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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/2589/2019

ACST/43/2019 du 20.12.2019 ( ABST ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.02.2020, 9C_107/2020
Recours TF déposé le 03.02.2020, rendu le 11.05.2022, ADMIS, 9C_107/2020
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2589/2019-ABST ACST/43/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 20 décembre 2019

 

dans la cause

 

A______
représenté par Mes Raphaël Jakob et Soile Santamaria, avocats

contre

GRAND CONSEIL

 


 


EN FAIT

1) A______ (ci-après : A______) est une fondation sans but lucratif, reconnue d'utilité publique du point de vue fiscal, avec siège à Genève, qui a pour but statutaire d'aider à façonner l'avenir des sciences de la vie par l'excellence en bioinformatique, soit l'étude, à l'aide de techniques informatiques, des composants du monde vivant et de leurs interactions, et englobe des activités de service et d'infrastructure, la recherche et la formation. Jusqu'au 31 décembre 2013, A______ était affilié, en tant qu'employeur externe, à la Caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (ci-après : CEH).

2) Le 1er janvier 2012 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP - RS 831.40) relative à l'organisation et au financement des institutions de prévoyance de corporations de droit public (ci-après : IPDP) qui a imposé à celles fonctionnant en capitalisation partielle de nouvelles règles en matière de financement afin qu'elles assurent à long terme leur équilibre financier, en tenant compte d'un objectif de taux de couverture de leurs engagements envers les rentiers et les assurés actifs d'au moins 80 % (art. 72a al. 1 let. c LPP), au plus tard le 1er janvier 2052 (let. c des dispositions transitoires ad art. 72a LPP). Un plan de financement devait garantir le maintien des taux de couverture au moins à leur valeur initiale, déterminable au plus tard le 1er janvier 2014 (let. a des dispositions transitoires ad art. 72a LPP) pour l'ensemble des engagements ainsi que les engagements envers les assurés actifs afin d'atteindre une capitalisation complète (art. 72 al. 1 let. b LPP).

3) a. Le 14 septembre 2012, le législateur genevois a adopté la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève (LCPEG - B 5 22), entrée en vigueur le 23 mars 2013, réglant la création et l'organisation de la Caisse de prévoyance de l'État de Genève (ci-après : CPEG), un établissement de droit public (art. 1 et 2 LCPEG) assurant le personnel de l'État de Genève ainsi que des autres employeurs affiliés contre les conséquences économiques de la retraite, de l'invalidité et du décès (art. 4 al. 1 LCPEG). Ses prestations, établies selon le principe de la primauté des prestations (art. 6 LCPEG), étaient garanties par l'État de Genève (art. 9 LCPEG). Elle fonctionnait en système de capitalisation partielle, avec l'approbation de l'autorité cantonale de surveillance des fondations et des institutions de prévoyance (ci-après : ASFIP ; art. 3 al. 1 et 25 al. 1 LCPEG). Elle était tenue d'assurer son équilibre financier à long terme, en tenant compte d'un objectif de taux de couverture de ses engagements à 80 % au 1er janvier 2052 et, dans ce cadre, de maintenir les taux de couverture acquis et de respecter les taux de couverture praescrits, à savoir un chemin de croissance lui permettant d'atteindre un taux de couverture d'au minimum 60 % au 1er janvier 2020, 63 % au 1er janvier 2025, 66 % au 1er janvier 2030, 69 % au 1er janvier 2035, 72 % au 1er janvier 2040 et 76 % au 1er janvier 2045 (art. 28 al. 1 et 28A LCPEG). En cas de déséquilibre financier structurel prévisible à long terme, attesté par un expert agréé en prévoyance professionnelle (ci-après : l'expert agréé), la CPEG devait en informer le Conseil d'État et l'ASFIP, et établir dans les meilleurs délais un rapport fixant le catalogue des mesures envisageables pour rétablir l'équilibre. Elle décidait des mesures à prendre pour rétablir l'équilibre à long terme (art. 28 al. 3 et 4 LCPEG).

À compter du 1er janvier 2014, la CPEG a absorbé, par succession universelle, la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (ci-après : CIA) et la CEH (art. 60 LCPEG). À l'occasion de cette fusion, un apport d'actifs à hauteur de CHF 800'000'000.- a été effectué en faveur de la CIA par les employeurs affiliés à la CIA, le solde étant à la charge de l'État (art. 66A al. 1 LCPEG). Au 1er janvier 2014, le degré de couverture de la CPEG était de 57,2 %.

b. Lors des travaux en commission des finances du Grand Conseil (ci-après : la commission) du projet de loi (ci-après : PL) 10847 ayant conduit à l'adoption de la LCPEG, la question de la liste des institutions affiliées à la CIA et amenées à participer à la recapitalisation a été discutée, une part d'appréciation politique dans la définition de leurs apports demeurant. La logique était de savoir si elles pouvaient payer et, si tel était le cas, à quelle hauteur (p. 164).

4) Le 18 mars 2014, avec effet au 1er janvier 2014, A______ a conclu avec la CPEG une convention d'affiliation qui prévoyait que leurs rapports juridiques étaient régis par la LPP, la LCPEG et divers règlements qui faisaient partie intégrante de la convention d'affiliation, le Grand Conseil et le Conseil d'État pouvant adopter, modifier et abroger unilatéralement les lois et règlements relevant de leurs compétences, lesquels faisaient foi en cas de contradiction (art. 2).

5) En janvier 2015, la Banque nationale suisse (ci-après : BNS) a introduit des taux d'intérêts négatifs, ce qui a eu des répercussions importantes sur l'ensemble des caisses de prévoyance et a particulièrement affecté celles qui étaient les plus faiblement capitalisées.

6) À la suite de baisses du taux d'intérêt technique, utilisé pour évaluer les engagements d'une caisse de pension, l'expert agréé a constaté, dans son rapport du 13 octobre 2016, que la CPEG ne serait pas en mesure, dans les dix ans, de respecter son chemin de croissance sans que des mesures structurelles importantes ne soient prises touchant aux prestations et/ou au financement.

7) Le 15 décembre 2016, alors que son taux de couverture était de 57,4 %, la CPEG a adopté une première mesure, avec entrée en vigueur au 1er janvier 2018, destinée à rétablir son équilibre financier à long terme et qui consistait à relever l'âge pivot de 64 à 65 ans, impliquant une réduction de 5 % des prestations.

8) Au printemps 2017, la CPEG a adopté un second volet de mesures, dont l'entrée en vigueur, plusieurs fois différée, a été fixée au 1er janvier 2020 si aucune loi prévoyant une capitalisation complémentaire n'était adoptée dans l'intervalle, qui prévoyait une réduction du taux de pension de 1,5 % à 1,35 % par année d'assurance, impliquant une réduction supplémentaire de 10 % des prestations.

9) En cours d'année 2017 et jusqu'à fin 2018, plusieurs propositions législatives ont été formulées en vue de rétablir l'équilibre financier de la CPEG à long terme, à savoir :

a. le dépôt par plusieurs députés, le 7 avril 2017, d'un PL 12095 « Saigner la CPEG ou la soigner ? La réponse s'impose ! », qui prévoyait un apport d'actifs de CHF 800'000'000.- en faveur de la CPEG. Après avoir été renvoyé à la commission, ce PL a été retiré par ses auteurs en séance plénière ;

b. le lancement, en septembre 2017, d'une initiative législative formulée cantonale n° 168 « Sauvegarder les rentes en créant du logement » (ci-après : l'IN 168) qui visait à augmenter le capital de la CPEG au moyen de la cession, en sa faveur, de terrains constructibles ou de droits à bâtir afin d'y construire des logements. Après avoir été acceptée par le Grand Conseil lors de sa séance du 24 janvier 2019, la loi émanant de cette initiative a fait l'objet d'une demande de référendum qui a abouti, la date de la votation n'ayant pas encore été fixée ;

c. le dépôt par le Conseil d'État, le 4 octobre 2017, d'un PL 12188 modifiant la LCPEG, qui prévoyait, outre le passage du système de la primauté des prestations à celui des cotisations et d'une nouvelle répartition des cotisations, (réduites de 27 % à 24 %, à hauteur de 42 % à la charge des salariés et de 58 % à celle de l'employeur), une recapitalisation de la CPEG à hauteur de 80 % au moyen d'un prêt. Cet apport d'actifs était effectué par les employeurs affiliés, notamment A______, et par l'État pour le solde, lequel se voyait octroyer par la CPEG un prêt à long terme remboursé par des apports en espèces ou en nature.

