Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/13191/2009

ACJC/1466/2010 (3) du 13.12.2010 sur JTBL/791/2010 ( OBL ) , CONFIRME

Descripteurs : ; LOYER INITIAL ; LOYER FONDÉ SUR LES COÛTS
Normes : CO.253.b
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13191/2009 ACJC/1466/2010

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre d’appel en matière de baux et loyers

AUDIENCE DU LUNDI 13 DECEMBRE 2010

 

Entre

Monsieur A______, domicilié, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 31 mai 2010, comparant par Me Damien Blanc, avocat, 9, rue Marignac, 1206 Genève, en l’étude duquel il fait élection de domicile,

d’une part,

 

Et

1) Monsieur B______,

2) Madame C______, domiciliés, intimés, comparant, tous deux, par l'ASLOCA, 12, rue du Lac, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle ils font élection de domicile,

d’autre part,

 


EN FAIT

A. Par acte expédié le 15 juillet 2010 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle du jugement du Tribunal des baux et loyers du 31 mai 2010, notifié le 15 juin 2010, fixant le loyer de l'appartement qu'il loue à C______ et B______ dans l'immeuble sis à x à Genève à 2'900 fr. par mois, charges non comprises, dès le 1er novembre 2008 et condamnant le bailleur à restituer le trop-perçu de loyer, avec intérêts à 5%, calculés à la date moyenne.

A______ demande l'annulation de ce jugement et, principalement, la fixation du loyer mensuel, charges non comprises, à 5'600 fr. Subsidiairement, il requiert le renvoi de la cause au Tribunal en vue d'une nouvelle décision après instruction complète, comprenant notamment un transport sur place.

C______ et B______ concluent à la confirmation du jugement entrepris.

B. Les faits suivants ressortent du dossier soumis aux premiers juges :

a. A______, propriétaire, ainsi que C______ et B______ ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement au 8ème étage de l'immeuble sis à x à Genève. Le bail mentionne que l'appartement comporte 9 pièces et 180 m2 chauffés.

Le bail a été conclu pour une durée initiale de 3 ans, du 1er novembre 2008 au 31 octobre 2011, et se renouvelle ensuite tacitement d'année en année. Le loyer mensuel, charges non comprises, a été fixé à 5'600 fr. dès le 1er novembre 2008, à 5'700 fr. dès le 1er novembre 2009 et à 5'800 fr. dès le 1er novembre 2010.

b. Aucun avis de fixation de loyer initial n'a été remis aux locataires.

c. Par requête du 21 avril 2009, déclarée non conciliée et portée devant le Tribunal des baux et loyers le 9 octobre 2009, les locataires ont conclu à la fixation judiciaire du loyer à 2'750 fr. par mois, charges non comprises, dès le 1er novembre 2008. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de cause C/13191/2009.

Une seconde procédure intentée par les locataires (C/13189/2009), encore pendante en première instance, porte sur la nullité d'un avis de modification de bail du 26 novembre 2008, la réalisation de travaux et la réduction de loyer pour défauts de la chose louée.

d. Le bailleur ne s'est pas présenté à l'audience de comparution personnelle fixée dans la présente cause. Le Tribunal a alors ordonné une instruction écrite et a, notamment, fixé au bailleur un délai au 7 décembre 2009 pour produire toutes pièces utiles et effectuer un calcul de rendement.

e. Le 4 décembre, le bailleur a sollicité une nouvelle comparution des parties et un bref délai pour déposer son mémoire de réponse. Par courrier du 7 décembre 2009, il a indiqué que le rendement net de la chose louée était «compris entre 6,7% à 4,7%». Le loyer acquitté par le précédent locataire était de 3'385 fr. par mois. Par ailleurs, l'appartement était constitué de deux appartements de 4 pièces, qui avaient été réunis, et totalisait en conséquence 7 pièces; il ne tombait ainsi pas sous la réglementation de l'art. 253b CO. Il a, enfin, sollicité un transport sur place.

f. Dans une ordonnance du 7 décembre 2009, le Tribunal a octroyé au bailleur un délai complémentaire au 14 décembre 2009 pour répondre et produire toutes pièces utiles en vue de procéder à un calcul de rendement. Les locataires disposaient d'un délai au 18 janvier 2010 pour se déterminer. La cause était par ailleurs remise à plaider au 8 février 2010.

g. Dans leur écriture du 18 janvier 2010, les locataires ont persisté dans leurs conclusions et ont relevé que le bailleur avait, dans son courrier du 7 décembre 2009, admis un rendement abusif, qu'il se refusait de produire les pièces utiles à la résolution du litige et, qu'en conséquence, leurs conclusions devaient être accordées. Les parties ont ensuite renoncé à plaider et la cause a été gardée à juger.

h. Il ressort des écritures de première instance et des pièces produites devant le Tribunal que l'immeuble bénéficie d'une buanderie, du téléréseau et d'un ascenseur. L'appartement est muni d'une cuisine équipée et agencée, d'une cheminée et d'un dressing. Les locataires reconnaissent que l'immeuble et l'appartement sont "généralement bien entretenus", quand bien même de nombreux travaux devaient, selon eux, encore être entrepris dans l'appartement. Celui-ci dispose de quatre balcons. Le bailleur estime que l'appartement compte sept pièces (cuisine comprise; cf. courrier du 7 décembre 2009), les locataires le qualifient d'un "grand cinq pièces" (cf. requête).

C. Le Tribunal a retenu que l'appartement comportait six pièces, cuisine comprise. La remise de l'avis de fixation de loyer initial était ainsi obligatoire. Dès lors qu'il ne s'agissait pas d'un logement de luxe au sens de l'art. 253b CO, le loyer devait être fixé selon les critères de l'art. 269 CO. En l'absence d'indications quant aux loyers usuels, au rendement et au loyer acquitté par le précédent locataire, il convenait de recourir aux statistiques cantonales. L'immeuble ayant été construit entre 1971 et 1980 et les locataires se prévalant du 9ème décile des statistiques pour un appartement en Ville de Genève, ce que le bailleur ne contestait pas, le montant y figurant, à savoir 2'900 fr., était retenu à titre de loyer.

Les arguments des parties en appel seront examinés ci-après dans la mesure utile à la solution du litige.

EN DROIT

1. Interjeté dans la forme et dans le délai prescrits par la loi, l'appel est recevable (art. 443 et 444 LPC).

2. Le Tribunal a tranché une contestation du loyer initial, qui relève du chapitre 2 du titre VIIIème du Code des obligations. Il a ainsi statué en dernier ressort (art. 56P al. 1 LOJ). Seul est en conséquence ouvert l’appel extraordinaire en violation de la loi (art. 292 LPC), dans le cadre duquel la Cour est liée par les faits constatés par le Tribunal, sous réserve d’une appréciation juridique erronée d’un point de fait (art. 292 al.1 let. d LPC), savoir manifestement insoutenable, en contradiction formelle avec les preuves recueillies et causale dans la décision incriminée (BERTOSSA/GAILLARD/GUYET/SCHMIDT, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n. 2 ad art. 445 LPC, n. 6 ss, ad art. 292 LPC).

3. L'appelant expose que l'appartement litigieux occupe la surface de deux appartements de 4 pièces, qui ont été réunis. Sa surface est de 167 m2. Selon le plan figurant au dossier, les chambres mesurent 12 m2, 16m2 et 24,28 m2, la cuisine 11 m2, la salle à manger 13 m2, le salon, muni d'une vaste cheminée, 42,17 m2, le dressing 7,6 m2 et la chambre adjacente 21,15 m2. Par ailleurs, il y a quatre chambres d'eau (une douche, une salle de bains et deux toilettes). La surface élevée pour un appartement de six pièces constituait un indice important permettant de retenir qu'il s'agit d'un appartement de luxe. Le Tribunal ne pouvait, sans procéder à un transport sur place, retenir le contraire. Il avait ainsi violé l'art. 435 LPC.

3.1 Les locataires exposent que le bailleur confond les deux procédures en cours, à savoir celle relative aux défauts de la chose louée dans laquelle un transport sur place a été fixé, puis annulé, et la présente cause, pour laquelle aucun transport sur place n'a été ordonné, celui-ci ne se justifiant pas. Ils contestent que l'appartement soit un logement de luxe au sens de l'art. 253b al. 2 CO.

3.2

3.2.1 Selon 253b al. 2 CO, les art. 269 et suivants CO relatifs à la protection contre les loyers abusifs ne s'appliquent pas aux baux d'appartements et de maisons familiales de luxe comprenant six pièces ou plus, cuisine non incluse. Le nombre minimum de pièces et le caractère luxueux du logement constituent des conditions cumulatives pour l'exclusion des dispositions concernant les loyers abusifs (LACHAT, Commentaire romand, art. 253b CO no 5; WEBER, Commentaire bâlois, art. 253a/253b CO no 7).

La notion de "luxe" s'interprète restrictivement; elle suppose que la mesure habituelle du confort soit clairement dépassée, l'impression générale étant décisive à cet égard. Ainsi, constituent des indices de luxe la présence de marbre à l'entrée de l'immeuble, un service de conciergerie "personnalisé", une piscine, des sanitaires en surnombre, des pièces particulièrement grandes, un jardin spacieux, un environnement très protégé, un excellent état d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral du 1er novembre 1999 dans la cause 4C.265/1999, consid. 6a; HIGI, Zürcher Kommentar, n. 66 ad art. 253a-253b CO; LACHAT, Le bail à loyer, 2008, p. 117 s). La présence d'un seul de ces indices ne suffit pas; il faut que le luxe se dégage de l'ensemble (LACHAT, ibidem).

3.2.2 Les art. 274d al. 3 CO et 435 LPC prévoient que le juge établit d’office les faits et apprécie librement les preuves. Il s’agit d’un cas d’application de la maxime inquisitoriale sociale ou de la maxime des débats atténuée. Fondée sur des considérations socio-économiques, cette maxime tend à protéger la partie la plus faible économiquement, à établir l’égalité entre les parties et à accélérer la procédure (ATF 125 III 231 consid. 4a). Le Tribunal peut proposer aux parties les moyens de preuve destinés à établir leurs allégués; il peut marquer sa préférence, en économie de procédure, pour la production de pièces; il n’est pas tenu d’ordonner des enquêtes relativement à des faits qui peuvent être prouvés par pièces (BERTOSSA/GAILLARD/GUYET/SCHMIDT, op. cit., n. 3 ad art. 435 LPC).

3.3 Le Tribunal a considéré qu'il ne suffisait pas que l'objet loué soit d'une grande surface pour retenir qu'il s'agissait d'un appartement de luxe. Le bailleur n'avait fourni aucun élément qui permettait de considérer que l'appartement était un logement luxueux, de sorte que les locataires pouvaient se prévaloir de la protection des art. 269 ss CO.

Dans son courrier du 7 décembre 2009, le bailleur a uniquement exposé comment les pièces de l'appartement étaient composées et précisé leur surface. Il a conclu qu'il s'agissait d'un appartement de 7 pièces, qui ne tombait pas sous le coup de l'art. 253b al. 2 CO.

Selon les plans produits en première instance par les parties, l'appartement compte, en tout cas, six pièces. Toutefois et comme on le verra ci-après, l'élément de "luxe" au sens de l'art. 253b CO fait défaut en l'espèce. En effet et comme l'a relevé le Tribunal, le seul fait que l'appartement occupe une grande surface ne suffit pas à retenir qu'il s'agit d'un objet de luxe. Selon les pièces et indications fournies par les parties en première instance - qui seules peuvent être prises en compte en appel extraordinaire -, l'immeuble bénéficie d'une buanderie, du téléréseau et d'un ascenseur. L'appartement est muni d'une cuisine équipée et agencée ainsi que d'une cheminée. Les intimés ont indiqué que l'appartement comptait plusieurs balcons; selon les plans produits, il s'agit de quatre balcons. Les parties n'ont pas fourni plus de précisions à cet égard. Toutefois, il est hautement probable que s'il s'était agi de balcons spacieux, le bailleur l'aurait souligné. Les locataires reconnaissent que l'immeuble et l'appartement sont "généralement bien entretenus", quand bien même de nombreux travaux devaient, selon eux, encore être entrepris dans l'appartement. Par ailleurs, mis à part la grande surface du séjour, qui semble se prolonger au-delà de la cheminée, ainsi que de la présence de cette dernière, aucune impression de standing ou de luxe ne se dégage du jeu de photos produit par les intimés en première instance. Ainsi, au vu des allégations du bailleur qui n'a déduit le critère de luxe, au sens de l'art. 253b CO, que de la surface de l'objet loué, et compte tenu des autres indications et des photos de l'appartement produits devant le Tribunal, les premiers juges n'ont pas violé la loi en considérant que le logement litigieux ne constituait pas un objet de luxe. En outre, les éléments au dossier, notamment les photographies produites, permettaient au Tribunal de se prononcer sans devoir procéder à un transport sur place. Le premier grief n'est donc pas fondé.

4. Le bailleur explique qu'il n'est pas en mesure de calculer le rendement de l'immeuble "pour des raisons historiques". Il semble admettre que le Tribunal pouvait ainsi recourir à l'aide des statistiques, mais lui reproche de ne pas avoir suffisamment tenu compte du fait que l'appartement était "hors normes, de par sa surface et ses aménagements". Le loyer de 2'900 fr. était ainsi manifestement trop bas. Les intimés avaient d'ailleurs accepté de payer 3'385 fr. par mois, charges non comprises. Partant, le loyer devait être fixé à 5'600 fr. par mois.

4.1 Les locataires estiment que le manque de collaboration du bailleur, qui n'a produit aucune pièce permettant un calcul de rendement, justifiait que l'on considère que celui-ci cachait un rendement abusif. Le loyer acquitté par le précédent locataire constituait, dans la fixation de leur loyer initial, la limite supérieure. Le Tribunal avait ainsi, à bon droit, fixé le loyer à 2'900 fr. en se fondant sur les statistiques.

4.2 La non-utilisation de la formule officielle prescrite aux art. 270 al. 2 CO et 24 LACC entraîne la nullité partielle du contrat de bail, sous l'angle de la fixation du montant du loyer (ATF 124 III 62 consid. 2a).

La jurisprudence prévoit que le juge appelé à fixer le loyer initial doit fonder sa décision sur toutes les circonstances du cas. Les facteurs à prendre en considération comprennent notamment sur le rendement admissible (art. 269 CO), les loyers pratiqués dans le quartier (art. 269a CO) et le loyer payé par le précédent locataire (ATF 124 III 62 consid. 2b; 121 III 56 consid. 2c; 120 II 341 consid. 6c). Lorsqu'il apparaît que le bailleur a omis de recourir à la forme prescrite afin d'empêcher toute contestation de la part du locataire, il peut se justifier, en cas de différence sensible entre le loyer convenu et celui antérieurement perçu, de fixer le loyer initial à la hauteur de ce dernier, par application analogique de l'art. 269d CO (ATF 120 II 341 consid. 6c; voir aussi ATF 124 III 62 consid. 2b).

Le juge exerce un pouvoir d'appréciation plus étendu que dans la procédure en contestation d'un loyer communiqué selon les formes prescrites; il n'a pas à limiter son intervention au cas où le loyer convenu par les parties est abusif, hypothèse dans laquelle il restreint son examen aux facteurs invoqués par les parties (arrêt du Tribunal fédéral 4A_185/2008 du 24 septembre 2008, consid. 2.3; ATF 121 III 364 consid. 4c).

S'il appartient au locataire qui conteste le loyer initial d’en prouver le caractère abusif, le bailleur doit collaborer loyalement à la preuve et fournir les documents probants en sa possession, soit notamment indiquer les calculs ou exemples comparatifs sur lesquels il s’est fondé pour fixer le loyer initial (FETTER, La contestation du loyer initial, Berne, 2005, n. 515, p. 236). Lorsque le bailleur refuse, comme en l'espèce, de collaborer à l'administration des preuves, certains auteurs - notamment ceux cités dans l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_472/2007 du 11 mars 2008 - préconisent que le juge puisse, considérant le loyer comme abusif en raison du refus du bailleur de produire les pièces qu'il détient (cf. art. 274d al. 3 CO), réduire le loyer initial convenu au montant faisant l'objet des conclusions non déraisonnables du locataire, voire au montant payé par le précédent locataire en cas d'augmentation importante.

La pratique genevoise admet que lorsque le Tribunal ne dispose ni d’informations relatives aux loyers comparatifs, ni d’éléments chiffrés permettant un calcul de rendement, il est admissible de procéder à la fixation du loyer initial en se fondant principalement sur les statistiques cantonales, moyennant les réajustements nécessaires pour tenir compte de certaines particularités du logement loué (ACJC/1314/2007, consid. 3.3; ACJC/254/2006, consid.3.3; ACJC/1303/2007, consid. 3.5). En outre, s’agissant du choix de la statistique à prendre en compte parmi celles établies par l’Office cantonal de la statistique, la Cour a rappelé que le juge disposait d’un large pouvoir d’appréciation que la Cour ne pouvait revoir que sous l’angle de l’appréciation arbitraire des faits, compte tenu de la nature restrictive de la voie d’appel (ACJC/1303/2007, consid. 3.5).

4.3 En l'absence des éléments permettant un calcul de rendement et d'autres indications (par exemple les loyers comparatifs), le Tribunal pouvait, en l'espèce, recourir à l'aide des statistiques cantonales, ce qui n'est plus contesté en appel. S'il est vrai que les statistiques officielles genevoises ne satisfont pas aux exigences de l'art. 11 al. 4 OBLF, dès lors que celles-ci supposent des données chiffrées suffisamment différenciées et dûment établies sur la situation, l'agencement et l'état de la chose louée, comme aussi sur la période de construction (arrêt du Tribunal fédéral 4A_472/2007 du 11 mars 2008, consid. 2.4; ATF 123 III 317 319), elles permettent néanmoins au juge de disposer de données approximatives permettant de fixer le loyer, lorsqu'il ne dispose pas d'autres éléments suffisants (ACJC/552/2005 du 9 mai 2005 et ACJC/1095/2004 du 4 octobre 2004). Le juge procédera toutefois aux réajustements nécessaires pour tenir compte de certaines particularités du logement loué (ACJC/1314/2007, consid. 3.3; ACJC/254/2006, consid. 3.3; ACJC/1303/2007, consid. 3.5).

Les premiers juges se sont fondés sur le montant ressortant des statistiques cantonales des loyers de mai 2008 (OCSTAT, Le niveau des loyers à Genève, p. 57), qui prévoient, au 9ème décile, un loyer de 2'900 fr. par mois pour un logement de six pièces, construit entre 1976 et 1980. Ils n'ont cependant procédé à aucune adaptation de ce montant aux caractéristiques du logement litigieux, contrevenant ainsi à l'art. 269 CO et à la jurisprudence y relative. Il convient ainsi d'y remédier.

Le logement litigieux est très spacieux. Il bénéfice d'une cuisine agencée et équipée, du téléréseau, d'un ascenseur, d'une buanderie et d'une cheminée. Les locataires reconnaissent que l'immeuble et l'appartement sont bien entretenus, même s'ils réclament certains travaux. Par ailleurs, l'appartement est situé au 8ème étage de l'immeuble et dispose de quatre balcons. Ces éléments justifient de s'écarter du chiffre ressortant des statistiques cantonales et de le porter au loyer acquitté par le précédent locataire, soit de 3'385 fr. par mois, charges non comprises. Ce montant tient dûment compte des particularités du logement en question. Par ailleurs, l'augmentation massive du loyer litigieux par rapport à celui acquitté par le précédent locataire ainsi que le fait que le bailleur n'a pas utilisé la formule officielle lors de la conclusion du bail, laissent à penser que le loyer perçu précédemment ne procurait pas au bailleur un rendement excessif.

L'appel sera donc admis et le loyer fixé à 3'385 fr. par mois, hors charges, dès le 1er novembre 2008. Le Tribunal a ordonné la restitution du trop perçu de loyer, "avec intérêts à 5%, calculés sur la date moyenne". Ce dernier point n'a pas été contesté par l'appelant, de sorte qu'il sera maintenu.

5. Chaque partie n'obtient que partiellement gain de cause. Elles seront ainsi chacune condamnées au paiement d'un émolument d'appel (art. 447 al. 2 LPC).

La valeur litigieuse, correspondant à vingt fois la part du loyer annuel encore contestée en appel (art. 51 al. 1 let. a, art. 51 al. 4 LTF), est supérieure à 15'000 fr.

* * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 15 juillet 2010 par A______ contre le jugement JTBL/791/2010 rendu le 31 mai 2010 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/13191/2009-1-L.

Au fond :

Admet l'appel et annule le jugement attaqué.

Cela fait et statuant à nouveau :

Fixe le loyer de l'appartement situé au 8ème étage de l'immeuble sis à x à Genève, remis en location par A______ à C______ et B______, à 3'385 fr. par mois, charges non comprises, dès le 1er novembre 2008.

Condamne A______ à restituer aux locataires le trop-perçu de loyer, avec intérêts à 5%, calculés à la date moyenne.

Condamne A______ à verser à l'Etat de Genève un émolument d'appel de 200 fr.

Condamne C______ et B______ à verser à l'Etat de Genève un émolument d'appel de 200 fr.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Florence KRAUSKOPF, présidente; Madame Marguerite JACOT-DES-COMBES et Monsieur Jean-Marc STRUBIN, juges; Madame Laurence CRUCHON et Monsieur Bertrand REICH, juges assesseurs; Madame Audrey MARASCO, commise-greffière.

La présidente :

Florence KRAUSKOPF

 

La commise-greffière :

Audrey MARASCO

 


Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.