme T______ se sont dégradées.

5) Le 24 octobre 2013, Mme X______ a communiqué ses inquiétudes à Monsieur R______, directeur des ressources humaines, en raison de la situation conflictuelle qu’elle vivait avec Mme T______, qu’elle qualifiait de « mobbing ». Elle avait entendu des rumeurs à son propos, selon lesquels elle envisageait de quitter son poste, alors même qu’elle n’avait jamais manifesté une telle intention.

6) Une réunion s’est tenue le 4 novembre 2013 entre MM. S______ et H______ d’une part et Mme X______ d’autre part, au cours de laquelle les premiers nommés ont fait savoir à Mme X______ qu’elle n’avait aucun avenir au sein du service, suite aux divergences intervenues avec sa supérieure hiérarchique, de sorte que la résiliation de son contrat de travail était envisagée.

7) Le 11 novembre 2013, Mme X______ a écrit à M. H______ pour lui faire part de son refus de démissionner pour la fin du mois de février 2014, comme il le lui avait suggéré lors de la séance précitée, dès lors qu’elle souhaitait continuer l’exercice de son activité au sein du service.

8) Le lendemain, M. B______ a demandé à rencontrer Mme X______ dans les meilleurs délais, faute de quoi il irait « de l’avant ». Il n’était pas en mesure d’accepter un rendez-vous au mois de décembre seulement, comme le proposait l’intéressée.

9) Par courrier recommandé du 21 novembre 2013, les HUG ont informé Mme X______ que son contrat de travail prendrait fin le 28 février 2014 pour les motifs évoqués lors de l’entretien du 4 novembre 2013 en présence de MM. S______ et H______, la dispensant de son obligation de travailler dès le 1er décembre 2013. La résiliation des rapports de service se basait sur l’art. 92 du règlement des services médicaux, le courrier ne comportant aucune indication des voies et délais de recours.

10) Par courrier du 26 novembre 2013, Mme X______ s’est formellement opposée à son licenciement, qu’elle qualifiait d’abusif, et en demandait l’annulation. Subsidiairement, elle sollicitait sa réintégration à son poste durant le délai de congé.

11) Le 6 décembre 2013, M. R______ a informé Mme X______ que suite à leur entretien de la veille, elle était autorisée à poursuivre son activité durant le délai de congé, soit jusqu’au 28 février 2014, le licenciement étant maintenu pour le surplus.

12) a. Par acte recommandé du 18 décembre 2013, expédié le 20 décembre 2013, Mme X______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la résiliation de ses rapports de travail du 21 novembre 2013, reçue le 23 novembre 2013, concluant préalablement à ce qu’une comparution personnelle des parties soit ordonnée. Sur le fond, elle a sollicité la réintégration à son poste et la condamnation des HUG au paiement de CHF 15'000.- à titre de « dépens ». Subsidiairement, elle a conclu à la condamnation des HUG au paiement d’une indemnité de CHF 110'043.- avec intérêts à 5 % dès le 1er mars 2014 et de « dépens » par CHF 15'000.-.

b. C’était à tort que les HUG considéraient que son contrat ressortissait au droit privé. Même s’il comportait cette référence, son contenu n’en relevait pas moins du droit public, ce qui était décisif pour juger du droit applicable à la relation juridique. Elle avait ainsi été engagée pour une durée indéterminée dans le but d’exercer un service public au sein d’un établissement public, de sorte qu’il y avait lieu d’appliquer le droit public, ce d’autant en l’absence de base légale formelle autorisant un renvoi au code des obligations du 30 mars 1911 (CO - RS 220). Seul le règlement des services médicaux, adopté par le conseil d’administration des HUG, opérait un tel renvoi s’agissant de l’engagement des chefs de clinique. A l’exception des dispositions concernant le licenciement qui reprenaient les termes du CO, tous les autres éléments du contrat étaient régis par le droit public, de sorte que ce droit devait s’appliquer à l’entier de la relation juridique. N’ayant bénéficié d’aucun entretien de service ni n’ayant pu faire valoir son droit d’être entendu, son licenciement était nul de plein droit. Il était au demeurant abusif du fait du harcèlement psychologique qu’elle avait subi.

13) a. Dans leurs observations du 20 février 2014, les HUG ont conclu, avec « suite de frais et dépens », à l’irrecevabilité du recours de Mme X______ pour défaut de compétence de la chambre administrative et, sur le fond, à l’octroi d’un délai pour répondre et au rejet du recours.

b. En dérogation à l’application de la législation réglementant le statut du personnel de l’administration, le conseil d’administration avait adopté un règlement, approuvé par le Conseil d’Etat, soumettant l’engagement des chefs de clinique et des médecins assistants au droit privé. Le contrat de Mme X______ s’inscrivait dans ce cadre et se référait expressément au droit privé, qui était applicable à sa relation avec les HUG. La jurisprudence admettait d’ailleurs que les cantons puissent soumettre les rapports juridiques entre les hôpitaux et leurs médecins au droit privé, à condition d’y être autorisés par une norme cantonale claire, ce qui était le cas en l’espèce. Ainsi, les relations de travail entre Mme X______ et les HUG étaient déterminées par le droit privé et la juridiction des prud’hommes était compétente pour juger du litige, le recours de l’intéressée à la chambre administrative étant irrecevable.

14) Le 24 février 2014, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger sur compétence.

EN DROIT

1) a. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Elle examine d’office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Sauf exceptions prévues par la loi ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. d et 57 LPA (art. 132 al. 2 LOJ).

b. Selon l’art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l’art. 1 LPA les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans le cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b) et de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). Sont notamment réputées autorités administratives au sens de l’art. 1 LPA les corporations et établissements de droit public (art. 5 let. e LPA).

Aux termes de la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (LEPM - K 2 05), les HUG sont des établissements publics médicaux (art. 1 let. a LEPM), soit des établissements de droit public dotés de la personnalité juridique (art. 5 al. 1 LEPM).

c. Le délai de recours est de 30 jours s’il s’agit d’une décision finale ou d’une décision en matière de compétence (art. 62 al. 1 let. a LPA).

d. En l’espèce, Mme X______ a recouru en temps utile contre le courrier des HUG du 21 novembre 2013, qui est un établissement de droit public. L’examen de la recevabilité du recours implique toutefois de déterminer si ce courrier, en tant qu’il prononce son licenciement, constitue une décision fondée sur du doit public ou si, comme l’allègue l’intimé, il relève d’un contrat de droit privé, de la compétence de la juridiction des prud’hommes.

2) a. Pour déterminer si un rapport juridique relève du droit privé ou du droit public, l’on ne peut se fonder sur la qualification juridique utilisée par les parties, le contenu réel du rapport de travail étant décisif (Arrêts du Tribunal fédéral 2P.151/2005 du 9 février 2006 consid. 5 et 2P.136/2005 du 14 décembre 2005 consid. 3.1.1 ; ATA/823/2013 du 17 décembre 2013). Si une autorité est partie audit rapport de droit, le droit public est présumé applicable. En outre, les conditions d’engagement dans le secteur public sont en principe fixées par des décisions soumises à acceptation (Arrêts du Tribunal fédéral 2P.151/2005 du 9 février 2006 consid. 5 et 2P.136/2005 du 14 décembre 2005 consid. 3.1.1).

b. Les fonctionnaires et les autres agents soumis au droit public sont nommés par décision. La nomination est un acte unilatéral soumis à l’accord de l’intéressé. L’acte d’engagement ne contient pas les clauses qui fixeraient un régime individuel, mais soumet le fonctionnaire nommé aux normes générales régissant la fonction publique. Il ne renferme de spécifique que ce qui est nécessaire à l’individualisation de la charge à remplir ou de certaines prestations particulières (ATA/582/2011 du 13 septembre 2011 consid. 4b ; Pierre MOOR, Droit administratif, Vol. 3, 2e édition, 1992, ch. 5.1.2.1 et 5.1.3.1).

La loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), qui définit les droits et devoirs des membres du personnel de la fonction publique qui lui sont assujettis (art. 2 al. 1 LPAC), dresse le catalogue du personnel de la fonction publique, pour les entités entrant dans son champ d’application (art. 1 LPAC), qui se compose de fonctionnaires, d’employés, d’auxiliaires, d’agents spécialisés et du personnel en formation (art. 4 al. 1 LPAC), lesquels sont soumis à un rapport de droit public. Le législateur a ainsi soumis à dessein tous les agents de l’Etat, auxquels la LPAC est applicable, au droit public, renonçant par la même occasion à les assujettir au droit privé (MGC 1996 43/VI 6330, p. 6350ss).

c. Le Tribunal fédéral et la doctrine n’excluent pas l’application du droit privé dans la relation de travail entre un agent public et une collectivité publique (ATF 118 II 213 consid. 3 p. 217ss ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C_467/2012 du 14 février 2013 consid. 5.4.1, 2P.18/2006 du 19 mars 2006 consid. 2.3 et 2P.136/2005 du 14 décembre 2005 consid. 3.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 87ss, n. 269 et 270 ; Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 1991, p. 628, n. 3070). Bien qu’ayant considéré qu’il pouvait se révéler douteux que les cantons soumettent de manière générale les rapports entre des entités publiques – en l’espèce les hôpitaux – et leurs employés – les médecins – au droit privé, la Haute Cour n’a toutefois pas écarté d’emblée l’application de celui-ci s’agissant du personnel médical hospitalier (ATF 118 II 213 consid. 3 p. 217ss ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_93/2012 du 12 mai 2012 consid. 4.1 concernant les médecins chefs de clinique), pour autant qu’une base légale expresse le prévoie. Cette base légale peut être fédérale, cantonale, voire communale dans la mesure où le droit cantonal le permet. Elle peut aussi consister en une prescription autonome d’une entité décentralisée, mais, dans ce cas, le droit de la collectivité dont dépend cette entité doit expressément autoriser celle-ci à prévoir le recours au droit privé dans ses prescriptions autonomes. La base légale doit être formelle, par respect du parallélisme des formes, lorsqu’elle permet de déroger à un principe d’engagement de droit public lui-même prévu dans une loi formelle, ce qui est en pratique presque toujours le cas. Plus généralement, le principe même du recours au droit privé devrait figurer dans une loi formelle, les modalités pouvant faire l’objet d’une délégation (Thierry TANQUEREL, Droit public et droit privé : unité et diversité du statut de la fonction publique, in Les réformes de la fonction publique, 2012, p. 71 à 73).

d. Dans la gestion de son personnel comme ailleurs, l’Etat doit respecter les principes et droits constitutionnels qui encadrent l’ensemble de son activité. Cette obligation concerne aussi bien les libertés que les principes de la légalité, de l’égalité de traitement, de l’interdiction de l’arbitraire, de l’intérêt public, de la proportionnalité ou de la bonne foi. Il en va de même du droit d’être entendu (Thierry TANQUEREL, Droit public et droit privé op. cit., n. 58 ss). L’Etat doit respecter ces exigences constitutionnelles y compris lorsqu’il soumet son personnel à un régime de droit privé (Arrêts du Tribunal fédéral 2P.137/2005 du 17 octobre 2005 consid. 3.2 et 2P.63/2003 du 29 juillet 2003 consid. 2.3). Il en résulte que le pouvoir du législateur de prévoir la soumission du personnel de l’Etat au droit privé trouve sa limite dans le principe de l’égalité de traitement. Ainsi, l’existence de statuts différents doit reposer sur des motifs objectifs suffisants. Tel est notamment le cas lorsque le recours au droit privé concerne des emplois de brève durée ou des tâches spéciales (ATA/822/2013 et ATA/823/2013 du 17 décembre 2013 ; ATA/582/2011 du 13 septembre 2011 ; ATA/362/2010 du 1er juin 2010 ; Thierry TANQUEREL, Droit public et droit privé op. cit., p. 74).

e. Aux termes de son art. 1 al. 2 let. e, la LPAC s’applique au personnel des établissements publics médicaux, sous réserve des dispositions particulières applicables au personnel médical énoncées dans les règlements des services médicaux adoptés par les établissements publics médicaux.

f. La LEPM définit notamment l’organisation des HUG, qui sont placés sous la surveillance et le contrôle du Conseil d’Etat (art. 5 al. 3 LEPM), lequel approuve les budgets, les comptes rendus, les tarifs d’hospitalisation et ceux des soins et des prestations ambulatoires, la nomination et la révocation des employés principaux, les règlements internes et le statut du personnel (art. 5 al. 4 LEPM). Les HUG sont gérés par un conseil d’administration (art. 6 al. 1 LEPM), qui est le pouvoir supérieur de l’établissement (art. 7 al. 1 LEPM), dont les membres sont désignés par le Conseil d’Etat et le Grand Conseil (art. 20 LEPM), et sont dirigés par un comité de direction (art. 20A LEPM). Les attributions du conseil d’administration des HUG sont mentionnées à l’art. 7 al. 2 LEPM, dont font partie l’établissement du statut du personnel (let. k) ainsi que la nomination et la révocation des fonctionnaires de l’établissement (let. l).

Sur cette base, et en se fondant également sur l’art. 33 LPAC, le conseil d’administration des HUG a adopté, le 16 décembre 1999, le statut du personnel des HUG, approuvé par le Conseil d’Etat le 12 janvier 2000 (ci-après : SPHUG), lequel s’applique aux catégories de personnel énoncé par la LPAC, les dispositions particulièrement prévues par le règlement des services médicaux demeurant réservées, et détermine les devoirs et les droits ainsi que les caractéristiques de chaque catégorie des membres du personnel (art. 1 SPHUG). Son titre II règle les conditions générales de travail du personnel, en particulier la durée du travail et l’horaire réglementaire (art. 7 SPHUG), les heures supplémentaires (art. 8) ou encore le perfectionnement professionnel (art. 12). Les titres III et IV concernent les devoirs et les droits du personnel et le titre V contient des dispositions générales. Les titres VI, VII, VIII, IX, X et XI consacrent des dispositions particulières en lien avec le personnel mentionné à l’art. 4 al. 1 LPAC, soit les fonctionnaires, les employés, les auxiliaires, les apprentis, les stagiaires et les agents spécialisés. Les titres XII et XIII concernent, enfin, respectivement la commission paritaire et les dispositions finales.

g. En date du 23 juin 2011, le conseil d’administration a adopté le règlement des services médicaux des HUG (ci-après : RSM), qui a été approuvé par le Conseil d’Etat le 28 septembre 2011. Ce texte réglemente tant l’organisation générale des HUG (titre I) que celle des départements (titre II) ainsi que des services et des centres (titre III) ; il fixe également le statut du corps médical (titre IV), soit le directeur médical, les chefs de départements médicaux, les médecins-chefs de service, les chefs de centres, les médecins responsables d’unité, les médecins adjoints agrégés et les médecins adjoints, les médecins associés, les médecins consultants, les médecins hospitalo-universitaires, les chefs de cliniques et médecins internes, les échanges de médecins et les médecins invités, les stagiaires médecins et les pharmaciens. Il pose encore les conditions générales de travail du personnel médical (titre V), ainsi que le sort réservé aux dossiers des patients (titre VI).

S’agissant en particulier du personnel médical, le directeur médical et les chefs de département sont nommés par le conseil d’administration et choisis parmi les professeurs ordinaires médecins-chefs de service (art. 32 et 34 RSM). Les médecins-chefs de service sont nommés par le conseil d’administration, le règlement sur la collaboration hospitalo-universitaire et le statut du corps professoral du 19 janvier 2011 (ci-après RCHU) et la LPAC leur étant applicables (art. 37 RSM). Les chefs de centres sont nommés par le comité de direction (art. 39 RSM). Les médecins responsables d’unité sont nommés par le comité de direction et choisis parmi les médecins adjoints, le SPHUG leur étant applicable (art. 42 RSM). Les médecins adjoints sont engagés par le comité de direction (art. 45 RSM), le RCHU et le SPHUG leur étant applicables (art. 47 RSM) ; ils ont le statut d’employés et sont nommés fonctionnaires dès la 5e année pour les agrégés et dès la 7e pour les non agrégés (art. 47 RSM). Les médecins associés et les médecins consultants, qui doivent exercer une activité médicale prépondérante à l’extérieur des HUG, sont engagés par le comité de direction par contrat de droit privé (art. 49 et 59 RSM), les contestations portant sur leurs rapports de travail étant de la compétence de la juridiction des prud’hommes (art. 57 et 66 RSM) et le SPHUG ne leur étant pas applicable (art. 49 et 59 RSM).

h. Le chef de clinique titulaire avec titre de spécialisation est toute personne engagée en cette qualité, notamment pour effectuer les tâches d’encadrement des médecins internes et des chefs de clinique sans titre de spécialiste et accomplir des prestations spécialisées (art. 74 al. 1 RSM). Ce statut, ainsi que celui de médecin interne, a été créé pour remplir l’une des missions essentielles des HUG, soit la formation de leur relève hospitalo-universitaire. Pour mener à bien cette mission, les HUG doivent bénéficier d’un ensemble de postes de médecins chefs de clinique et de médecins internes permettant d’assurer des rotations pour les besoins de la formation post-grade des médecins internes ainsi que d’offrir l’opportunité d’une expérience de gestion des équipes soignantes dans le cadre d’un contrat de travail de chef de clinique (directives d’application du RSM du comité de direction du 17 novembre 2011 ad art. 74).

Aux termes de l’art. 75 RSM, les chefs de clinique et les internes sont engagés par le comité de direction, sur proposition de la hiérarchie médicale (al. 1), par contrat de droit privé, les dispositions du contrat-type de travail pour les médecins assistants, subsidiairement du titre X du CO étant applicables dans la mesure où le RSM n’y déroge pas (al. 5). Le contrat mentionne notamment la durée de l’engagement et du temps d’essai, l’indication du traitement, l’affectation à un service (art. 81 al. 1 RSM). La durée de l’engagement est définie à l’art. 77 RSM. Ainsi, le chef de clinique est engagé par contrat de durée déterminée, avec un temps d’essai de trois mois (al. 1). En règle générale, il est mis fin à son contrat après six ans d’activité dans cette fonction (al. 2), son maintien au-delà de la sixième année étant exceptionnellement possible en fonction d’un plan de formation et/ou de carrière (al. 3). Quant au médecin interne, il est engagé par contrat de durée déterminée la première année, puis de durée indéterminée dès la deuxième année (al. 5 et 6).

Des entretiens d’évaluation ont lieu au minimum chaque année, la première fois avant le terme de la période d’essai, le plan de formation ou de carrière étant actualisé lors de chaque évaluation (art. 85 al. 1 et 2 RSM).

Selon l’art. 92 RSM, la direction des ressources humaines, sur délégation du comité de direction, est compétente pour procéder à la résiliation du contrat de travail, en accord avec la hiérarchie médicale (al. 1). Toute résiliation doit intervenir par écrit, par courrier recommandé ou être remise en mains propres. Si l’autre partie le demande, la partie qui résilie doit motiver sa décision par écrit (al. 2). Le contrat de durée indéterminée peut être résilié par les parties moyennant un préavis de trois mois pour la fin d’un mois ou de manière immédiate en tout temps pour de justes motifs, conformément à l’art. 337 CO (al. 5). Les contestations portant sur les rapports découlant du contrat de travail entre un chef de clinique et les HUG sont de la compétence de la juridiction genevoise des prud’hommes (art. 94 RSM).

En outre, les dispositions du SPHUG sont applicables concernant les périodes de service militaire effectuées par les chefs de clinique et les internes (art. 89 RSM), l’assurance-accidents (art. 90 RSM). Les médecins internes et les chefs de clinique sont affiliés à la caisse de prévoyance des établissements publics médicaux de Genève (art. 91 RSM). Par ailleurs, les chefs de clinique avec titre de spécialiste du domaine d’activité du service concerné sont soumis au règlement sur les cadres supérieurs de l’administration cantonale concernant la durée hebdomadaire de travail (art. 82 al. 5 RSM) et la rémunération de leurs heures supplémentaires (art. 83 al. 5 RSM).

3) a. En l’espèce, la recourante a été engagée, d’abord à deux reprises pour une durée déterminée, puis, le 29 juin 2012, pour une durée indéterminée par les HUG en qualité de « cheffe de clinique avec FMH ». Ce dernier contrat, qui mentionne expressément qu’il ressortit au droit privé, fixe le poste à pourvoir, la durée, indéterminée, de l’engagement, le taux d’activité, le droit aux vacances, le salaire à percevoir et l’affiliation à la caisse de prévoyance. Il a été conclu par les HUG, représentés par le chef du département de E______, agissant en concours avec le responsable des ressources humaines, sans intervention d’une autre autorité dans le processus d’engagement. Le contrat ne contient pas d’autre référence à la réglementation cantonale régissant le statut du personnel de l’Etat que l’application de la grille de rémunération des agents étatiques, renvoyant au RSM et à ses directives d’application, ainsi qu’au SPHUG pour certaines de ses dispositions seulement.

b. Il ressort de l’art. 1 al. 1 let. e LPAC, que celle-ci n’est applicable au personnel des établissements publics médicaux que pour autant que les dispositions particulières énoncées dans le RSM ne l’excluent pas. La LPAC délègue ainsi aux HUG la possibilité d’exclure de son champ d’application certaines catégories de son personnel, en adoptant pour ce faire un règlement, ce que son conseil d’administration a fait en édictant le RSM, se fondant sur la compétence lui étant attribuée à cette fin par l’art. 7 LEPM. Dans la mesure où le RSM a été approuvé par le Conseil d’Etat en application de l’art. 5 al. 4 LEPM, il a valeur d’un règlement adopté par ce dernier.

Prévue par une loi formelle, cette délégation, qui en délimite le contour, est valable. Même si elle ne mentionne pas expressément que les HUG peuvent faire application du droit privé pour réglementer le statut de certains membres de leur personnel, il n’en demeure pas moins qu’en leur permettant d’exclure l’application de la LPAC, ils le peuvent implicitement, dès lors que cette loi réglemente la relation de droit public entre l’Etat et leurs agents, à l’exclusion de toute relation de droit privé, comme cela ressort des travaux préparatoires ayant présidé à son adoption. Par ailleurs, le contenu du RSM s’inscrit dans le cadre de cette délégation, qu’elle n’outrepasse pas, puisqu’elle organise les divers services médicaux au sein des HUG, y compris s’agissant des membres du personnel médical. Au surplus, elle renvoie expressément aux dispositions du CO dans plusieurs de ses articles et ne se limite pas, comme le soutient la recourante, à prévoir l’application des règles en matière de licenciement seulement.

c. Encore convient-il de déterminer si les HUG ont fait usage de leur prérogative dans le respect du principe de l’égalité de traitement.

La recourante a été engagée en qualité de cheffe de clinique, alors que le poste qui lui avait été initialement proposé par son supérieur hiérarchique était celui de médecin adjoint, qui, pour des raisons propres à l’établissement, n’a pu lui être accordé. Elle a néanmoins accepté d’être engagée en cette qualité, d’abord au bénéfice de contrats à durée déterminée, puis de durée indéterminée le 29 juin 2012, n’ayant jamais manifesté son opposition à quelque titre que ce soit. Elle n’a pas non plus refusé que ses relations soient régies par le droit privé, comme le mentionnait expressément ce dernier contrat.

Si, tout comme les autres membres du corps médical des HUG, les chefs de clinique assurent une mission de service public, il n’en demeure pas moins que leur poste, de par ses caractéristiques, diffère sensiblement de celui des autres médecins, de rang supérieur, lesquels se trouvent dans une relation de droit public. Ainsi, le rang de chef de clinique avec ou sans spécialisation, tout comme celui de médecin interne, s’adresse avant tout aux médecins en formation, ou qui ont obtenu un titre de spécialiste mais qui sont amenés à parfaire leur formation, comme cela résulte d’ailleurs du cahier des charges annexé au contrat du 29 juin 2012. Dans ce contexte, le poste de chef de clinique apparaît comme une transition vers d’autres postes à responsabilité, de niveau supérieur, comme celui de médecin adjoint, ce qui ressort en particulier des directives d’application du RSM, selon lequel le poste de chef de clinique vise à ce que leurs titulaires, bien que n’assumant aucune charge professorale, assurent la formation post-grade des médecins internes, et à ce qu’ils acquièrent simultanément une expérience de gestion des équipes soignantes. La recourante, lors de son évaluation, a d’ailleurs émis, comme plan de carrière, le souhait d’accéder à un poste de rang supérieur, soit celui de médecin adjoint, ce qui ressort du rapport d’évaluation du 22 avril 2013. A cet égard, il n’apparaît pas déterminant, qu’à l’instar du membre du personnel soumis au droit public, la recourante ait fait l’objet d’une évaluation, retranscrite sur une grille similaire à celle utilisée pour les agents de l’Etat, dès lors que l’exigence d’une évaluation périodique résulte expressément de l’art. 85 RSM dans le cadre des dispositions consacrées aux chefs de clinique. Pour ces motifs, même engagés par contrat de durée indéterminée, les chefs de cliniques n’assurent ce poste que pour une durée temporaire, de six ans au plus, au terme de laquelle il est mis fin au contrat (art. 77 RSM), et ce en vue d’assurer une rotation suffisante de l’effectif (cf. directives d’application du RSM).

Par ailleurs, d’autres catégories de médecins sont également régies par les dispositions du droit privé, soit les médecins associés et les médecins consultants, dont les postes exigent qu’ils n’occupent, aux sein des HUG, pour pouvoir bénéficier de ce statut, qu’une activité accessoire, leur activité principale devant être développée à l’extérieur de l’établissement, en qualité soit d’employé d’un hôpital, soit d’indépendant.

A ces éléments s’ajoutent le fait que seul le comité de direction est intervenu dans l’engagement de la recourante, le RSM n’utilisant du reste pas le terme de « nomination » concernant les chefs de clinique, à l’exclusion de toute intervention d’une autre autorité, comme le conseil d’administration des HUG ou le Conseil d’Etat (cf. art. 5 al. 4 LEPM).

De plus, les autres termes utilisés par le RSM, comme « engagement », « résiliation du contrat de travail », relèvent également du droit privé et ne sont pas caractéristiques d’une relation de travail soumise au droit public.

Même si le salaire de la recourante a été fixé conformément à l’échelle des traitements du personnel de l’Etat et qu’elle a été affiliée à la caisse de prévoyance des établissements publics médicaux, rien n’indique qu’elle aurait été traitée comme un agent de l’Etat, n’ayant jamais été soumise directement aux dispositions de la LPAC et de son règlement d’exécution et seulement dans une mesure limitée au SPHUG, par le renvoi du RSM. La définition des membres du corps médical soumis au statut de chef de clinique n’apparaît pas non plus avoir varié au fil du temps, la recourante n’ayant pas allégué que des collaborateurs ayant occupé des fonctions similaires à la sienne auraient été engagés sous statut de droit public et soumis à l’application de la LPAC. Le fait que ses activités de médecin au sein des HUG aient comporté une dimension de service public, à l’instar d’autres membres du personnel médical soumis à la LPAC, n’apparaît pas suffisant pour constituer une inégalité de traitement, les différents postes, tel que précédemment mentionnés, ayant pour caractéristiques de ne pas être de même rang.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les rapports de travail de la recourante ont, à bon droit, été soumis au droit privé, de sorte qu’ils échappent, en conséquence, à la compétence de la chambre administrative.

4) Au vu de ce qui précède, le recours sera donc déclaré irrecevable. Il ne sera pas transmis d’office à la juridiction compétente, celle-ci n’étant pas une juridiction administrative au sens de l’art. 6 LPA (art. 64 al. 2 LPA). Dans la mesure où la compétence de la chambre des prud’hommes de la Cour de justice n’entre pas en ligne de compte s’agissant d’une juridiction de seconde instance, il ne sera de même pas fait application de l’art. 118A LOJ.

Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Par ailleurs, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 20 décembre 2013 par Madame X______ contre le courrier des Hôpitaux universitaire de Genève du 21 novembre 2013 ;

met à la charge de Madame X______ un montant de CHF 500.- à titre d’émolument ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Joanna Burgisser-Bueche, avocate de la recourante, ainsi qu’à Me Pierre Martin-Achard, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :