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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/577/2017

ATA/1305/2018 du 04.12.2018 sur JTAPI/1214/2017 ( LCI ) , REJETE

Parties : DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC / LAVIZZARI Romain, CONSORTS LAVIZZARI-PAYOT, FEVRE Hubert, GUILLEMIN Marc, GUILLEMIN Valquiria, WYSS Denis, WYSS Marie-Louise, GÜR André, GÜR Monique, AFFLELOU Lionel & CONSORTS, BOULDOUYRE AFFLELOU Charlotte, COMMUNE DE COLLONGE-BELLERIVE & CONSORTS, LAVIZZARI Benjamin, ESPINASSE Jérôme, PONTE ESPINASSE Alexandra, ROUILLER Denis, LAVIZZARI Carlo, PAYOT Olivier, LAVIZZARI Florian
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/577/2017-LCI ATA/1305/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 décembre 2018

3ème section

 

dans la cause

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

contre

Monsieur Benjamin LAVIZZARI
Monsieur Carlo LAVIZZARI
Monsieur Florian LAVIZZARI
Monsieur Romain LAVIZZARI
Monsieur Olivier PAYOT

représentés par Me Guerric Canonica, avocat

et

Monsieur Lionel AFFLELOU
Madame Charlotte BOULDOUYRE AFFLELOU
Monsieur Jérôme ESPINASSE
Monsieur Hubert FEVRE
Monsieur Marc GUILLEMIN
Madame Valquiria GUILLEMIN
Monsieur André GÜR
Madame Monique GÜR
Madame Alexandra PONTE ESPINASSE
Monsieur Denis ROUILLER
Monsieur Denis WYSS
Madame Marie-Louise WYSS
représentés par Me Anthony Walter, avocat

et

COMMUNE DE COLLONGE-BELLERIVE
représentée par Me Nicolas Wisard, avocat


 

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 novembre 2017 (JTAPI/1214/2017)


EN FAIT

1. Messieurs Benjamin, Carlo, Florian et Romain LAVIZZARI, et Monsieur Olivier PAYOT (ci-après : les consorts LAVIZZARI-PAYOT) sont copropriétaires de la parcelle n° 5'491, feuille 60 de la commune de
Collonge-Bellerive, sise 28, chemin du Port-de-Bellerive.

Cette parcelle est située en 5ème zone villa et a une contenance de 1'297 m2.

2. Monsieur Lionel AFFLELOU Madame Charlotte BOULDOUYRE AFFLELOU, Monsieur Jérôme ESPINASSE, Monsieur Hubert FEVRE, Monsieur Marc GUILLEMIN, Madame Valquiria GUILLEMIN, Monsieur André GÜR, Madame Monique GÜR, Madame Alexandra PONTE ESPINASSE, Monsieur Denis ROUILLER, Monsieur Denis WYSS, Madame Marie-Louise WYSS (ci-après : les voisins) sont tous des voisins directs de la parcelle susvisée.

3. Le 11 août 2016, les consorts LAVIZZARI-PAYOT ont déposé auprès du département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, devenu depuis lors le département du territoire (ci-après : DT ou le département) une demande d’autorisation de construire portant sur l’édification de quatre villas contiguës de haute performance énergétique (ci-après : HPE ; HPE 44 %), panneaux solaires, couverts à voitures, couverts à containers et abattage d’arbres.

4. Dans le cadre de l’instruction de cette demande, tous les préavis recueillis ont été favorables, voire favorables sous conditions, à l’exception de celui de la commune.

5. Le DT a délivré l’autorisation de construire le 19 janvier 2017 (DD 109'396-1), laquelle a été publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève du même jour.

6. Par acte du 17 février 2017, les voisins ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette autorisation.

7. La commune de Collonge-Bellerive a également recouru auprès du TAPI contre l’autorisation de construire.

8. Par décision du 22 mars 2017 (DITAI/147/2017), le TAPI a joint les deux procédures précitées A/577/2017 et A/587/2017 sous la cause A/577/2017.

9. Les consorts LAVIZZARI-PAYOT et le DT ont conclu au rejet des recours.

10. À la suite d’un second échange d’écritures, le TAPI a tenu une audience de comparution personnelle des parties et d’enquêtes. Elle a auditionné Monsieur Marcel T’HART, membre de la commission d’architecture (ci-après : CA), en qualité de témoin assermenté.

Sa déposition sera reprise en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

Les parties ont persisté dans leurs conclusions.

Les consorts LAVIZZARI-PAYOT ont précisé qu’une division parcellaire ne serait pas entreprise dans le cadre du projet de construction litigieux.

11. Par jugement du 30 novembre 2016, le TAPI a admis les deux recours. L’autorisation était annulée.

Le calcul des constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI) du projet était incorrect. Le DT s’était notamment trompé sur le calcul des couverts à voitures et des terrasses du rez-de-chaussée situées entre les villas B et C, fermées sur plus de 50 % de leurs côtés. La totalité de leur surface devait être comptée comme CDPI. Le projet prévoyait dès lors 111,63 m2 de CDPI, ce qui était non seulement supérieur au 8 % de la parcelle (8,6 %), mais également au 100 m2 maximum autorisés par le règlement. Pour ce motif déjà, l’autorisation devait être annulée.

Le département avait renoncé à prendre en considération dans le calcul des surfaces brutes de plancher (ci-après : SBP) différentes surfaces du projet, totalisant 128,3 m2, qui avaient pour conséquence la création d’un étage supplémentaire (vérandas, escaliers menant à l’attique, y compris les paliers d’escaliers). L’art. 59 al. 3 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) prévoyait la possibilité de renoncer à prendre en compte certaines surfaces à certaines conditions. Le DT n’avait pas instruit ce point. En l’absence d’un examen concret du cas d’espèce, permettant de comprendre pourquoi 128,3 m2 de surface n’avaient pas été pris en considération dans le calcul des SBP, les conditions d’application de l’art. 59 al. 3 LCI n’avaient pas été respectées. Pour cette raison également, l’autorisation de construire devait être annulée.

12. Par acte du 8 janvier 2018, le DT a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Il a conclu à l’annulation du jugement précité et au rétablissement de l’autorisation de construire du 19 janvier 2017.

Le TAPI avait violé l’art. 3 al. 3 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01). Les CDPI retenues étaient composées de quatre surfaces. Seules deux posaient problème, à savoir les couverts à voitures et les deux terrasses (villas B et C). Le département détaillait les calculs. La surface finale des CDPI totalisait 98,5 m2 et respectait l’art. 3 al. 3 RCI.

Par ailleurs, il était erroné de considérer que les vérandas destinées à l’habitation, telles qu’en l’espèce, devaient entrer dans le calcul des CDPI,
celles-ci n’étant précisément pas destinées à l’habitation. En conséquence, elles étaient soumises au régime de l’art. 59 al. 3 LCI, à savoir que le principe voulait qu’elles entrent dans le calcul des surfaces, sauf exception reconnue par l’art. 59
al. 3 LCI. L’exception avait été admise par la CA, implicitement, comme l’autorisait à tout le moins la jurisprudence.

13. Le 27 février 2018, les consorts LAVIZZARI-PAYOT ont appuyé le recours.

14. La commune a conclu au rejet du recours. Les vérandas devaient s’analyser sous l’angle de l’art. 59 al. 3 let. d LCI. Elles n’en remplissaient toutefois pas les conditions. Leur surface devait en conséquence être comptée. Le projet dépassait le rapport de surfaces autorisé de 44 %.

15. Les voisins ont conclu au rejet du recours. Les surfaces des terrasses des villas A et D devaient compter comme CDPI.

16. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

17. Pour le surplus, les calculs et argumentations des parties seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. En cinquième zone, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25 % de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 27,5 % lorsque la construction est conforme à un standard de HPE, reconnue comme telle par le service compétent (art. 59 al. 1 LCI).

b. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé dont la surface de plancher habitable n’excède pas 40 % de la surface du terrain, 44 % lorsque la construction est conforme à un standard de HPE, 48 % lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique (ci-après : THPE), reconnue comme telle par le service compétent (art. 59 al. 4 let. a LCI, dans sa teneur en vigueur depuis le 26 janvier 2013).

c. La compatibilité du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier exigée par l’art. 59 al. 4 LCI est une clause d’esthétique, analogue à celle contenue à l’art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/875/2018 du 28 août 2018 ; ATA/123/2018 du 6 février 2018 et la jurisprudence citée).

3. a. Avant d’autoriser un projet de construction en cinquième zone, dont la densité correspond à celle prévue par l’art. 59 al. 4 let. a LCI, le département doit ainsi recueillir les appréciations de la CA, respectivement celles de la commune du lieu de situation exprimées sous forme de préavis rendu par l’exécutif municipal (art. 59 al. 4 let. a LCI ; art. 48 let. h et 30 al. 1 let. s a contrario de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B 6 05).

b. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur (ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 ; ATA/1382/2017 du 10 octobre 2017 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/875/2018 précité ; ATA/636/2018 du 19 juin 2018). Dans le système prévu par l’art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/875/2018 précité).

La délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/828/2015 du 11 août 2015).

c. Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci (ATA/875/2018 précité ; ATA/636/2018 du 19 juin 2018). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1158/2018 du 30 octobre 2018 ; ATA/1049/2018 du 9 octobre 2018). De même, s’agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre administrative exerce son pouvoir d’examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/875/2018 précité).

4. a. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut renoncer à prendre en considération dans le calcul du rapport des surfaces, la surface de plancher :

a) des combles dont la hauteur est inférieure à 1,8 m ;

b) des combles de peu d’importance, indépendamment du vide d’étages ;

c) des garages de dimensions modestes, lorsque ceux-ci font partie intégrante du bâtiment principal ;

d) des serres, jardins d’hiver ou constructions analogues en matériaux légers et de dimensions modestes.

b. La surface des constructions, selon l’art. 59 LCI, comprend les constructions annexes faisant corps avec le bâtiment principal, à l’exclusion de celles qui seraient admises comme CDPI (art. 29 RCI).

5. a. Sont réputées CDPI, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,5 m, une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30°, une ligne horizontale de faîtage située à 4,5 m du sol au maximum. Dans le cadre d’un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, et afin d’améliorer l’insertion dans le site et pour autant qu’il n’en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la CA, des constructions de peu d’importance groupées d’une surface de plus de 50 m2 au total. Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d’importance ne doit pas excéder 8 % de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (art. 3 al. 3 RCI).

b. Les CDPI ne sont pas prises en considération pour le calcul du rapport des surfaces (art. 59 al. 7 LCI).

c. Il ressort des travaux préparatoires que l’habitabilité constitue l’élément décisif pour juger qu’une construction est de peu d’importance au sens de l’art. 3 al. 3 RCI (MGC 1983 p. 437 ss).

d. Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la chambre de céans a déjà été amenée à préciser que les surfaces déterminantes étaient celles de l’emprise au sol d’une construction (ATA/1000/2018 du 25 septembre 2018 ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015 confirmé par l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_55/2016 du 3 mars 2016).

6. a. En conséquence lors du calcul du rapport des surfaces, en cinquième zone, certaines surfaces :

- sont exclues du calcul, à savoir les CDPI (art. 59 al. 7 LCI), celles-ci étant toutefois soumises aux conditions particulières de l’art. 3 al. 3 RCI et autorisées pour autant qu’elles soient compatibles avec les normes de la zone de construction dans laquelle elles sont projetées (directive CDPI n° 024-v5 du 3 février 2014, ci-après : la directive) ;

certains garages, ateliers non professionnels, couverts à voitures, couverts à plaisance, cabanes de jardins, pool-house ou vérandas ont été reconnus comme CDPI (MGC 1992 p. 4'657 ; ATA/1345/2015 précité ; ATA/592/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/726/2012 du 30 octobre 2012).

- peuvent être exclues du calcul du rapport de surfaces, à savoir certaines constructions, décrites à l’art. 59 al. 3 LCI, à certaines conditions (directive rapport des surfaces en zone 5 n° 021-v4 du 1er mars 2013) ;

certains combles, garages ou vérandas ont été exclus du calcul du rapport de surfaces (ATA/1064/2018 du 9 octobre 2018 ; ATA/475/2011 du 26 juillet 2011 et les références citées).

b. Doivent encore être distinguées les constructions de très peu d’importance, tels que jardins d’hiver, pergolas, prévues par l’art. 1 al. 4 et 5 LCI lesquelles ne sont pas soumises à autorisations de construire.

7. En l’espèce, dans un premier grief, le DT conteste le calcul des surfaces retenues comme CDPI.

8. a. Une première divergence porte sur les conditions auxquelles sont soumises les CDPI de la parcelle.

L’art. 3 al. 3 RCI indique que les CDPI ne doivent pas représenter plus que le 8 % de la surface de la parcelle. La directive précise que le respect du 8 % est impératif.

Autre est la question de la limite des 100 m2. La directive précise que « partant du principe que la parcelle sera divisée à terme, la limite des 100 m2 n’est pas prise en compte pour autant que cela ne prétérite pas l’harmonie et l’aménagement du quartier ».

b. En l’espèce, les requérants ont indiqué que la parcelle ne ferait pas l’objet d’une division parcellaire.

En conséquence, c’est à bon droit que le TAPI a considéré que les exigences tant du 8 % que de la limite des 100 m2 s’appliquaient.

9. La seconde divergence consiste dans les qualifications, ou non, de CDPI de différentes surfaces, voire dans leur calcul.

a. S’agissant du calcul des CDPI des couverts à voiture, le TAPI a procédé à une déduction de 4,5 m2 par couvert. Sans détailler son calcul, on comprend qu’il a soustrait 1,5 m sur la longueur de 3 m par couvert.

Le DT conteste le calcul, en indiquant que la longueur à considérer n’était pas le côté à 3 m mais l’autre, sur une longueur de 4,55 m, soit la distance entre la façade et le deuxième poteau, ce qui donnerait une CDPI de 32,8 m2 pour les quatre couverts [60 m2 – (4 x 6,8 m2)].

Les parties soutiennent respectivement le calcul du TAPI ou du DT alors que les voisins contestent qu’une déduction puisse s’opérer. Selon ces deniers, l’illustration, en page 5 de la directive, d’un couvert à deux poteaux était sans lien avec le projet. Ils appuyaient leur argumentation principalement sur les plans des coupes. Les couverts envisagés seraient partie intégrante du bâtiment. Les garages étaient reliés fonctionnellement à l’habitat principal, en partie fermés sur les côtés, soutenus par deux poteaux parallèles et un avant-toit qui viendrait s’appuyer contre le bâtiment principal.

b. Il ressort de l’extrait du plan cadastral de la société hdkgéomatique du 27 juin 2016 que les couverts ne sont pas accolés au bâtiment. Contrairement à ce que soutiennent les voisins, les plans du rez-de-chaussée n’indiquent pas que le couvert serait accolé à la façade. L’allégation selon laquelle sans un point d’appui de l’autre côté, les couverts sont structurellement intenables n’est étayée par aucune pièce.

En conséquence, le TAPI peut être suivi quant à une déduction de la surface, conformément au schéma du bas de la page 3 de la directive intitulé « coupe sur un couvert à deux poteaux ». La déduction doit toutefois porter sur le côté où se trouvent les poteaux, soit en l’espèce sur la longueur, contrairement aux calculs du TAPI qui a effectué le calcul en prenant la largeur.

La directive n’indique pas qu’il faudrait soustraire l’avant-toit uniquement jusqu’au second poteau. L’exemple du haut de la page (« plan ») soustrait aussi l’entier de la longueur. La question se pose de savoir s’il a lieu de suivre le département, qui n’indique au demeurant pas les raisons pour lesquelles il ne retient une longueur que de 4,55 m. Toutefois, si l’entier de la longueur de 5 m était retenu, sur une surface de 1,5 m, maximum autorisé, 7,5 m2 seraient soustraits pour chaque couvert, pour un total de CDPI relatif aux couverts de 30 m2 [60 m2 – (4 x 7,5 m2)], soit une différence de 2,8 m2 avec le calcul du DT (qui arrive à 32,8 m2) non déterminante en l’espèce, compte tenu de ce qui suit.

c. S’agissant des autres CDPI litigieuses, notamment les terrasses couvertes, au rez-de-chaussée, des villas B et C, le département ne conteste pas qu’elles répondent à la définition de CDPI. La divergence porte sur le calcul du TAPI lequel parvient à 48,6 m2 alors que le département détaille un calcul à 44,66 m2.

Cette question souffrira de rester indécise dès lors que même à retenir 48,6 m2, la solution ne serait pas différente.

d. Les surfaces de CDPI de 10,25 m2 du local à containers n’est pas litigieuse.

e. Les voisins concluent à ce que les surfaces des terrasses des villas A et D soient comptabilisées comme CDPI conformément au schéma 8 de la page 4 de la directive, un poteau se trouvant sous le surplomb de l’étage.

Le TAPI a considéré que tel ne devait pas être le cas en application du schéma 7 de la page 4 de la directive s’agissant d’un « surplomb de l’étage » sans poteau.

Certes, un poteau apparaît sur les plans des façades. Toutefois, il ressort des plans du rez-de-chaussée que les poteaux se trouvent sous le couvert à voiture et non sur les terrasses. L’argument des voisins n’est en conséquence pas fondé.

f. Les parties ne contestent pas 10,78 m2 de CDPI au titre de surfaces couvertes entre les villas B et C en attique (pergolas). En vertu du raisonnement qui suit, cette surface ne répond toutefois pas à la définition des CDPI.

g. En conséquence, la surface de CDPI est inférieure à 100 m2 (32,8 + 48,6 + 10,25 = 91,65 m2). Il n’est pour le surplus pas contesté que cette surface représente moins que le 8 % de la surface de la parcelle.

Le premier grief du département est fondé.

10. Dans un second grief, le département conteste que certaines surfaces ne puissent pas être exclues du calcul de la SBP au sens de l’art. 59 al. 3 let. d LCI.

Le litige porte sur les vérandas.

a. Selon leurs caractéristiques, les « vérandas » sont parfois considérées comme CDPI (ATA/592/2014 consid. 6a ; ATA/726/2012 du 30 octobre 2012) et doivent en conséquence répondre des conditions de l’art. 3 al. 3 RCI quant aux exigences de proportions avec la parcelle ou sont parfois traitées sous l’angle de l’art. 59 al. 3 let. d LCI (ATA/15/2008 ; ATA/125/2008, s’agissant par exemple d’une véranda de 6,66 m2).

b. En l’espèce, les vérandas concernées sont en toiture et ajoutent un niveau au bâtiment. N’étant pas au sol, elles ne peuvent répondre à la définition de CDPI qui impose un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,5 m, une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30°, une ligne horizontale de faîtage située à 4,5 m du sol au maximum.

Les voisins relèvent l’incohérence du département qui, le 24 janvier 2017, a écrit à la commune que les vérandas litigieuses étaient des CDPI alors qu’il soutient le contraire aujourd’hui. Ce courrier est toutefois sans incidence sur ce qui précède, les constructions concernées ne répondant pas à la définition des CDPI.

Ni la commune ni le département ne contestent plus aujourd’hui que, dans le cas d’espèce, les vérandas ne sont pas des CDPI.

11. a. La question consiste à déterminer si le département est autorisé à ne pas tenir compte des surfaces desdites vérandas en toiture en application de l’art. 59 al. 3 let. d LCI.

b. Une véranda destinée à une activité commerciale peut bénéficier de l’exonération de sa surface dans le décompte des SBP conformément au régime de l’art. 59 al. 3 let. d et non à celui de 59 al. 7 LCI (ATA/792/2001 du 27 novembre 2001 consid. 5).

c. En l’espèce, à l’instar du DT, le TAPI a considéré que les vérandas projetées (non chauffées, d’une surface inférieure à 20 m2, non habitables) pouvaient entrer dans les constructions dont les surfaces ne comptaient pas comme SBP au sens de l’art. 59 al. 3 let. d LCI.

Il ressort en effet des plans (coupes et attiques) qu’une séparation est prévue entre, d’une part, le haut des escaliers et les quelques 10 m2 de palier et, d’autre part, la véranda. Les plans mentionnent par ailleurs que les vérandas ne sont pas chauffées. La surface des vérandas est inférieure à 20 m2.

d. Le TAPI a toutefois reproché au DT de ne pas avoir analysé les conditions d’application de l’al. 3 let. d de l’art. 59 LCI. Le département considère que le préavis de la CA vaut implicitement accord pour ladite dérogation aux surfaces, la CA ayant déjà analysé les caractéristiques du quartier pour faire application de l’art. 59 al. 4 LCI.

L’application de l’exception de l’art. 59 al 3 LCI est soumises à plusieurs conditions, soit principalement l’exigence de constructions analogues à des serres ou des jardins d’hiver, une construction en matériaux légers, des dimensions modestes, que les circonstances justifient ladite exemption de surface et que cette mesure soit compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier (art. 59 al. 3 let. d LCI).

In casu, le préavis de la CA ne contient aucune mention d’une analyse des conditions précitées. De surcroît, le représentant de la CA a indiqué en audience que celle-ci n’était pas informée que des surfaces avaient été soustraites au sens de l’art. 59 al. 3 LCI. Dans ces conditions, c’est à juste titre que le TAPI a considéré qu’il n’était pas établi que les conditions d’application de l’art. 59 al. 3 let. c LCI étaient remplies.

Contrairement toutefois à ce que soutient le TAPI, si les vérandas sont exclues du calcul des SBP en application de l’art. 59 al. 3 let. d LCI, elles n’en deviennent pas des CDPI, le législateur ayant prévu des régimes distincts entre les art. 59 al. 3 let. d LCI et 59 al. 7 LCI. La jurisprudence mentionnée par le TAPI ne dit pas le contraire (ATA/592/2014 précité consid. 6a). Elle relève que la surface de la CDPI n’est pas prise en compte dans le calcul des surfaces en application de l’art. 59 al. 7 LCI. En conséquence, les surfaces des vérandas exclues du calcul des SBP au sens de l’art. 59 al. 3 let. d LCI ne sont plus prises en compte.

e. Se pose encore la question de la qualification des surfaces à côté des vérandas, en l’espèce la surface en toiture consacrée à la cage d’escaliers et au palier qui les dessert, surface que le TAPI a chiffrée à 62,61 m2.

Dès lors que ces surfaces permettent de quasiment doubler la surface des quatre vérandas (chiffrée par le TAPI à 65,69 m2), il apparaît de prime abord douteux qu’elles puissent faire l’objet d’une exemption au sens de l’art. 59 al. 3 LCI. Il est en tous les cas exclu qu’il soit considéré que cette exemption puisse s’appliquer sans aucun examen approfondi de la problématique.

L’analyse devra aussi porter notamment sur la question des 10,78 m2 de pergolas, faussement qualifiés de CDPI, compte tenu de leur caractère en toiture.

Ces surfaces n’ayant pas du tout fait l’objet d’une analyse par le département, il n’est pas établi que les conditions pour la délivrance de l’autorisation soient remplies.

Le jugement du TAPI sera en conséquence confirmé par substitution de motifs, l’autorisation querellée étant annulée et le dossier renvoyé au département pour une analyse technique et chiffrée de toutes les surfaces.

12. Seul le département a recouru. Aucun émolument ne sera en conséquence perçu (art. 87 al. 1 LPA).

Une indemnité de procédure de CHF 1’000.- sera allouée à la commune de Collonge-Bellerive, conformément à la jurisprudence constante de la chambre administrative, pour une commune de moins de dix mille habitants qui a dû recourir à un mandataire (ATA/588/2017 du 23 mai 2017 et les références citées).

Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée aux voisins, qui ont pris un avocat et ont conclu à une telle indemnité.

Les indemnités de procédure seront mises à la charge de l’État de Genève.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 janvier 2018 par le département du territoire contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 novembre 2017 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Monsieur Lionel AFFLELOU Madame Charlotte BOULDOUYRE AFFLELOU, Monsieur Jérôme ESPINASSE, Monsieur Hubert FEVRE, Monsieur Marc GUILLEMIN, Madame Valquiria GUILLEMIN, Monsieur André GÜR, Madame Monique GÜR, Madame Alexandra PONTE ESPINASSE, Monsieur Denis ROUILLER, Monsieur Denis WYSS, Madame Marie-Louise WYSS, pris conjointement et solidairement, à la charge de l’État de Genève ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’000.- à la commune de
Collonge-Bellerive, à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt au département du territoire, soit pour lui l’office des autorisations de construire, à Me Guerric Canonica, avocat des consorts LAVIZZARI-PAYOT, à Me Anthony Walter, avocat des intimés, à Me Nicolas Wisard, avocat de la commune ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :