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Décisions | Sommaires

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C/9568/2022

ACJC/890/2022 du 29.06.2022 sur SQ/388/2022 ( SQP ) , CONFIRME

Normes : LP.271.al1.ch4; LP.271.al1.ch6
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9568/2022 ACJC/890/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mercredi 29 JUIN 2022

 

 

ETAT DE FRIBOURG, BUREAU DE LA TAXE D'EXEMPTION DE L'OBLIGATION DE SERVIR, route des Arsenaux 16, 1700 Fribourg, recourant contre une ordonnance rendue par la 25ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 mai 2022, comparant en personne,

 

 


EN FAIT

A. Par acte reçu le 20 mai 2022 par le Tribunal de première instance, l'ETAT DE FRIBOURG, soit pour lui le Service de la protection de la population et des affaires militaires, Bureau de la taxe d'exemption, a requis le séquestre du salaire de A______ auprès de son employeur, B______ SA, à la route 1______ à C______ pour un montant de 1'689 fr. avec intérêts à 3% dès le 12 février 2021, 1'689 fr. avec intérêts à 4% dès le 1er janvier 2022 et 18 fr. 30. Il a exposé que ces montants étaient réclamés à titre de taxe d'exemption de l'obligation de servir pour 2019 selon une décision du 12 janvier 2021. Selon la requête, A______ est domicilié "p.a B______ SA". L'ETAT DE FRIBOURG a fondé sa requête sur l'art. 271 al. 1 ch. 4 et 6 LP.

L'ordonnance de séquestre remplie par l'ETAT DE FRIBOURG qui accompagnait la requête mentionne une créance de 1'689 fr. avec intérêts à 3% dès le 12 février 2021 et "18 fr. 30 sans intérêts" avec intérêts à 4% dès le 1er janvier 2022.

L'ETAT DE FRIBOURG a produit à l'appui de sa requête une décision de taxation du 12 janvier 2021 rendue à l'encontre de A______, une sommation du 19 avril 2021 et un dernier rappel avant poursuite du 19 août 2021, faisant état, respectivement, d'un montant réclamé de 1'689 fr., 1'698 fr. 55, comprenant 9 fr. 55 à titre d'intérêts et 1'715 fr. 45, comprenant encore 16 fr. 90 supplémentaire à titre d'intérêts. Toutes ces décisions indiquent une adresse de A______ en Suisse, dans le canton de Fribourg pour la première, puis dans celui de Genève.

B. Par ordonnance du 27 mai 2022, le Tribunal a rejeté la requête et mis les frais judiciaires, arrêtés à 200 fr., à la charge de l'ETAT DE FRIBOURG.

Il a relevé que l'ETAT DE FRIBOURG avait rendu vraisemblable sa créance ainsi que le cas de séquestre, mais que tel n'était pas le cas s'agissant de l'existence en Suisse de biens de A______, l'ETAT DE FRIBOURG se contentant d'alléguer, sans le documenter, que l'intéressé travaillerait auprès de la société mentionnée. La requête était dès lors rejetée, sans qu'il soit nécessaire d'octroyer un délai au requérant pour compléter sa requête eu égard à l'absence d'indication du domicile de A______.

C. Par acte expédié le 10 juin 2022 à la Cour de justice, l'ETAT DE FRIBOURG a formé recours contre cette ordonnance. Il a conclu à l'admission de son recours et à ce que soit reconnu le caractère vraisemblable de l'existence de biens en Suisse de A______, subsidiairement à ce que soit "autorisée la procédure de séquestre", conformément à sa requête du 19 mai 2022.

Il a produit à l'appui de son recours un courriel du 20 janvier 2022 du Service de la taxe d'exemption de l'obligation de servir de l'Administration fiscale cantonale genevoise indiquant l'adresse à C______ de l'employeur de A______, soit B______ SA, ainsi que l'adresse, à D______ (France), de l'intéressé. Il considérait dès lors que, compte tenu de la fiabilité qui devait être attachée à cette information donnée par l'autorité fiscale cantonale genevoise, la vraisemblance de biens en Suisse de A______ était donnée et le séquestre devait donc être ordonné.

L'ETAT DE FRIBOURG a été informé le 21 juin 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Contre une décision refusant un séquestre, qui est une décision finale en tant qu'elle met fin à l'instance d'un point de vue procédural, seul le recours est ouvert (art. 309 let. b ch. 6 et 319 let. a CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_508/2012 du 28 août 2012 consid. 3.2).

En matière de séquestre, la procédure sommaire est applicable (art. 251 let. a CPC).

1.2 Déposé dans la forme et le délai prescrits, le recours est recevable (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

1.3 Au stade de la requête et de l'ordonnance de séquestre, la procédure est unilatérale et le débiteur n'est pas entendu (art. 272 LP; ATF 133 III 589 consid.1).

Dans le cadre du recours contre l'ordonnance de refus de séquestre, la procédure conserve ce caractère unilatéral, car, pour assurer son efficacité, le séquestre doit être exécuté à l'improviste; partant, il n'y a pas lieu d'inviter A______ à présenter ses observations, ce qui ne constitue pas une violation de son droit d'être entendu (ATF 107 III 29 consid. 2 et 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_344/2010 du 8 juin 2010 consid. 5, in RSPC 2010 p. 400, et 5A_279/2010 du 24 juin 2010 consid. 4).

1.4. Le recourant a produit une pièce nouvelle devant la Cour.

1.4.1 Dans le cadre du recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

Les dispositions spéciales réservées par la loi (art. 326 al. 2 CPC) n'entrent pas en ligne de compte, dès lors qu'elles concernent essentiellement les recours contre les jugements de faillite (art. 174 LP) ainsi que les recours sur opposition au séquestre (art. 278 al. 3 LP; Message du Conseil fédéral relatif au Code de procédure civile (CPC), FF 2006 6841, p. 6986; Brunner/Vischer, Kurzkommentar ZPO, 3ème éd., 2021, n. 3 ad art. 326 CPC; Jeandin, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 4 ad art. 326 CPC).

1.4.2 Au vu de ce qui précède, la pièce nouvelle produite par le recourant est irrecevable.

2. Le recourant reproche au Tribunal de ne pas avoir admis qu'il avait rendu vraisemblable l'existence en Suisse de biens du débiteur.

2.1 Selon l'art. 272 LP, le séquestre est autorisé par le juge du for de la poursuite ou par le juge du lieu où se trouvent les biens, à condition que le créancier rende vraisemblable que sa créance existe (ch. 1), qu'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).

Comme cas de séquestre, l'art. 271 al. 1 LP prévoit notamment que le créancier de la dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur lorsque le débiteur n’habite pas en Suisse et qu’il n’y a pas d’autre cas de séquestre, pour autant que la créance ait un lien suffisant avec la Suisse ou qu’elle se fonde sur une reconnaissance de dette au sens de l’art. 82 al. 1 LP (ch. 4), ou lorsque le créancier possède contre le débiteur un titre de mainlevée définitive (ch. 6).

Les créances de salaire d'un frontalier qui travaille en Suisse peuvent être séquestrées au siège suisse de l'employeur (ATF 114 III 31, consid. 2).

2.2 En l'espèce, le recourant n'a pas indiqué dans sa requête de séquestre l'adresse du débiteur et n'a produit devant le Tribunal aucun titre permettant de rendre vraisemblable l'existence de biens du débiteur en Suisse, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, sans que le recourant ne le conteste dans son recours. Ce dernier a produit une pièce devant la Cour afin de réparer son omission à cet égard, laquelle est toutefois irrecevable (cf. supra consid. 1.4.2), de sorte qu'il ne peut en être tenu compte. Pour le surplus, le fait de refuser un séquestre qui ne répond pas aux conditions légales n'heurte pas de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité, contrairement à ce que soutient le recourant et celui-ci pourra renouveler sa requête devant le Tribunal s'il s'y estime fondé.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal a rejeté la requête de séquestre et le recours sera dès lors rejeté.

3. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais judiciaires du recours, arrêtés à 300 fr. (art. 48 et 61 al. 1 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 10 juin 2022 par ETAT DE FRIBOURG, BUREAU DE LA TAXE D'EXEMPTION DE L'OBLIGATION DE SERVIR contre l'ordonnance SQ/388/2022 rendue le 27 mai 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/9568/2022-25 SQP.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute l'ETAT DE FRIBOURG de toute autre conclusion.

Sur les frais :

Arrête les frais judicaires à 300 fr., les met à la charge de l'ETAT DE FRIBOURG et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.