Selon l'exposé des motifs relatifs à ce PL, si aucune mesure n'était prise, la CPEG mettrait en oeuvre de nouvelles réductions des prestations et l'autorisation de fonctionner selon le système de la capitalisation partielle risquait de lui être refusée (p. 13 s). Il était prévu que l'État et les employeurs affiliés non subventionnés participent à la recapitalisation au prorata de leurs engagements envers les assurés, ce qui était cohérent avec le règlement de liquidation partielle de la CPEG, et, qu'en contrepartie, ils bénéficient intégralement de la baisse des cotisations employeurs. Les employeurs subventionnés par l'État ne participaient pas à la recapitalisation mais voyaient leurs subventions diminuées du montant de l'économie sur les cotisations employeurs (p. 61). Les cotisations employeurs dépendaient de l'âge des assurés, de sorte qu'un employeur ayant beaucoup d'employés jeunes contribuait moins qu'un employeur ayant des employés d'une moyenne d'âge élevée (p. 62). Avec une moyenne d'âge de 42,2 ans, A______ pouvait escompter une différence de cotisation de CHF 700'000.- (p. 63). Celui-ci était amené à participer à la recapitalisation à hauteur de 0,4 %, pour un montant estimé de CHF 19'500'000.- (p. 67). Le montant exact de la recapitalisation ne pourrait toutefois être déterminé qu'une fois les comptes de la CPEG audités transmis au Conseil d'État, au deuxième trimestre suivant l'entrée en vigueur du PL. Les employeurs et l'État disposaient ensuite jusqu'au 31 décembre de l'année d'entrée en vigueur du PL pour effectuer leurs apports (p. 81).

Le Grand Conseil a renvoyé sans débats le 12 octobre 2017 ce PL à la commission, qui a rendu son rapport le 19 novembre 2018. Lors de son audition, le directeur du département des finances et des ressources humaines (ci-après : DF) avait indiqué que ce projet, contrairement au PL 10847 lors duquel de grandes discussions avaient eu lieu pour savoir quel employeur participait ou non, partait du principe que tous les employeurs non subventionnés participaient à la recapitalisation et bénéficiaient en contrepartie intégralement de la baisse des cotisations employeurs, tandis que les employeurs subventionnés profitaient aussi de la baisse des coûts mais voyaient leurs subventions baisser d'autant la première année (p. 44 s). Lors de son audition, le directeur de l'ASFIP a indiqué que la CPEG avait, dès sa création, un ratio de rentiers extrêmement élevé. Si les engagements des rentiers étaient couverts à 100 %, il n'en allait pas de même de ceux des employés actifs, qui étaient couverts à hauteur de 0 %, une telle situation n'étant pas très bonne (p. 251) ;

d. le dépôt par plusieurs députés, le 28 novembre 2017, d'un PL 12228 modifiant la LCPEG, qui reprenait pour l'essentiel le texte de l'IN 168 s'agissant de la cession à la CPEG de terrains et droits à bâtir ainsi que, pour la recapitalisation de la CPEG, à hauteur de 75 %, le principe prévu par le PL 12188 d'un versement extraordinaire de l'État et des employeurs affiliés, dont A______, parallèlement à un prêt simultané de la CPEG en faveur de l'État. Ni le principe de primauté des prestations, ni la répartition des cotisations entre employeur et salarié n'étaient modifiés.

Le Grand Conseil a renvoyé sans débat le 14 décembre 2017 ce PL à la commission, qui a rendu son rapport le 10 avril 2018. Lors de son audition, le président du Conseil d'État indiquait que près de la moitié du montant de CHF 208'000'000.- viendrait de l'Aéroport international de Genève (ci-après : l'aéroport) et le reste d'une série d'organismes privés non subventionnés, d'organisations totalement externes à l'État ou d'organisations publiques qui avaient des capacités, à l'instar de l'aéroport, de pouvoir financer ce genre d'opérations, ce qui était par exemple le cas de la Fondation des immeubles pour les organisations internationales (ci-après : FIPOI) ou du secrétariat des Fondations immobilières de droit public (ci-après : SFIDP ; p. 41). Le directeur du DF expliquait, quant à lui, que le PL permettait également une baisse des cotisations des employeurs jusqu'à 3 %, soit CHF 87'000'000.-, ce qui ne pouvait toutefois pas être le cas à court ou moyen terme (p. 536 s) ;

e. le dépôt par le Conseil d'État (qui considérait que le PL 12188 tel qu'issu des travaux en commission avait subi des modifications le détournant de ses objectifs initiaux), le 14 novembre 2018, d'un PL 12404 modifiant la LCPEG, reprenant pour l'essentiel le PL 12188 non amendé, avec toutefois une recapitalisation de la CPEG de 75 %.

Selon l'exposé des motifs relatif à ce PL, les employeurs non subventionnés, qui participaient à la recapitalisation, dont A______ à hauteur de CHF 17'500'000.- (p. 41), bénéficiaient par la suite d'une baisse des cotisations employeurs, ce qui devait permettre de couvrir une partie du coût de la recapitalisation (p. 40).

Le Grand Conseil a renvoyé sans débats le 22 novembre 2018 ce PL à la commission, qui a rendu son rapport le 7 décembre 2018. Aux termes de ce dernier, lors de son audition, le directeur du DF expliquait que pour les employeurs subventionnés, l'État réduisait la subvention au prorata de la baisse de la cotisation. S'agissant des employeurs non subventionnés, mentionnés dans l'annexe, ceux-ci devaient participer à la recapitalisation à des taux variables, la participation la plus élevée étant celle de l'aéroport, avec un montant de CHF 86'400'000.- sur un total de CHF 231'000'000.-, calculés en fonction du pourcentage des engagements envers les assurés actifs au bilan de la CPEG, cette clé de répartition étant la plus juste. Le Conseil d'État avait communiqué aux employeurs concernés les modifications à venir, ceux-ci ne s'étant, à sa connaissance, pas manifestés depuis lors. À l'instar de l'État, il était envisageable pour ces employeurs, à condition qu'ils négocient avec la CPEG, de faire un prêt croisé (p. 32).

10) Le 10 janvier 2018, A______ a écrit au Conseil d'État, lui indiquant avoir pris connaissance du PL 12188. Les fonds qu'il percevait étaient affectés à des projets scientifiques et ne pouvaient être utilisés à d'autres fins que celles définies par les bailleurs de fonds. En tant qu'employeur affilié à la CPEG, il était directement touché par le PL 12188, qui prévoyait un apport d'actifs de sa part de l'ordre de CHF 19'500'000.-, alors que son budget annuel était de CHF 26'000'000.-. Il n'était en l'état pas en mesure de s'acquitter d'un montant aussi élevé. Il remerciait le Conseil d'État de bien vouloir prendre en compte le contenu de son courrier dans le cadre des débats au Grand Conseil s'agissant du PL 12188 et, dans l'hypothèse d'une confirmation de celui-ci, il souhaitait pouvoir discuter des modalités de paiement des montants dus afin de trouver une solution qui ne le conduise pas dans une situation rendant impossible la poursuite de ses activités.

11) Le 21 février 2018, le Conseil d'État a répondu au A______ qu'il resterait attentif aux éléments qu'il invoquait, l'invitant néanmoins à prendre contact avec lui pour évaluer les possibilités de financement, étant précisé que, malgré un apport d'actifs de CHF 19'500'000.-, il bénéficierait d'une réduction de charges de l'ordre de CHF 600'000.- par an en raison d'une baisse des cotisations des employeurs, le PL 12188 assurant au surplus une égalité de traitement entre les différents employeurs affiliés à la CPEG.

12) Le 28 juin 2018, l'ASFIP a rappelé à la CPEG que la gestion en capitalisation partielle impliquait le respect d'un plan de financement et de l'équilibre financier à long terme, qui n'était toutefois plus garanti, malgré les mesures prises, vu sa marge de manoeuvre à court terme pratiquement nulle. Un plan de financement devait lui parvenir au plus tard d'ici au 30 juin 2019, faute de quoi elle ne pourrait l'autoriser à poursuivre sa gestion en capitalisation partielle.

13) Le 14 novembre 2018, le Conseil d'État a informé A______ que la commission avait fortement amendé le PL 12188, le détournant de ses objectifs initiaux. Il lui transmettait un nouveau PL, qui reposait sur des hypothèses actuarielles prudentes et visait une réforme structurelle du système de prévoyance professionnelle avec le passage de la primauté des prestations à celle des cotisations et le maintien des prestations actuelles de la CPEG, voire une légère baisse en cas de dégradation des paramètres techniques, au moyen d'une recapitalisation à hauteur de 75 % de ses engagements et de mesures d'accompagnement qui limitaient les expectatives de baisses de prestations des assurés actifs à 5 %. Le principe de répartition du coût et des économies de ce PL restait le même que celui prévu par le PL 12188, à savoir que l'État et les employeurs affiliés non subventionnés participaient à la recapitalisation au prorata de leurs engagements envers les assurés actifs et, en contrepartie, bénéficiaient intégralement de la baisse des cotisations employeurs. Quant aux employeurs subventionnés par l'État, ils ne participaient pas à la recapitalisation, que l'État assurait à leur place, mais voyaient leurs subventions diminuées du montant de l'économie sur les cotisations employeurs. Ce PL prévoyait ainsi qu'il serait amené à participer à la recapitalisation de la CPEG au prorata des engagements envers ses assurés actifs, dont le montant ne pouvait être déterminé que sur la base des comptes audités au 31 décembre de l'année durant laquelle la loi serait promulguée. Il était prévu que les apports d'actifs en espèces et en nature soient effectués avant le 31 décembre de l'année suivante.

14) Lors de sa séance du 14 décembre 2018, le Grand Conseil a débattu des PL 12228 et 12404, le PL 12188 ayant été retiré par le Conseil d'État. À l'issue des débats, il a adopté successivement la loi 12228 et la loi 12404 dans des versions amendées sur quelques points. L'art. 70 de la loi 12228 et l'annexe II ont la teneur suivante :

 

Art. 70

Versements extraordinaires (nouveau, l'art. 70 ancien devenant l'art. 74)

1 Un apport d'actifs est effectué en faveur de la Caisse conformément a l'article 25A. Cet apport d'actifs s'élève au montant permettant a la Caisse d'atteindre un taux de couverture de 75 %, voire un taux de couverture de 100 % pour les prestations que la Caisse choisirait de rétablir conformément a l'article 25A, alinéas 1 et 2.

2 Ce montant est calculé sur la base des comptes audités de la Caisse au 31 décembre qui précède l'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018, en prenant en compte :

a) des engagements envers les membres pensionnés calculés avec un taux d'intérêt technique égal ou supérieur a 1,75 % et ;

b) des engagements envers les membres actifs calculés selon les bases et règles techniques en vigueur au 31 décembre 2019.

3 L'apport d'actifs en faveur de la Caisse est effectué comme suit :

a) les employeurs affiliés a la Caisse, qui figurent sur la liste de l'annexe II, s'acquittent d'un apport d'actifs au prorata des engagements de leurs membres salariés a la date d'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018 ;

b) le solde est a la charge de l'État de Genève.

4 L'apport d'actifs est effectué au plus tard le 31 décembre de l'année d'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018.

 

Annexe II (voir articles 70 et 71) : liste des employeurs affiliés a la Caisse qui s'acquittent d'un apport d'actifs en faveur de la CPEG (nouvelle)

Aéroport international de Genève

Caisse publique de prêts sur gages

Centre suisse de contrôle de qualité

Conférence universitaire des associations d'etudiantEs

Fondation de la crèche La Cigogne

Fondation des immeubles pour les organisations internationales

Fondation des parkings

Fondation Health on the Net

Fondation pour la promotion du logement bon marche et de l'habitat coopératif

Fondation pour les terrains industriels de Genève

Groupement intercommunal pour l'animation parascolaire

Institut suisse de bioinformatique

Office cantonal des assurances sociales

Secrétariat des fondations immobilières de droit public

Société pédagogique genevoise

Syndicat des services publics

TIMELAB - Fondation du laboratoire d'horlogerie et de microtechnique de Genève

Union du corps enseignant secondaire genevois

15) Par deux arrêtés du 19 décembre 2018, publiés dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 21 décembre 2018, le Conseil d'État a fait publier les lois 12228 et 12404 dans leur teneur respective adoptée par le Grand Conseil, avec l'indication que ces deux lois étaient exposées au référendum facultatif ordinaire et que le délai référendaire expirait le 11 février 2019.

16) Le lancement d'un référendum contre la loi 12228 a été annoncé au Conseil d'État le 2 janvier 2019 et publié dans la FAO du 7 janvier 2019. Celui d'un référendum contre la loi 12404, annoncé le 10 janvier 2019, a été publié dans la FAO du 18 janvier 2019.

17) a. Le 16 janvier 2019, le Conseil d'État a déposé un PL 12424 modifiant la loi sur l'exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 (LEDP - A 5 05) visant à introduire une modalité de vote du corps électoral avec une question subsidiaire lorsque deux lois de contenu incompatibles modifiant la même loi, votées par le Grand Conseil lors de la même session, font toutes deux l'objet d'un référendum et sont soumises en votation lors d'une même opération électorale.

b. Le 31 janvier 2019, le Grand Conseil a adopté la loi 12424 dans la teneur proposée par le PL 12424, avec la clause d'urgence.

18) Par arrêtés du 27 février 2019, publiés dans la FAO du 1er mars 2019, le Conseil d'État a constaté l'aboutissement des référendums dirigés contre les lois 12228 et 12404 et fixé au 19 mai 2019 la votation sur ces deux objets ainsi que sur la question subsidiaire les concernant.

19) Lors de la votation populaire du 19 mai 2019, le corps électoral cantonal a accepté la loi 12228 à 52,83 % (question subsidiaire : 52,87 %), la loi 12404, acceptée à 52,64 % (question subsidiaire : 47,13 %), ayant été écartée.

20) Après avoir validé les résultats de la votation, le Conseil d'État a, par arrêté du 5 juin 2019 publié dans la FAO du 7 juin 2019, promulgué la loi 12228 pour être exécutoire dans tout le canton dès le lendemain de sa publication, son entrée en vigueur étant fixée au 1er janvier 2020.

21) Par acte du 8 juillet 2019, A______ a recouru auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) contre l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG, concluant préalablement à l'octroi de l'effet suspensif au recours et, principalement, « avec suite de frais et dépens », à son annulation, subsidiairement à la radiation de son nom dans l'annexe II de la loi et de l'obligation à sa charge de s'acquitter d'un apport d'actifs en faveur de la CPEG.

La disposition contestée visant un apport d'actifs qui lui était imposé, elle avait un contenu normatif, et non décisionnel. Si le caractère normatif de la disposition en cause devait être nié, alors il faudrait la considérer comme une loi décisionnelle et le recours devait être transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

L'obligation que la disposition contestée lui imposait était un impôt spécial d'affectation, dès lors qu'il s'agissait, pour les employeurs concernés, de participer à une capitalisation effectuée par l'État, en vue de couvrir des dépenses déterminées, et non d'une mesure qui ressortissait à la prévoyance professionnelle, à défaut de figurer dans la LPP, laquelle octroyait cette compétence à la caisse et non à l'État et ne prévoyait pas d'apport d'actifs par les employeurs. Il en résultait une obligation de respect des exigences strictes en matière de contributions publiques, ce qui n'était pas le cas de la loi contestée.

Celle-ci violait ainsi les principes de la légalité et de la séparation des pouvoirs, dès lors qu'en adoptant, dans une loi formelle, une mesure individuelle et concrète, le Grand Conseil était sorti de son domaine de compétence, à défaut de norme l'y habilitant. Elle violait également les principes régissant l'imposition, dès lors qu'il devait, au même titre que les autres employeurs figurant dans l'annexe, s'acquitter d'une contribution qui ne lui profitait pas, mais qui bénéficiait à l'ensemble du personnel actif et retraité de l'État et des employeurs affiliés non mentionnés sur la liste, l'apport d'actifs requis étant destinés à alimenter les fonds communs de la CPEG. Aucun motif ne justifiait un financement spécial de sa part, ce d'autant que la compensation initialement prévue, sous la forme d'une diminution de la cotisation des employeurs, avait été supprimée de la loi, rendant l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG incohérent.

Cette disposition emportait une violation du principe d'égalité de traitement sous plusieurs angles. Elle créait d'abord une distinction insoutenable entre employeurs subventionnés et non subventionnés, lesquels ne se voyaient imposer aucune obligation d'apports d'actifs, et avec l'Université de Genève (ci-après : l'université), alors qu'ils bénéficiaient de contributions en nature de celle-ci et donc, indirectement, aussi de la part de l'État. D'autres entités n'étaient pas non plus mises à contribution, comme la CPEG et sa fondation. Ensuite, l'État, en tant qu'employeur, se voyait accorder des modalités de participation favorables par le biais de l'octroi d'un prêt, dont il ne bénéficiait pas. Enfin, la disposition contestée créait une assimilation insoutenable entre les entités rattachées à l'État et celles qui ne l'étaient pas, en imposant une mesure identique à des entités répondant à des régimes juridiques différents et dont le rapport avec l'État l'était également, étant précisé que certaines des entités mentionnées, qui avaient des ressources commerciales susceptibles de générer des recettes librement disponibles comme l'aéroport, étaient capables de s'acquitter des montants requis, alors que d'autres ne l'étaient pas.

