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Décisions | Sommaires

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C/11269/2022

ACJC/1071/2022 du 23.08.2022 sur JTPI/8418/2022 ( SFC ) , CONFIRME

Normes : LP.191
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11269/2022 ACJC/1071/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 23 AOÛT 2022

 

Pour

Monsieur A______, domicilié ______[GE], recourant contre un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 13 juillet 2022, comparant en personne.

 

 


EN FAIT

A.    A______ a expédié le 10 juin 2022 au Tribunal de première instance une déclaration d'insolvabilité, assortie de diverses pièces relatives à sa situation financière et complétée ultérieurement par le dépôt de pièces supplémentaires.

Il a allégué qu'il vivait avec sa compagne et leur fille de 21 ans. Il était employé à 100% auprès de B______ SA et percevait un salaire mensuel net de 4'581 fr. après saisie sur salaire d'environ 3'100 fr. Sa compagne était sans emploi depuis 2013 suite à un licenciement et leur fille suivait des études. Il faisait l'objet de saisies sur salaire très régulièrement depuis 2013 et avait des dettes pour un montant total de 171'793 fr. 25. Il ne parvenait plus à faire face au paiement de ses factures avec le salaire qui lui restait après saisie sur salaire.

Il ne disposait d'aucune fortune personnelle à part les avoirs déposés sur ses comptes bancaires, à savoir un montant total de 359 fr. 95 auprès de C______ au
6 juillet 2022.

B. Par jugement JTPI/8418/2022 du 13 juillet 2022, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a débouté A______ des fins de sa requête d'insolvabilité (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 50 fr., mis à la charge de ce dernier et compensés avec l'avance fournie (ch. 2) et débouté le précité de toutes autres conclusions (ch. 3).

Le Tribunal a retenu que A______ ne disposait d'aucun actif à réaliser au profit de ses créanciers, de sorte qu'il n'avait pas d'intérêt digne de protection à la déclaration de sa faillite. Sa requête devait être rejetée.

C. Par acte expédié le 18 juillet 2022, A______ forme recours contre ce jugement, qu'il a reçu le 14 juillet 2022. Il souhaite "trouver un arrangement [lui] permettant de vivre décemment". Il attend du juge qu'il lui propose "un compromis acceptable en vue de solder [s]es dettes progressivement".

Il produit des pièces nouvelles.

Il a été informé par courrier de la Cour de justice du 29 juillet 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 al. 1 par renvoi de l'art. 194
al. 1 LP).

Le recours a été interjeté dans le délai utile de 10 jours (art. 174 al. 1 LP) et selon la forme prescrite. Il est partant recevable.

1.2 Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC). Le juge établit les faits d'office (maxime inquisitoire, art. 255 let. a CPC). La preuve des faits allégués doit, en principe, être apportée par titres.

2. 2.1 Dans le cadre d'un recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC). Les dispositions spéciales de la loi sont réservées (al. 2).

En vertu de l'art. 174 al. 1 2ème phrase LP - applicable par renvoi de l'art. 194 al. 1 LP -, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux lorsque ceux-ci se sont produits avant le jugement de première instance. Ainsi, par exception au principe général de l'art. 326 al. 1 CPC, les parties peuvent alléguer des pseudos-nova sans restriction en matière de faillite (arrêt du Tribunal fédéral 5P.263/2003 du 25 août 2003 consid. 3.3.1).

2.2 Les allégations et pièces nouvelles du recourant sont recevables, sans préjudice de leur pertinence.

3. Le recourant fait valoir que la décision du Tribunal serait "inappropriée", vu sa situation financière.

3.1 Aux termes de l'art. 191 LP, le débiteur peut lui-même requérir sa faillite en se déclarant insolvable en justice (al. 1); lorsque toute possibilité de règlement amiable des dettes selon les art. 333 ss est exclue, le juge prononce la faillite
(al. 2).

Le requérant n'a pas un droit inconditionnel au prononcé de sa faillite
(ATF 133 III 614 consid. 6.1.2). Pour que la faillite puisse être prononcée ensuite d'une déclaration d'insolvabilité en justice, il faut que se réalise une condition positive, soit un état d'insolvabilité, et que, simultanément, ne soit satisfaite aucune condition négative, à savoir la possibilité de règlement amiable des dettes, un ajournement de la décision de faillite en raison d'un sursis concordataire ou extraordinaire, une procédure de faillite déjà en cours, une procédure de détermination de retour à meilleure fortune en cours ou un abus de droit manifeste au sens de l'art. 2 al. 2 CC (Cometta, Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n. 4 ad art. 191 LP).

La faillite sur déclaration d'insolvabilité du débiteur offre à celui-ci d'importants avantages. En effet, les saisies à son encontre (même les saisies de salaire) tombent. En outre, cette institution lui procure immédiatement la tranquillité nécessaire pour se reprendre financièrement : déjà après l'ouverture de la faillite, il peut disposer librement de son salaire courant (c'est-à-dire les versements devenus exigibles après l'ouverture de la faillite). De plus, il peut à nouveau être poursuivi pour les créances nées avant la faillite uniquement après son retour à meilleure fortune (Amonn/Walther, Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 9ème éd. 2013, § 38 n. 22-23).

L'interdiction de l'abus de droit est applicable à tout l'ordre juridique, donc également en matière de poursuites et faillite. Dans la procédure de faillite sur déclaration d'insolvabilité du débiteur, le juge doit ainsi vérifier d'office l'application de ce principe à la lumière des circonstances particulières du cas d'espèce (ATF 118 III 27, 113 III 2 consid. 2a).

A titre d'exemple, un débiteur commet un abus de droit lorsqu'il requiert sa faillite, en sachant que la masse en faillite ne comprendrait aucun actif ou lorsqu'il souhaite par ce moyen faire tomber une saisie de salaire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_776/2008 du 15 janvier 2009 consid. 2.1 in fine; cf. également ATF 123 III 402 consid. 3a/aa = JdT 1999 II 102, p. 103 et les réf. citées).

La faillite volontaire prévue à l'art. 191 LP n'est pas une procédure visant à régler la problématique du surendettement des particuliers obérés. Si l'on devait agréer la demande de faillite volontaire de chaque débiteur qui poursuit le but de faire tomber une saisie sur ses revenus, l'art. 93 LP serait pratiquement vidé de sa substance; il ne saurait y avoir libre choix entre la saisie des revenus et la déclaration d'insolvabilité, car les intérêts des créanciers doivent également être pris en compte; dans ce domaine, il ne peut s'agir de faire triompher uniquement le point de vue du débiteur (ATF 145 III 26 consid. 2.2 et les références citées).

3.2 En l'espèce, comme le rappelle la jurisprudence susmentionnée, et contrairement à ce que croit le recourant, la procédure de faillite volontaire n'a pas vocation à résoudre son surendettement.

Au demeurant, le Tribunal a à raison retenu que le recourant ne disposait d'aucun actif susceptible de tomber dans la masse en faillite, ce que celui-ci ne critique d'ailleurs pas. La procédure serait ainsi vouée à l'échec.

Le recours se révèle infondé, de sorte qu'il sera rejeté.

4. Les frais du recours, arrêtés à 75 fr., seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et compensés avec l'avance de frais fournie, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *

 

 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 18 juillet 2022 par A______ contre le jugement JTPI/8418/2022 rendu le 13 juillet 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/11269/2022-5 SFC.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 75 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Marie-Pierre GROSJEAN, greffière.

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Marie-Pierre GROSJEAN

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.