Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/163/2016

ATA/1103/2017 du 18.07.2017 sur JTAPI/365/2016 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS ; RESSORTISSANT ÉTRANGER ; AUTORISATION D'ÉTABLISSEMENT ; PROCÉDURE PÉNALE ; CONDAMNATION ; RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL) ; ORDRE PUBLIC(EN GÉNÉRAL) ; RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS) ; RESPECT DE LA VIE FAMILIALE ; ENFANT ; PESÉE DES INTÉRÊTS
Normes : LPA.14; Cst.29.al2; CEDH.8; LEtr.62.al1.letb; LEtr.63.al2; LEtr.64.al1.letc; LEtr.83.al1; LEtr.83.al2; LEtr.83.al3; LEtr.83.al4
Résumé : Confirmation de la révocation du permis d'établissement d'un ressortissant tunisien âgé de 46 ans, arrivé en Suisse à l'âge de 25 ans, en raison des infractions pénales commises (18 condamnations, soit plus de 27 mois de PPL et 325 jours-amendes). Proportionnalité de la mesure confirmée dès lors qu'un risque de récidive apparaît hautement probable, que l'intégration professionnelle n'est pas bonne (pas de travail, dettes et dépendance à l'aide sociale) et que sa réintégration dans son pays d'origine n'est pas impossible. S'il entretient une relation affective étroite avec sa fille cadette mineure, il n'y a pas de lien particulièrement fort du point de vue économique puisqu'il ne verse pas une contribution pour son entretien. Renvoi possible, licite et exigible.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/163/2016-PE ATA/1103/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2017

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Imed Abdelli, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ ET DE L'ÉCONOMIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
12 avril 2016 (JTAPI/365/2016)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1971 à Kairouan (Tunisie), est ressortissant tunisien.

2) Le 30 juillet 1996, il a épousé, à Kairouan, Madame B______, ressortissante suisse née le ______ 1961.

Deux filles, nées à Genève, sont issues de cette union : Madame C______ , née le ______ 1998, et D______, née le ______ 2001.

3) M. A______ est arrivé en Suisse le 26 décembre 1996, après avoir obtenu un visa délivré par l'ambassade de Suisse en Tunisie.

Il a obtenu une autorisation de séjour à titre de regroupement familial avec son épouse le 20 janvier 1997.

4) À compter de février 1997, M. A______ a été engagé par la société E______ pour effectuer des missions temporaires, notamment dans l’hôtellerie, ainsi qu’en tant que manœuvre, manutentionnaire ou nettoyeur.

5) Le 28 février 2002, il a été mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement dans le canton de Genève, dont le délai de contrôle actuel échoit le 25 décembre 2017.

6) À teneur du registre cantonal de la population du canton de Genève, les époux A______ se sont séparés le 15 décembre 2004.

7) Depuis son arrivée en Suisse, M. A______ a fait l’objet de nombreuses condamnations pénales, à savoir :

- le 23 février 2000, par le Procureur général du canton de Genève
(ci-après : le Procureur général), à une peine privative de liberté de vingt jours et à une amende de CHF 1'000.-, pour violation des règles de la circulation routière et conduite en état d’ébriété ;

- le 10 avril 2001, par le Tribunal de police du canton de Genève
(ci-après : le Tribunal de police), à une peine privative de liberté de trois mois, avec sursis de quatre ans, pour violation des règles de la circulation routière, opposition à une prise de sang et circulation malgré un retrait ou refus du permis de conduire ;

- le 4 février 2003, par le juge d’instruction du canton de Genève
(ci-après : le juge d'instruction), à une peine privative de liberté de trente jours et à une amende de CHF 300.-, pour violation des règles de la circulation routière, conduite en état d’ébriété et opposition à une prise de sang ;

- le 30 octobre 2006, par le Tribunal de police, à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis de cinq ans, pour lésions corporelles simples
(à l’encontre de son conjoint durant le mariage ou dans l’année qui a suivi la séparation), vol, appropriation illégitime, dommages à la propriété, lésions corporelles simples, utilisation frauduleuse d’un ordinateur, tentative de violation de domicile et tentative de vol ;

- le 13 juillet 2007, par le Procureur général, à une peine privative de liberté de dix jours, sans révocation du sursis de cinq ans, pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) ;

- le 18 novembre 2008, par le juge d’instruction, à une peine pécuniaire de trente jours-amende à CHF 30.-, avec sursis pendant deux ans, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, dommages à la propriété et contravention à la LStup ;

- le 4 mai 2009, par le Procureur général, à une peine pécuniaire de
quatre-vingt jours-amende à CHF 30.-, avec sursis pendant trois ans, et à une amende de CHF 600.- pour violation des règles de la circulation routière, opposition ou dérobade aux mesures visant à l’incapacité de conduire sans permis de conduire ou malgré un retrait ;

- le 5 mars 2010, par le juge d’instruction, à une peine privative de liberté de six mois, avec sursis pendant trois ans, pour dommage à la propriété, violation de domicile, menaces (envers son conjoint durant le mariage ou dans l’année qui a suivi la séparation), contrainte, opposition aux actes de l’autorité et violation du devoir d’assistance ou d’éducation ;

- le 15 novembre 2012, par le Ministère public du canton de Genève
(ci-après : le Ministère public), à une peine pécuniaire de quinze jours-amende à
CHF 30.-, et à une amende de CHF 550.-, pour incapacité de conduire
(taux d’alcoolémie qualifié) et pour violation des obligations en cas d’accident et violation des règles de la circulation routière ;

- le 15 janvier 2013, par le Ministère public, à une peine pécuniaire de trente jours-amende à CHF 30.- et à une amende de CHF 700.-, pour incapacité de conduire (taux d’alcoolémie qualifié) et pour violation des règles de la circulation routière, violation des obligations en cas d’accident et contravention à l’ordonnance réglant l’admission des personnes et véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51) ;

- le 25 février 2013, par le Ministère public, à une peine pécuniaire de nonante jours-amende de CHF 30.- et à une amende de CHF 500.-, pour incapacité de conduire (taux d’alcoolémie qualifié) et contravention à la LStup ;

- le 9 janvier 2014, par le Ministère public, à une peine privative de liberté de quarante jours et à une amende de CHF 400.-, pour infractions à la LStup et à la loi sur les armes du 20 juin 1997 (LArm - RS 514.54) ;

- le 4 février 2014, par le Ministère public, à une peine privative de liberté de quarante jours et à une amende de CHF 100.-, pour violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires et infraction à la LStup ;

- le 20 mars 2014, par le Ministère public de l’arrondissement de la Côte, à une peine pécuniaire de quarante jours-amende à CHF 30.-, pour conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis ;

- le 16 avril 2014, par le Ministère public du canton de Fribourg, à une peine pécuniaire de quarante jours-amende à CHF 30.- et à une amende de CHF 600.-, pour mise à disposition d'un véhicule sans permis de circulation et non couvert par une assurance responsabilité civile, usage abusif de plaques et contravention à l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du
13 novembre 1962 (OCR - 741.11) ;

- le 10 février 2015, par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, à une peine privative de liberté de cinq mois, pour complicité de vol et circulation malgré le retrait du permis de conduire ;

- le 11 février 2015, par le Ministère public, à une peine privative de liberté de trente jours, pour lésions corporelles simples et menaces sur le conjoint durant le mariage ou l’année qui a suivi le divorce.

8) Le 24 mars 2000, l’office cantonal de la population, devenu depuis lors l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), a indiqué à M. A______ qu'il avait été informé de l'ordonnance de condamnation rendu à son encontre le 23 février 2000 et qu’il ne tolèrerait plus une telle conduite de la part d’une personne bénéficiant de l’hospitalité de la Suisse. Des sanctions administratives sévères pouvaient être prononcées à son égard en cas de récidive.

9) Le 2 août 2000, l’OCPM a indiqué à M. A______ avoir appris son interpellation en lien avec plusieurs infractions à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01). Ce courrier devait être considéré comme un ultime avertissement. Toute plainte fondée de la part des autorités amènerait à revoir le bien fondé de sa présence sur le territoire.

10) Par lettre recommandée du 12 février 2013, l’OCPM a adressé un nouvel avertissement à M. A______. Il avait déjà été condamné à réitérées reprises et avait bénéficié, depuis le 1er décembre 2005, de prestations financières de l’Hospice général (ci-après : l'hospice) s’élevant jusqu’alors à un total de
CHF 160'405.25. En cas de commission de nouvelles infractions, son permis d’établissement pouvait être révoqué.

11) À teneur d'un extrait des poursuites du 19 décembre 2014, M. A______ avait des dettes à hauteur de CHF 83'892.45.

12) Selon une attestation de l'hospice du 7 janvier 2015, M. A______ a été au bénéfice de prestations financières du 1er décembre 2005 au 30 septembre 2008 et à nouveau à compter du 1er janvier 2010. Il a notamment perçu des prestations financières s'élevant à CHF 24'208.- en 2010, CHF 38'212.85 en 2011,
CHF 35'186.30 en 2012, CHF 44'947.- en 2013 et CHF 19'953.- en 2014.

13) Par courrier recommandé du 3 septembre 2015, l’OCPM a informé
M. A______ de son intention de proposer au département de la sécurité et de l’économie (ci-après : DSE) la révocation de son autorisation d’établissement.

Il avait fait l’objet de sept nouvelles condamnations pénales depuis sa lettre d’avertissement du 12 février 2013. La poursuite de son séjour en Suisse représentait une menace importante et constante pour l’ordre et la sécurité publics suisses. De plus, il bénéficiait encore de prestations financières de l'hospice.

Un délai de trente jours lui était imparti pour produire ses observations et objections éventuelles.

14) Par lettre manuscrite du 4 septembre 2015, M. A______ a expliqué qu’il n’était pas quelqu’un de dangereux et qu'il avait de bonnes relations avec une administration genevoise. Il avait également conduit des voitures malgré le retrait de son permis, mais contestait plusieurs faits pour lesquels il avait été condamné. La prison l’avait « fait bien réfléchir » au bien-être de ses enfants. Dès sa sortie de prison, il chercherait un emploi et changerait de vie. Il était désolé des actes qu’il avait commis et demandait pardon.

15) Par courriers des 18 septembre 2015 et 9 octobre 2015, l'OCPM a sollicité des informations auprès de Mme B______ concernant la relation qu'entretenait son époux avec leurs filles.

16) Par courrier du 10 novembre 2015, Mme B______ a indiqué que ses filles voyaient leur père à l'extérieur, trois à quatre fois par semaine, par exemple au restaurant. Lorsqu'il recevait son salaire, il donnait un peu d'argent de poche à ses filles.

17) Par décision du 27 novembre 2015, le DSE a révoqué l’autorisation d’établissement de M. A______, a prononcé son renvoi de Suisse et l'a invité à quitter la Suisse d'ici au 15 janvier 2016.

Il avait été condamné à plusieurs reprises à des peines privatives de liberté totalisant vingt-et-un mois. La fréquence et la répétition des infractions pénales commises depuis 2006 étaient particulièrement inquiétantes et démontraient un profond mépris pour l’ordre juridique suisse. Il représentait une menace actuelle pour l’ordre et la sécurité publics suisse.

En outre, rien dans le dossier ne permettait de retenir qu’il entretenait des contacts fréquents et réguliers avec ses enfants et qu’il était capable de subvenir financièrement à leurs besoins. Compte tenu de l’absence d’intégration sociale et professionnelle, l’intérêt public à son éloignement apparaissait prépondérant et l’emportait sur son intérêt privé à poursuivre son séjour en Suisse. Les modalités relatives à l’exercice d’un éventuel droit de visite pouvaient être aisément aménagées depuis la Tunisie.

18) Par acte du 15 janvier 2016, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant préalablement à son audition et à celle de témoins et, principalement, « sous suite de frais et de dépens », à l’annulation de la décision entreprise.

Il vivait séparé de son épouse depuis 2009 et entretenait avec ses deux filles une relation forte et régulière. Il avait commencé à travailler seulement deux mois après son arrivé en Suisse et avait été occupé professionnellement pendant une longue période. Durant son incarcération aux établissements de Bellechasse, il avait suivi une formation pratique de cinquante jours en lien avec le soin aux animaux.

Le DSE avait constaté les faits de manière inexacte en ne tenant pas compte de la lettre de son épouse du 10 novembre 2015, mentionnant qu’il voyait ses filles trois à quatre fois par semaine et qu’elles recevaient un peu d’argent de poche quand il recevait son salaire. Il fallait également prendre en considération sa bonne entente avec une administration genevoise, l’observation de cures de désintoxication, son comportement correct durant de longues années et son long parcours professionnel en Suisse.

L’intimé avait également abusé de son pouvoir d’appréciation en estimant que la préservation de la sécurité nationale et de l’ordre public devait prévaloir sur son droit au respect de sa vie de famille, en particulier de son droit d’entretenir des relations personnelles avec ses deux filles.

Le DSE n’avait pas non plus pris en considération sa réelle prise de conscience, qui laissait « entrevoir un espoir concret et tangible d’amélioration » manifestée sur plusieurs plans (observation de cures de désintoxication, comportement correct durant de longues périodes, etc.).

En outre, après avoir passé plus de dix-neuf ans en Suisse et y avoir établi des attaches solides (maîtrise parfaite du français, réseau social solide, volonté de participer à la vie économique), son renvoi et sa réintégration dans son pays d’origine étaient impossibles. Sa relation avec sa famille en Tunisie était très tendue et sa bonne entente avec une administration genevoise lui causerait des problèmes en cas de renvoi. Enfin, la situation actuelle instable de ce pays ne pouvait pas lui offrir de perspectives de travail et lui assurer une « vie décente », compte tenu de son âge et de ses problèmes de santé.

La décision attaquée était arbitraire tant dans sa démarche que dans son résultat. Son dossier se résumait à un ensemble de condamnations pénales, sans prendre en considération sa bonne entente avec une administration genevoise. Sous l’angle de la proportionnalité, le DSE aurait pu lui adresser un avertissement en premier lieu.

Étaient notamment joints au recours diverses attestations de personnes proches, témoignant de son caractère sociable et respectueux, ainsi qu’une attestation du 18 décembre 2015 d'un collaborateur d'une administration genevoise confirmant les bons rapports qu'il entretenait avec celle-ci.

19) Dans ses observations du 11 mars 2016, le DSE a conclu au rejet du recours, reprenant l'argumentation de sa décision du 27 novembre 2015.

S’agissant de son droit au respect de la vie de famille de l'intéressé, sa fille aînée était majeure, de sorte que seule la relation avec sa fille cadette de quinze ans était susceptible d’être protégée. Or, bien qu’une relation effective et étroite existe entre eux, il ne lui versait pas de contribution d’entretien lui permettant de se prévaloir d’une relation économique étroite. En outre, le comportement de
M. A______ n’était pas « irréprochable » au sens de la jurisprudence du Tribunal fédéral. Au surplus, un droit de visite pouvait être aménagé en conséquence.

Par ailleurs, la longueur de son séjour en Suisse et sa bonne entente avec une administration genevoise ne suffisaient pas à contrebalancer l’intérêt public à son renvoi. Ses dernières condamnations étaient récentes et un risque de récidive était avéré.

Enfin, son intégration professionnelle n’était pas non plus exemplaire et sa situation économique était pour le moins précaire.

20) Par jugement du 12 avril 2016, le TAPI a rejeté le recours.

Il n'y avait pas lieu de donner suite à la demande de l'intéressé tendant à son audition, dans la mesure où le dossier contenait les éléments suffisants et nécessaires pour statuer immédiatement sur le litige.

M. A______ avait fait l’objet, depuis 2000, de dix-sept condamnations pénales. La réitération des infractions commises ainsi que son refus de tenir compte des trois avertissements signifiés par l'OCPM démontraient qu’il ne pouvait ou ne voulait pas respecter l’ordre juridique suisse. La condition d’atteinte très grave à l’ordre public était réalisée.

Âgé de quarante-cinq ans, M. A______ résidait en Suisse depuis presque vingt ans. Depuis l’année 2000, il n’avait cessé d’occuper la police par ses nombreuses infractions à la LCR, à la LStup, à la LArm et au code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Il avait ainsi été condamné à dix-sept reprises, soit un cumul de peines d’emprisonnement de plus de vingt-sept mois. Aucun élément concret ne laissant entrevoir une amélioration de son comportement et on ne pouvait reprocher à l’OCPM de ne pas lui avoir adressé un dernier avertissement. Un risque de récidive existait dès lors que ses nombreuses infractions témoignaient d’une absence de prise de conscience et d’une incapacité à évoluer positivement selon les règles de l’ordre juridique suisse.

Sur le plan professionnel et financier, M. A______ se trouvait dans une situation précaire, dès lors qu’il n’avait aucune formation particulière, qu’il n’occupait pas d’emploi durable et qu’il n’avait pas de revenu régulier. Depuis 2005, il percevait une aide financière de l’hospice dont le total dépassait
CHF 200'000.-. La durée de son séjour en Suisse, les attestations de tiers relevant son caractère sociable et respectueux, ainsi que sa bonne entente avec une administration genevoise n’apparaissaient pas suffisants au point de contrebalancer l’atteinte qu’il avait portée à l’ordre et à la sécurité publics.

Par ailleurs, il ne pouvait se prévaloir de son droit à la protection de la vie familiale pour demeurer auprès de ses filles, dont l’une était majeure et l’autre âgée de quinze ans. Ces dernières vivaient avec leur mère, qui assurait leur entretien, et ne se trouvaient pas dans un rapport de dépendance particulier avec leur père. Elles pourraient rencontrer ce dernier en Suisse ou ailleurs et garder le contact grâce aux moyens de communication existants.

Sa réintégration dans son pays d’origine n’apparaissait pas insurmontable, dès lors qu’il y avait passé les vingt-cinq premières années de son existence, qu’il en connaissait parfaitement les us et coutumes et que sa famille y résidait. Il ne pouvait de toute manière pas se prévaloir d’une intégration professionnelle réussie en presque vingt ans passés à Genève. Les rapports tendus qu’il alléguait avec sa famille en Tunisie et les ressentiments de certaines personnes vivant là-bas n'étaient pas suffisants pour influer sur la décision litigieuse.

Enfin, le dossier ne faisait pas apparaître que le renvoi de l'intéressé vers la Tunisie se révélerait impossible, illicite ou inexigible.

21) Par acte du 13 mai 2016, M. A______ a recouru contre le jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) concluant, « avec suite de frais et dépens », à son annulation et à l'annulation de la décision du DSE du 27 novembre 2015. À titre préalable, il devait être dit que le recours avait effet suspensif et ordonné la production du dossier du DSE ainsi que son audition et celle de témoins.

Le TAPI avait violé son droit d'être entendu en refusant d'auditionner ses filles, son épouse et l'auteur de l'attestation du 18 décembre 2015 produite à l'appui de son recours. Le TAPI avait également apprécié de manière arbitraire les faits, notamment s'agissant de la relation qu'il déployait avec ses filles, en minimisant sa prise de conscience sur ses erreurs passées et en n'instruisant pas la question de l'exigibilité du renvoi. Le TAPI s'était focalisé uniquement sur son dossier pénal pour rendre son jugement.

Les infractions qu'il avait commises n'étaient pas d'une gravité pouvant justifier son renvoi. Sur dix-sept infractions, onze avaient donné lieu à des peines égales ou inférieures à quarante jours. Son comportement délictueux était plus dicté par des circonstances (alcool, drogue, problèmes de santé, séparation) que par un simple mépris de la loi.

Sous l'angle de la proportionnalité de la révocation, il fallait retenir que les infractions de lésions corporelles simples étaient intervenues dans un contexte d'adultère, lors de crises conjugales graves, et étaient anciennes. Les infractions à la LStup ne visaient pas un trafic de grande envergure, susceptible de mettre la santé publique en danger, mais avait pour but de lui procurer les moyens nécessaires à sa propre consommation. Il n'avait plus récidivé depuis ses cures de désintoxication. L'autorité avait d'ailleurs retenu à tort des infractions commises il y avait plus de dix ans. De plus, les avertissements qui lui avaient été adressés par l'OCPM étaient anciens. S'il ne contestait pas l'existence de dettes, rien ne prouvait qu'elles découlaient d'une faute qualifiée de sa part.

S'agissant de la relation qu'il entretenait avec ses filles, il ne faisait aucun doute qu'elle était étroite et effective. Il avait une réelle volonté de participer financièrement à l'entretien de ses enfants, ce qu'il ferait dès qu'il trouverait un emploi.

Enfin, un renvoi en Tunisie mettrait en péril sa situation personnelle et familiale. Il a repris l'argumentation déjà développée devant le TAPI s'agissant de ses chances de réintégration et du risque de torture en Tunisie.

22) Le 18 mai 2016, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

23) Le 26 mai 2016, le DSE a indiqué que le recours du 13 mai 2016 avait effet suspensif ex lege.

24) Dans ses observations au fond du 14 juin 2016, le DSE a conclu au rejet du recours, reprenant l'argumentation déjà développée dans sa décision du
27 novembre 2015 et dans ses observations devant le TAPI du 11 mars 2016.

25) Le 15 juillet 2016, M. A______ a sollicité l'audition par la chambre administrative de sa fille aînée ainsi que de l'auteur de l'attestation du
18 décembre 2015 qu'il avait produite avec son recours.

26) Lors de l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 4 octobre 2016, M. A______ a notamment indiqué qu'il voyait ses filles le mercredi après-midi, le dimanche ainsi que quatre à cinq autres fois par semaine. Ils allaient au restaurant ou se promenaient au parc. Il leur donnait des centaines de francs par mois pour qu'elles puissent acheter ce qu'elles voulaient, et ce grâce à ses économies ou à l'argent qu'il recevait de sa famille en Tunisie. Il avait arrêté la drogue et l'alcool depuis cinq à six ans. S'agissant de sa famille en Tunisie, il avait de bonnes relations avec elle. Concernant sa santé, tout allait bien depuis un an et demi. En revanche, la révocation de son permis d'établissement l'angoissait et il était suivi par des psychiatres qui lui donnaient des médicaments. Son état psychique le conduisait parfois à être claustrophobe, désagréable avec les gens et à s'isoler. Entre le mois de novembre 2015 et de novembre 2016, il avait bénéficié du soutien du service de probation qui lui avait permis de travailler chez F______ à G______. Il s'agissait d'un contrat temporaire. Il avait l'espoir d'être engagé de manière fixe par H______, pour qui il avait déjà travaillé sur appel. Il souhaitait travailler.

Lors de son audition, Mme C______ a indiqué qu'auparavant elle voyait son père le mercredi et parfois durant le week-end. Désormais, elle le voyait plus souvent, environ deux à trois fois par semaine. Sa sœur le voyait en revanche moins souvent. Elle était très attachée à lui, tout comme sa sœur, et ne souhaitait pas qu'il quitte la Suisse. Sa mère réglait directement avec son père la question de l'argent relatif à leur entretien. Ce dernier ne donnait pas toujours les mêmes montants chaque mois, mais entre CHF 500.- et CHF 1'000.-. Parfois, il leur donnait également directement une certaine somme, par exemple CHF 100.-. Depuis qu'elle avait douze ans, leur père s'intéressait beaucoup plus à elle et sa sœur. Elle était très attachée à la famille de son père qui vivait en Tunisie, avec laquelle elle avait des contacts souvent par téléphone et internet. Elle se rendait, jusqu'à deux ans auparavant, chaque année en Tunisie avec sa mère pour une à trois semaines. Elle savait que son père avait de bons contacts avec sa famille vivant en Tunisie, en particulier avec sa mère, ses deux sœurs, son frère, ses neveux et ses nièces. Elle ne savait pas s'il avait gardé contact avec son frère vivant à Genève.

Le DSE a produit lors de l'audience une copie de l'ordonnance pénale du
17 avril 2015 dorénavant exécutoire, rendue par le Ministère public, condamnant M. A______ à une peine privative de liberté de trente jours et à une amende de CHF 100.-, pour contravention et délit à la LStup, pour avoir vendu, le 16 avril 2015, 8 gr de haschich et détenu 11,4 gr de la même substance.

27) Le 5 octobre 2016, la chambre administrative a informé les parties qu'elle n'entendait pas procéder à l'audition d'autres témoins et qu'un délai leur était imparti au 7 novembre 2016 pour produire d'éventuelles observations finales.

28) Le 27 octobre 2016, l'OCPM a transmis plusieurs documents relatifs à l'arrestation de M. A______, survenue le 20 octobre 2016, à savoir un rapport d'arrestation et un procès-verbal d'audition établis par la police ainsi qu'un avis de maintien en arrestation provisoire, tous datés du 20 octobre 2016.

M. A______ était prévenu de vol, dommage à la propriété, utilisation frauduleuse d'un ordinateur et infractions à la LStup. Selon ses déclarations à la police, il avait reconnu être en possession de trois sachets contenant un total de 22,1 gr de cocaïne mais n'avait pas ou partiellement reconnu les autres faits qui lui étaient reprochés.

29) Dans ses observations finales du 1er novembre 2016, le DSE a conclu à nouveau au rejet du recours.

30) Dans ses observations finales du 12 décembre 2016, M. A______ a persisté dans ses conclusions, sollicitant toutefois un délai supplémentaire pour produire son dossier médical et la suspension de la cause jusqu'à droit connu sur l'affaire pénale en cours.

31) Par courrier du 16 janvier 2017, le DSE a indiqué qu'il s'opposait à la demande de suspension de la présente procédure jusqu'à droit connu dans l'affaire pénale en cours.

Le passé pénal de M. A______ était déjà suffisamment éloquent, raison pour laquelle son autorisation d'établissement avait été révoquée et son renvoi prononcé.

32) Le 6 mars 2017, M. A______ a indiqué qu'il n'avait reçu que des réponses partielles s'agissant de son état de santé suite aux demandes qu'il avait formulées auprès des médecins l'ayant traité.

Il avait bénéficié, durant son incarcération à Champ-Dollon, d'un suivi régulier par un psychiatre. Il n'avait plus consommé de cocaïne depuis trois ans. Lors de sa dernière incarcération, il avait souffert d'une dégradation importante de sa santé ayant conduit à une longue hospitalisation. Dorénavant, il était obligé de prendre des somnifères pour dormir. S'agissant de la procédure pénale actuellement en cours, il n'avait pas encore été condamné pour cette affaire et bénéficiait de la présomption d'innocence. Il avait depuis lors été libéré dans l'attente de la suite de l'instruction pénale.

Étaient jointes diverses pièces, soit notamment :

- un rapport du service de médecine pénitentiaire des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 14 février 2017 à teneur duquel M. A______ présentait, sur le plan psychiatrique, un trouble anxieux généralisé avec auto- et hétéro-agressivité dans le contexte d'un trouble de l'adaptation associé à des idées suicidaires récurrentes. Il avait, pour ces raisons, bénéficié d'un suivi régulier lors de son incarcération. Sur le plan hématologique, il présentait une anémie par carence en acide folique. Sur le plan infectieux, il avait développé des plaies au niveau des membres inférieurs qui s'étaient surinfectées. Cela avait conduit à un traitement antibiotique et un séjour hospitalier du 10 au 17 novembre 2016, sans complication majeure. Il s'était également plaint de douleurs retrosternales. Sur le plan addictologique, il était connu pour tabagisme chronique et pour une dépendance à la cocaïne qu'il ne disait plus consommer depuis trois ans ;

- un certificat médical du centre médico-chirurgical du 29 avril 2016 établissant que M. A______, suivi depuis le 18 avril 2016, nécessitait un suivi médical de six mois, sauf complications, lequel n'avait pas pu commencer en raison de son état psychologique. Le certificat ne mentionnait pas les raisons nécessitant un traitement médical ;

- différents compte-rendus et lettres de sortie des HUG des 2 juillet, 7 juillet et 11 juillet 2014 relatifs à des brûlures des deuxième et troisième degrés du bras droit de M. A______.

33) Le 14 mars 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

34) Le 28 mars 2017, M. A______ a produit un certificat médical des HUG du 23 mars 2017 selon lequel il avait été suivi, entre février 2010 et janvier 2016, notamment pour une chéloïde au bras droit, une sécheresse cutanée au niveau des cuisses, une anémie causée par une carence en acide folique, une anxiété généralisée, des douleurs lombaires chroniques, une lésion méniscale interne et une allergie aux pénicillines.

35) Le 16 mai 2017, l'OCPM a transmis des pièces complémentaires concernant M. A______, à savoir un rapport d'arrestation et un procès-verbal d'audition établis par la police le 4 mai 2017 ainsi qu'un avis de mise en liberté sur arrestation provisoire daté du 5 mai 2017.

Il était reproché à M. A______ d'avoir détenu 20,4 gr de haschich et d'avoir vendu 2,5 gr de la même substance à un toxicomane.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant demande la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur les actuelles procédures pénales ouvertes à son encontre.

a. Lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA).

b. L’art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu’une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/206/2015 du 24 février 2015 consid. 2c). La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d’une autre autorité serait utile à l’autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend (ATA/630/2008 du 16 décembre 2008 consid. 5). Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l’autorité saisie n’ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d’une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l’interdiction du déni de justice formel fondée sur l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) d’attendre la décision d’une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d’autres motifs (ATA/26/2017 du 17 janvier 2017 consid. 2b).

c. En l'espèce, l'issue des procédures pénales ouvertes à l'encontre du recourant est sans incidence sur la présente procédure compte tenu, notamment, du passé pénal de celui-ci.

Dès lors, la demande de suspension de procédure sera rejetée.

3) Le recourant sollicite, à titre préalable, son audition, ainsi que celle de sa fille aînée et de l'auteur de l'attestation du 18 décembre 2015 qu'il avait produite à l'appui de son recours.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_588/2014 du 22 juin 2015 consid. 2.1 ; ATA/219/2017 du 21 février 2017 consid. 2b). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_119/2015 du 16 juin 2015 consid. 2.1).

b. En l'espèce, la chambre administrative a procédé à l'audition du recourant et de sa fille aînée. S'agissant de l'audition de l'auteur de l'attestation du 18 décembre 2015, la chambre administrative considère qu'elle n'amènerait pas d’éléments pertinents supplémentaires dans le cadre du présent litige. En effet, ce qui résulterait de cette audition serait sans incidence sur le bien-fondé de la révocation de son permis d'établissement, comme il sera exposé ci-après. La chambre administrative dispose ainsi des éléments nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause.

4) Le recourant se plaint d'une violation du droit d'être entendu commise par le TAPI, dans la mesure où ce dernier a renoncé à procéder aux auditions qu'il avait sollicitées.

a. La violation du droit d’être entendu est réparable devant l’instance de recours si celle-ci jouit du même pouvoir d’examen des questions litigieuses que l’autorité intimée, et si l’examen de ces questions ne relève pas de l’opportunité, car l’autorité de recours ne peut alors substituer son pouvoir d’examen à celui de l’autorité de première instance (ATF 138 I 97 consid. 4.1.6.1 ; 137 I 195
consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.30/2003 du 2 juin 2003 consid. 2.4 ; ATA/993/2016 du 22 novembre 2016 consid. 2d et les références citées).

b. En l’espèce, la chambre administrative – qui dispose du même pouvoir de cognition que le TAPI – a entendu le recourant et sa fille, comme il l’avait requis. Dans ces circonstances, l’éventuelle violation de son droit d'être entendu par le TAPI relative à ces auditions a ainsi été réparée dans le cadre de la présente procédure. S'agissant de l'audition de l'auteur de l'attestation du 18 décembre 2015, celle-ci n'apparaît pas utile pour les raisons déjà exposées ci-dessus. Le TAPI n’a ainsi pas violé son droit d’être entendu en ne procédant pas à ladite audition.

5) L'objet du litige porte sur le bien-fondé de la révocation de l'autorisation d'établissement du recourant.

6) a. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, la chambre administrative n’a pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée
(art. 61 al. 2 LPA), sauf s’il s’agit d’une mesure de contrainte prévue par le droit des étrangers (art. 10 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), hypothèse non réalisée en l’espèce. Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/10/2017 du 10 janvier 2017 consid. 3a).

b. Au cours de la procédure de recours, il n'est tenu compte des faits nouveaux que si la juridiction y est en général autorisée, si la décision ne sort ses effets que dès la date de la décision sur recours et si l'économie de procédure l'impose (Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., 1991, p. 434 n. 2105). Le rôle de l'autorité de recours consiste non seulement à contrôler la solution qui a été adoptée, mais aussi à imposer celle qui est propre à mettre fin à la contestation (ATF 98 Ib 178 ; 92 I 327 ; 89 I 337). Or, en faisant abstraction des faits survenus après la décision attaquée, l'autorité de recours ouvrirait la porte à de nouvelles procédures et risquerait donc de laisser subsister le litige, sans contribuer toujours utilement à le trancher (André GRISEL, Traité de droit administratif, vol. II, 1984, p. 932). Statuant sur les recours de droit administratif, le Tribunal fédéral prend en compte les faits nouveaux notamment dans le domaine de la police des étrangers (ATF 105 Ib 165 consid. 6b ; 105 Ib 163).

À plusieurs reprises, la chambre de céans a tenu compte, d'office ou sur requête, de faits qui s'étaient produits après que la décision de première instance eut été rendue (ATA/286/2017 du 14 mars 2017 consid. 3b ; ATA/10/2017 précité consid. 3b ; ATA/504/2016 du 14 juin 2016 consid. 3b ; ATA/189/2011 du 22 mars 2011 consid. 7b).

7) a. Aux termes de l’art. 63 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers du
16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), l’autorisation d’établissement d’un étranger qui séjourne légalement et sans interruption depuis plus de quinze ans en Suisse ne peut être révoquée que s’il attente de manière très grave à la sécurité et l’ordre publics en Suisse ou à l’étranger, les met en danger ou représente une menace pour la sécurité intérieure ou extérieure de la Suisse
(art. 63 al. 1 let. b LEtr) ou s’il a été condamné à une peine privative de liberté de longue durée ou a fait l’objet d’une mesure pénale prévue aux
art. 59 à 61 ou 64 CP (art. 62 al. 1 let. b LEtr). La réalisation de l’un de ces deux motifs suffit au prononcé de la révocation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_204/2012 du 25 septembre 2012 consid. 2.2 ; 2C_750/2011 du 10 mai 2012 consid. 3.1).

b. Quand le refus d'octroyer une autorisation de séjour ainsi que la révocation d’une autorisation d’établissement se fondent sur la commission d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le premier critère servant à évaluer la gravité de la faute et à procéder à la pesée des intérêts en présence (arrêts du Tribunal fédéral 2C_139/2013 du 11 juin 2013 consid. 7.1 ; 2C_148/2010 du 11 octobre 2010 consid. 4.1 ; 2C_418/2009 du 30 novembre 2009 ; 2C_464/2009 du 21 octobre 2009 consid. 5 ; ATA/384/2016 du 3 mai 2016 consid. 4c).

Il y a atteinte très grave à la sécurité et l'ordre publics au sens de l’art. 63 al. 1 let. b LEtr lorsque, par son comportement, l'étranger a lésé ou menacé des biens juridiques particulièrement importants, tels l'intégrité physique, psychique ou sexuelle (ATF 139 I 16 consid. 2.1 ; 137 II 297 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_200/2013 du 16 juillet 2013 consid. 3.1 ; ATA/384/2016 précité consid. 4b).

Les infractions à la LStup constituent également une atteinte grave à l'ordre et à la sécurité publics, au vu des ravages de la drogue dans la population, spécialement auprès des jeunes et des personnes socialement fragilisées. C'est pourquoi il se justifie de se montrer particulièrement rigoureux à l'égard des personnes ayant commis des crimes ou des délits graves en matière de trafic de drogue (ATF 139 II 121 consid. 5.3 ; 137 II 297 consid. 3.3 ; 125 II 521
consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_516/2012 du 17 octobre 2012 consid. 2.2 ; 2C_655/2011 du 7 février 2012 consid. 9.2), surtout s’ils ne sont pas eux-mêmes consommateurs mais agissent par pur appât du gain (arrêt du Tribunal fédéral 2C_139/2013 du 11 juin 2013 consid. 7.2). Il existe donc un intérêt public et prépondérant à renvoyer de Suisse les étrangers qui ont commis des infractions à la législation fédérale sur les stupéfiants d'une certaine gravité (ATF 139 I 145 consid. 2.5 ; 125 II 521 consid. 4a ; 122 II 433 consid. 2c). Aussi, seules des circonstances exceptionnelles permettent de faire pencher la balance en faveur de l'étranger en cause (arrêts du Tribunal fédéral 2C_19/2011 du 27 septembre 2011 consid. 4.1 ; 2A.267/2005 du 14 juin 2005 consid. 2.2). Partant, les étrangers qui sont mêlés au commerce des stupéfiants doivent s'attendre à faire l'objet d'une mesure d'éloignement (arrêts du Tribunal fédéral 2A.7/2004 du 2 août 2004 consid. 5.1 ; 2A.615/2002 du 21 avril 2004 consid. 4.4 ; ATA/384/2016 précité consid. 4c).

Le critère de la gravité qualifiée de l'atteinte peut également être réalisé par des actes contrevenant à des prescriptions légales ou à des décisions de l'autorité qui présentent un degré de gravité comparativement moins élevé, mais qui, par leur répétition malgré des avertissements et des condamnations successives, démontrent que l'étranger ne se laisse pas impressionner par les mesures de droit pénal et qu'il ne possède ni la volonté ni la capacité de respecter à l'avenir l'ordre juridique (ATF 137 II 297 consid. 3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_182/2017 du 30 mai 2017 consid. 6.2 ; 2C_127/2016 du 13 septembre 2016 consid. 4.2.1 ; 2C_881/2012 du 16 janvier 2013 consid. 4.3.1 ; FF 2002 3469 p. 3565 ss). En d'autres termes, des infractions qui, prises isolément, ne suffisent pas à justifier la révocation, peuvent, lorsqu'elles sont additionnées, satisfaire aux conditions de l'art. 63 al. 1 let. b LEtr (ATF 139 I 16 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_699/2014 du 1er décembre 2014 consid. 3.2 ; 2C_160/2013 du 15 novembre 2013 consid. 2.1.1). À cet égard, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de confirmer que le critère de la gravité pouvait être réalisé concernant la réitération d'infractions contre le patrimoine qui présentent un degré de gravité comparativement moins élevé, mais qui, par leur répétition, démontrent chez l'étranger une incapacité à se conformer à l'ordre établi (arrêt du Tribunal fédéral 2C_182/2017 précité consid. 6.2).

8) En l'espèce, M. A______ a été condamné à dix-huit reprises, sur une période de quinze ans (2000 à 2015), totalisant vingt-sept mois et vingt jours de peine privative de liberté, ainsi que trois-cents-vingt-cinq jours-amende. S'agissant des motifs des condamnations, dont certaines portent sur plusieurs biens juridiques protégés, dix se rapportent à des infractions à la LCR, cinq concernent des infractions à la LStup, quatre relèvent des infractions contre le patrimoine, trois concernent des infractions contre l'autorité publique, deux ont trait aux infractions contre la vie et l'intégrité corporelle (lésions corporelles simples), deux relèvent de crimes et délits contre la liberté, une relève de crime ou délit contre la famille et une concerne une infraction à la LArm. Ainsi, le recourant a, d'une part, lésé un bien juridique particulièrement important, soit l'intégrité physique. D'autre part, il a commis de nombreuses infractions à la LStup, ce qui constitue également une atteinte grave à l'ordre et à la sécurité publics. Enfin, s'agissant des autres infractions commises, si elles présentent comparativement un degré de gravité moins élevé que les infractions à la LStup, les actes de violence criminelle et les infractions contre l'intégrité sexuelle, leurs répétitions en l'espèce démontrent chez le recourant une incapacité à se conformer à l'ordre établi.

Par ses agissements, le recourant attente ainsi sans aucun doute de manière très grave à la sécurité et l’ordre publics en Suisse.

Dès lors, c'est conformément au droit que le DSE, confirmé en cela par le TAPI, a considéré que les conditions d'une révocation de l'autorisation d'établissement découlant de l'art. 63 al. 1 let. b LEtr, par renvoi de
l'art. 63 al. 2 LEtr, étaient remplies.

9) Même lorsqu'un motif de révocation de l'autorisation est réalisé, le prononcé de la révocation ne se justifie que si la pesée des intérêts à effectuer dans le cas d'espèce fait apparaître la mesure comme proportionnée aux circonstances
(ATF 135 II 377 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_19/2011 du
27 septembre 2011 consid. 4.1).

La question de la proportionnalité d'une révocation d'autorisation doit être tranchée au regard de toutes les circonstances du cas d'espèce, les critères déterminants se rapportant notamment à la gravité de l'infraction, à la culpabilité de l'auteur, au temps écoulé depuis l'infraction, au comportement de l'auteur pendant cette période, au degré de son intégration et à la durée de son séjour antérieur, ainsi qu'aux inconvénients qui le menacent, lui et sa famille, en cas de révocation (ATF 139 I 145 consid. 2.4 ; 139 I 31 consid. 2.3.1 ; 139 I 16
consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1103/2013 du 26 juillet 2014 ; ATA/968/2016 du 15 novembre 2016 consid. 9).

Lors d'infractions pénales graves, il existe, sous réserve de liens personnels ou familiaux prépondérants, un intérêt public digne de protection à mettre fin au séjour d'un étranger afin de préserver l'ordre public et à prévenir de nouveaux actes délictueux, le droit des étrangers n'exigeant pas que le public demeure exposé à un risque même faible de nouvelles atteintes à des biens juridiques importants (ATF 139 I 16 consid. 2.2.1 ; 139 I 31 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1103/2013 précité consid. 5.3).

La durée de présence en Suisse d'un étranger constitue un autre critère très important. Plus cette durée est longue, plus les conditions pour prononcer l'expulsion administrative doivent être appréciées restrictivement (ATF 135 II 377 consid. 4.4 et 4.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_94/2016 du 2 novembre 2016 ; 2C_789/2014 du 20 février 2015 consid. 5.3). La révocation de l'autorisation d'établissement d'un étranger qui séjourne depuis longtemps en Suisse doit se faire avec une retenue particulière, mais n'est pas exclue en cas d'infractions graves ou répétées même dans le cas d'un étranger né en Suisse et qui y a passé l'entier de sa vie (ACEDH Trabelsi c. Allemagne du 13 octobre 2011, req. 41548/06 ; ATF 139 I 31 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_459/2013 du 21 octobre 2013 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/10/2017 précité consid. 6a).

Le Tribunal fédéral a ainsi confirmé la révocation de l'autorisation d'établissement d'un ressortissant espagnol, arrivé en Suisse à l'âge de cinq ans et âgé de quarante-sept ans lors de la décision de révocation de son permis d'établissement, lequel avait été condamné à une unique peine privative de liberté de quatre ans pour trafic de drogue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_695/2016 du
1er décembre 2016). Le Tribunal fédéral a, par exemple, également confirmé la révocation du permis d'établissement d'un ressortissant portugais, né en Suisse, et ayant été condamné à sept reprises en sept ans pour de nombreuses infractions, comprenant des infractions contre l'intégrité corporelle (arrêt du Tribunal fédéral 2C_565/2013 du 6 décembre 2013), et d'un ressortissant chilien, né à Genève, condamné à plusieurs peines privatives de liberté dont la plus importante était de trente mois, alors qu'il avait été retenu que son intégration professionnelle était bonne (arrêt du Tribunal fédéral 2C_982/2015 du 20 juillet 2016).

10) Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950
(CEDH - RS 0.101) pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Pour qu'il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, l'étranger doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 137 I 284 consid. 1.3 ; ATA/424/2017 du 11 avril 2017 consid. 11).

Les relations visées par l’art. 8 § 1 CEDH sont avant tout celles qui existent entre époux ainsi que les relations entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 127 II 60 consid. 1d/aa ; 120 Ib 257 consid. 1d ; ATA/519/2017 du 9 mai 2017 consid. 10c). La relation entre les parents et les enfants majeurs qui vivent encore au domicile peut être couverte par
l'art. 8 CEDH, notamment lorsqu'ils n'ont pas encore vingt-cinq ans et n'ont pas eux-mêmes de conjoint ou d'enfants (ACEDH Bousarra c. France du 23 septembre 2010, req. 25672/07, § 38-39 ; A.A. c. Royaume-Uni du 20 septembre 2011,
req. 8000/08, § 48-49 ; ATA/513/2017 du 9 mai 2017 consid. 7a). S’agissant d’autres relations entre proches parents, la protection de l’art. 8 § 1 CEDH suppose qu’un lien de dépendance particulier lie l’étranger majeur qui requiert la délivrance de l’autorisation de séjour et le parent ayant le droit de résider en Suisse en raison, par exemple, d’un handicap - physique ou mental - ou d’une maladie grave. Tel est le cas en présence d’un besoin d’une attention et de soins que seuls les proches parents sont en mesure de prodiguer. Cette règle vaut sans conteste lorsque la personne dépendante est l’étranger qui invoque l’art. 8 CEDH (ATF 129 II 11 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_537/2012 du 8 juin 2012 consid. 3.2 ; 2D_139/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.3 ; ATA/1087/2016 du
20 décembre 2016).

Selon la jurisprudence, un étranger disposant d'un droit de visite sur son enfant mineur habilité à résider en Suisse peut en principe exercer ce droit même s'il vit à l'étranger, au besoin en aménageant ses modalités quant à la fréquence et à la durée (ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.2). En effet, le droit de visite d'un parent sur son enfant ne doit pas nécessairement s'exercer à un rythme bimensuel et peut également être organisé de manière à être compatible avec des séjours dans des pays différents (ATF 140 I 145 consid. 3.2 et la référence citée). Un droit plus étendu ne peut le cas échéant exister qu'en présence de liens familiaux particulièrement forts d'un point de vue affectif et économique et lorsque, en raison de la distance qui sépare le pays de résidence de l'enfant du pays d'origine de son parent, cette relation ne pourrait pratiquement pas être maintenue (ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.2). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'existence du lien affectif particulièrement fort doit être considérée comme remplie lorsque les contacts personnels sont effectivement exercés dans le cadre d'un droit de visite usuel selon les standards d'aujourd'hui, lorsque l'étranger détient déjà un droit de séjour en Suisse (ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 4.2). En outre, les autres conditions d'une prolongation de l'autorisation doivent être remplies également. Le parent étranger doit ainsi entretenir une relation économique particulièrement forte avec son enfant et avoir fait preuve en Suisse d'un comportement irréprochable (ATF 139 I 315 consid. 2.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1153/2013 du 10 juillet 2014 consid. 2.2 ; 2C_117/2014 du 27 juin 2014 consid. 4.1.2 ; 2C_318/2013 du 5 septembre 2013 consid. 3.3.2).

11) En l'espèce, le recourant est arrivé en Suisse en 1996 à l'âge de vingt-cinq ans. Aujourd'hui âgé de quarante-six ans, il réside sur le territoire helvétique depuis vingt et un ans. Depuis l'an deux mille, la vie du recourant est rythmée par les condamnations pénales, puisqu'il a déjà été condamné à dix-huit reprises, la dernière condamnation remontant au 17 avril 2015, pour des violations du CP, de la LCR, de la LStup ainsi que de la LArm, ce qui dénote clairement une incapacité à se conformer à l'ordre juridique suisse. Les différents avertissements adressés au recourant par l'OCPM en date des 24 mars 2000, 2 août 2000 et 12 février 2013, tout comme sa responsabilité de père de famille, n'ont aucunement dissuadé ce dernier à poursuivre ses activités délictuelles. Par ailleurs, contrairement à ce qu'il fait valoir, rien au dossier ne laisse à supposer une réelle prise de conscience de sa part quant à l'inadmissibilité de son comportement. Compte tenu de son passé pénal, le risque de récidive dans la commission de nouvelles infractions apparaît ainsi hautement probable. Ce constat est renforcé par les deux procédures pénales ouvertes à son encontre en 2016, respectivement 2017, pour détention et vente de stupéfiants, vol, dommage à la propriété et utilisation frauduleuse d'un ordinateur. Enfin, sa bonne entente avec une administration genevoise, laquelle ressort notamment de l'attestation susmentionnée du 18 décembre 2015 et n'est au demeurant pas contestée, n'est pas de nature à contrebalancer ce qui précède puisqu'il n'a pour sa part pas lui-même cessé ses activités délictuelles.

S'agissant de son intégration professionnelle, celle-ci ne peut être qualifiée de bonne, bien qu'il vive en Suisse depuis plus de vingt ans. S'il a effectivement commencé à travailler rapidement après son arrivé en Suisse, il apparaît qu'il a bénéficié de prestations financières du 1er décembre 2005 au 30 septembre 2008 et à nouveau à compter du 1er janvier 2010. Ainsi, entre 2010 et 2014, il a perçu CHF 162'507.15 de prestations de l'hospice, en sus des prestations perçues entre 2005 et 2008. Il a par ailleurs accumulé, à teneur d'une attestation de l'office des poursuites du 19 décembre 2014, des dettes à hauteur de CHF 83'892.45. À l'exception d'un emploi temporaire, intervenu selon ses dires entre les mois de novembre 2015 et de novembre 2016, et d'une formation de cinquante jours survenues pendant sa détention aux établissements de Bellechasse, il apparaît que le recourant n'a eu aucune activité professionnelle depuis plus de dix ans. Par ailleurs, nonobstant les lettres de soutien produites, le recourant n'établit pas l'existence de liens sociaux spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire.

Sur le plan familial, le recourant est séparé de son épouse depuis plusieurs années déjà. La décision de révocation du permis d'établissement ne remet aucunement en question le droit de ses filles de résider en Suisse, seul le recourant étant concerné par la mesure d’éloignement. Sa fille aînée est actuellement âgée de dix-neuf ans, ne vit pas avec lui et ne se trouve dans aucun rapport de dépendance, de sorte qu'il ne peut se prévaloir de la protection de
l'art. 8 CEDH à son égard. Sa fille cadette, D______, est en revanche mineure et âgée actuellement de seize ans. Il ressort du dossier que le recourant entretient effectivement une relation affective étroite avec celle-ci. En revanche, il ne présente pas un lien familial particulièrement fort d'un point de vue économique avec elle. S'il ressort des déclarations concomitantes des époux A______ et de leur fille aînée que le recourant verse de l'argent de poche à ses filles quand il le peut, il ne ressort pas des déclarations de Mme B______ que celui-ci verserait une pension alimentaire pour l'entretien de D______. Il n'a versé d'ailleurs aucune pièce au dossier permettant d'attester d'éventuels versements. Si Mme C______ a effectivement indiqué que son père versait entre CHF 500.- à
CHF 1'000.- par mois, elle a également indiqué que sa mère et son père réglaient entre eux la question de l'argent relatif à leur entretien. Il est d'ailleurs assez improbable que le recourant puisse verser les montants cités par sa fille au vu de sa situation financière. Par ailleurs, comme déjà mentionné, le recourant n'a clairement pas fait l'objet d'un comportement irréprochable en Suisse. Enfin, les rapports personnels qu’il entretient avec D______ pourraient perdurer grâce aux moyens de télécommunication usuels (téléphone, internet) et lors de visites durant les vacances scolaires qui pourraient s'effectuer en Suisse ou à l'étranger.

S'agissant de sa réintégration dans son pays d'origine, son long séjour en Suisse rend un départ certes difficile, mais la Tunisie n'est pas un pays qui lui est étranger, dans la mesure où il y a vécu jusqu'à ses vingt-cinq ans. Contrairement à ses premières déclarations, sur lesquelles il est revenu par la suite, et conformément au témoignage de sa fille aînée, il apparaît qu'il entretient de bons rapports avec sa famille vivant en Tunisie, en particulier avec sa mère, ses deux sœurs, son frère, ses neveux et ses nièces. Si son intégration professionnelle en Tunisie ne serait certainement pas exempte de difficultés, on ne voit pas qu'elle serait radicalement plus difficile qu'en Suisse. De plus, il pourrait bénéficier du soutien moral et financier de sa famille, le recourant ayant notamment indiqué, lors de son audition par la chambre administrative, que cette dernière lui envoyait déjà de l'argent.

12) Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’autorité intimée était fondée à révoquer l’autorisation d’établissement du recourant en application de
l’art. 63 al. 2 LEtr. C'est ainsi à raison que le TAPI a confirmé ladite révocation.

13) Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi d’un étranger ne peut être ordonné que si l’exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEtr). L'exécution du renvoi n’est pas possible lorsque l’intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEtr). Elle n’est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse
(art. 83 al. 3 LEtr). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr). Cette disposition s’applique en premier lieu aux réfugiés dits « de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu’ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile et de violence généralisée, et ensuite aux personnes pour qui un retour reviendrait à les exposer à un danger concret, notamment parce qu’elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu’elles seraient objectivement, au regard des circonstances d’espèce et selon toute probabilité, conduites irrémédiablement à un dénuement complet, exposées à la famine et ainsi à une dégradation grave de leur état de santé, à l’invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d’emplois et de moyens de formation ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-374/2014 du 2 mars 2016 consid. 6.4 ; D-5434/2009 du 4 février 2013 consid. 15.1 ; E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid 6.1 ; ATA/189/2016 du 1er mars 2016).

Par rapport aux problèmes de santé, l'exécution du renvoi ne devient inexigible qu'à partir du moment où, en raison de l'absence de possibilités de traitement dans le pays d'origine, l'état de santé de la personne concernée se dégraderait très rapidement, au point de conduire, d'une manière certaine, à la mise en danger concrète de l'intégrité physique ou psychique. En revanche,
l'art. 83 al. 4 LEtr ne saurait faire échec à une décision de renvoi au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical prévalant en Suisse correspondent à un standard élevé non accessible dans le pays d'origine ou le pays tiers de résidence. Cela dit, il sied de préciser que si, dans un cas d'espèce, l'état de santé ne constitue pas en soi un motif d'inexigibilité sur la base des critères qui précèdent, il peut demeurer un élément d'appréciation dont il convient alors de tenir compte dans le cadre de la pondération de l'ensemble des éléments ayant trait à l'examen de l'exécution du renvoi (arrêt du TAF E-255/2014 du 15 juillet 2014 consid. 4.2 ; E-6800/2006 du 28 avril 2008 consid. 3.2).

En l’espèce, aucune pièce au dossier ne fait état d’une impossibilité de renvoyer le recourant. Il ressort des pièces produites par celui-ci qu'il a fait l'objet d'un suivi médical, ces dernières années, pour des brûlures survenues en 2014, une anémie liée à une carence d'acide folique, une sécheresse cutanée au niveau des cuisses, des douleurs lombaires chroniques, une lésion méniscale interne, une allergie ainsi qu'une anxiété généralisée. Ces différents maux ne sauraient être considérés comme relevant d'une sérieuse atteinte à la santé nécessitant des soins indisponibles en Tunisie. En outre, malgré ses allégations et sans autre élément de preuve, rien ne laisse à penser que l'intégrité physique du recourant serait réellement et concrètement compromise en cas d’exécution du renvoi en Tunisie. Dès lors, c'est à bon droit que son renvoi a été prononcé et que l'exécution de son renvoi a été ordonnée.

14) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

15) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 mai 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 avril 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Imed Abdelli, avocat du recourant, au département de la sécurité et de l'économie, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Balzli

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.