Dans la mesure où le législateur n'avait pas même déterminé s'il pouvait bien s'acquitter de ce montant, il en résultait également une violation du principe de la capacité contributive, pourtant essentiel en matière fiscale, ainsi que de la garantie de la propriété sous l'angle de l'interdiction de l'imposition confiscatoire, au regard de l'absence de ressources financières disponibles et des risques de faillite encourus s'il devait payer entre CHF 17'000'0000.- et CHF 22'000'000.- d'ici au 31 décembre 2020. En outre, en cas de résiliation de son affiliation à la CPEG, il perdrait tout droit sur le montant d'au moins CHF 40'000'000.- initialement versé à la CPEG lors de sa fondation, le degré de couverture de son personnel salarié étant de 0 %.

La disposition litigieuse emportait aussi une violation du principe de proportionnalité, puisque le montant qu'il lui était demandé de verser était susceptible de provoquer sa faillite et que, dans une telle situation, l'État serait actionné en garantie, au regard du taux de couverture des actifs de 0 %, ce qui créerait une situation absurde.

Son droit d'être entendu avait été violé, dès lors que le législateur lui avait imposé une mesure individuelle par le biais d'une disposition figurant dans une loi formelle sans préalablement lui demander de se prononcer, la décision consistant à lui imposer un apport d'actifs n'ayant pas non plus été motivée.

Enfin, au regard des éléments susmentionnés, la disposition litigieuse était également arbitraire.

A______ a produit un chargé de pièces, comportant notamment :

- ses états financiers pour l'année 2018, mentionnant, dans son compte de résultat, des revenus totaux de l'ordre de CHF 33'444'641.- ainsi que des charges salariales de CHF 23'442'476.- pour 193 employés au 31 décembre 2018 ;

- un accord de partage des infrastructures et des prestations, conclu avec l'université de Genève (ci-après : l'université) à une date indéterminée, non signé, aux termes duquel celle-ci mettait à sa disposition un accès à son réseau informatique ainsi que des locaux d'une surface de 758 m 2 moyennant le versement d'un montant forfaitaire de CHF 53'328.- par an correspondant aux charges d'entretien des locaux ainsi qu'à une partie des prestations offertes par l'université ;

- un courrier de la conseillère d'État en charge du DF du 26 juin 2019, lui indiquant qu'une rencontre aurait lieu pour évoquer avec lui les solutions envisageables pour le versement du montant de CHF 17'500'000.-, dans le respect du cadre légal en vigueur et du principe d'égalité de traitement.

22) Le 17 septembre 2019, le Grand Conseil a conclu au « déboutement du A______ de toutes ses conclusions ».

La disposition litigieuse s'insérait dans la LCPEG, une loi au sens formel et matériel, et visait un but large, qui avait des effets sur un nombre indéterminé de personnes et servait une politique dépassant la situation concrète et particulière des administrés, notamment A______, étant précisé que la liste de l'annexe II avait été établie à titre informatif, de sorte que la chambre constitutionnelle était bien compétente pour connaître du recours.

L'obligation d'apport d'actifs des employeurs non subventionnés s'inscrivait dans une logique de prévoyance professionnelle et non fiscale, la corporation publique étant compétente en matière de financement, en application de la LPP, ce qu'avait accepté A______ en concluant, de son plein gré, un contrat d'affiliation à la CPEG. En matière d'IPDP, la corporation publique, qui était compétente pour promulguer les changements de condition par voie législative, sous réserve des compétences réservées à la caisse elle-même, pouvait modifier les droits et obligations des employeurs affiliés, pour autant que ceux-ci puissent résilier le contrat d'affiliation. Quand bien même l'État décidait du financement, il prenait néanmoins à sa charge, en tant qu'employeur, la part la plus importante de la recapitalisation. La participation des employeurs affiliés ne constituait ainsi pas une participation aux dépenses résultant des tâches générales dévolues à l'État, ce qui avait déjà été le cas lors de la création de la CPEG et n'avait jamais été contesté ; elle n'était pas effectuée de manière inconditionnelle et sans contreprestation, mais permettait de maintenir l'existence de la caisse et le fonctionnement en capitalisation partielle, ainsi que les prestations aux assurés. Puisque l'obligation d'apport d'actifs ne relevait pas de l'impôt, les principes du droit fiscal n'étaient par conséquent pas applicables.

Ceux-ci avaient, en tout état de cause, été respectés. Il en allait ainsi des principes de la légalité et de la séparation des pouvoirs, la LPP donnant la compétence à la corporation de droit public d'adopter les dispositions légales nécessaires et, par conséquent, la compétence de légiférer sur le financement au Grand Conseil, lequel avait au demeurant adopté la LCPEG. Le critère de distinction entre entités subventionnées et non subventionnées était objectif, ces dernières ne prenant quoi qu'il en fût pas en charge la part afférente aux engagements des membres salariés des employeurs subventionnés, ce qui incombait à l'État. Dès lors qu'il s'agissait de recapitaliser la CPEG, il n'y avait pas lieu d'affecter les montants perçus à un compte séparé de cotisation, l'IPDP étant une institution commune à laquelle A______ s'était affilié en pleine connaissance de cause. Bien que les autres PL prévissent une réduction des cotisations des employeurs, il n'y avait aucune correspondance avec le coût, puisqu'il ne s'agissait pas de procéder à une opération neutre et qu'une telle réduction dépendait de la structure d'âge des employés.

La disposition litigieuse respectait également le principe d'égalité de traitement, en présence d'une distinction sur la base d'un critère objectif entre employeurs subventionnés et non subventionnés, l'État payant à la place des premiers. Aucun de ces deux types d'employeurs ne bénéficiait au demeurant d'une réduction des cotisations. A______ ne pouvait pas non plus être assimilé à l'université en raison des accords conclus avec celle-ci, qui ne permettaient pas de le considérer comme une entité subventionnée. En tout état de cause, A______ n'avait aucun intérêt à se plaindre du fait que d'autres employeurs affiliés ne figuraient pas à l'annexe II, en l'absence d'impact sur la part dont il devait s'acquitter, calculée en fonction de ses propres engagements liés à ses propres employés. Demander un financement à la CPEG ou à sa fondation pour recapitaliser la CPEG était au demeurant une opération neutre et revenait à faire transiter un montant d'un compte à un autre. A______ n'était pas non plus défavorisé par rapport à l'État, car, bien que mis au bénéfice d'un prêt, le montant dont il devait s'acquitter était colossal, il offrait la garantie étatique et le prêt était remboursable par des apports de terrains ou de droits à bâtir, ce qui ne pouvait être imposé aux employeurs externes. Rien n'empêchait d'ailleurs A______ de conclure un contrat de prêt pour pouvoir faire face à ses obligations financières. Lorsqu'A______ avait rejoint, sur une base volontaire, la CEH puis la CPEG, il n'avait pas été question qu'il se repose sur son statut d'entité à but non lucratif pour se voir offrir, par le contribuable, ses obligations en matière de prévoyance professionnelle.

En qualité d'entité devant faire face à des contributions de sa caisse de pension, A______ devait allouer les fonds à disposition au paiement de ses obligations et préparer un budget permettant de les respecter. Le montant qui lui était demandé était fonction des engagements relatifs à ses propres employés actifs, en lien direct avec la situation de prévoyance de ceux-ci, et ne devait être versé que dix-huit mois suivant l'acceptation de la loi, ce qui lui laissait le temps d'explorer des possibilités de prêt et d'aides étatiques. Le montant en cause était du reste trois fois inférieur à celui qu'il s'était contractuellement engagé à payer, en trente jours, en cas de sortie de la CPEG.

Le fait qu'A______ était une entité sans but lucratif n'imposait pas à l'État de payer à sa place la prévoyance de ses employés. L'obligation d'apport constituait une contribution unique demandée à A______ en sa qualité d'employeur non subventionné affilié à la CPEG, ce qui excluait d'emblée toute violation de la garantie de la propriété.

Le droit d'être entendu d'A______ n'avait pas non plus été violé, en l'absence de tel droit dans le cadre d'une procédure législative et d'absence de décision administrative. Il avait au demeurant été tenu informé de toutes les discussions législatives par le Conseil d'État et avait pu s'exprimer par écrit.

23) Le 18 septembre 2019, le juge délégué a accordé aux parties un délai au 1er novembre 2019 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

24) Le Grand Conseil ne s'est pas déterminé à l'issue du délai imparti.

25) Le 1er novembre 2019, A______ a persisté dans les conclusions et termes de son recours.

La LPP ne permettait pas à la CPEG d'exiger un versement unique de recapitalisation et à fonds perdus de la part des employeurs, mais seulement des cotisations, de sorte que l'État, en procédant de la sorte, intervenait non pas en tant que tel mais comme collectivité publique qui puisait dans les deniers publics à cette fin, dans l'exercice ordinaire de ses pouvoirs financiers. D'ailleurs, ni la Confédération, ni les autres cantons, qui avaient procédé à la recapitalisation de leurs caisses, n'avaient requis de versement des employeurs externes. L'art. 70 al. 3 let. a LCPEG n'était ainsi pas une mesure destinée à résorber le découvert prévu par la LPP, qui ne concevait rien de tel. La loi contestée n'avait pas repris le principe de la baisse des cotisations des employeurs, qui représentait pourtant une contrepartie à l'effort demandé aux employeurs externes non subventionnés, ce qui créait une asymétrie économique entre ces derniers et les employeurs subventionnés. La mesure contestée posait un problème de droit public et ne pouvait être interprétée sous l'angle du droit privé contractuel, la clause de réserve de modification ainsi que la possibilité de résiliation n'ayant aucun impact sur le litige.

26) Le 20 novembre 2019, le Grand Conseil a sollicité l'octroi d'un délai pour dupliquer.

27) Le 22 novembre 2019, le juge délégué a refusé de donner suite à cette demande, la cause étant en état d'être jugée.

28) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. La chambre constitutionnelle est l'autorité compétente pour contrôler, sur requête, la conformité des normes cantonales au droit supérieur (art. 124 let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00). Selon la législation d'application de cette disposition, il s'agit des lois constitutionnelles, des lois et des règlements du Conseil d'État (art. 130B al. 1 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

Il ne suffit toutefois pas qu'un acte soit pris en la forme d'une loi pour qu'il soit attaquable devant la chambre constitutionnelle aux fins de contrôle de sa conformité au droit supérieur (ACST/1/2015 du 23 janvier 2015 consid. 2c et les références citées). Encore faut-il qu'il contienne des règles de droit, à savoir des mesures générales, destinées à s'appliquer à un nombre indéterminé de personnes, et abstraites, se rapportant à un nombre indéterminé de situations, affectant au surplus la situation juridique des personnes concernées en leur imposant une obligation de faire, de s'abstenir ou de tolérer ou en réglant d'une autre manière et de façon obligatoire leurs relations avec l'État, ou alors ayant trait à l'organisation des autorités (ATF 135 II 328 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1023/2017 du 21 décembre 2018 consid. 2.2). Des actes ou mesures qui, bien qu'adoptés selon la procédure législative, comportent une décision mais pas de règles de droit, à savoir des lois purement décisionnelles, ne peuvent être contestées devant la chambre de céans (ACST/14/2018 du 28 juin 2018 consid. 1b ; ACST/1/2015 précité).

Selon la jurisprudence de la chambre constitutionnelle, n'a pas un caractère décisionnel une loi qui a pour objet la délégation à une fondation de la tâche étatique de soutenir, par le biais de deniers principalement publics, la production indépendante et la réalisation d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles (ACST/12/2015 du 15 juin 2015 consid. 1b). Est de même un acte normatif un acte censé expliciter le sens et la portée d'une loi en matière de stationnement contre paiement, par lequel le Conseil d'État énonce le principe que toute acquisition et installation de parcomètres et horodateurs sur la voie publique sont du ressort du canton et que les recettes provenant de l'exploitation de ces appareils reviennent au canton (ACST/6/2017 du 19 mai 2017 consid. 1b et c), ainsi qu'une loi ayant pour objet de ratifier un contrat de prestations par lequel l'État confie à un établissement autonome de droit public le contrôle de l'ensemble du stationnement statique sur le domaine public et de fixer l'indemnité que l'État verserait à ladite fondation pour l'accomplissement de cette tâche (ACST/14/2018 précité consid. 1b).

b. En l'espèce, le recours est formellement dirigé contre l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG, disposition d'une loi cantonale, en l'absence de cas d'application (ACST/22/2019 du 8 mai 2019 consid. 2a et les références citées).

L'article attaqué présente également les caractéristiques d'une loi au sens matériel, en exigeant des employeurs affiliés à la CPEG un apport d'actifs et en réglant ainsi leurs obligations en matière de recapitalisation de la CPEG. Bien que la disposition en cause, qui prévoit certes un versement extraordinaire effectué à une reprise, fixe celui-ci au prorata des engagements des membres salariés des employeurs affiliés à la date d'entrée en vigueur de la LCPEG, à savoir le 1er janvier 2020, le montant dû n'est pas déterminé puisqu'il est fonction des comptes audités de la CPEG. D'ailleurs ni la loi ni son annexe ne mentionnent de pourcentage dû à ce titre par les employeurs affiliés. Ceux-ci ne sont pas non plus mentionnés par la disposition en cause, mais figurent, à titre informatif seulement, sur la liste en annexe à la loi, de sorte que l'objet de celle-ci n'est pas clairement individualisé. Le fait que l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG effectue un renvoi à cette annexe n'y change rien. À cela s'ajoute qu'une disposition similaire avait également été insérée dans la LCPEG lors de son adoption en 2012 s'agissant des apports exigés des employeurs affiliés à l'ancienne CIA, dont la contestation aurait pu faire l'objet d'un contrôle abstrait (à l'époque, directement auprès du Tribunal fédéral), de sorte qu'il doit en aller de même de l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG qui modifie partiellement ladite loi. L'art. 70 al. 3 let. a LCPEG est donc une disposition générale et abstraite, sujette à un contrôle abstrait des normes devant la chambre constitutionnelle, de sorte que le recours est également recevable sous cet angle.

2) Le recours a été interjeté en temps utile à compter de la promulgation de la loi attaquée, qui a eu lieu par arrêté du Conseil d'État publié dans la FAO du 7 juin 2019 (art. 62 al. 1 let. d et al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), et il respecte les conditions de forme et de contenu prévues par les art. 64 al. 1 et 65 LPA, y compris celle d'un exposé détaillé des griefs (art. 65 al. 3 LPA). Il est donc également recevable de ce point de vue.

3) a. A qualité pour recourir toute personne touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d'État ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l'acte soit annulé ou modifié (art. 60 al. 1 let. b LPA). L'art. 60 al. 1 let. b LPA formule de la même manière la qualité pour recourir contre un acte normatif et en matière de recours ordinaire. Cette disposition ouvre ainsi largement la qualité pour recourir, tout en évitant l'action populaire, dès lors que le recourant doit démontrer qu'il est susceptible de tomber sous le coup de la loi constitutionnelle, de la loi ou du règlement attaqué (ACST/28/2019 du 21 novembre 2019 consid. 3a et la référence citée).

b. En application de l'art. 111 al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le droit cantonal ne peut pas définir la qualité de partie devant l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral de manière plus restrictive que ne le fait l'art. 89 LTF. Aux termes de cette disposition, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (al. 1 let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (al. 1 let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (al. 1 let. c).

Lorsque le recours est dirigé contre un acte normatif, la qualité pour recourir est conçue de manière plus souple et il n'est pas exigé que le recourant soit particulièrement atteint par l'acte entrepris. Ainsi, toute personne dont les intérêts sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un jour a qualité pour recourir ; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition toutefois qu'il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les dispositions contestées (ATF 145 I 26 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_752/2018 du 29 août 2019 consid. 1.2).

La qualité pour recourir suppose en outre un intérêt actuel à obtenir l'annulation de l'acte entrepris, cet intérêt devant exister tant au moment du dépôt du recours qu'au moment où l'arrêt est rendu (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; ACST/22/2019 précité consid. 3b).

c. En l'espèce, en tant qu'employeur affilié à la caisse, le recourant est directement concerné par la disposition litigieuse, qui lui impose un apport d'actifs au prorata des engagements de ses membres salariés en vue d'une recapitalisation de la CPEG. Il a dès lors qualité pour recourir.

4) À l'instar du Tribunal fédéral, la chambre constitutionnelle, lorsqu'elle se prononce dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes, s'impose une certaine retenue et n'annule les dispositions attaquées que si elles ne se prêtent à aucune interprétation conforme au droit ou si, en raison des circonstances, leur teneur fait craindre avec une certaine vraisemblance qu'elles soient interprétées ou appliquées de façon contraire au droit supérieur. Pour en juger, il lui faut notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits en cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante et des circonstances dans lesquelles ladite norme serait appliquée. Le juge constitutionnel doit prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d'une application conforme - ou non - au droit supérieur. Les explications de l'autorité sur la manière dont elle applique ou envisage d'appliquer la disposition mise en cause doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard du droit supérieur dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, elle puisse se révéler inconstitutionnelle ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait (ATF 145 I 26 consid. 1.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_752/2018 précité consid. 2 ; ACST/38/2019 du 21 novembre 2019 consid. 5).

5) a. Selon le recourant, l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG emporterait une violation des principes régissant l'imposition, concrétisés à l'art. 127 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), en tant que l'apport d'actifs qui lui est imposé serait un impôt spécial d'affectation, à défaut d'être prévu par la LPP.

b. Aux termes de l'art. 127 Cst., les principes généraux régissant le régime fiscal, notamment la qualité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de calcul, sont définis par la loi (al. 1). Dans la mesure où la nature de l'impôt le permet, les principes de l'universalité, de l'égalité de traitement et de la capacité économique doivent, en particulier, être respectés (al. 2).

c. De manière générale, l'impôt se définit comme la contribution versée par un particulier à une collectivité publique pour participer aux dépenses résultant des tâches générales dévolues à cette dernière en vue de la réalisation du bien commun. Il est perçu de manière inconditionnelle, c'est-à-dire uniquement en fonction d'une certaine situation économique réalisée en la personne de l'assujetti, sans considération d'une prestation de l'État ou d'un avantage particulier consenti en sa faveur (arrêt du Tribunal fédéral 2C_466/2008 du 10 juillet 2009 consid. 4.2.1 et les références citées). Selon qu'il sert à alimenter les caisses générales de l'État ou qu'il est plus spécifiquement destiné à couvrir des dépenses déterminées, l'impôt peut être subdivisé entre impôts généraux et impôts d'affectation. Lorsque ces derniers sont destinés à couvrir des dépenses spécifiques qui sont provoquées par des personnes déterminées ou qui profitent plus directement à certaines catégories de personnes qu'à la majorité des citoyens, on parle d'impôts d'attribution des coûts (arrêt du Tribunal fédéral 2C_150/2015 du 9 juin 2015 consid. 3.3.2). Le cercle des contribuables comprend les personnes à la charge desquelles, pour des motifs objectifs et raisonnables, la collectivité publique peut mettre en priorité les dépenses en cause plutôt que de les imposer à l'ensemble des contribuables ; cet impôt est dû indépendamment de l'usage ou de l'avantage obtenu individuellement par le contribuable ou de la dépense que celui-ci a provoquée. En d'autres termes, il n'est pas nécessaire que le contribuable retire un avantage individuel particulier pour justifier l'imposition (ATF 124 I 289 consid. 3b ; 122 I 61 consid. 3b).

6) a. L'art. 72a LPP règle le financement des IPDP en capitalisation partielle et prévoit que celles ne satisfaisant pas aux exigences en matière de capitalisation complète au 1er janvier 2012, tout en bénéficiant de la garantie de l'État, peuvent, avec l'accord de l'autorité de surveillance, déroger au principe de la capitalisation complète (capitalisation partielle) lorsqu'un plan de financement permet d'assurer à long terme leur équilibre financier. Ce plan de financement garantit notamment (al. 1) : la couverture intégrale des engagements pris envers les rentiers (let. a), le maintien des taux de couverture au moins à leur valeur initiale pour l'ensemble des engagements de l'institution de prévoyance, ainsi que pour les engagements envers les assurés actifs, jusqu'à l'atteinte de la capitalisation complète (let. b), un taux de couverture des engagements totaux pris envers les rentiers et les assurés actifs d'au moins 80 % (let. c), le financement intégral de toute augmentation des prestations par la capitalisation (let. d). L'autorité de surveillance contrôle le plan de financement et approuve la poursuite de la gestion de l'institution de prévoyance selon le système de la capitalisation partielle. Elle veille à ce que le plan de financement prévoie le maintien des taux de couverture acquis (al. 2).

Selon l'art. 72c al. 1 LPP, il y a garantie de l'État quand la corporation de droit public s'engage à couvrir les prestations de l'IPDP ci-après, dans la mesure où elles ne sont pas entièrement financées sur la base des taux de couverture initiaux : prestations de vieillesse, de risque et de sortie (let. a), prestations de sortie dues à l'effectif d'assurés sortants en cas de liquidation partielle (let. b), découverts techniques affectant l'effectif d'assurés restants en cas de liquidation partielle (let. c).

L'IPDP fait vérifier périodiquement par l'expert que son équilibre financier est garanti à long terme dans le système de la capitalisation partielle et que le plan de financement visé à l'art. 72a al. 1 LPP est respecté (art. 72d LPP). Les IPDP n'atteignant pas le taux de couverture minimal de 80 % lui soumettent tous les cinq ans un plan visant à leur permettre de l'atteindre d'ici au 1er janvier 2052 (let. c des dispositions transitoires ad art. 72a LPP).

Est réputé initial le taux de couverture existant au 1er janvier 2012 (art. 72b al. 1 LPP). Lorsqu'un taux de couverture initial au sens de l'art. 72a al. 1 let. b n'est plus atteint, l'IPDP doit prendre les mesures prévues aux art. 65c à 65e LPP (art. 72e LPP). En cas de passage à la capitalisation complète, le financement des IPDP est régi par les art. 65 à 72 dès qu'elles en remplissent les exigences (art. 72f al. 1 LPP).

Aux termes des dispositions générales en matière de financement, les institutions de prévoyance doivent offrir en tout temps la garantie qu'elles peuvent remplir leurs engagements (art. 65 al. 1 LPP). Selon l'art. 65c LPP, une dérogation à ce principe et, partant, un découvert limité dans le temps, est toutefois autorisé (al. 1) s'il est garanti que les prestations peuvent être fournies dès qu'elles sont exigibles (let. a), l'institution de prévoyance prend des mesures pour résorber le découvert (let. b). Aux termes de l'art. 65d LPP, l'institution de prévoyance doit résorber elle-même le découvert, le fonds de garantie n'intervenant que lorsqu'elle est insolvable (al. 1). Tant que dure le découvert, l'institution de prévoyance peut décider d'appliquer (al. 3) : le prélèvement auprès de l'employeur et des salariés de cotisations destinées à résorber le découvert, la cotisation de l'employeur devant alors être au moins aussi élevée que la somme des cotisations des salariés (let. a), le prélèvement auprès des bénéficiaires de rente d'une contribution destinée à résorber le découvert (let. b). Si ces mesures se révèlent insuffisantes, l'institution de prévoyance peut décider d'appliquer tant que dure le découvert et pendant cinq ans au plus une rémunération inférieure à celle prévue (al. 4). L'art. 65d LPP ne porte que sur les mesures destinées à résorber un découvert illicite et qui, sous réserve d'un découvert limité dans le temps, doit être résorbé par l'institution de prévoyance elle-même (arrêt du Tribunal fédéral 9C_78/2007 du 15 janvier 2008 consid. 6.6).

Chaque IPDP partiellement capitalisée dispose de quarante ans pour parvenir à une capitalisation complète et décide elle-même comment elle entend se financer et sur combien de temps (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la LPP du 19 septembre 2008, FF 2008 7619, p. 7650). Les IPDP dont la situation financière se dégrade durant la période de recapitalisation doivent prendre les mesures propres à rétablir l'équilibre, les mesures possibles étant notamment l'adaptation de la cotisation ordinaire, la limitation de l'adaptation des rentes en cours au renchérissement ou un financement complémentaire dans ce but, la réduction du niveau des prestations, l'amélioration des stratégies de placement, la requête d'un versement unique de la part de la corporation de droit public, l'introduction d'une cotisation d'assainissement temporaire ou encore l'instauration d'une garantie de rendement accordée par la corporation de droit public (Message, op. cit., p. 7651). Les IPDP disposent ainsi de plusieurs possibilités pour atteindre le taux de financement requis, l'important étant qu'elles visent une capitalisation complète et adoptent des mesures lorsque leur taux de financement se dégrade (Message, op. cit., p. 7654).

b. L'art. 50 LPP traite des dispositions réglementaires et prévoit que les institutions de prévoyance établissent des dispositions sur les prestations, l'organisation, l'administration et le financement, le contrôle et les rapports avec les employeurs, les assurés et les ayants droit (al. 1). Ces dispositions peuvent figurer dans l'acte constitutif. S'il s'agit d'une IPDP, les dispositions concernant soit les prestations, soit le financement peuvent être édictées par la corporation de droit public concernée (al. 2). À Genève, la CPEG fixe les dispositions générales, communes et particulières s'appliquant aux prestations, dans le cadre du financement fixé par l'État (art. 22 LCPEG).

