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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/529/2022

DCSO/196/2022 du 19.05.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Requête en faillite; octroi de l'AJ au requérant; portée; frais de liquidation de la faillite; décision d'octroi d'AJ limitée; compétence de la CSO pour statuer sur la portée d'une décision AJ
Normes : lp.169
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/529/2022-CS DCSO/196/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 19 MAI 2022

 

Plainte 17 LP (A/529/2022-CS) formée en date du 14 février 2022 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Sandy Zaech, avocate.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me ZAECH Sandy

TerrAvocats Genève

Rue Saint-Joseph 29

Case postale 1748

1227 Carouge GE.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


Attendu, EN FAIT, que B______ SARL s'est engagée à verser à A______ la somme de 20'261 fr. 70 dans le cadre d'une transaction judiciaire entérinée au cours de l'audience du Tribunal des prud'hommes du 10 novembre 2020.

Que faute de paiement dudit montant, A______ a requis, le 4 décembre 2020, la poursuite, puis, le 27 août 2021, la faillite de B______ SARL.

Qu'elle a été mise au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la "requête en faillite" de B______ SARL, octroi limité à "environ deux heures d'activité, forfait courriers / téléphones et audiences en sus".

Que la faillite de B______ SARL a été prononcée le 30 septembre 2021.

Que la faillite a été suspendue par jugement du 9 décembre 2021, faute d'actifs permettant de couvrir les frais de liquidation.

Qu'aucun créancier n'a requis la liquidation sommaire ni avancé les frais de liquidation dans le délai fixé par l'Office.

Que la clôture de la faillite a été prononcée par jugement du 27 janvier 2022.

Que, par décision du 1er février 2022, l'Office a invité A______ à régler le solde des frais de la faillite non couverts par les actifs liquides de la faillie en 1'031 fr. 60.

Que ce montant est le solde négatif de la liste des mouvements du sous-compte de l'Office dévolu à la gestion financière de la faillite de B______ SARL (11'395 fr. 15 de frais, émoluments, débours, dettes de la masse, restitutions suite à revendications et versements au bailleur créancier gagiste – 10'363 fr. 55 de crédits, soit des liquidités issues des comptes de la faillie auprès de [la banque] C______, notamment un compte de garantie-loyer).

Que les frais judiciaires (200 fr.) et les dépens (400 fr.) du jugement de faillite, mis à la charge de la faillie, ne sont pas compris dans ce décompte.

Que par acte expédié le 14 février 2022 au greffe de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillite (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre cette décision, concluant à son annulation, au motif qu'elle était au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure de faillite, que la créance avait été constatée dans une procédure prud'homale gratuite et que la décision attaquée la mettait en situation financière difficile.

Que dans sa réponse du 8 mars 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte, sa décision étant fondée sur l'art. 169 al. 1 LP; que l'octroi de l'assistance judiciaire pour la requête de faillite et la gratuité de la procédure prud'homale n'interféraient pas dans l'application de cette norme.

Considérant, EN DROIT, qu'à teneur de l'art. 169 al. 1 LP, celui qui requiert la faillite répond des frais jusqu'à et y compris la suspension des opérations faute d'actif ou jusqu'à l'appel aux créanciers.

Que par frais de la faillite au sens de cette disposition on entend aussi bien les émoluments que les frais définis par l'OELP, en particulier : par les art. 52 et 53 lit. a OELP pour la déclaration judiciaire de la faillite et sa suspension (ATF 118 III 29 = JdT 1994 II 69) ainsi que les mesures conservatoires de l'art. 170 LP; par l'art. 49 al. 2, 1ère phr. OELP pour leur avance; par les art. 43 à 47 OELP pour la phase de liquidation, en particulier pour les frais liés à la formation de l'inventaire (art. 221 ss LP). Que les frais sont en premier lieu à la charge de la masse en faillite. Que ce n'est que si les actifs disponibles sont insuffisants à couvrir les frais que le créancier tenu à les avancer devra en répondre à titre subsidiaire dans les limites de l'art. 169 al. 1 LP (ATF 102 III 87 = JdT 1978 II 2; Cometta, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 2 et 3 ad art. 169 LP).

Que le droit fédéral des poursuites règle la question des frais et dépens dans cette matière et ne mentionne pas le droit à l'assistance judiciaire. Que, toutefois, celui-ci découle du droit constitutionnel fédéral et s'étend également à cette matière (ATF
122 I 8 = JdT 1998 II 77; 121 I 60 consid. 2.a.cc et 2.b = JdT 1997 II 135; 119 III 113 = JdT 1996 II 105; 118 III 33 = JdT 1994 II 137). Que l'assistance judiciaire peut donc être requise en matière de poursuite et de faillite, notamment dans le cadre d'une requête en faillite. Que c'est le droit cantonal qui arrête les conditions auxquelles l'assistance est octroyée, dans le cadre fixé par le droit fédéral (ATF 118 III 33 consid. 2.a = JdT 1994 II 137).

Que l'assistance judiciaire en matière de faillite peut être sollicitée tant par le débiteur qui requiert sa déclaration d'insolvabilité que par le créancier requérant la faillite de son débiteur (ATF 118 III 33 consid. 2.a = JdT 94 II 137).

Que l'octroi de l'assistance judiciaire pour la requête de faillite porte en principe sur les frais et dépens du prononcé judiciaire de la faillite ainsi que sur les frais de la faillite au sens de l'art. 169 LP (ATF 119 III 113 consid. 2 = JdT 1996 II 105).

Qu'à Genève, les modalités de l'assistance judiciaire sont réglées, pour les procédures civiles (art. 117 à 123 CPC), pénales (art. 132 à 138 CPP) et administratives (art. 10 LPA/GE), par le règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, pénale et administrative (RAJ; RS/GE E 2 05.04);

Que l'art. 63 LOJ/GE prévoit également le droit à l'assistance juridique extrajudiciaire pour toute personne physique domiciliée dans le canton de Genève et susceptible d'intervenir comme partie dans une procédure, dont les moyens sont insuffisants pour lui assurer l'aide nécessaire d'un avocat ou d'un médiateur en dehors d'une procédure administrative ou judiciaire pour la poursuite d'un intérêt digne de protection (art. 63 al. 1 et 2 LOJ/GE).

Qu'en matière judiciaire civile et administrative, ainsi qu'en matière extrajudiciaire, l'assistance est octroyée sur requête de l'intéressé (art. 64 al. 1 LOJ/GE; art. 6 RAJ).

Que l'octroi de l'assistance peut être limité à certains actes de procédure ou démarches déterminées ainsi que dans la quotité des heures nécessaires à l'activité couverte. Que toute procédure ou démarche connexe doit faire l'objet d'une nouvelle requête (art. 3 al. 1 RAJ).

Qu'en l'espèce, la plaignante a obtenu l'assistance judiciaire civile pour une requête de faillite, avec limitation du temps d'activité de l'avocat désigné d'office.

Que la portée de la décision d'octroi de l'assistance judiciaire était limitée à la procédure judiciaire de prononcé de la faillite;

Qu'elle a ainsi été dispensée de verser l'avance de frais et les honoraires de son conseil en lien avec cette démarche, lesquels ont été pris en charge par l'Etat de Genève.

Qu'un complément d'octroi d'assistance juridique aurait dû être requis pour une extension aux frais de liquidation de la faillite mis à la charge du créancier requérant en application de l'art. 169 LP, vraisemblablement sous l'angle de l'assistance juridique administrative ou extrajudiciaire.

Que pour le surplus, la Chambre de surveillance constate que sa compétence matérielle se limite à vérifier que l'Office a correctement appliqué l'art. 169 LP en établissant le décompte litigieux et en imputant ces frais à la plaignante, ce qui est le cas.

Que le fait de savoir si de tels frais doivent ou non être couverts par l'assistance juridique – si cet objet devait être litigieux – ne relève pas de sa compétence, mais des autorités compétentes en matière d'octroi de l'assistance juridique.

Que les autorités de poursuite ne peuvent qu'appliquer les décisions rendues en matière d'assistance juridique dont elles constatent préjudiciellement l'existence et la portée.

Qu'ainsi, tout au plus, l'autorité de surveillance pourrait reprocher à l'Office de ne pas avoir tenu compte d'une décision d'assistance juridique couvrant les frais de liquidation de la faillite et de ne pas avoir exonéré un créancier de ces frais.

Que tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce.

Que la plainte est ainsi infondée en tant qu'elle attaque le décompte de frais de la faillite mis à la charge de la plaignante et, dans la mesure où elle porterait sur la portée de la décision d'assistance juridique, irrecevable.

Que la plaignante invoque encore la gratuité pour les litiges de valeur inférieure à 75'000 fr. en première instance et à 50'000 fr. en appel en matière prud'homale (art. 68 et ss RTFMC) en se prévalant du fait que la créance sur la base de laquelle elle a requis la faillite avait été constatée par le Tribunal des prud'hommes.

Que la gratuité instaurée en matière prud'homale est limitée à la procédure devant cette juridiction et ne saurait s'étendre à des conséquences lointaines telles que les frais de la faillite requise sur la base d'un jugement prononcé par le Tribunal des prud'hommes.

Qu'enfin, la situation financière difficile de la plaignante n'est pas un critère pertinent dans l'application de l'art. 169 LP.

Que la plainte sera par conséquent rejetée dans la mesure où elle est recevable.

Que la procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 14 février 2022 contre la décision du 1er février 2022 de l'Office des faillites, mettant à la charge de A______ les frais de la faillite de B______ SARL.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et
Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.