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C/26019/2017

ACJC/1126/2022 du 26.08.2022 sur JTPI/1708/2018 ( SEX ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26019/2017 ACJC/1126/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 26 AOÛT 2022

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [TI], recourante contre un jugement rendu par la 16ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 février 2018, comparant par Me Audrey PION, avocate, Locca Pion & Ryser, promenade du Pin 1, case postale , 1211 Genève 3, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

1) B______ LIMITED, sise ______ (Grande-Bretagne), intimée, comparant par Me Guillaume TATTEVIN, avocat, route de Chêne 11, 1207 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

2) Monsieur C______, domicilié ______ (France), autre intimé, comparant en personne,

3) Monsieur D______, domicilié ______ (Chine), autre intimé, comparant en personne,

4) Monsieur E______, domicilié ______ (Grande-Bretagne), autre intimé, comparant en personne,

5) Madame F______, domiciliée ______ (Chine), autre intimée, comparant en personne.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/1708/2018 du 2 février 2018, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a déclaré exécutoire en Suisse le Worldwide Freezing Order n° CL-1______, rendu le 23 octobre 2017 par la High Court of Justice, Queen’s Bench Division (Commercial Court), entre B______ LTD et C______, A______, E______, D______, et F______ (chiffre 1 du dispositif), fait interdiction aux établissements suisses mentionnés aux "Schedule C à G" du Worldwide Freezing Order du 23 octobre 2017, dès réception de l'ordonnance et sous la menace des peines prévues à l'article 292 CP, d'aliéner ou de diminuer la valeur de tous actifs, avoirs, avoirs, titres, comptes, coffres appartenant à C______, A______, E______, D______, et F______ (individuellement ou collectivement), ou dont ils sont bénéficiaires économiques, ou qui sont détenus pour leur compte, sauf dans la limite de retrait de 1'308 fr. 40 par semaine (ch. 2), arrêté les frais judiciaires à 2'400 fr., mis à la charge des précités conjointement et solidairement, compensés avec l'avance versée par B______ LTD et condamné ceux-ci à verser, conjointement et solidairement, la somme de 2'400 fr. à cette dernière (ch. 3), condamné les précités à verser, conjointement et solidairement, la somme de 2'250 fr. à B______ LTD à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

En substance, le Tribunal a retenu que B______ LTD avait produit la décision dont la reconnaissance était requise ainsi que le certificat nécessaire et qu'à ce stade il n'était pas procédé à l'examen des conditions à la reconnaissance des décisions en application des art. 34 et 35 CL. Les mesures conservatoires sollicitées pouvaient être ordonnées.

B. a. Par acte du 9 mars 2018, A______ forme recours contre ce jugement, qu'elle a reçu le 27 février 2018, et sollicite son annulation, sous suite de frais et dépens.

Elle produit des pièces nouvelles.

b. Par mémoire réponse du 19 juin 2018, B______ LTD conclut au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

Elle produit des pièces nouvelles.

c. Par arrêt ACJC/895/2018 du 5 juillet 2018, la Cour a ordonné la suspension de la cause et dit que la procédure serait reprise à la requête de la partie la plus diligente.

d. Par arrêt ACJC/178/2019 du 5 février 2019, la Cour a ordonné la reprise de l'instruction de la cause suspendue par arrêt du 5 juillet 2018, imparti à A______ un ultime délai de dix jours dès réception de la décision pour verser une avance de frais complémentaire pour la traduction du recours en anglais et réservé la suite de la procédure.

e. Le recours et les pièces ont été envoyées à E______ en Grande-Bretagne, ainsi qu'à C______ en France et un délai leur a été imparti pour répondre au recours. Aucune suite n'y a été donnée.

Le recours et les pièces ont également été envoyées à D______, ainsi qu'à F______, dite G______, en Chine, et un délai leur a été imparti pour élire domicile en Suisse et répondre au recours, en leur précisant, qu'à défaut, seule la décision finale leurs serait communiquée par publication dans la Feuille d'avis officielle du canton de Genève. Aucune suite n'y a été donnée.

f. La réponse de B______ LTD au recours a été transmise à A______ par pli du greffe de la Cour du 22 avril 2022 et celles-ci ont été informées le 10 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants ressortent du dossier.

a. B______ LTD est une société inscrite au registre des sociétés d'Angleterre et du Pays de Galles.

A______ est l'épouse de C______. Les époux ont deux fils, D______, marié à F______, dite G______, et E______.

A______ soutient être domiciliée à H______ (TI), alors que l'intimée affirme qu'elle réside en France, à I______, avec son époux.

b. Dans le cadre d'une action déposée par B______ LTD le 10 mars 2012, la High Court of Justice, Queen's Bench Division, Commercial Court (ci-après: la Haute Cour de Londres) a, par jugement du 28 février 2012, condamné C______, aux côtés d'autres personnes ou entités, à verser à B______ LTD la somme de GBP 8'745'464.

c. Le 28 septembre 2017, la Haute Cour de Londres a rendu, à la requête de B______ LTD, un Worldwide Freezing Order (ci-après: WFO) ex parte visant C______, A______, D______, E______ et F______, dite G______.

Le 23 octobre 2017, après avoir entendu l'avocat représentant C______ et A______, la Haute Cour de Londres a rendu un nouvel WFO, claim CL-1______, faisant interdiction à C______ de disposer d'aucun de ses actifs, qu'il soit situé en Angleterre et Pays de Galles ou ailleurs dans le monde jusqu'à concurrence de GBP 19'000'000. Etaient des actifs de C______, notamment ceux détenus directement par lui ou par l'intermédiaire de sociétés écrans, et par A______ ou l'intermédiaire de sociétés écrans, énumérées dans une annexe D.

L'art. 14 du WFO prévoit que C______ peut dépenser jusqu'à 1'308 fr. 40 par semaine (soit l'équivalent de GBP 1'000) pour des dépenses personnelles, à condition d'en avertir préalablement les avocats de B______ LTD, et que les autres personnes visées par la mesure peuvent dépenser des sommes qui ne proviennent pas des actifs visés et qui ne sont pas détenues conjointement avec ou dans l'intérêt de C______.

d. Entretemps, le 28 septembre 2017, B______ LTD a assigné A______, C______, E______, D______, et F______, dite G______, devant la Haute Cour de justice de Londres (Claim n° 2______ Folio 3______).

e. Le 3 octobre 2017, B______ LTD a requis et obtenu du Tribunal, à l'encontre de C______, le séquestre, à concurrence de 11'362'106 fr., des avoirs au nom de celui-ci ou de tiers mais lui appartenant auprès de J______ SA, K______ SA, L______ SA, M______ SA et N______ SA, le titre de créance étant le jugement rendu par la Haute Cour de Londres le 28 février 2012.

f. Par requête du 8 novembre 2017 au Tribunal dirigée contre C______, A______, E______, D______, et F______, dite G______, B______ LTD a conclu à la constatation de la force exécutoire en Suisse du WFO du 23 octobre 2017 susmentionné. Cela fait, elle a requis des mesures conservatoires, sans entendre les précités, visant notamment en substance à ce qu'il leur soit fait interdiction de disposer de tous actifs, avoirs, titres, comptes, coffres leur appartenant ou dont ils sont bénéficiaires économiques, ou qui sont détenus pour leur compte, sauf dans la limite du retrait de 1'308 fr. 40 par semaine et à ce qu'il soit dit que les mesures conservatoires ordonnées déploieront leurs effets durant le délai de recours contre la constatation de la force exécutoire, sous suite de frais et dépens.

Le Tribunal a rendu le jugement entrepris (cf. A ci-dessus).

g. A la requête de B______ LTD, la Haute Cour de Londres a rendu ex parte, le 8 février 2018, un nouvel WFO à l'encontre de A______. Il y est précisé, au paragraphe 3: "As against the Respondant only, this Order varies an supersedes the worldwide freezing order made against her by Mrs O______ on 23 October 2017. Save insofar as varied and superseded by this Order against the Respondent only, the worldwide freezing order made by Mrs O______ on 23 October 2017 remains in full force and effect",

soit selon la traduction de la recourante: "à l'encontre de la partie défenderesse uniquement, la présente Ordonnance est modifiée et remplace l'ordonnance de gel mondial prise à son encontre par Mme O______ le 23 octobre 2017. Sauf telle que modifiée et remplacée dans cette mesure par la présente Ordonnance à l'encontre de la Partie défenderesse uniquement, l'ordonnance de gel mondial prise par Mme O______ le 23 octobre 2 017 reste pleinement en vigueur".

L'intimée conteste cette traduction s'agissant des termes "modifie et remplace", qui doivent être compris selon elle comme "amende et prévaut sur".

Ce nouvel WFO porte sur les actifs de A______ visés par le WFO du 23 octobre 2017, en particulier ceux des sociétés mentionnées à l'annexe D, ainsi que sur de nouveaux actifs, détenus par des sociétés tierces, dont le nom figure sur une liste qui vient compléter celle de l'annexe D, et "n'interdit pas à la partie défenderesse de dépenser 1'500 £ (ou l'équivalent local soit 1'962 fr. 60 Francs suisses et 15'813, 60 HK$) de frais de subsistance et une somme raisonnable destinée au conseil juridique et à la représentation. Mais avant de dépenser toute somme, la partie défenderesse doit informer les représentants légaux du Demandeur de la provenance de l'argent".

h. Le 1er mars 2018, la Haute Cour de justice de Londres a confirmé ce WFO après avoir entendu les parties.

Il est précisé à l'annexe B de cette décision que "Le demandeur n’utilisera sans l'accord du tribunal aucune information dans le but d’intenter d’autres poursuites civiles ou pénales, que ce soit en Angleterre et au Pays de Galles, ou dans toute autre juridiction (6). Sauf pour les procédures en saisie contre des biens appartenant ou contrôlés par C______ et/ou le défendeur en France et en Suisse (7)".

i. Le 12 février 2018, B______ LTD a requis et obtenu du Tribunal, à l'encontre de C______, le séquestre, à concurrence de 11'420'701 fr., des avoirs au nom de A______ auprès de K______ SA, L______ SA et N______ SA, le titre de créance étant le jugement rendu par la Haute Cour de Londres le 28 février 2012.

j. Dans un courrier du 18 juin 2018 au conseil de A______, le conseil anglais de B______ LTD a fait valoir que le second WFO n'était qu'un complément du premier et ne pouvait exister indépendamment de celui-ci. Il avait été obtenu suite à l'apparition de nouveaux éléments de preuve. Par ailleurs, A______ avait accepté la compétence des tribunaux anglais, suite au WFO du 13 octobre 2017. Elle avait en revanche contesté cette compétence à réception du WFO du 1er mars 2018, ce qui n'était pas possible, celui-ci n'étant qu'un complément du premier WFO.

EN DROIT

1. 1.1 Seule la voie du recours est ouverte en matière d'exécution d'une décision étrangère selon la CL (art. 319 let. a, 309 let. a et 327a CPC).

En matière d'exécution d'une décision étrangère selon la CL, la procédure sommaire est applicable (art. 339 al. 2 CPC) mais, en vertu de l'art. 327a al. 3 CPC qui renvoie à l'art. 43 ch. 5 CL, le délai de recours est d'un mois si la partie contre laquelle l'exécution est demandée est domiciliée en Suisse.

Le recours doit être écrit et motivé.

1.2 Interjeté selon la forme et dans le délai prescrits par la loi, le recours est recevable.

2. Les parties ont produit des pièces nouvelles.

2.1 Dès lors que la procédure de première instance est unilatérale et que la partie adverse ne peut faire valoir son point de vue que dans la procédure de recours, l’art. 326 ne peut trouver application dans la procédure d’exequatur; dans la procédure de recours selon l’art. 43 CLrév en relation avec l’art. 327a CPC, les nova doivent être admissibles, en particulier dans le cas du prononcé ultérieur d’un jugement sur appel dans l’état d’origine (arrêt du Tribunal fédéral 5A_79/2008 du 6 août 2008 consid. 4.2.2). L’admission de nova dans la procédure selon l’art. 327a CPC ne peut pas se fonder sur l’art. 229 CPC (cf. ATF 138 III 625 c. 2.2), mais bien sur l’art. 317 al. 1 appliqué par analogie, d’autant plus que tel qu’il est aménagé, le recours selon l’art. 327a CPC se rapproche de l’appel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_568/2012 du 24 janvier 2013 consid. 4).

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Ces conditions sont cumulatives. S'agissant des vrais nova (echte Noven), soit les faits qui se sont produits après le jugement de première instance - ou plus précisément après les débats principaux de première instance (art. 229 al. 1 CPC) -, la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée (arrêts du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1; 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 5.1; 4A_643/2011 du 24 février 2012 consid. 3.2.2).

2.2 Les pièces nouvelles produites par la recourante sont recevables. Celles postérieures au jugement entrepris qui le sont par l'intimée le sont également. Il en a été tenu compte dans l'état de fait ci-dessus.

3. La recourante soutient que le WFO du 23 octobre 2017, dont l'exequatur a été prononcée aux termes du jugement entrepris, a été remplacé par deux autres WFO, de sorte que le premier n'est plus exécutoire.

3.1 La décision est déclarée exécutoire dès l'achèvement des formalités prévues à l'art. 53, sans examen au titre des art. 34 et 35 (art. 41 al. 1 CL).

Selon l'art. 53 CL, la partie qui invoque la reconnaissance d'une décision ou sollicite la délivrance d'une déclaration constatant sa force exécutoire doit produire une expédition de celle-ci réunissant les conditions nécessaires à son authenticité. La partie qui sollicite la délivrance d'une déclaration constatant la force exécutoire d'une décision doit aussi produire le certificat visé à l'art. 54, sans préjudice de l'art. 55.

La juridiction ou l'autorité compétente d'un Etat lié par la présente Convention dans lequel une décision a été rendue délivre, à la requête de toute partie intéressée, un certificat en utilisant le formulaire dont le modèle figure à l'annexe V de la Convention (art. 54 CL).

A défaut de production du certificat visé à l'art. 54, la juridiction ou l'autorité compétente peut impartir un délai pour le produire ou accepter un document équivalent ou, si elle s'estime suffisamment éclairée, en dispenser (art. 55 al. 1 CL).

3.2 En l'espèce, comme l'a justement retenu le Tribunal, l'intimée a produit la décision dont la reconnaissance était requise ainsi que le certificat nécessaire, tel que figurant à l'annexe V de la Convention.

Contrairement à ce que tente de soutenir la recourante, les WFO rendus postérieurement par la Haute Cour de Londres les 8 février et 1er mars 2018 ne remettent pas en cause le caractère exécutoire de celui du 23 octobre 2017. En effet, ils en complètent seulement la portée, sans la réduire pour autant, comme cela ressort par ailleurs du courrier du conseil de l'intimée du 18 juin 2018. La saisie des actifs visés par le WFO du 23 octobre 2017 n'est pas modifiée par les WFO postérieurs, qui se limitent à ordonner le blocage de biens supplémentaires.

Le grief est infondé.

Il n'est partant pas nécessaire d'examiner plus avant la question de savoir si la recourante était fondée à contester en recours le caractère exécutoire de la décision dont l'exequatur a été ordonnée, comme le plaide l'intimée.

4. La recourante soutient qu'il n'existerait pas de lien de rattachement entre l'objet de la mesure et l'Etat du juge (la Haute Cour de Londres) qui l'a prononcée, de sorte que la mesure ordonnée ne pourrait être qualifiée de provisoire au sens de l'art. 31 CL, ni son exequatur ordonnée.

L'intimée expose que la compétence de la Haute Cour de Londres pour prononcer le WFO dont l'exequatur a été sollicitée n'est pas fondée sur l'art. 31 CL, mais sur celle des juridictions compétentes au fond, qui le sont au titre du lieu du dommage d'un acte délictuel (art. 5 (3) CL), du lieu du tribunal saisi de la demande originaire contre C______ (art. 6 (2) CL) et du tribunal devant lequel le défendeur a comparu (art. 24 CL).

4.1.1 Selon l'art. 31 CL, les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d'un État lié par la présente Convention peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet État, même si, en vertu de la présente Convention, une juridiction d'un autre État lié par la présente Convention est compétente pour connaître du fond.

Si la compétence de l'autorité saisie du litige au fond pour ordonner les mesures provisoires nécessaires reste évidemment acquise, cette disposition autorise ainsi le juge d'un autre pays que celui auquel revient la compétence au fond à prendre des mesures provisoires, étant précisé qu'un lien de rattachement réel entre l'objet de cette mesure et la compétence territoriale de l'État contractant du juge saisi doit néanmoins exister (arrêt du Tribunal fédéral 5A_801/2017 du 14 mai 2018 consid. 3.3.3 et les réf. cit.).

Le lien de rattachement réel entre l'objet des mesures sollicitées et la compétence territoriale de l'Etat contractant du juge saisi correspond à la localisation de l'objet de la mesure, respectivement au lieu d'exécution de celle-ci, l'idée de proximité du juge et du lieu d'exécution de la mesure étant privilégié (BUCHER, CR-LDIP/CL, n. 34 et 35 ad art. 31 CL).

Le lien de rattachement réel n'est exigé que pour les mesures de protection qui ne sont pas ordonnées par un tribunal compétent selon la CL pour trancher le fond. Cela signifie que des mesures de protection avec effet transnational, comme la Freezing Injunction, peuvent être ordonnées contre des personnes domiciliées dans un Etat contractant par un tribunal compétent pour le fond selon les art. 2 ou 5 à 18 CL, indépendamment du fait que le tribunal soit ou non saisi du fond (ATF 129 III 626, SJ 2004 I 82, consid. 5.3.2).

4.1.2 Une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat lié par la présente Convention peut être attraite, dans un autre Etat lié par la présente convention: en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire (art. 5 (3) CL).

Cette même personne peut aussi être attraite s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire, à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé (art. 6 (2) CL).

Outre les cas où sa compétence résulte d’autres dispositions de la présente Convention, le juge d’un Etat lié par la présente Convention devant lequel le défendeur comparaît est compétent. Cette règle n’est pas applicable si la comparution a pour objet de contester la compétence ou s’il existe une autre juridiction exclusivement compétente en vertu de l’art. 22 (art. 24 CL).

4.2 En l'espèce, une procédure au fond est pendante entre les parties devant la Haute Cour de Londres, la recourante ayant au demeurant procédé devant cette juridiction. Il en résulte que celle-ci était également compétente pour ordonner les WFO dont l'exequatur a été sollicitée, sans que l'existence d'un lien de rattachement entre l'Etat requis et la mesure ordonnée ne soit nécessaire.

Le grief est également infondé, de sorte que le recours sera rejeté.

5. La recourante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), sera condamnée aux frais de la procédure de recours, arrêtés à 4'508 fr., compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

Elle sera en outre condamnée à verser à l'intimée 2'000 fr. à titre de dépens de recours (art. 84, 85, 88 à 90 RTFMC; art. 23 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 9 mars 2018 par A______ contre le jugement JTPI/1708/2018 rendu le 2 février 2018 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26019/2017–16 SEX.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 4'508 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ LTD la somme de 2'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.