La liberté d'organisation des cantons est limitée par le droit fédéral, qui prescrit la forme juridique et une certaine autonomie des IPDP. Toutefois, la LPP, une loi-cadre prévoyant des prestations minimales, octroie une grande liberté de décision et d'organisation dans l'exécution de la prévoyance professionnelle. Dès lors, les législatifs et exécutifs cantonaux et communaux doivent conserver la possibilité d'exercer une certaine influence sur le financement ou les prestations de l'IPDP de leur collectivité, en édictant des actes législatifs. Les pouvoirs législatifs ou exécutifs devraient toutefois se limiter à agir sur l'un des deux paramètres (financement ou prestations), afin que l'organe suprême de l'IPDP ait la possibilité et la responsabilité de fixer en toute souplesse l'autre paramètre pour garantir la sécurité financière de l'institution (Message, op. cit., p. 7673).

7) En l'espèce, à la suite de divers événements (introduction des taux négatifs par la BNS et baisses du taux d'intérêt technique), l'expert agréé de la CPEG a constaté, en fin d'année 2016, que celle-ci ne serait pas en mesure de respecter son chemin de croissance à long terme, tel que fixé par la LCPEG, en vue d'atteindre un taux de couverture de 80 % au 1er janvier 2052 imposé par l'art. 72a LPP, si des mesures structurelles importantes n'étaient pas prises touchant aux prestations et/ou au financement. À la même époque, le taux de couverture de la CPEG n'était ainsi que de 57,4 %, alors qu'il devait atteindre au moins 60 % au 1er janvier 2020. La CPEG a alors adopté, dans son domaine de compétence, une première mesure, consistant à élever l'âge pivot, ce qui a conduit à une réduction de 5 % des prestations. Au printemps 2017, la CPEG a adopté un deuxième volet de mesures qui prévoyait une réduction du taux de pension, dont elle a souhaité différer l'entrée en vigueur au vu de la réduction supplémentaire de 10 % des prestations que lesdites mesures impliquaient. C'est pour éviter une nouvelle baisse des prestations et surtout pour rétablir l'équilibre financier à long terme, afin d'atteindre une capitalisation à 80 % telle qu'exigée par le droit fédéral, que la question d'une recapitalisation de la CPEG s'est posée, étant précisé que la prise de mesures revêtait une certaine urgence dès lors que l'ASFIP devait renouveler son autorisation de fonctionner en capitalisation partielle. Les mesures envisagées se situent ainsi dans le contexte des art. 72a ss LPP, et non pas dans celui d'un découvert, situation envisagée à l'art. 65d LPP, applicable aux IPDP par le renvoi des art. 72e et 72f LPP, dès lors que la CPEG a maintenu ses taux de couverture au moins à leur valeur initiale, ni, par voie de conséquence, dans une situation ayant nécessité d'actionner la garantie de l'État (art. 72c LPP).

C'est par conséquent dans le contexte du maintien de la CPEG en capitalisation partielle et du respect, à cette fin, de son chemin de croissance, que des mesures devaient être prises, dans le cadre de l'art. 72a LPP. Même si cette disposition, ainsi que la disposition transitoire y relative, n'indique pas les moyens en vue d'y parvenir, une telle situation ne préjuge pas pour autant de l'absence de compétence du législatif en cette matière ni du caractère de contribution publique de l'acte adopté. Outre le fait que le financement de l'IPDP est du ressort de la corporation de droit public (art. 50 al. 2 LPP et 22 LCPEG), qui bénéficie à ce titre d'une marge de manoeuvre étendue d'un point de vue organisationnel (Message, op. cit., p. 7673), les mesures à prendre en cas de dégradation de la situation financière durant la période de recapitalisation peuvent également être de différentes natures, comme l'a indiqué le Conseil fédéral dans son message (Message, op. cit., p. 7651), mentionnant, de manière non exhaustive, tant la réduction du niveau des prestations par l'IPDP que la requête d'un versement unique de la part de l'État. Or, dans le cas de la CPEG, la marge de manoeuvre de celle-ci était limitée, dès lors que les deux mesures qu'elle a prises n'étaient pas à même de rétablir son équilibre financier à long terme, comme l'a relevé l'expert agréé et l'ASFIP, de sorte que seul le recours à un versement unique pouvait encore être envisagé, dont les modalités devaient être arrêtées par l'État, seul compétent en matière de financement.

Contrairement à ce que soutient le recourant, la corporation de droit public était bien compétente pour prendre la mesure litigieuse, le Grand Conseil ayant adopté la loi 12228 à cette fin et l'art. 70 al. 3 let. a qu'elle contient. Comme précédemment indiqué, il s'agit d'une loi formelle et matérielle, qui contient des règles de droit, et a été soumise au référendum facultatif, le corps électoral l'ayant acceptée. Le principe de la légalité a ainsi été pleinement respecté, ce qui rend du reste sans objet le grief du recourant en lien avec une violation de ce principe ainsi que celui de la séparation des pouvoirs.

Il ressort des développements qui précèdent que, même si la disposition litigieuse a été adoptée par une autorité politique, elle se fonde sur la LPP et l'exigence de capitalisation prévue à l'art. 72a LPP, de sorte que le raisonnement du recourant, qui prétend qu'il s'agit d'une contribution publique, ne peut pour ce motif déjà pas être suivi. Le recourant perd en outre de vue que ce ne sont pas les seuls employeurs externes qui sont mis à contribution, mais également l'État, pour le solde selon l'art. 70 al. 3 let. b LCPEG. Or, on voit mal le législateur condamner la collectivité dont il est issu au paiement de ses propres impôts. À cela s'ajoute que la LPP ne relève pas d'une tâche générale dévolue à l'État et que les employeurs concernés, qu'il s'agisse de l'État ou des employeurs externes affiliés sur une base volontaire à la CPEG, profitent directement de sa recapitalisation, en lui garantissant de manière générale une pérennité financière à long terme, de façon à conserver l'autorisation de fonctionner en capitalisation partielle jusqu'à l'atteinte du taux de couverture de 80 %, lui éviter de tomber sous le seuil initial et empêcher la prise de mesures plus drastiques, notamment au niveau des prestations. Le fait que le degré de couverture du personnel actif du recourant soit de 0 % n'y change rien, puisqu'il l'est de manière générale pour tous les employeurs affiliés, y compris l'État - ce qui constitue d'ailleurs l'un des problèmes de la CPEG -, le taux de couverture des pensionnés étant, quant à lui, de 100 %.

Au vu de ces éléments, l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG ne peut être considéré comme imposant aux employeurs concernés le paiement d'une contribution publique, de sorte que le grief en lien avec une violation de l'art. 127 Cst. doit être écarté, ainsi que les principes qui le composent, comme les aspects spécifiques en termes de légalité, l'universalité, ou l'imposition selon la capacité contributive, y compris le principe de la proportionnalité, qui n'est pas érigé en droit constitutionnel indépendant, et le grief tiré de la violation de la garantie de la propriété en lien avec l'interdiction de l'imposition confiscatoire. Il convient toutefois d'examiner les griefs restants soulevés par le recourant, à savoir l'égalité de traitement, l'interdiction de l'arbitraire et la violation du droit d'être entendu dans la procédure législative, qui peuvent être invoqués de manière autonome.

8) a. Le recourant soutient que la disposition litigieuse serait constitutive d'une inégalité de traitement et serait arbitraire.

b. Un arrêté de portée générale viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Le législateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de ces principes (ATF 145 I 73 consid. 5.1 et les références citées).

c. Un acte normatif viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) s'il ne repose pas sur des motifs objectifs sérieux ou s'il est dépourvu de sens et de but. Le législateur, organe politique soumis à un contrôle démocratique, doit se voir reconnaître une grande liberté dans l'élaboration des lois, les autorités judiciaires n'ayant pas à revoir l'opportunité des choix effectués dans ce cadre et ne devant pas annuler une disposition légale au motif que d'autres solutions paraîtraient envisageables, voire même préférables (ATF 136 I 241 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_773/2017 du 13 mai 2019 consid. 5.2).

d. En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant est un employeur externe non subventionné, le fait qu'il ait conclu un accord avec l'université ne modifiant en rien ce statut. Il importe également peu qu'il poursuive, du point de vue fiscal, une activité sans but lucratif, ce qui ne signifie du reste pas qu'il ne perçoit aucun revenu, comme l'attestent les états financiers versés au dossier.

Cela étant, ce n'est pas en fonction du revenu perçu ou de la question de savoir si l'entité en cause avait les moyens de s'acquitter d'un montant déterminé, même si une telle situation a été évoquée s'agissant de l'aéroport (au demeurant amené à prendre en charge la plus grande partie des coûts de recapitalisation des employeurs externes), que le législateur a opéré une distinction, contrairement aux discussions qui ont eu lieu dans le cadre du PL 10847, mais du statut d'entité subventionnée ou non, seules ces dernières, de même que l'État, étant amenées à participer formellement à la recapitalisation. En effet, une telle distinction repose sur des motifs objectifs et raisonnables, ces deux types d'entités - subventionnées ou non - ne se trouvant pas dans une situation identique, le mécanisme de leur participation à la recapitalisation ne devant pas non plus l'être. En outre, tandis que les entités non subventionnées s'acquittent d'un certain montant en vue de cette recapitalisation, la part due par les entités subventionnées est prise en charge par l'État, lequel réduit néanmoins le montant des subventions, ce qui ressort des travaux législatifs des différents PL.

S'il est vrai que la loi 12228 ne prévoit plus de diminution de la cotisation des employeurs, contrairement au PL 12188 ou à la loi 12404, elle ne l'exclut pas, du moins à long terme, puisqu'elle prévoit que tant que le taux de couverture de 80 % n'est pas atteint, toute baisse des cotisations ne peut être effectuée qu'au seul bénéfice de la cotisation employeur (art. 30 al. 7 de la loi 12228). Outre le fait qu'une baisse de la cotisation des employeurs, qui a tout au plus été estimée, pour le recourant, à CHF 700'000.- la première année, ne soit pas déterminable dans le temps, étant donné qu'elle est fonction de la classe d'âge des employés, un tel mécanisme ne pouvait permettre au recourant de compter sur une opération neutre à long terme ni se voir assuré qu'en cours d'élaboration la loi ne serait pas modifiée sur ce point. C'est d'ailleurs le peuple qui, en dernier ressort, a porté sa préférence sur la loi 12228 au détriment de la loi 12404. C'est le lieu de rappeler que le recourant s'est affilié à la CEH puis à la CPEG qui lui a succédé de manière volontaire et sur la base d'une convention d'affiliation qui réservait l'adoption, la modification et l'abrogation unilatérale des lois et des règlements par les autorités compétentes. Le fait qu'il n'ait pas été mis à contribution lors de la création de la CPEG en tant qu'employeur externe affilié à la CEH ne constituait au demeurant pas une garantie qu'il ne serait jamais amené à contribuer à la recapitalisation de la caisse dans le futur, risque qu'il ne pouvait ignorer. En tout état de cause, le fait de prévoir ou non une baisse de la cotisation de l'employeur - et par conséquent une augmentation de celle des employés par le biais d'une répartition différente - demeurait dans la marge d'appréciation du législateur et n'enlevait rien au principe de la participation des employeurs externes à la recapitalisation, ces deux mécanismes étant distincts.

Comme précédemment évoqué, le législateur n'a pas souhaité opérer de distinction entre les entités non subventionnées en fonction de leurs capacités financières, mais a subordonné leur contribution au prorata de leurs engagements, ce qui rend du reste sans objet le grief du recourant à ce titre, notamment sa comparaison avec l'aéroport, qui supporte d'ailleurs une grande part du montant dû par les employeurs externes. Le législateur disposait du reste d'une marge de manoeuvre importante dans le choix des entités en cause, qu'il n'appartient pas à la chambre de céans de critiquer.

Le montant dû par le recourant, tel qu'estimé, est certes important, au regard de ses revenus annuels. Il n'en demeure pas moins que ses charges salariales le sont également et représentent un poste important dans son budget. Le recourant ayant été tenu informé des différents projets, il n'ignorait pas qu'il serait amené à contribuer à la recapitalisation de la CPEG, de sorte qu'il lui appartenait de provisionner les montants en cause, tant le Conseil d'État que le législateur ayant laissé entendre que des modalités de paiement étaient envisageables, notamment par le recours à un prêt. Le recourant ne peut dès lors se prévaloir d'une inégalité de traitement par rapport à l'État, dont le principe d'un prêt figure dans la loi 12228, puisqu'une telle possibilité peut aussi lui être offerte.

e. Pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés, le grief tiré de la violation de l'interdiction de l'arbitraire soulevé par le recourant est mal fondé. Le but de la loi 12228 et de la disposition contestée est de permettre à la CPEG d'augmenter son degré de capitalisation, ce qui constitue un motif objectif et raisonnable, qui s'inscrit dans la ligne des préoccupations exprimées par le législateur fédéral à l'art. 72a LPP. La disposition attaquée n'est pas non plus, en soi, arbitraire, au motif qu'elle fait participer le recourant à cette recapitalisation, une telle mesure, outre le fait qu'elle repose sur un choix d'ordre politique opéré par le législateur cantonal que la chambre de céans ne saurait revoir, vise tous les employeurs affiliés, selon les modalités précédemment rappelées. Par ailleurs, la disposition contestée ne saurait être annulée pour le motif qu'une autre solution aurait été possible ou qu'un autre canton ou la Confédération connaîtrait une réglementation différente. Il s'ensuit que ce grief sera également écarté.

9) a. Le recourant se plaint d'une violation du droit d'être entendu.

b. Dans le cadre d'une procédure législative, c'est-à-dire dans une procédure qui conduit à l'adoption de normes générales et abstraites, la Cst. ne confère pas aux citoyens le droit d'être entendus. Une exception n'est admise que lorsque certaines personnes (destinataires dits « spéciaux ») sont touchées de façon sensiblement plus grave que le plus grand nombre des destinataires « ordinaires », par exemple lorsqu'un décret de portée générale ne touche concrètement qu'un très petit nombre de propriétaires (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_752/2018 précité consid. 3.1).

c. En l'espèce, le recourant ne saurait se prévaloir du droit d'être entendu dans la procédure législative, en présence d'une norme générale et abstraite, ce d'autant qu'il n'apparaît pas être davantage touché que les autres employeurs non subventionnés figurant dans la liste de l'annexe II de l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG. En tout état de cause, il apparaît que le recourant a néanmoins pu se prononcer de manière appropriée sur le principe de sa contribution à la recapitalisation de la CPEG, ce qui résulte de son courrier du 10 janvier 2018 adressé au Conseil d'État, dans le cadre duquel il a expliqué que, d'un point de vue financier, il ne lui était pas possible de s'acquitter de l'apport d'actifs qui lui était demandé, au regard de son montant estimé trop important. Le Conseil d'État a, par la suite, tenu le recourant informé du sort réservé par la commission au PL 12188 et du dépôt du PL 12404 dans son courrier du 14 novembre 2018. Même si, dans ce cadre, le recourant ne s'est pas formellement exprimé sur le PL 12228, il n'en demeure pas moins que le principe d'un apport d'actifs de sa part est resté identique dans les différents projets et qu'il n'a pas indiqué qu'une baisse des cotisations de l'employeur (prévue par le PL 12404 mais non par le PL 12228) aurait un effet sur sa capacité à payer le montant requis, ce qui montre bien que cet aspect n'était pas déterminant. Ce grief sera par conséquent également écarté.

10) Il s'ensuit que le recours sera rejeté.

La chambre de céans s'étant prononcée sur le fond du recours, avant l'entrée en vigueur de la loi 12228, la demande d'octroi de l'effet suspensif devient sans objet.

11) Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 juillet 2019 par A______ contre l'art. 70 al. 3 let. a de la loi 12228 du 14 décembre 2018 modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge d'A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Raphaël Jakob et Soile Santamaria, avocats du recourant, ainsi qu'au Grand Conseil.

Siégeant : M. Verniory, président, MM. Pagan et Martin, Mme McGregor, M. Knupfer, juges.

 

Au nom de la chambre constitutionnelle :

la greffière-juriste :

 

 

 

C. Gutzwiller

 

le président siégeant :

 

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :