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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/961/2015

ATA/1012/2015 du 29.09.2015 ( TAXIS ) , REJETE

Descripteurs : TAXI ; CHAUFFEUR ; DEVOIR PROFESSIONNEL ; AMENDE ; FIXATION DE L'AMENDE ; PROPORTIONNALITÉ
Normes : LTaxis.1 ; LTaxis.23 ; LTaxis.39.al1 ; LTaxis.45.al1 ; LTaxis.48.al1 ; RTaxis.47.al1 ; RTaxis.74.al3
Résumé : Recours d'un chauffeur de taxi contre une décision du SCOM lui infligeant, après avoir obtenu le préavis de la commission de discipline instaurée par la LTaxis, une amende administrative de CHF 400.- pour refus de course. La chambre administrative confirme l'amende et valide la procédure de consultation de ladite commission telle qu'elle a été mise en place.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/961/2015-TAXIS ATA/1012/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 septembre 2015

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Roger Mock, avocat

contre

SERVICE DU COMMERCE

 



EN FAIT

1) Monsieur A______ exploite, en qualité d’indépendant, un taxi de service public immatriculé GE 1______.

2) Le 8 juillet 2014, le service du commerce (ci-après : SCOM) a reçu une dénonciation de Monsieur B______ à l’encontre de M. A______.

Celui-là était conducteur du taxi immatriculé GE 2______. Il avait beaucoup hésité avant de se décider d’informer le SCOM d’un problème survenu à l’aéroport la nuit du 2 juillet 2014 à 24h00. À cette date, trois touristes avaient demandé à M. A______ de les emmener à l’hôtel Phoenix à l’avenue Louis-Casaï. Celui-ci avait refusé sèchement alors même qu’il n’y avait aucun moyen de transport, compte tenu de l’heure tardive, et qu’il était le premier sur la ligne. M. B______ avait informé M. A______ de ce qu’il dénoncerait la situation au SCOM. M. B______ avait pris en charge les clients et souhaitait que les mesures nécessaires soient prises afin d’éviter qu’une telle situation ne se renouvelle.

3) Par courrier du 26 novembre 2014, le SCOM a invité M. A______ à lui communiquer ses observations sur les faits dénoncés.

4) Le 6 décembre 2014, l’intéressé a relevé qu’il convenait, avant de lui infliger une sanction, d’attendre que les faits soient avérés et prouvés. Il fallait vérifier que la dénonciation n’était pas calomnieuse. Il se souvenait avoir eu un échange verbal avec un collègue ce jour-là, qui lui reprochait un supposé refus de prendre en charge un client. Il avait pris la peine d’expliquer audit collègue que le client potentiel ne s’était pas présenté à lui pour demander le service de son taxi et qu’il ne lui avait même pas adressé la parole. Le dénonciateur était, en fait, à proximité de son propre taxi GE 2______, stationné plusieurs voitures derrière le véhicule GE 1______. Celui-là n’avait pas pu entendre. Le collègue était devenu insistant et s’était entêté à ne pas comprendre l’explication. M. A______ l’avait prié de cesser de perturber son travail. Le collègue était devenu agressif et irrespectueux. M. A______ lui avait signifié « de faire ce qu’il voulait et qu’il était manifestement dans l’erreur ».

M. A______ sollicitait les nom et prénom du dénonciateur afin de saisir la justice pour dénonciation calomnieuse.

5) Le 18 décembre 2014, le SCOM a transmis à M. A______ copie de la dénonciation de M. B______.

6) Par observations du 14 janvier 2015, M. A______ a relevé que le SCOM n’avait aucun élément prouvant les allégations de M. B______. Il s’agissait d’une dénonciation calomnieuse qui méritait une sanction. Une copie de ladite peine devait lui être envoyée. Si le SCOM n’était pas compétent pour prononcer une mesure administrative à l’encontre de M. B______, M. A______ tenait à en être informé afin de pouvoir saisir la justice.

7) Par courrier du 11 février 2015, le SCOM, sous la plume d’une juriste, a sollicité le préavis de la commission de discipline instaurée par la loi sur les taxis et limousines (transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles) du 21 janvier 2005 (LTaxis - H 1 30) entrée en vigueur le 15 mai 2005 (ci-après : la commission). La correspondance était adressée « p. a. SCOM ».

Sur le courrier, le SCOM a précisé six points, à savoir le destinataire de la décision, la catégorie de taxi (service public), l’immatriculation du véhicule (GE 1______), l’infraction reprochée (« le 2 juillet 2014, à 24h00, M. A______ a refusé de prendre en charge des clients qui voulaient se rendre à l’hôtel Phoenix suite à l’avenue Louis-Casaï depuis l’aéroport international de Genève »), les antécédents (« aucun »), ainsi que « Sanction/mesure envisagée : amende 400.-, art. 45 LTaxis ».

Était soulignée la phrase selon laquelle « Si la commission de discipline LTaxis devait donner un préavis défavorable sur la/les sanction(s)/mesure(s) mentionnée(s) ci-dessus, nous vous remercions de nous l’indiquer dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente. Passé ledit délai, une décision sera rendue par le SCOM, étant précisé qu’un silence de votre part équivaut à un préavis favorable ».

La correspondance a été transmise par courriel du mercredi 11 février 2015 à Monsieur C______, président de la commission.

8) Par courriel du 17 février 2015 à 19h11, M. C______ a indiqué que « faisant suite à votre courriel du 11 février 2015, la commission de discipline LTaxis vous informe qu’elle préavise favorablement la sanction que vous lui avez soumise au sens de l’art. 48 LTaxis. »

9) Par décision du 19 février 2015, le SCOM a infligé une amende administrative de CHF 400.- à M. A______.

Le dénonciateur avait clairement indiqué que, le 2 juillet 2014, il avait dû prendre en charge des clients qui voulaient se rendre à l’hôtel Phoenix depuis l’aéroport international de Genève en raison de son refus d’effectuer la course. Sa version des faits emportait leur conviction que son refus s’expliquait par le manque d’intérêt à effectuer une course d’un si court trajet. Il s’agissait d’un refus de course.

10) Par acte du 19 mars 2015, posté le lendemain, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée.

Il a conclu à l’annulation de celle-ci et à ce qu’il soit dit qu’aucune amende ne devait lui être notifiée. Les conclusions étaient prises sous suite de « frais et dépens ».

Le SCOM intervenait sur la base d’une dénonciation d’un collègue de travail. Celle-ci était totalement infondée et son caractère diffamatoire, voire calomnieux, ferait l’objet d’un examen plus approfondi à l’issue de la présente procédure. Le 2 juillet 2014, à minuit, il se trouvait à son domicile privé, dont l’adresse était mentionnée, à Onex, suite à son retour chez lui à 23h55 après l’exécution de sa dernière course de la journée, soit la prise en charge de clients à l’aéroport de Cointrin à 23h30 pour Chancy. Il produisait le disque établi le 20 (sic) juillet 2014 par le tachygraphe de son taxi. Ne bénéficiant pas du don d’ambiguïté (sic), il ne pouvait pas être chez lui le 2 juillet 2014 à 23h55 tout en se trouvant le même jour à 24h00 à l’aéroport de Cointrin.

11) Par observations du 27 avril 2015, le SCOM a conclu au rejet du recours.

L’autorité était convaincue du bien-fondé de la dénonciation en raison des déclarations divergentes et contradictoires du recourant. Il n’avait notamment pas réellement contesté les faits qui lui étaient reprochés. Après avoir admis qu’il se trouvait bien à l’aéroport au moment des faits litigieux, il avait subitement changé de version pour les besoins de la cause, produisant, en août 2014, une preuve non pertinente, étant donné que le disque tachygraphe ne permettait précisément pas de prouver la date à laquelle les mouvements avaient été enregistrés, puisque la date y était inscrite manuellement. Le recourant s’était contenté de déclarations générales, selon lesquelles les faits ne seraient prétendument pas admis et la dénonciation « calomnieuse ». Le SCOM n’était pas convaincu par les explications du recourant et avait acquis la conviction que les faits s’étaient bien déroulés conformément à la dénonciation. Le montant de l’amende était proportionné, ce d’autant plus que les refus de course à l’aéroport étaient fréquents. L’intéressé n’invoquait pas non plus de difficultés financières particulières l’empêchant de s’acquitter du montant litigieux.

Un délai au 29 mai 2015 a été accordé à M. A______ pour formuler toute requête complémentaire, voire exercer son droit à la réplique. Passé la date précitée et sans nouvelle de sa part, la cause serait gardée à juger en l’état du dossier.

12) M. A______ ne s’est pas manifesté.

13) Une audience de comparution personnelle des parties s’est tenue le 18 août 2015 à 10h00.

Par appel téléphonique du matin même au greffe de la chambre administrative, le conseil de M. A______ a informé la chambre de céans que ce dernier n’avait pas réagi à la convocation, vraisemblablement en vacances hors de Suisse avec sa famille. Il sollicitait une nouvelle audience.

Ni le recourant ni son conseil ne se sont présentés à l’audience. La représentante du SCOM a précisé que la procédure de préavis de la commission, telle que présentée dans le dossier de M. A______ était celle pratiquée habituellement entre le SCOM et la commission. Tous les préavis étaient adressés par courriel au président de la commission, qui répondait systématiquement. Le dossier « papier » relatif à l’infraction reprochée restait dans les locaux du SCOM. Elle n’avait jamais vu des membres de la commission venir consulter le dossier et le SCOM n’avait jamais eu, à sa connaissance, à envoyer à un des commissaires un dossier pour consultation. Le pouvoir d’appréciation de la sanction appartenant au SCOM, celui-ci estimait qu’il respectait la loi en formulant un préavis qui résumait brièvement les faits, mentionnait les antécédents et proposait une sanction. La commission n’était pas l’autorité qui devait statuer sur les faits et ne faisait que préaviser, sans lier le SCOM. Celui-ci devait donner suite tant aux rapports de police, qu’aux rapports des inspecteurs, voire aux dénonciations, ce qui devait représenter, de façon très approximative, plus de deux cents dossiers par an. Dans le cas de M. A______, l’amende proposée découlait d’un barème.

14) Conformément à la demande de la chambre administrative, le SCOM a précisé par courrier du 24 août 2015 que le barème d’amendes administratives en matière de LTaxis était déjà en possession de la chambre administrative, dans la mesure où il avait été transmis au président de celle-ci par courriel du 25 juin 2014. Ce barème, validé par la commission, était utilisé par le SCOM pour prononcer les sanctions jusqu’à l’arrêt de la chambre administrative du 29 juillet 2014 (ATA/572/2014) par lequel elle avait estimé que l’art. 74 al. 3 du règlement d’exécution de la loi sur les taxis et limousines (transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles) du 4 mai 2005 (RTaxis - H 1 30.01) était contraire au droit supérieur, soit à l’art. 48 LTaxis. Suite à cet arrêt, le SCOM avait mis en place la procédure de préavis telle que pratiquée dans le dossier de M. A______. Le barème en question n’avait pas été modifié depuis sa transmission à la chambre de céans. Il n’avait toutefois plus valeur de « préavis », au vu de la procédure de préavis mise en place et ne constituait rien de plus qu’un document interne au service, de sorte que le SCOM sollicitait de la chambre de céans qu’elle ne le produise pas au dossier.

15) a. En réponse à une correspondance de la juge déléguée du 19 août 2015, M.  C______ a transmis copie du procès-verbal de la séance du 14 novembre 2014 de la commission, au cours de laquelle celle-ci avait validé la procédure de consultation de ses membres par voie électronique, ainsi que copie du courriel sollicitant la commission à propos du projet de sanction de M. A______, qui n’avait pas suscité de réponse négative de la part de ses membres. Indépendamment des demandes de préavis adressées auxdits membres par voie électronique, la commission se réunissait physiquement trois à quatre fois par an pour passer en vue les thèmes tels que la nature et la fréquence des infractions constatées par le secteur inspectorat, les évolutions de la jurisprudence en matière de sanction, ainsi que l’état du contentieux juridique en cours.

b. Il ressortait du procès-verbal de la séance de la commission du 14 novembre 2014 que son président avait proposé de procéder, pour les prochaines demandes de préavis de la commission, de la façon suivante :

- envoi aux membres de la commission d’un courriel leur exposant le cas et la sanction à préaviser ;

- un délai de sept jours était imparti aux membres de la commission pour donner un préavis défavorable éventuel sur la qualité de la sanction prévue ;

- à l’échéance du délai, le président communiquerait le préavis au SCOM, étant précisé que le silence d’une majorité des membres de la commission équivalait à un préavis favorable ;

- en cas d’absence d’un des membres de la commission, un message d’absence devrait l’indiquer, afin qu’il puisse être contacté à son retour.

Le procès-verbal mentionnait que : « La commission de discipline valide la procédure proposée ci-dessus et accepte d’être saisie par e-mail, par le SCOM, pour donner son préavis avec entrée en vigueur immédiate ».

16) Copies des correspondances susmentionnées ont été communiquées aux parties. Celles-ci ont été informées, par courrier du 8 septembre 2015, que la cause serait gardée à juger, sauf éventuelles observations de leur part d’ici au 21 septembre 2015.

17) Aucune partie ne s’est manifestée.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La loi a pour objet d’assurer un exercice des professions de transport de personnes au moyen de voitures automobiles et une exploitation des services de taxis et de limousines conformes, notamment aux exigences de la sécurité publique, de la moralité publique, du respect de l’environnement et de la loyauté dans les transactions commerciales ainsi qu’aux règles relatives à l’utilisation du domaine public (art. 1 LTaxis).

3) Les taxis doivent accepter toutes les courses, quel que soit le lieu de prise en charge ou de destination dans le canton (art. 39 al. 1 LTaxis).

Lorsqu’ils sont en attente de clients dans une station de taxis, les chauffeurs de taxis sont tenus d’accepter toute course sollicitée directement par un client, quel que soit le lieu de destination dans le canton. Sont réservées les exceptions des al. 3 et 4, non pertinentes en l’espèce, et l’obligation de l’art. 23 al. 2 à l’aéroport (art. 47 al. 1 RTaxis).

Concernant plus spécifiquement l’aéroport, les chauffeurs qui accèdent à la station au niveau « Arrivées » s’engagent à accepter le paiement de la course soit par carte de crédit, soit en euros ou en dollars américains, et à se rendre à toute destination dans un rayon de 50 km (art. 23 al. 2 RTaxis). Les milieux professionnels s’organisent afin qu’un nombre suffisant de taxis se rendant à l’aéroport soient munis ou équipés d’un moyen d’encaissement par carte de crédit ou de paiement électronique (art. 23 al. 3 let. a RTaxis), de l’équipement nécessaire à desservir les stations de sports d’hiver (let. b), de sièges pour enfants (let. c). Si le service constate que les milieux professionnels ne sont pas suffisamment organisés pour offrir aux passagers de l'aéroport les prestations de l'al. 3 et que la prise en charge des clients est perturbée par des refus de course ou est difficile, il peut limiter l'accès à la station aux seuls exploitants de taxis répondant aux exigences de l'al. 3. Une carte permettant d'actionner une barrière leur est délivrée (art. 23 al. 4 RTaxis).

4) Le département de la sécurité et de l’économie (ci-après : le département), soit pour lui le SCOM à teneur de l’art. 1 al. 1 et 2 du RTaxis, peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 20'000.- à toute personne ayant enfreint les prescriptions de la LTaxis ou de ses dispositions d’exécution (art. 45 al. 1 LTaxis).

Une commission de discipline, formée des représentants des milieux professionnels, des organes de police et de la direction générale des véhicules, est appelée à donner son préavis sur les mesures et sanctions administratives prononcées par le département. Ses préavis ont valeur consultative et ne lient pas le département (art. 48 al. 1 LTaxis).

Selon l’art. 74 al. 3 RTaxis, pour les infractions impliquant des amendes en application de l'art. 45 de la LTaxis, le préavis de la commission peut être donné au service par la seule approbation d'un barème.

5) En l’espèce, dans sa réponse du 6 décembre 2014, le recourant n’a pas formellement contesté les faits. Il a fait état du litige qui l’avait opposé à son collègue, chacun campant sur ses positions. Il a contesté toute sanction au motif que les faits devaient être avérés et prouvés, envisageant que la dénonciation soit calomnieuse. Il ressort toutefois de sa correspondance qu’il ne conteste pas s’être trouvé à l’aéroport le 2 juillet 2014 à minuit, puisque ladite altercation avec le collègue s’y est déroulée.

Dans sa correspondance du 14 janvier 2015, une fois en possession des coordonnées du dénonciateur, il s’est limité à solliciter une sanction à l’égard de celui-ci.

Outre que le recourant a totalement modifié sa version des faits dans le cadre de son recours, dans lequel il allègue s’être trouvé à son domicile le 2 juillet 2014 à minuit, il ne produit aucune preuve ni n’offre la possibilité d’entendre d’éventuels témoins à même de confirmer ses dernières allégations. Il se limite à produire un disque tachygraphe, lequel doit être apprécié avec retenue. La date du 2 juillet 2014 y est mentionnée à la main. Les données qui s’y trouvent se limitent à minuit. Aucun autre tachygraphe n’est produit qui aurait permis de vérifier tout à la fois les questions de kilométrage ou l’emploi du temps de l’intéressé, les premières minutes du 3 juillet 2014. Par ailleurs, le disque tachygraphe produit permet de constater des déplacements jusque vers 23h55. Sur les dix déplacements relevés sur le disque, le plus court peut être évalué à plus de cinq minutes. Sous réserve d’un autre de quelques dix minutes, tous les autres sont supérieurs au quart d’heure et cinq déplacements sont supérieurs à trente minutes, allant même jusqu’à quarante-cinq minutes. Outre les éventuelles questions liées aux difficultés du trafic, les deux derniers déplacements, effectués entre 22h00 et 24h00 ont duré, respectivement plus de trente-cinq et trente minutes. Le transport litigieux consistait en un trajet de 300 m seulement. À ce titre, il se serait très largement distingué de la durée des trajets effectués pendant la journée, ce qui tend à confirmer la réalité des faits dénoncés.

De surcroît, le recourant n’a pas donné une suite à ce qu’il considère être une dénonciation calomnieuse.

Par conséquent, le refus de course apparaît établi à satisfaction de droit, compte tenu des éléments qui précèdent, principalement de la dénonciation, de la contradiction entre les versions alléguées par le recourant et par le fait que, dans un premier temps, il n’avait pas contesté être sur place. L’intéressé a en conséquence violé l’art. 39 al. 1 LTaxis.

6) En ce qui concerne la quotité de l’amende, qui n’est pas contestée par le recourant, elle se fonde sur l’art. 45 al. 1 LTaxis, qui prévoit une fourchette entre CHF 100.- et CHF 20'000.- pour les infractions à la LTaxis ou à ses dispositions d’exécution.

a. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut, au demeurant, aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/818/2013 du 17 décembre 2013 ; ATA/844/2012 du 18 décembre 2002 ; ATA/757/2011 du 13 décembre 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA/571/2010 du 31 août 2010 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2011, ch. 1.4.5.5 p. 160 s).

En vertu de l’art. 1 al. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 1 et 3 et 107 CP).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., 2010, n. 1179). Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/818/2013 précité ; ATA/844/2012 précité ; ATA/757/2011 du 13 décembre 2011 ; ATA/14/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA/571/2010 du 31 août 2010). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès (ATA/160/2009 du 31 mars 2009). Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) ; ATA/533/2010 du 4 août 2010 ; ATA/201/2010 du 23 mars 2010).

b. En plusieurs occasions déjà, la chambre de céans a mis en doute la légalité de l’art. 74 al. 3 RTaxis (ATA/348/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/235/2014 du 8 avril 2014 ; ATA/818/2013 du 17 décembre 2013 ; ATA/844/2012 du 17 avril 2012). Ces précédentes espèces concernaient des infractions à la LTaxis et au RTaxis susceptibles d'une amende et de mesures administratives selon le barème approuvé par la commission. Dans ces cas, le SCOM ne pouvait pas se passer du préavis de la commission pour statuer sur la/les infraction(s) reprochée(s) au chauffeur.

Dans une jurisprudence récente, la chambre administrative a finalement retenu que le SCOM ne pouvait pas prononcer de sanction administrative sans disposer du préavis de la commission, et cela même si l’infraction reprochée au chauffeur n'était passible, selon ledit barème, que d’une amende administrative, l’art. 74 al. 3 RTaxis étant dépourvu de base légale (ATA/582/2015 du 9 juin 2015 ; ATA/247/2015 du 3 mars 2015 ; ATA/997/2014 du 16 décembre 2014 consid. 5 ; ATA/572/2014 précité consid. 7).

En application de ces jurisprudences, le SCOM devait dès lors, et avant de statuer sur une infraction reprochée à un chauffeur, requérir le préavis de la commission, quelle que soit la sanction administrative envisagée (ATA/480/2015 du 19 mai 2015).

c. En l’espèce, l’intimé a produit le préavis de la commission. Celui-ci a cependant consisté uniquement dans l’acquiescement au projet de décision du SCOM. Il ressort toutefois de l’instruction du recours que la commission a dûment été consultée selon une procédure préalablement adoptée par celle-ci. S’il peut être regretté qu’apparemment les membres de cette commission se limitent à avaliser le préavis, concis, du SCOM, sans prendre connaissance du dossier, il n’en demeure pas moins qu’il est de la responsabilité desdits membres d’émettre un préavis conforme à la loi et à l’entier du dossier. L’avis consultatif de la commission précédant la prise de décision définitive par le SCOM, il répond à ce titre à la notion de préavis. La procédure mise en place est en conséquence conforme aux exigences légales et réglementaires.

Au vu de l’absence d’antécédents et de l’importance de veiller à un service de taxis de qualité, notamment aux abords de l’aéroport et pour de brefs trajets, le montant de l’amende fixé à CHF 400.- respecte le principe de la proportionnalité et n’excède pas le large pouvoir d’appréciation accordé au SCOM par la loi. Sur ce point, la décision de cette autorité doit également être confirmée.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision du SCOM confirmée.

7) Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 mars 2015 par Monsieur A______ contre la décision du service du commerce du 19 février 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Roger Mock, avocat du recourant, ainsi qu'au service du commerce.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :