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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/16302/2012

ACJC/210/2013 (3) du 18.02.2013 sur JTBL/1162/2012 ( SBL ) , MODIFIE

Descripteurs : ; BAIL À LOYER ; RÉSILIATION ; CAS CLAIR ; DÉFAUT DE PAIEMENT ; FORMULE OFFICIELLE
Normes : CO.257.d CO.266.n
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16302/2012 ACJC/210/2013

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 18 FEVRIER 2013

Entre

A______ SA, sise ______ Genève, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 22 octobre 2012, comparant par E______ SA, chemin de Grange-Canal 21, 1208 Genève, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile aux fins des présentes,

d’une part,

 

et

 

Monsieur B______, domicilié rue C______ 4, 1213 Onex (GE), intimé, comparant par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle il fait élection de domicile,

d’autre part,

 


EN FAIT

A. Par contrat de bail à loyer signé le 11 mars 2009, D______ SA (actuellement et ci-après : A______ SA), représentée par la régie immobilière E______ SA, a loué à B______ un logement de 4 pièces au 4ème étage de l’immeuble de la rue C______ 4, 1213 Onex, pour la période du 16 mars 2009 au 31 mars 2012, renouvelable, pour un loyer mensuel de 1'800 fr. et des charges de chauffage et d’eau chaude de 160 fr., soit au total 1'960 fr. par mois.

Par lettre recommandée datée du 11 avril 2012 mais envoyée le lendemain, non réclamée malgré un avis de retrait déposé dans la boîte aux lettres le 13 avril 2012, la bailleresse a mis B______ en demeure de lui payer dans les 30 jours l’arriéré de loyer de 3'021 fr. 55, correspondant à deux loyers pour un total de 3'920 fr., sous déduction d’un acompte versé de 918 fr. 45, plus des frais de rappel de 20 fr., à défaut de quoi le bail pourrait être résilié conformément à l’art. 257d al. 2 CO. Il était précisé que le loyer était à jour jusqu’au 29 février 2012.

Une copie retravaillée et resignée de cet avis comminatoire a été adressée en recommandé également le 12 avril 2012 à F______, épouse du locataire, contenue dans une enveloppe et jointe à une lettre d’accompagnement signée, toutes deux à l’intention et au nom de l’épouse. Ce courrier n’a pas non plus été réclamé par celle-ci malgré un avis de retrait déposé dans la boîte aux lettres le 13 avril 2012.

Par lettre de résiliation et avis officiel datés du 21 mai 2012 et adressés en recommandé à B______ le lendemain, A______ SA, constatant que le locataire ne s’était pas acquitté dans le délai imparti de son arriéré de loyer et de charges mentionnés dans l’avis comminatoire et que l’arriéré s’élevait à ce jour à 3'001 fr. 55, soit deux mois de location moins un versement d’acompte de 918 fr. 45, a résilié le bail pour le 30 juin 2012. Ce courrier n’a pas été réclamé malgré un avis de retrait déposé dans la boîte aux lettres le 23 mai 2012.

Des copies retravaillées et resignées de cette lettre de résiliation et de cet avis officiel ont été adressées en recommandé le 22 mai 2012 à l’épouse du locataire, contenues dans une enveloppe et jointes à une lettre d’accompagnement signée, toutes deux à l’intention et au nom de l’épouse. Ce courrier n’a pas non plus été réclamé par celle-ci malgré un avis de retrait déposé dans la boîte aux lettres le 23 mai 2012.

Ces avis et lettres, dont le contenu essentiel est le même pour le locataire et son épouse, contiennent des signatures différentes et une mention manuscrite «Monsieur» au-dessus du nom du locataire dans les versions - en original ou en copie - adressées à F______.

B. Par requête par voie de la procédure sommaire de cas clair (art. 257 CPC) déposée le 8 août 2012 au greffe du Tribunal des baux et loyers, A______ SA a conclu à l’évacuation immédiate par B______ de toute personne, de tous biens et de tous tiers de l’appartement et de ses dépendances de la rue C______ 4 à Onex, en les laissant en bon état de propreté et de réparation locative, ainsi qu’à l’exécution immédiate du jugement.

Lors de l’audience de débats du 15 octobre 2012 tenue devant le Tribunal en présence des représentants de l’Hospice général et de l’Office du logement, B______ a, par la bouche de son conseil, conclu à l’irrecevabilité de la requête, le congé étant affecté d’un vice de forme faute d’avoir été adressé à son épouse au nom de celle-ci. Il a en outre indiqué avoir versé un mois de loyer dans le délai comminatoire, sur les deux qui faisaient l’objet de la mise en demeure; désormais, un ordre de virement permanent avait été donné et il restait à ce jours un solde de 951 fr. 90 en faveur de la bailleresse. Cette dernière a rétorqué que l’arriéré au 31 octobre 2012 se montait à 2'911 fr. 90.

C. Par jugement du 22 octobre 2012, communiqué aux parties le 30 octobre 2012, le Tribunal a déclaré irrecevable la requête en évacuation (ch. 1), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

Les premiers juges ont constaté que l’avis comminatoire et l’avis de résiliation au sens de l’art. 257d CO avaient été adressés en copie, sous pli séparé, à l’épouse du locataire et ont considéré que, la conformité à l’art. 266n CO de cette manière de faire n’ayant pas été tranchée par la jurisprudence et étant controversée en doctrine, le cas n’était pas clair, ce qui conduisait à l’irrecevabilité de la requête.

D. Par acte expédié le 9 novembre 2012 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a conclu à la réformation de ce jugement et a repris ses conclusions de première instance.

B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris, à la nullité du congé du 21 mai 2012 et au déboutement de la bailleresse de toutes autres ou contraires conclusions.

Les parties ont été informées le 23 novembre 2012 que la cause était mise en délibération et qu’une décision serait rendue ultérieurement.

E. L’argumentation juridique des parties sera examinée ci-après dans la mesure utile.


EN DROIT

1. Vu l’application de l’art. 257d CO dans le cadre de la présente cause, la Chambre des baux et loyers de la Cour siège sans assesseurs (art. 121 al. 2 LOJ).

2. 2.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

En l’occurrence, la validité du congé a été contestée par le locataire et mise en doute par le Tribunal.

La jurisprudence relative à la valeur litigieuse dans le cadre de la LTF s’applique aussi au CPC (LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2011, ch. 4.2 p. 47 et ch. 2.1.1 p. 185 note 12). Ainsi, dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer - provisions pour frais accessoires incluses - de la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné; il faut prendre ici en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_217/2007 du 4 septembre 2007 consid. 1; ATF 111 II 384 consid. 1; LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, ch. 4.3 p. 49).

Compte tenu de ces principes, la valeur litigieuse est dans le présent cas de 70'560 fr. (1'960 fr. x 12 x 3), de sorte que la voie de l’appel est ouverte.

2.2 Selon les art. 311 et 314 al. 1 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 10 jours - compte tenu de l’application de la procédure sommaire à une requête de cas clair (art. 257 al. 1 CPC) - à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d'appel.

En l’espèce, ces conditions formelles étant remplies, l’appel est recevable.

2.3 L'appel peut être formé pour violation du droit ou constatation inexacte des faits (art. 310 CPC).

3. La question à trancher dans un premier temps est celle de savoir si la procédure introduite par la requête de l’appelante du 8 août 2012 remplit les conditions du cas clair au sens de l’art. 257 al. 1 CPC et si les premiers juges étaient, dès lors, fondés ou non à la déclarer irrecevable au motif qu’elle ne remplissait pas ces conditions.

En vertu de l’art. 257 al. 1 CPC, le Tribunal admet l’application de la procédure sommaire lorsque les conditions suivantes sont remplies : a. l’état de fait n’est pas litigieux ou est susceptible d’être immédiatement prouvé; b. la situation juridique est claire. D’après l’al. 3, le Tribunal n’entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée.

Cela signifie que l’état de fait doit pouvoir être établi sans peine. En cas de doute, l’affaire doit être traitée dans une procédure complète. La situation juridique peut être considérée comme claire si, sur la base d’une doctrine et d’une jurisprudence éprouvées, la norme s’applique au cas concret et y déploie ses effets de manière évidente. Si la partie adverse, qui doit être entendue (art. 253 CPC), conteste les faits ou oppose une exception à la prétention du demandeur, la protection dans les cas clairs ne peut pas être accordée. Il suffit - à tout le moins - au défendeur de démontrer la vraisemblance de ses objections, mais des allégations dénuées de fondement ne sauraient faire obstacle à un procès rapide (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse [CPC], in FF 2006 p. 6841 ss, spéc. 6959).

Il est admis que la procédure d'évacuation postérieure à une résiliation de bail pour défaut de paiement du loyer appartient, en principe, à la catégorie des cas clairs (HOFMANN/LÜSCHER, Le Code de procédure civile, 2009, p. 165; LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, p. 167).

Toutefois, chaque fois que le locataire excipera dans un cas a priori «clair» de la nullité ou de l’inefficacité du congé, le juge devra estimer la solidité des arguments. S’ils ont une chance de succès, le juge refusera d’admettre le cas clair. En cas de doute, l’art. 257 CPC ne saurait s’appliquer (LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, p. 168).

4. 4.1 Aux termes de l’art. 1 al. 1 du contrat-cadre romand de baux à loyer du 12 décembre 2007 (ci-après : CCR), qui déroge à l’art. 257c CO et qui a été déclaré de force obligatoire générale, le loyer, les acomptes de chauffage et de frais accessoires sont payables par mois d'avance au domicile du bailleur ou à son compte postal ou bancaire.

4.2 En vertu de l’art. 257d CO, lorsque, après la réception de la chose, le locataire a du retard pour s’acquitter d’un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu’à défaut de paiement dans ce délai il résiliera le bail; ce délai sera de 10 jours au moins et, pour les baux d’habitations ou de locaux commerciaux, de 30 jours au moins (al. 1); faute de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d’habitations et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d’un mois (al. 2).

En matière d’évacuation pour défaut de paiement du loyer, le juge doit examiner si la créance invoquée par le bailleur existe, si elle est exigible, si le délai imparti est conforme à l’art. 257d al. 1 CO, si l’avis comminatoire du bailleur est assorti d’une menace de résiliation du bail en cas de non-paiement dans le délai imparti, si la somme réclamée n’a pas été payée, et si le congé satisfait aux exigences de forme prévues aux art. 266l et 266n CO et respecte le délai et le terme prescrits par l’art. 257d al. 2 CO.

La demeure suppose notamment que le locataire ne se soit pas acquitté de la dette de loyer ou de frais accessoires à l’échéance contractuelle ou légale (WESSNER, in Droit du bail à loyer, Commentaire pratique, 2010, n. 9 ss ad art. 257d CO).

Lorsque les conditions formelles et matérielles susmentionnées sont réalisées, l’art. 257d CO ne laisse aucune marge d’appréciation au juge. Il suffit ainsi que l’arriéré de loyer ne soit pas payé dans le délai de 30 jours imparti par le bailleur pour que la résiliation du bail pour non-paiement soit acquise. Le juge doit alors prononcer l’évacuation.

L’autorité de conciliation ou le juge doit constater d’office l’éventuelle inefficacité du congé (LACHAT, Le bail à loyer, 2008, p. 728).

4.3 Selon l’art. 267 al. 1 CO, à la fin du bail, le locataire doit restituer la chose dans l’état qui résulte d’un usage conforme au contrat.

5. 5.1 Dans le cas présent, les premiers juges ont déclaré irrecevable la requête en cas clair de l’appelante au motif que le cas d’espèce pose une question juridique controversée, la doctrine étant partagée sur la question de savoir l’avis comminatoire et l’avis de résiliation au sens de l’art. 257d CO peuvent être adressés en copie, sous pli séparé, au conjoint du locataire ou s’il faut encore que chacun reçoive un formulaire officiel original et distinct.

C’est sur cette question que portent principalement les argumentations respectives des parties dans le cadre de l’appel.

5.2 La jurisprudence du Tribunal fédéral ne répond pas explicitement à cette question.

Lorsque la chose louée sert de logement de famille (art. 169 CC et art. 266m in principio CO), l’art. 266n CO prévoit que le congé donné par le bailleur ainsi que la fixation d'un délai de paiement assorti d'une menace de résiliation (art. 257d CO) doivent être communiqués séparément au locataire et à son conjoint.

Selon un arrêt récent du Tribunal fédéral, cette règle est également applicable lorsque les deux époux sont titulaires du bail. Par envoi séparé, il faut entendre l'expédition à chaque époux, sous deux plis distincts, de la lettre fixant le délai comminatoire pour s'acquitter des arriérés de loyers (art. 257d CO) ou de la formule officielle de congé prescrite par l'art. 266l al. 2 CO. Si la partie qui donne le congé ne respecte pas les prescriptions de forme des art. 266l à 266n CO, le congé est nul en application de l’art. 266o CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_673/2012 du 21 novembre 2012 consid. 3.1).

D’après son sens et son but, l’art. 266n CO ne pose pas, pour la communication du congé, des conditions qui s’écarteraient des principes généraux. L’objectif de la communication séparée est de permettre au conjoint du locataire d’exercer les droits prévus à l’art. 273a CO (ATF 118 II 42 consid. 3 = JdT 1993 I 140; BURKHALTER/MARTINEZ-FAVRE, Commentaire SVIT du droit du bail, 2011, n. 23 ad art. 266l - 266o CO).

Le Tribunal fédéral a retenu que l’avis comminatoire adressé au nom du locataire, dont une copie est également envoyée à son conjoint - en l’occurrence aussi locataire - par pli séparé, est valable et respecte les conditions de l’art. 266n CO, ledit conjoint pouvant comprendre, sans avoir de doute, que la mise en demeure lui est adressée en tant que locataire solidaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_451/2011 du 29 novembre 2011 consid. 5).

Ni la loi ni la jurisprudence n’exigent que l’avis comminatoire et l’avis de résiliation au sens de l’art. 257d CO soient communiqués au locataire et à son conjoint non locataire sur des courriers, respectivement sur des formulaires officiels originaux et distincts, ni que lesdits avis soient au nom du conjoint personnellement lorsqu’ils lui sont adressés. Il découle en outre de l’art. 257d CO que ces avis sont destinés au locataire, la communication séparée à son conjoint - qui n’est pas partie au contrat de bail - visant à informer celui-ci de la situation afin qu’il puisse exercer ses droits. Au-delà de ce but d’information et de clarté pour l’époux, des exigences formelles particulières ne sauraient être exigées du bailleur en plus de la communication au conjoint du locataire du contenu - en original ou en copie - des avis comminatoire et de résiliation (cf., par analogie, ATF 138 III 401 consid. 2 = SJ 2012 I 446 [rés.], selon lequel une hausse de loyer notifiée au moyen d'une formule officielle non signée à la main, mais à l'aide d'un fac-similé, avait atteint son but d'information et le locataire avait reçu toutes les données utiles pour contester la hausse, l'exigence d'une signature manuscrite devant seulement permettre d'authentifier le document). A cet égard, contrairement à ce que semble soutenir l’intimé, l’art. 266m CO vise une situation très différente de celle qui est l’objet de l’art. 266n CO et ne saurait dès lors servir de point de départ pour l’interprétation de ce dernier article. Enfin, aucune règle n’impose au bailleur d’indiquer au conjoint du locataire les droits qui lui sont spécifiques.

L’examen des opinions de la doctrine ne saurait conduire à une autre conclusion. Ainsi, de l’avis de certains auteurs, l’envoi au conjoint d’une photocopie du congé notifié au locataire suffit (LACHAT, Le bail à loyer, p. 632, note 42; BARRELET, in Droit du bail à loyer, Commentaire pratique, 2010, n. 6 ad art. 266n CO). Le chapeau de l’ATF 118 II 42, qui évoque la remise du double du congé au conjoint du locataire, va dans le même sens (cf. HIGI, in Zürcher Kommentar, Die Miete, volume V2b, Art. 266 - 268b OR, 1995, n. 37 ad art. 266m - 266n CO). Les écrits des autres auteurs cités par le Tribunal et l’appelant insistent principalement sur l’exigence de la communication séparée, sur une formule officielle, du congé, sans expressément exiger qu’il s’agisse de formulaires officiels originaux et distincts pour le locataire et son conjoint (WEBER, in Basler Kommentar, OR I, 2011, n. 6 ad art. 266m/266n CO; TERCIER/FAVRE/BUGNON, Les contrats spéciaux, 2009, n. 2371). Par ailleurs, il n’est pas nécessaire que les textes des avis comminatoires et de résiliation communiqués séparément à l’époux soient strictement identiques à ceux notifiés au locataire, ni qu’ils soient écrits au nom du conjoint (HIGI, op. cit., n. 44 s. ad art. 266m/266n CO).

Au vu de ce qui précède, il n’existe aucun doute, d’une part, qu’une copie de l’avis comminatoire et de l’avis de résiliation communiquée séparément au conjoint du locataire peut respecter les conditions de l’art. 266n CO et, d’autre part, qu’une mention du nom du conjoint et de ses droits propres n’est pas nécessaire.

5.3 En l’espèce, en adressant séparément à l’épouse de l’intimé des originaux ou des copies de l’avis comminatoire, respectivement de l’avis de résiliation jointes chacune à une lettre d’accompagnement signée à son intention et se trouvant dans une enveloppe à son nom, l’appelante a en tout état de cause rempli les exigences de forme découlant tant du sens que du texte de l’art. 266n CO. Il importe peu que ces avis et lettres, dont le contenu essentiel est le même pour l’intimé et son épouse, contiennent des signatures différentes et une mention manuscrite «Monsieur» au-dessus du nom du locataire.

Sous cet angle, la validité du congé litigieux ne prête pas le flanc à la critique.

6. Pour le surplus, l’intimé locataire ne conteste pas ne pas avoir réglé l’entier des loyers de mars et avril 2012 dus à la date de la mise en demeure - correctement libellée - dans le délai comminatoire de 30 jours, lequel avait expiré lorsque l’ap-pelante a notifié l’avis de résiliation - conforme aux exigences de forme de l’art. 266l CO - séparément à l’intimé et à son épouse. En outre, le bail a été résilié moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d’un mois.

Les conditions formelles et matérielles de l’art. 257d CO ayant ainsi été respectées et la résiliation étant en conséquence valable et efficace, l’évacuation immédiate de l’intimé, de toute personne vivant dans son logement ainsi que de tous biens s’y trouvant ne peut qu’être prononcée, en application de l’art. 267 al. 1 CO. Les conditions de la requête de cas clair étaient ainsi réalisées, celle-ci étant donc recevable. Le chiffre 1 du dispositif du jugement querellé doit être annulé et réformé dans cette mesure.

L’obligation de remise des locaux en bon état découlant de l’art. 267 al. 1 CO, il n’apparaît pas nécessaire de la rappeler dans le dispositif.

7. 7.1 Aux termes de l’art. 337 CPC (exécution directe), si le Tribunal qui a rendu la décision a ordonné les mesures d’exécution nécessaires (art. 236 al. 3 CPC), la décision peut être exécutée directement (al. 1); la partie succombante peut demander la suspension de l’exécution auprès du tribunal de l’exécution; l’art. 341 CPC est applicable par analogie (al. 2).

D’après l’art. 30 al. 4 LaCC, lorsqu’il est appelé à statuer sur l’exécution d’un jugement d’évacuation d’un logement, après l’audition des représentants des services sociaux et l’audition des parties, le Tribunal peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l’exécution du jugement dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire.

Cette dernière disposition correspond à l'art. 474A aLPC. Celui-ci a été considéré par le Tribunal fédéral comme conforme au droit fédéral et à la garantie de la propriété, pour autant que le droit du bailleur à la restitution de la chose louée (art. 267 al. 1 CO) ne soit pas entravé, notamment par l'octroi à l'ancien locataire de délais de départ équivalant à la prolongation de bail allant au-delà de ce que prévoient les art. 272 ss CO. L'ajournement ne saurait être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail; il doit être limité dans le temps. Un renvoi sine die n'est pas admissible (ATF 117 Ia 336 consid. 2 = SJ 1992 234; ACJC/1129/2011 du 19 septembre 2011 consid. 3).

7.2 En l’occurrence, l’appelante conclut à l’exécution directe et immédiate de l’évacuation.

L’intimé n’invoque aucun motif humanitaire ou autre de nature à faire obstacle à l’exécution de l’évacuation. Néanmoins, compte tenu du fait que l’évacuation n’est prononcée qu’à l’issue de la procédure d’appel ainsi que des difficultés notoires de trouver un logement dans le canton de Genève, il se justifie d’accorder à l’intimé un délai de départ de l’appartement de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

C’est à partir de cette date que l’appelante doit être autorisée à requérir l’évacuation par la force publique du locataire intimé.


8. A teneur de l'art. 22 LaCC, des frais ne sont pas dus dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l’appel interjeté par A______ SA contre le chiffre 1 du dispositif du jugement JTBL/1162/2012 rendu le 22 octobre 2012 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/16302/2012-7-SE.

Au fond :

Annule ledit chiffre 1.

Et, statuant à nouveau :

Condamne B______ à évacuer immédiatement de sa personne, de tous tiers et de tous biens l’appartement et ses dépendances sis à la rue C______ 4, 1213 Onex.

Autorise A______ SA à requérir l’évacuation par la force publique d’B______, de tous tiers et de tous biens à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Monsieur Blaise PAGAN et Madame Elena SAMPEDRO, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.