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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/826/2022

JTAPI/633/2022 du 14.06.2022 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/1126/2022

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR
Normes : LEI.31.al1.letb; LEI.64.al1.letc; LEI.83; OASA.30
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/826/2022

JTAPI/633/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 14 juin 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1990, est originaire du Kosovo.

2.             Il indique être arrivée en Suisse le 15 avril 2015.

3.             Le 24 juillet 2021, il a déposé, par l’intermédiaire de Monsieur B______, une demande d’autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), et sollicitait une autorisation de travail provisoire jusqu’à droit connu.

Il résidait en Suisse depuis 6 ans et y était bien intégré.

4.             M. A______ a sollicité la délivrance d’un visa pour lui permettre de se rendre au Kosovo pour des raisons personnelles le 27 novembre 2021, lequel lui a été délivré.

5.             Le 15 novembre 2021, l’OCPM a fait suite à sa requête du 24 juillet 2021. Au vu du manque de clarté de celle-ci, elle pouvait être interprétée soit comme une demande d’autorisation de séjour en vue d’exercer une activité lucrative salariée, auquel cas il appartenait à son employeur d’introduire une demande auprès de l’office cantonal de l’inspection des relations de travail, soit comme une demande d’autorisation de séjour délivrée en dérogation aux conditions d’admission de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) dans le but de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité, auquel cas il avait l’intention de refuser d’accéder à cette requête et donc de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), et de prononcer son renvoi de Suisse.

Un délai de trente jours lui était octroyé pour faire valoir ses observations et objections éventuelles.

6.             Dans le délai prolongé au 15 janvier 2022, M. A______ n’a pas transmis d’observations.

7.             Par décision du 10 février 2022, l’OCPM a refusé d’accéder à sa requête et donc de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM, et a prononcé son renvoi de Suisse.

M. A______ indiquait être arrivée en Suisse le 15 avril 2021 sans pour autant avoir fourni de preuve confirmant sa présence sur le territoire suisse. Quand bien même il aurait été en mesure de justifier de la durée de son séjour en Suisse, il estimait qu’elle était de courte durée et ne saurait constituer un élément déterminant susceptible de justifier une suite favorable à la requête. Il ne remplissait par ailleurs pas les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité puisqu’il n’avait pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse, ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence.

Par ailleurs, il n’avait pas démontré qu’une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstance générales affectant l’ensemble de la population restée sur place.

Enfin, il ne pouvait pas se prévaloir d’une intégration professionnelle ou sociale particulièrement marquée au point de devoir admettre qu’il ne puisse pas quitter la Suisse sans devoir être confronté à des obstacles insurmontables ; il n’avait en effet pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu’il ne puisse plus raisonnablement envisager un retour au Kosovo.

Au surplus sa présence sur le territoire helvétique devait être relativisé par rapport aux nombreuses années passées au Kosovo. Arrivé en Suisse à l’âge de 24 ans, il avait passé toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie adulte dans ce pays, années apparaissant comme essentielles pour la formation de la personnalité et, partant pour l’intégration sociale et culturelle.

8.             Par acte du 14 mars 2022, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant préalablement à ce qu’un délai complémentaire au 28 mars 2022 lui soit octroyé pour compléter son mémoire et, au fond, principalement à l’annulation de la décision et à ce que l’autorisation de séjour lui soit accordée sous l’angle de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), subsidiairement au renvoi de la cause à l’OCPM en l’invitant à soumettre son dossier au SEM avec un préavis positif, plus subsidiairement à ce qu’il soit renoncé à son renvoi et qu’une admission provisoire lui soit accordée, le tout sous suite de frais et dépens.

Agé de 31 ans, il avait passé en Suisse presqu’un quart de sa vie ; la majeure partie de sa famille, avec qui il avait des liens très étroits, était établie à Genève, à l’exception de ses parents âgés dont il prenait soin économiquement. En sept ans il avait par ailleurs tissé un cercle d’amis avec lesquels il entretenait des liens qui s’étaient considérablement durcis ces dernières années : en cas de renvoi, ces personnes, privées de leur ami, seraient touchées affectivement.

Il avait un emploi stable et son activité emportait l’entière satisfaction de son employeur actuel ; le pronostic d’une intégration réussie ne faisait aucun doute. Son casier judiciaire était vierge et il n’avait jamais émargé à l’aide sociale ni contracté de dettes. Il était actuellement hébergé chez son frère.

Ainsi, ne pas lui accorder d’autorisation de séjour et prononcer son renvoi de Suisse violait l’art. 8 CEDH qui imposait le respect de la vie privée et familiale. Rien n’indiquait par ailleurs qu’il constituerait une menace pour l’ordre juridique suisse et le bien-être économique de la Suisse.

Enfin, il n’avait plus aucun lien ni réseau d’amis au Kosovo et ses parents habitaient un petit appartement dans lequel ils ne pouvaient pas l’accueillir. Dès lors, il se retrouverait sans abri et sans emploi en cas de retour au Kosovo, alors que tout son réseau familial et amical se trouvait à Genève.

Les mêmes motifs le fondaient à requérir du tribunal qu’il renonce à prononcer son renvoi.

9.             Le recourant n’a pas complété son recours dans le délai au 28 mars 2022 que le tribunal lui avait octroyé.

10.         L’OCPM a répondu au recours le 10 mai 2022, concluant à son rejet, les arguments soulevés par le recourant n’étant pas de nature à modifier sa position.

11.         Le recourant n’a pas répliqué.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             L’objet du litige concerne la décision prise par l’OCPM le 10 janvier 2022, refusant au recourant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’extrême gravité.

6.             La loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 al. 1 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

7.             Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte des cas individuels d'extrême gravité.

8.             L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), de sa situation familiale (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que de ses possibilités de réintégration dans son État de provenance (let. g).

9.             Le critère de l'intégration du requérant se base sur le respect de la sécurité et de l'ordre public, le respect des valeurs de la Constitution, les compétences linguistiques, la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (art. 58a LEI).

Selon les directives et commentaires du SEM (domaine des étrangers, octobre 2013, état au 1er janvier 2021, p. 41 ch. 3.3.1 ; ci-après : Directives LEI), les critères d’intégration (art. 58a LEI) servent de base à l'appréciation de l'intégration d'un étranger. Les principes juridiques appliqués jusqu'à présent à la notion « d'intégration réussie » et la jurisprudence y relative restent en principe valables, à ceci près que les exigences linguistiques sont désormais précisées (Directives LEI, ch. 3.3.1).

Les critères de l'art. 58a LEI doivent impérativement être respectés, mais ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 III consid. 3.2.3 ; 137 II consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

10.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 137 II 345 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1 ; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; Directives LEI, ch. 5.6).

11.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.25/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

12.         La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré, socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas personnel d'extrême gravité: il faut encore que la relation du requérant avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse pas exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine (ATF 123 II 125 consid. 2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1714/2016 du 17 septembre 2019 consid. 5.2 et références citées).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1 ; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5d).

13.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2020 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid. 4.6 et les références citées ; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5d ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4d).

14.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2). La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée, soit sept à huit ans (ATA/200/2021 du 23 février 2021 consid. 8c ; ATA/684/2020 du 21 juillet 2020 consid. 7e; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269).

15.         S'agissant de l'intégration professionnelle, elle doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A_543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées).

Le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, d'éviter de commettre des actes répréhensibles et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu de domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant, à elles seules, de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée, susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/ 2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2).

16.         Il ne faut pas non plus perdre de vue qu’il est parfaitement normal qu'une personne ayant effectué un séjour prolongé en Suisse s'y soit créée des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Aussi, les relations d'amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l'étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3).

Lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, elle y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

17.         Doivent être pris en compte dans le cadre de l'appréciation des possibilités de réintégration dans l'État de provenance : l'âge de la personne concernée lors de son entrée en Suisse, sa connaissance des us et coutumes et sa maîtrise de la langue de son pays de provenance, ses problèmes de santé éventuels, son réseau familial et social dans son pays de provenance ainsi que ses possibilités de scolarisation et de formation dans ce pays, sa situation professionnelle et ses possibilités de réintégration sur le marché du travail dans son pays de provenance ainsi que ses conditions d'habitation dans ce même pays (Directives LEI, ch. 5.6.12.7).

18.         Il sied par ailleurs de rappeler que dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). Sauf prescription particulière de la loi ou d'un traité international, l'étranger n'a donc en principe aucun droit à la délivrance et au renouvellement d'un permis de séjour pour cas de rigueur. L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties.

19.         En l'espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal parvient à la conclusion que l'autorité intimée n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que le recourant ne satisfaisait pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA pour la reconnaissance d'un cas de rigueur, étant d'emblée rappelé que le seul fait de séjourner en Suisse pendant plusieurs années - même à titre légal - n'est à cet égard pas suffisant, s'il ne s'y ajoutent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles, lesquelles font ici manifestement défaut.

S'agissant de la durée de son séjour, le recourant a indiqué, dans le cadre de sa demande d'autorisation qu'il était arrivé en Suisse, à Genève, le 15 avril 2015. Toutefois, même à retenir que cette présence en Suisse a bien débuté à cette date et aurait été continue, elle doit être relativisée et ne saurait, à elle seule, pas suffisante pour retenir l'existence d'un cas de rigueur. En effet, le recourant a séjourné illégalement en Suisse jusqu’au dépôt de sa demande d'autorisation et son séjour s’est poursuivi au bénéfice d'une simple tolérance depuis lors. Ainsi, il ne peut déduire des droits résultant d'un état de fait créé en violation de la loi et ne peut en tout cas pas tirer parti de la seule durée de son séjour en Suisse - en soit de toute manière insuffisante - pour bénéficier d'une dérogation aux conditions d'admission.

S'agissant de son intégration en Suisse, il résulte des pièces du dossier - qui couvrent uniquement la période précédant le dépôt de la demande d’autorisation de séjour puisqu’aucune pièce nouvelle ou actualisée n’a été produite dans le cadre du recours - que le recourant exerce une activité lucrative salariée, ce qui lui permet de subvenir à ses besoins, qu’il n’a jamais bénéficié des prestations de l’Hospice général, qu’il ne fait pas l’objet de poursuites pour dettes, ni d’actes de défaut de biens et enfin que son casier judiciaire est vierge. Bien que ces éléments plaident en sa faveur, le fait de travailler pour ne pas dépendre de l’aide sociale constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Le recourant n’a en outre pas fait état d’une quelconque intégration socioculturelle se traduisant par exemple par un engagement marqué sur le plan culturel, associatif, collectif, etc.

Pour le surplus, son intégration professionnelle ne saurait être qualifiée d'exceptionnelle. En effet, le recourant, qui indique travailler à ce jour en tant que carreleur, n'établit pas avoir acquis pendant son séjour des connaissances et qualifications professionnelles particulières qu'il ne pourrait mettre à profit en retournant au Kosovo, ni ne démontre avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable susceptible de justifier la délivrance d'un permis humanitaire.

S'agissant de sa réintégration dans son pays d'origine, il convient de souligner que le recourant est né au Kosovo, qu'il a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine et qu'il est arrivé en Suisse à l'âge de 25 ans. Si certes il semble qu’une partie de sa famille se soit installée en Suisse, ses deux parents vivent au Kosovo et il indique les soutenir économiquement. Par ailleurs, fin 2021, il a sollicité la délivrance d’un visa pour s'y rendre pour des raisons personnelles, ce qui démontre que des liens indéniables existent encore entre le recourant et son pays d'origine et que les membres de sa famille vivant dans ce pays pourront lui apporter leur soutien dans ses efforts de réinsertion.

S'il se heurtera sans doute à des difficultés de réadaptation dans son pays d'origine, il ne démontre pas que celles-ci seraient plus graves pour lui que pour n'importe lequel de ses concitoyens qui se trouverait dans une situation similaire. En outre, il ne faut pas perdre de vue que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Ainsi, le recourant ne pouvait ignorer, au vu de son statut illicite en Suisse, qu'il pourrait à tout moment être amené à devoir renoncer, en cas de refus de la régularisation de ses conditions de séjour, à tout ce qu’il avait mis en place en Suisse, à savoir notamment quitter sa famille et ses amis établis en Suisse, ainsi que son emploi à Genève.

20.         Au vu de ce qui précède, c'est à raison que la décision litigieuse rejette la demande d'autorisation de séjour du recourant sous l'angle du cas individuel d'extrême gravité.

21.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1; ATA/954/2018 du 18 septembre 2018 consid. 9).

22.         En l'espèce, dès lors qu'elle a refusé de délivrer une autorisation de séjour au recourant, l'autorité intimée devait en soi ordonner son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI, aucun élément ne laissant pour le surplus supposer que l'exécution de cette mesure ne serait pas possible, pas licite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

23.         Intégralement infondé, le recours sera donc rejeté.

24.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

25.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 14 mars 2022 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 10 février 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière