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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2553/2022

DCSO/446/2022 du 10.11.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Non-divulgation de la poursuite; rejet de la demande en non-divulgation; action en reconnaissance de dette introduite
Normes : lp.8a.al1.letd
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2553/2022-CS DCSO/446/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 10 NOVEMBRE 2022

 

Plainte 17 LP (A/2553/2022-CS) formée en date du 12 août 2022 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       A______

______

______[GE].

- B______

c/o Me MARTI Jean-François

Quai Gustave-Ador 26

Case postale 6253

1211 Genève 6.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. B______ a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, le 16 mars 2022 portant sur un montant de 4'500 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le 10 décembre 2021 à titre d'arriérés de loyers pour décembre 2021 pour la location d'un logement 5 pièces.

b. A______ a formé opposition totale au commandement de payer à sa réception.

c. A______ a déposé le 23 juin 2022 auprès de l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) une demande de non-divulgation de la poursuite n° 1______.

d. L'Office a invité le jour même B______ à se prononcer sur la demande de non-divulgation. Ce dernier s'y est opposé car il avait déposé le
25 juillet 2022 une requête en conciliation auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers comportant des conclusions en annulation de l'opposition formée au commandement de payer.

e. L'Office a rendu le 27 juillet 2022 une décision rejetant la demande de non-divulgation de A______, le créancier ayant introduit une action pour annuler l'opposition.

A______ a reçu cette décision le 4 août 2022, en même temps que les déterminations de B______ sur sa demande de non-divulgation qui lui a été communiquée dans le même courrier.

B. a. Par acte expédié le 12 août 2022 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre cette décision dont elle a conclu à l'annulation et à ce que l'Office rende une décision de non-divulgation de la poursuite n° 1______.

Elle invoquait en substance le fait que l'Office avait rendu sa décision sans respecter son droit d'être entendue puisqu'elle n'avait pas été interpellée pour se déterminer contrairement à B______, qui en avait profité pour déposer la requête en conciliation – ce qu'il n'aurait pas fait si l'Office ne l'avait pas interpellé. Le montant du loyer litigieux avait été consigné et diverses procédure opposaient les parties devant le Tribunal des baux et loyers. La poursuite était dès lors abusive.

b. Dans ses observations du 30 août 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte au motif que le créancier avait établi avoir déposé une action visant à faire reconnaître la dette et obtenir l'annulation de l'opposition formée au commandement de payer. En outre, la débitrice avait admis avoir consigné le montant en poursuite, preuve qu'elle reconnaissait le devoir et s'en était acquittée.

c. Dans ses observations du 22 août 2022, B______ également conclu au rejet de la plainte au motif qu'il avait entrepris les démarches nécessaires en vue de faire annuler l'opposition formée au commandement de payer.

d. La Chambre de surveillance a informé les parties, par courrier du
13 septembre 2022, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2. La plaignante fait grief à l'Office de ne pas avoir respecté son droit d'être entendue.

2.1.1 Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH comprend en particulier le droit, pour une partie à une procédure, de prendre connaissance de toute argumentation présentée à l'autorité et de se déterminer à son propos ("droit de réplique", "Replikrecht"); peu importe que celle-ci contienne de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit propre à influer concrètement sur la décision à rendre. En effet, il appartient aux parties, et non à l'autorité, de décider si une prise de position ou une pièce produite contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvellement versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent faire usage de leur droit de réplique (ATF 139 I 189 consid. 3.2; 139 II 489 consid. 3.3; 138 I 154 consid. 2.3 p. 157, 484 consid. 2.1 p. 485 s.; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197; arrêt 4A_29/2014 du
7 mai 2014 consid. 3, non publié in ATF 140 III 159).

Si l'autorité communique l'écriture pour information sans fixer de délai pour d'éventuelles observations, elle doit surseoir à statuer afin de permettre à la partie adverse de déposer des observations spontanées et ne rendre sa décision qu'après écoulement d'un laps de temps suffisant pour admettre que la partie intéressée a renoncé à répliquer (arrêt du Tribunal fédéral 4A_332/2011 du
21 novembre 2011, consid. 1). Un délai inférieur à dix jours ne suffit pas à garantir l'exercice du droit de répliquer de manière spontanée (arrêts du Tribunal fédéral 5D_81/2015 du 4 avril 2016 consid. 2.3.4, 5A_174/2016 du 25 mai 2016 consid. 3.2).

En principe, la violation du droit d'être entendu entraîne l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond, et pour peu qu'elle ait eu une influence sur cette décision. Cela étant, la jurisprudence admet qu'un manquement à ce droit puisse être considéré comme réparé lorsque la partie lésée a bénéficié de la faculté de s'exprimer librement devant une autorité de recours, pour autant que celle-ci dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et puisse ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2017 précité).

2.1.2 Lorsque l'office des poursuites est saisi par le débiteur d'une demande en non divulgation au sens de l'art. 8 al. 1 let. d LP, il la rejette si, dès réception, il sait qu'une procédure de mainlevée d'opposition a été engagée concernant la poursuite contestée, voire que la continuation de la poursuite a été requise. S'il n'a pas connaissance d'une telle démarche, il demande au créancier de prendre position sur la demande de non-divulgation du débiteur. Si le créancier fournit la preuve qu'il a engagé une procédure visant à faire annuler l'opposition, la poursuite est à nouveau portée à la connaissance des tiers en application de l'art. 8a LP (Instruction n° 5 du 18 octobre 2018 de l'Office fédéral de la justice, Service Haute surveillance LP, concernant le nouvel art. 8a al. 3 let. d LP – ci-après : Instruction n° 5 – chiffre 4 § 3 et 5). Pour prouver qu'il a engagé une procédure visant à faire annuler l'opposition, le créancier peut fournir la confirmation de remise à la poste ou l'accusé de réception de la demande de mainlevée ou du mémoire introduisant l'action en reconnaissance de dette (Instruction n° 5, chiffre 4 § 5).

2.2 En l'espèce, la plaignante a exprimé sa position devant l'Office en déposant la demande de non divulgation. L'Office l'a communiquée au créancier afin qu'il puisse se déterminer. L'Office a ensuite communiqué les déterminations du créancier à la débitrice en même temps qu'elle lui notifiait sa décision. Ce faisant, l'Office n'a pas permis à la plaignante de déposer une réplique sur les déterminations du créancier.

En matière de décision sur non-divulgation, la procédure exposée ci-dessus prévoit expressément que l'Office rende sa décision dès qu'il dispose de l'information selon laquelle le créancier a entrepris les démarches idoines aux fins d'obtenir l'annulation de l'opposition, sans que le débiteur ne soit encore autorisé à s'exprimer sur le vu de l'information détenue par l'Office. Il n'y a donc pas de violation du droit d'être entendu en l'occurrence.

En tout état, la plaignante a pu faire valoir – et a fait valoir – sa position sur les déterminations du créancier devant l'autorité de surveillance qui connaît de la cause avec un plein pouvoir de cognition. Ainsi, dans la mesure où une violation du droit d'être entendu aurait été commise en l'espèce, elle aurait été réparée devant la Chambre de céans.

Le grief de la plaignante fondé sur la violation de son droit d'être entendue sera par conséquent écarté.

3. 3.1 En application de l'art. 8a al. 1 LP, toute personne peut consulter les procès-verbaux et les registres des offices des poursuites et des offices des faillites et s’en faire délivrer des extraits à condition qu’elle rende son intérêt vraisemblable. Toutefois, aux termes de l'art. 8a al. 3 let. d LP, les Offices ne doivent pas porter à la connaissance de tiers : ( ) d. les poursuites pour lesquelles une demande du débiteur dans ce sens est faite à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification du commandement de payer, à moins que le créancier ne prouve, dans le un délai de 20 jours imparti par l'Office, qu'une procédure en annulation de l'opposition (art. 79 à 84 LP) a été engagée à temps; lorsque la preuve est apportées par la suite, ou lorsque la poursuite est continuée, celle-ci est à nouveau portée à la connaissance de tiers.

Dans le cadre de l'application de cette disposition, l'Office doit uniquement déterminer si le poursuivant a ou non engagé une procédure tendant à faire écarter l'opposition formée par le débiteur. Il ne saurait donc examiner lui-même si la prétention déduite en poursuite paraît ou non justifiée, ni émettre un pronostic sur l'issue des démarches judiciaires éventuellement engagées par l'une ou l'autre des parties (arrêt du Tribunal fédéral 5A_319/2020 du 7 mai 2020 cons. 2). L'aspect justifié ou non de la poursuite, au sens de l'art. 8a al. 3 let. d LP, s'apprécie uniquement au regard de l'action ou de l'inaction du poursuivant. Il en résulte que la simple introduction par le poursuivant d'une requête de mainlevée fait obstacle à la non-divulgation de la poursuite, quand bien même cette requête serait ensuite rejetée ou déclarée irrecevable et que le poursuivant n'engagerait pas d'autre démarche (ATF 141 III 41 cons. 3.3).

En outre, lorsque le débiteur paie la créance en poursuite, il ne peut plus invoquer ultérieurement le caractère injustifié de la poursuite et ne peut plus s'opposer à sa divulgation (Instruction n° 5 du Service de la haute surveillance LP du 18 octobre 2018 concernant l'art. 8a al. 3 let. d LP, § 4.2).

3.2 En l'espèce, la décision entreprise constate d'une part que la débitrice s'est libérée de la dette en poursuite en en consignant le montant et, d'autre part, que le créancier a introduit une action visant à obtenir l'annulation de l'opposition formée au commandement de payer. Les conditions étaient par conséquent réunies pour que la poursuite soit communiquée aux tiers en application de l'art. 8a LP et la décision de l'Office de rejeter la demande de non-divulgation était fondée.

La plainte sera par conséquent rejetée.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

 

*****


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte du 12 août 2022 de A______ contre la décision de l'Office du 27 juillet 2022 rejetant sa demande de non-divulgation de la poursuite n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Natalie OPPATJA et
Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.