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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2109/2017

ATA/1159/2018 du 30.10.2018 sur JTAPI/1174/2017 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 12.12.2018, rendu le 26.09.2019, REJETE, 1C_655/2018
Descripteurs : DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; CONDITION DE RECEVABILITÉ ; INTÉRÊT ACTUEL ; INTÉRÊT DIGNE DE PROTECTION ; INTÉRÊT PERSONNEL
Normes : LPA.60.leta; LPA.60.letb
Parties : MAUGUÉ Eric / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC, KALI Taib
Résumé : Confirmation d'un jugement du Tribunal administratif de première instance dans lequel le recours d'un voisin contre une autorisation de construire a été déclaré irrecevable. La chambre administrative a estimé que la source des griefs du recourant, soit une situation dangereuse pour les usagers d'une contre-route, ne relèvent pas de la construction prévue mais d'une situation préexistante et partiellement également d'une situation provisoire liée à un chantier en cours sur les parcelles avoisinantes. Le recourant échoue ainsi à démontrer qu'il subirait un préjudice particulier lié à l'autorisation délivrée et qu'il aurait un intérêt personnel pratique qui se distinguerait nettement de l'intérêt général au recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2109/2017-LCI ATA/1159/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 octobre 2018

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur Éric MAUGUÉ
représenté par Me Christian Bruchez, avocat

contre

Monsieur Taib KALI
représenté par Me Jean-Pierre Carera, avocat

et

Département du territoire - OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 novembre 2017 (JTAPI/1174/2017)


EN FAIT

1) Monsieur Taib KALI est copropriétaire de la parcelle no 776, feuille 22 de la commune de Lancy, sise route de Grand-Lancy 124 en zone de construction 5.

2) Le 2 novembre 2016, M. KALI a requis du département devenu depuis le département du territoire (ci-après : le département) une autorisation de démolir la maison construite sur sa parcelle ainsi qu'une autorisation de construire six logements, sous forme d'habitat groupé, à très haute performance énergétique.

3) Le 31 janvier 2017, le département a délivré à M. KALI l'autorisation de démolir requise (M 7'768).

4) Par décision du 3 avril 2017, le département a délivré l'autorisation globale de construire DD 109'646.

Le projet prévoyait notamment un garage souterrain abritant huit places de stationnement au bas d'un terrain en pente, permettant une sortie de plain-pied sur une esplanade créé par aplanissement du terrain. Une place de stationnement extérieure était prévue et un accès à la parcelle était créé, d'une largeur de 6,5 m, qui débouchait à l'extrémité de la contre-route parallèle à la route du
Grand-Lancy, à la hauteur du carrefour avec celle-ci.

La commune de Lancy avait demandé un complément le 16 décembre 2016 concernant notamment l'inclusion de la création d'un trottoir le long de la
contre-route et dans un préavis du 1er mars 2017, il était indiqué qu'après la délivrance de l'autorisation de construire, des contacts avec le département et la ville de Lancy devaient être pris concernant le trottoir et ses spécificités (largeur, matériaux etc.).

La direction générale des transports (ci-après : DGT) avait préavisé favorablement sans observations le projet le 5 janvier 2017 et la commission d'architecture l'avait également préavisé favorablement le 7 février 2017.

5) Le 15 mai 2017, Monsieur Éric MAUGé, propriétaire de la parcelle no 4'144, à l'adresse chemin Pierre-Longue 1, sur laquelle est édifiée une maison d'habitation, située à l'angle du chemin de Pierre-Longue et de la contre-route, a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l'autorisation de construire DD 109'646. Il a conclu principalement à l'annulation de l'autorisation de construire et préalablement à ce qu'un transport sur place soit ordonné et à ce qu'un ingénieur spécialiste en matière de circulation routière du bureau de prévention des accidents soit mandaté afin de réaliser une expertise routière.

La parcelle no 776 n'était manifestement pas équipée puisque la contre-route sur laquelle celle-ci débouchait constituait déjà, en l'état, un danger considérable pour les usagers. Les standards applicables en matière de sécurité routière, tout comme le droit public en matière de circulation routière n'étaient pas respectés et ce danger ne pourrait que s'accroître en cours de chantier et après la réalisation des constructions autorisées. Les nombreuses interventions des riverains du chemin auprès des autorités n'avaient pas permis d'améliorer la situation de la contre-route ; la dernière intervention était une pétition qui avait été adressée le
12 avril 2017 à deux conseillers d'État et au maire de Lancy.

6) Le 16 juin 2017, M. KALI a déposé des observations concluant au rejet du recours

Entre la parcelle no 4'144 et la parcelle no 776, distantes d'environ 95 m, s'étendaient les parcelles nos 4'947 et 4'946 sur lesquelles un projet de construction était en cours de réalisation portant sur quarante-huit habitations sous forme de d'habitats groupés (DD 106'101 et DD 106'106). M. MAUGUé se plaignait en réalité des nuisances engendrées par le chantier en cours.

La parcelle no 776 était équipée et les véhicules sortant n'emprunteraient pas la contre-route.

Conformément au préavis de la commune du 1er mars 2017, il prendrait à sa charge le prolongement du trottoir existant jusqu'à la limite de la propriété ce qui impliquait notamment le déplacement sur sa parcelle, en accord avec la DGT, d'une armoire technique de Swisscom, laquelle se trouvait actuellement sur le bord de la route du Grand-Lancy.

7) Le 17 juillet 2017, le département a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement au rejet de celui-ci.

M. MAUGUé n'avait pas la qualité pour agir, son domicile était situé à environ 100 m à vol d'oiseau du projet contesté, et il ne démontrait pas être personnellement atteint par la décision attaquée.

Le projet n'était pas susceptible d'accroître le trafic et visait au contraire à améliorer la sécurité sur la contre-route par rapport à la situation actuelle. La contre-route était à sens unique et il n'était même pas certain que les nouveaux habitants l'empruntent.

8) Le 15 août 2017, M. MAUGUé a persisté dans les conclusions prises dans son recours.

La contre-route pouvait être empruntée dans les deux sens, aucune signalisation permanente ne privilégiait un sens de circulation. La parcelle no 776 et la contre-route qui la desservait, n'étaient pas équipées pour pouvoir garantir la circulation piétonne. Le trottoir ne modifierait en rien ce constat. La visibilité était quasi inexistante au niveau du carrefour.

Depuis juillet 2015, la commune de Lancy avait demandé au département d'étudier la problématique de la contre-route et de ses dangers. Le département n'avait réalisé aucune étude sérieuse de la situation de la sécurité du trafic et n'avait pas tenu compte des normes applicables dans le contexte, reconnaissant implicitement que les normes VSS n'étaient pas respectées. Une mise en conformité de la voirie permettant d'assurer la sécurité nécessiterait des aménagements concernant toutes les formes de circulation.

9) Le 5 septembre 2017, le département a persisté dans ses conclusions.

10) a. Le 5 septembre 2017, M. MAUGUé a déposé une requête de mesures provisionnelles urgentes afin qu'il soit fait interdiction à M. KALI de réaliser tous travaux sur sa parcelle, notamment de nivellement et d'aplanissement.

b. Par décision du 15 septembre 2017 (DITAI/1483/2017), le TAPI a rejeté la requête en mesures provisionnelles urgentes à laquelle M. KALI et le département s'étaient opposés, respectivement le 11 et 12 septembre 2017.

11) Par jugement du 9 novembre 2017, le TAPI a déclaré le recours de M. MAUGUé irrecevable.

Celui-ci ne pouvait pas se prévaloir d'un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision querellée et ne disposait dès lors pas de la qualité pour recourir.

M. MAUGUé n'était pas directement voisin de la parcelle concernée. La contre-route desservirait bientôt plus de septante logements et rien ne permettait de retenir que l'augmentation de trafic engendrée par le projet litigieux augmenterait sensiblement les nuisances. M. MAUGUé n'était pas touché directement plus qu'un autre usager de la contre-route par la faible augmentation de la circulation liée au projet. Son recours s'apparentait davantage à une action populaire visant l'augmentation générale du niveau de sécurité sur la contre-route.

12) Par acte mis à la poste le 11 décembre 2017, M. MAUGUé a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre le jugement du TAPI en concluant à son annulation et au renvoi de la cause au TAPI pour qu'il statue sur le fond. Subsidiairement, il sollicitait un transport sur place et une expertise par un ingénieur spécialiste en matière de circulation routière du bureau de prévention des accidents.

La sortie du garage du projet était dépourvue de toute visibilité que ce soit à droite ou à gauche, en relation avec le trafic provenant de la route du
Grand-Lancy. L'aménagement d'un trottoir tel que prévu ne concernait que quelques mètres à gauche et à droite de la sortie.

Ce qui était déterminant, c'était de relever qu'un accès desservant la parcelle était envisagé à l'intersection entre la contre-route et la route du Grand-Lancy, à un endroit où il n'existait actuellement aucun débouché sur la contre-route. Il serait amené, ainsi que sa famille, à circuler quotidiennement devant cette sortie de garage sur une portion de route qui n'était absolument pas équipée de manière satisfaisante. Les autorités n'avaient pas équipé correctement la desserte routière parallèlement à la réalisation du premier projet sur les parcelles directement voisines à la sienne.

13) Le 19 décembre 2017, le TAPI a transmis son dossier, renonçant à formuler des observations.

14) Le 18 janvier 2018, M. KALI a déposé des observations, concluant au rejet du recours ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure.

Les véhicules entrant dans la future construction n'utiliseraient pas la contre-route, quelle que soit leur provenance sur la route du Grand-Lancy. Seuls ceux sortant de la propriété pourraient emprunter la contre-route, notamment s'ils se dirigeaient vers la ville de Genève, un engagement directement dans la circulation en obliquant à gauche sur la route du Grand-Lancy pouvant s'avérer périlleux, bien que non prohibé.

Le trottoir prévu prolongeait celui construit le long de la route du
Grand-Lancy et avec le déplacement de l'armoire Swisscom, celui-ci ne serait pas interrompu et garantirait une meilleure visibilité.

Les communes concernées avaient mandaté un ingénieur de la circulation afin d'étudier les mesures qui permettraient d'améliorer la circulation routière dans le quartier, selon le courrier du 28 novembre 2017 adressé par la commune de Lancy à l'un des habitants du chemin de Pierre-Longue.

Le recourant n'avait pas qualité pour recourir contre l'autorisation de construire et sur le fond, l'autorisation devait être confirmée.

15) Le 19 janvier 2018, le département a déposé des observations concluant au rejet du recours en l'absence de qualité pour recourir du recourant contre l'autorisation de construire.

16) Le 1er mars 2018, le recourant a indiqué persister dans ses conclusions et a déposé une expertise de la sécurité routière du chemin de Pierre-Longue effectuée en décembre 2017 - janvier 2018, sur mandat de l'association transports et environnement, par Monsieur Claude MORZIER, expert en sécurité routière, laquelle concluait à une situation globalement dangereuse pour les usagers dans tout le périmètre et des visibilités très insuffisantes aux débouchés de parcelles sur le chemin de Pierre-Longue. En priorité, l'extension de la zone 30 ou une mise en zone 20 uniformément avec le chemin de Pierre-Longue devait être prévue pour la contre-allée ainsi que sa mise en sens unique de la branche ouest. Ensuite, il convenait de « mettre en oeuvre l'amélioration des visibilités au carrefour
Pierre-Longue/contre-allée, la construction du trottoir, la continuité du cheminement piéton, l'aménagement de la porte d'entrée est et l'aménagement du trottoir à l'angle Genévrière/contre-allée ». Enfin, venaient les surélévations des carrefours.

17) Lors du transport sur place du 27 avril 2018, des photographies de l'entrée de la parcelle en cause et de la route du Grand-Lancy ainsi que de la contre-route à son débouché sur la route du Grand-Lancy et de la continuation de la
contre-route en direction du chemin de Pierre-Longue ont été prises.

M. MORZIER a été entendu en qualité de témoin. Il n'avait pas examiné le projet litigieux et a indiqué que les normes VSS ne représentaient que des recommandations. Concernant la visibilité par rapport aux piétons sur le trottoir celles-ci prévoyaient qu'il devait y avoir une visibilité depuis 3 m à l'intérieur de la propriété sur 15 m à gauche et 15 m à droite sur le trottoir.

Le représentant de la DGT a précisé que si cette recommandation était suivie à Genève, peu de constructions pourraient être autorisées. Dans la pratique, il était exigé que le conducteur puisse voir si des piétons arrivaient sur le trottoir avant de le traverser. Dans le projet litigieux, il y avait une zone herbeuse avant le trottoir qui permettait une visibilité suffisante pour le conducteur du véhicule qui sortait de la propriété. Depuis septembre 2017, la DGT et les communes de Lancy et Onex avaient engagé des discussions en vue d'améliorer la sécurité du périmètre chemin de Pierre-Longue, contre-route et route du Grand-Lancy. Plusieurs séances avaient eu lieu, la dernière le 13 mars 2018. Il avait été convenu que la commune de Lancy dépose un plan pour avis à la DGT qui pourrait prévoir une limitation de vitesse à 30 km/h sur la contre-route et un sens unique limité direction Onex, avant le chemin de Pierre-Longue. Ce projet d'amélioration n'était pas lié au projet de construction litigieux. Le projet ne prévoyait pas de portail, ce qui améliorait la visibilité et il avait été exigé qu'il soit possible de sortir en marche-avant de la propriété et qu'une aire de manoeuvre soit prévue sur la parcelle. La construction présentait une amélioration par rapport à la situation actuelle. Actuellement, des véhicules étaient parqués le long de la contre-route du côté de la parcelle litigieuse et l'armoire Swisscom cachait la vue. L'ouverture avait été faite en vue de la construction et remplaçait un mur le long duquel les véhicules parqués empêchaient les piétons de passer, ce qui les obligeait à marcher sur la route.

Les participants se sont accordés sur la distance de 93 m entre la parcelle du recourant et celle concernée par le projet de construction ainsi que sur le fait qu'aucune signalisation n'interdisait de rouler dans les deux sens sur la
contre-route.

Le recourant a fait remarquer qu'un conducteur venant depuis la Ville de Genève n'aurait pas une meilleure visibilité par rapport à la contre-route après le déplacement de l'armoire Swisscom. Le représentant de la DGT a précisé que dans ce cas, un conducteur sortant de la propriété n'avait pas la priorité et devait être attentif. Le recourant passait à cet endroit tous les jours avec sa famille et il n'y avait pas de vue sur la route du Grand-Lancy, les voitures passaient dans les deux sens et il n'y avait pas de limitation de vitesse. La sortie de véhicules depuis la propriété de l'intimé poserait un risque névralgique pour les piétons, en ce sens que c'était à cet endroit précis que les voitures sortiraient, que d'autres pourraient sortir de la contre-route en direction de la route du Grand-Lancy et d'autres entrer de la route du Grand-Lancy sur la contre-route. L'aménagement piétonnier proposé par le projet n'y changeait rien en ce sens qu'il serait principalement une sortie de parcelle et non un véritable trottoir.

18) Le 28 mai 2018, le département a déposé la norme VSS 640 273a portant sur les conditions de visibilité dans les carrefours à niveau.

19) Le 25 mai 2018, le département a renoncé à formuler des observations.

20) Le 28 mai 2018, M. KALI a renoncé à formuler des observations.

21) Le 6 juin 2018, le recourant a réitéré sa demande de faire procéder à une expertise. Il était constant que la sécurité en termes de circulation sur la
contre-route n'était pas garantie. Aucune mesure n'avait été prévue pour assurer la sécurité de la circulation durant la réalisation du chantier si par impossible l'autorisation devait être délivrée.

22) Le 28 juin 2018, le département s'est opposé à la demande d'expertise.

23) Le 6 juillet 2018, le recourant a déposé des observations après enquêtes, persistant dans ses conclusions.

Par courrier du 26 avril 2018 reçu de la commune de Lancy, il avait été informé que la dangerosité des cheminements piétonniers dans le secteur du chemin de Pierre-Longue avait été identifiée et que des mesures étaient à l'étude. Un cheminement piétonnier provisoire en raison d'un chantier avait été mis en place, lequel était impraticable en raison de la présence de poubelles et de la croissance de la végétation.

Il disposait d'un intérêt personnel se distinguant de l'intérêt général du fait qu'il se trouvait dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation qui se distinguait de l'intérêt général.

L'accroissement des nuisances résultait du débouché d'un garage de huit places à un point particulièrement critique. Vu l'absence d'accès à la contre-route de cette parcelle jusqu'ici, les autorités avaient été d'avis que cet accès ne répondait pas aux exigences de sécurité. Les immissions provenant de l'ouvrage projeté étaient clairement discernables par rapport aux immissions générales. Il avait intérêt à l'annulation de l'autorisation litigieuse pour ces raisons. Le dossier d'autorisation était incomplet car il ne contenait pas un plan de circulation répondant aux exigences légales.

24) Le 13 juillet 2018, M. KALI a déposé des observations, persistant dans ses conclusions au rejet du recours.

Le recourant n'avait avancé aucun élément pour rendre vraisemblable qu'il serait concrètement touché par le projet litigieux dans une mesure supérieure aux autres résidents du quartier.

La réalisation du projet litigieux consacrait en réalité une nette amélioration de la situation existante. Tant l'aménagement du projet litigieux que la sortie de la parcelle avaient été étudiés afin de permettre les meilleures conditions de sécurité possible. Le terrain serait aplani afin de créer une esplanade sur toute la longueur le long de la contre-route. À l'est, le mur de soutènement existant serait reculé par rapport à la limite de propriété à l'intérieur de la parcelle afin d'offrir une vue plus dégagée et des plantes basses y seraient plantées.

25) Le 16 juillet 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 137 II 266 consid. 3.2). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d'obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige
(ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 138 IV 81 consid. 2.2).

En l'espèce, la chambre administrative renonce, par une appréciation anticipée des preuves, à procéder à la mesure d'instruction demandée par le recourant. La chambre de céans a procédé à un transport sur place et a entendu un témoin, expert en sécurité routière et le dossier contient tous les éléments pertinents et utiles pour statuer, notamment une expertise produite par le recourant concernant la sécurité routière du quartier.

3) Le jugement du TAPI ayant déclaré irrecevable le recours contre l'autorisation de construire délivrée le 3 avril 2017 par le département à l'intimé, le litige devant la chambre de céans porte sur la question de la recevabilité dudit recours.

4) a. À teneur de l'art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/661/2018 du 26 juin 2018
consid. 3a ; ATA/1218/2015 du 10 novembre 2015). La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/799/2018 du 7 août 2018 consid. 2a et l'arrêt cité ;Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 184 n. 698).

b. Cette notion de l'intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l'art. 103 let. a de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (OJ - RS 173.110) et qui était, jusqu'à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l'art. 98a de la même loi. Elle correspond aux critères exposés à l'art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110) que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d'unité de la procédure qui figure à l'art. 111 al. 1 LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1 p. 45-46 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2018 du 10 juillet 2018 consid. 4.1 ; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 pp. 4126 ss et 4146 ss). Selon l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué
(let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c).

  c. En ce qui concerne les voisins, seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis (ATF 133 II 409 consid. 1 p. 411 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse (ATF 137 II 30 consid. 2.2 p. 32 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_822/2013 du 4 janvier 2014 consid. 2.2 ; ATA/659/2018 du 26 juin 2018 consid. 4 ; concernant une personne qui va devenir voisine de la construction litigieuse : ATA/450/2008 du
2 septembre 2008 ; Laurent PFEIFFER, La qualité pour recourir en droit de l'aménagement du territoire et de l'environnement, 2013, p. 92). Outre les propriétaires voisins, les propriétaires par étage, les superficiaires, les locataires et les preneurs à ferme sont susceptibles de remplir cette condition (arrêt du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 1.2 ; ATA/205/2015 du 24 février 2015 ; Heinz AEMISEGGER/Stephan HAAG, Commentaire pratique de la protection juridique en matière d'aménagement du territoire, 2010, p. 53 n. 60 ad art. 33 LAT). La qualité pour recourir peut être donnée en l'absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l'immeuble des recourants de l'installation litigieuse (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 p. 33 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_346/2011 du 1er février 2012 publié in DEP 2012 p. 692 consid. 2.3 ; ATA/220/2013 du 9 avril 2013). La proximité avec l'objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de l'arrêt contesté qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 137 II 30 consid. 2 p. 32 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_343/2014 du 21 juillet 2014 consid. 2.2 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, op. cit., p. 196 n. 744 ; Laurent PFEIFFER, op. cit, p. 93). L'absence de voisin direct susceptible de s'opposer à une décision ne justifie pas, en soi, d'élargir le cercle des personnes admises à recourir à tout propriétaire, sans égard à leur situation particulière par rapport au projet litigieux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_822/2013 du 10 janvier 2014 consid. 2.3).

d. S'il est certain ou très vraisemblable que l'installation litigieuse serait à l'origine d'immissions - bruit, poussières, vibrations, lumières ou autres - touchant spécialement les voisins, même situés à quelque distance, ces derniers peuvent avoir qualité pour recourir (ATF 140 II 214 consid. 2.3 p. 219-220 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2018 du 10 juillet 2018 consid. 4.1 ; ATA/450/2016 précité). Il importe peu, alors, que le nombre de personnes touchées soit considérable - dans le cas d'un aéroport ou d'un stand de tir, par exemple
(ATF 124 II 293 consid. 3a p. 303-304 publié in RDAF 1999 I p. 624). Il en va de même quand l'exploitation de l'installation comporte un certain risque qui, s'il se réalisait, provoquerait des atteintes dans un large rayon géographique, dans le cas d'une centrale nucléaire ou d'une usine chimique, par exemple (ATF 120 Ib 379 consid. 4d/e p. 388-389 ; RDAF 2007 I p. 426 = DEP 2006 p. 904).

Les immissions ou les risques justifiant l'intervention d'un cercle élargi de personnes doivent présenter un certain degré d'évidence, sous peine d'admettre l'action populaire que la loi a précisément voulu exclure. Il en va ainsi des riverains d'un aéroport, situés dans le prolongement de la piste de décollage, des voisins d'un stand de tir (cf. arrêts précités) ou des propriétaires ou locataires de parcelles exposées aux émissions d'une installation de téléphonie mobile, si celles-ci sont situées dans un certain périmètre (arrêt du Tribunal fédéral 1A.62/2001 du 24 octobre 2001 consid. 1b : qualité pour agir reconnue à une personne habitant à 280 m de l'installation, mais pas admise à 800 m). Lorsque la charge est déjà importante, la construction projetée doit impliquer une augmentation sensible des nuisances. Ainsi en va-t-il particulièrement en milieu urbain où la définition du cercle des personnes touchées plus que n'importe quel habitant d'une agglomération n'est pas une chose aisée (arrêt du Tribunal fédéral 1A.47/2002 du 16 avril 2002 consid. 3.5 ; ATA/251/2018 du 20 mars 2018 consid. 2c).

Ainsi, il n'y a pas d'intérêt pratique au recours si la vraisemblance que le recourant subisse un préjudice n'est pas avérée ou hautement improbable (ATF 121 II 39 consid. 2c ;  Laurent PFEIFFER, op. cit., p. 65).

e. En l'espèce, le recourant allègue un danger accru pour les piétons et les autres usagers empruntant la contre-route passant devant la parcelle sur laquelle la construction litigieuse est projetée.

Or, même s'il fallait admettre que le recourant soit touché plus que les autres usagers de la contre-route ou les autres habitants du quartier, ce qui n'est pas prouvé, les pièces figurant au dossier, notamment le photomontage de la construction et de ses abords, les plans, les constatations faites lors du transport sur place, les témoignages recueillis ainsi que le rapport d'expertise produit par le recourant lui-même, indiquent une situation pour les usagers qui ne sera pas péjorée par la construction autorisée, voire même améliorée sous certains aspects.

En effet, bien qu'à ce jour, la sortie de véhicules sur la contre-route, à la hauteur de la parcelle litigieuse, n'existe pas, l'obstacle à la visibilité que constitue l'armoire Swisscom pour les véhicules s'engageant sur la contre-route depuis la route du Grand-Lancy sera déplacée à l'intérieur de la parcelle litigieuse ; le terrain devant la construction sera aplani, formant une esplanade à la sortie du garage, avant la traversée du trottoir bordant la contre-route qui sera construit ; l'entrée sera dépourvue de portail afin de limiter la perte de visibilité et un mur de soutènement sera déplacé afin d'augmenter celle-ci. Finalement, des murs qui bordent actuellement la contre-route et contre lesquels des véhicules stationnent, empêchant le cheminement, seront enlevés, diminuant de fait les obstacles pour les piétons.

À cela s'ajoute que concernant la situation dangereuse des routes du quartier, en général, qui n'est pas contestée, le rapport d'expert remis par le recourant lui-même n'identifie pas les endroits les plus problématiques le long de la contre-route mais le long du chemin de Pierre-Longue et au carrefour de celui-ci avec la contre-route. En outre, des mesures sont en cours d'adoption, comme le confirme le courrier du maire de la commune de Lancy du 26 avril 2018 au recourant, indiquant celles envisagées pour réduire la dangerosité, non seulement sur la contre-route mais également sur le chemin de Pierre-Longue. S'agissant d'ailleurs des mesures étudiées pour la contre-route, celles-ci rejoignent partiellement celles déjà prévues par le projet contesté, soit le recul de la végétation et la construction d'un trottoir franchissable devant un garage.

En conséquence, il appert que la source des griefs du recourant ne relèvent pas de la construction prévue mais d'une situation préexistante et partiellement également d'une situation provisoire liée à un chantier en cours sur les parcelles avoisinantes. Il échoue ainsi à démontrer qu'il subirait un préjudice particulier lié à l'autorisation délivrée et qu'il aurait un intérêt personnel pratique qui se distinguerait nettement de l'intérêt général au recours.

C'est donc à juste titre que le TAPI a jugé son recours contre l'autorisation de construire irrecevable et son recours devant la chambre de céans sera rejeté.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- comprenant les frais de témoin de CHF 742.15, sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à M. KALI, à la charge du recourant (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 décembre 2017 par Monsieur Éric MAUGUÉ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 novembre 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- comprenant les frais de témoins de CHF 742.15, à la charge de Monsieur Éric MAUGUÉ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à Monsieur Taib KALI, à la charge de Monsieur Éric MAUGUÉ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Bruchez, avocat du recourant, à
Me Jean-Pierre Carera, avocat de Monsieur Taib KALI, au département du territoire - OAC, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance .

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :