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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3749/2021

JTAPI/559/2022 du 25.05.2022 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : REMISE EN L'ÉTAT;ZONE AGRICOLE
Normes : LAT.22; LCI.129.lete
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3749/2021 LCI

JTAPI/559/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 25 mai 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Laurine ROCHAT, avocate, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______, feuille 2______ de la commune de B______, sise en zone agricole à l’adresse 3______, route de C______, laquelle abrite, à teneur du registre foncier, un bâtiment de 39 m2 (n° 4______), un bâtiment de 26 m2 (n° 5______) et un hangar (n° 6______).

2.             À teneur du registre du commerce du canton de Genève, il est administrateur unique de la société D______ SA, qui a pour but la fabrication, la pose et la location de clôtures, ainsi que toutes activités dans le domaine de la serrurerie et la construction métallique.

3.             Par courrier du 20 novembre 2020, le département du territoire (ci-après : DT) lui a fait savoir qu’il avait été saisi d’une plainte, accompagnée d’un reportage photographique, duquel il ressortait qu’un entreposage de containers et un parking sauvage étaient à déplorer sur sa parcelle. Dès lors que ces éléments, au sujet desquels il n’avait été saisi d’aucune demande d’autorisation de construire, étaient susceptibles d’être assujettis à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), un délai de dix jours lui était imparti pour formuler des observations.

Cette situation a donné lieu à l’ouverture d’une procédure d’infraction (dossier I-7______).

4.             Ce courrier du 20 novembre 2020 lui ayant a été retourné par la Poste avec la mention « le destinataire est introuvable à l’adresse indiquée », le DT, par pli du 4 décembre 2020, a imparti à M. A______ un nouveau délai de dix jours pour déposer ses observations.

5.             Par correspondance du 15 décembre 2020, M. A______ a indiqué au DT qu'il avait « déposé deux containers type container maritime (ces derniers [étaient] posés à même le sol et entièrement amovibles ; aucun scellement n’a[vait] été fait) ». Toutefois, « cet entreposage n’[était] pas là pour durer » et il ignorait qu’une autorisation de construire s'avérait nécessaire pour « déposer des containers » sur sa parcelle. Il s’est également déterminé s’agissant des « quelques camions entreposés sur la parcelle », qui ne constituait pas un parking sauvage.

6.             Par courrier du 22 janvier 2021, le DT lui a imparti un délai de dix jours pour se déterminer quant au fait que les affectations du bâtiment sis sur sa parcelle auraient été modifiées sans autorisation.

7.             Après plusieurs échanges de courriels avec le DT, il a produit ses observations, par écriture du 9 mars 2021, dans le délai prolongé qui lui avait été octroyé.

Il a expliqué qu'il avait dû délocaliser son entreprise, initialement sise dans une zone d’habitations constructible du canton, afin de pouvoir continuer à exercer son activité dans le domaine de la serrurerie et de la construction métallique. Il avait également développé, en 2011, des activités dans le domaine du paysagisme, tout en conservant son « activité phare », soit la construction métallique.

Aucun changement d’affectation du bâtiment n’était à déplorer. Il avait acheté la parcelle n° 1______, ainsi que le bâtiment qu’elle abritait, le 7 septembre 2018 à Monsieur E______. Ce dernier - et son père avant lui - avait exploité le bâtiment et l’ensemble de la parcelle depuis les années 1980 dans le cadre d’une activité de serrurerie et de tôlerie industrielle. Le propriétaire précédent, Monsieur F______, y avait exercé une activité similaire depuis 1972. Il ressortait des photographies qu'il produisait que le bâtiment et la parcelle n’avaient donc jamais été exploités « de façon agricole » depuis plus de cinquante ans. S’agissant de l’entreposage de deux containers et de la création d’un « parking sauvage » lui étant reprochés, il a confirmé les explications formulées dans son courrier du 15 décembre 2020.

Plusieurs pièces étaient jointes, notamment :

-          Un courrier du registre foncier adressé le 18 septembre 2017 à M. E______ informant ce dernier avoir mentionné dans ses registres, le 2 mai 2017, le non assujettissement de la parcelle n° 1______ à la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991 (LDFR - RS 211.412.11), conformément à une décision y relative de la commission foncière agricole (ci-après : CFA) du ______ 2017 ;

-          Des photographies de la parcelle n° 1______ portant la mention des années 1972, 1983, 1991, 2001, 2005, 2011 et 2018.

8.             Par décision du 30 avril 2021, le DT a ordonné à M. A______ de requérir, dans un délai de soixante jours, une autorisation de construire définitive s’agissant de l’entreposage de containers, de la création d’un parking sauvage et de la modification des affectations présentes dans le bâtiment n° 4______. S'il ne souhaitait pas tenter de régulariser la situation, il lui était loisible de procéder à la mise en conformité des lieux en revenant à un état légal dans un délai de nonante jours, la production d’un reportage photographique ou de tout autre élément attestant de cette mise en conformité étant requise dans le même délai. L’absence de dépôt d’une requête ou de mise en conformité l'exposerait à toutes autres mesures et/ou sanctions justifiées par la situation.

À l’issue de l’instruction d’une éventuelle requête ou sans dépôt dans le délai imparti, il serait statué par décision séparée sur les mesures applicables visant au rétablissement d’une situation conforme au droit. Quant à la sanction administrative relative à la réalisation des travaux sans droit, elle ferait également l’objet d’une décision à l’issue du traitement du dossier I -7______, de sorte qu’elle demeurait réservée.

9.             Par courrier du 23 juillet 2021, le DT, faisant suite à un contrôle effectué sur la parcelle n° 1______ le 7 juillet 2021 par l’un de ses collaborateurs, a imparti à M. A______ un délai de dix jours pour se déterminer quant à divers éléments vraisemblablement réalisés sans autorisation sur sa parcelle, soit le stockage d’un bateau, la pose de nouveaux containers et le stockage de matériaux et/ou déchets de chantier.

10.         Il ne ressort pas des éléments au dossier que ce dernier aurait fait usage de cette possibilité, étant précisé qu’à teneur d’un courriel du 26 juillet 2021, il a demandé à une collaboratrice du DT de le rappeler à propos du courrier précité.

11.         Par nouvelle décision du 1er octobre 2021, le DT a ordonné à M. A______ de rétablir une situation conforme au droit en procédant à l’évacuation du bateau, à la suppression et à l’évacuation des nouveaux containers et à l’évacuation des matériaux et/ou déchets de chantier présents sur sa parcelle dans un délai de soixante jours. Un reportage photographique ou tout autre élément attestant de cette remise en état devrait lui parvenir dans ce même délai. Il lui était également rappelé que la mise en conformité ordonnée par décision du 30 avril 2021, désormais entrée en force, restait entièrement en vigueur. Afin de permettre l’accès au bâtiment n° 4______, une « petite zone de parcage sise au Nord-Est de la parcelle » était tolérée, étant précisé que le DT se réservait le droit d’en ordonner la suppression en tout temps, cette latitude n’ayant pas pour effet de légaliser cet aménagement. La suppression de toutes les autres installations précitées, y compris celles décrites dans la décision du 30 avril 2021, signifiait également qu’une fois démolies, leurs emplacements devraient être à nouveau aptes à être exploités pour l’agriculture, le sol devant être reconstitué au niveau du terrain naturel préexistant. Toutes les surfaces en pleine terre reconstituées devraient répondre positivement aux critères d’aptitude fixés pour les surfaces d’assolement. En cas de non-respect de cette décision et/ou à défaut de réception des éléments précités dans le délai imparti, il s’exposerait à toutes nouvelles mesures et/ou sanction justifiées par la situation. La sanction portant sur la réalisation de travaux sans droit demeurait réservée et ferait l’objet d’une décision à l’issue du traitement du dossier I-7______.

12.         Par acte du 1er novembre 2021, sous la plume de son conseil, M. A______ (ci-après : le recourant) a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, dont il a requis l’annulation, sous suite de frais et dépens. Il a proposé la comparution personnelle des parties.

Rappelant les éléments de fait exposés dans ses observations du 9 mars 2021, il a rappelé que la parcelle n° 1______ servait à une activité non agricole depuis plus de cinquante ans. La consultation du système d'information du territoire genevois (SITG) permettait de constater que, dans le cadre de l’exploitation par l’entreprise « G______ » de sa serrurerie en 1972, la majeure partie de cette parcelle n’était déjà plus en terre. De plus, sa surface totale, de 4'637 m2, était « petite », comparée aux grands terrains cultivés qui la bordaient, de sorte qu’elle ne serait « de toutes façons d’aucune utilité à l’agriculture ». Il faisait perdurer l’activité qui avait eu lieu sur cette parcelle depuis de très nombreuses années. Sa société, fondée quarante-et-un ans plus tôt, employait actuellement huit personnes à l’année, était en charge de chantiers dans tout canton et comptait six véhicules professionnels nécessaires à la livraison des ouvrages réalisés sur place. Il n’avait pas recouru contre la décision rendue par le DT le 30 avril 2021 « dans l’optique de parvenir à ajuster ses vues avec celles » de ce dernier, étant précisé qu’il avait notamment pris contact avec un architecte en vue de déposer une éventuelle autorisation de construire, ce dont il avait informé l'autorité à plusieurs reprises.

Si sa parcelle restait assujettie aux règles de la zone agricole, elle n’était en majorité pas en surface d’assolement, de sorte que sa plus grande partie, notamment celle où se trouvaient les containers litigieux, ne bénéficiait d’aucune protection particulière. Ainsi, il ne comprenait pas pourquoi la décision attaquée spécifiait que la remise en état de la surface sur laquelle se situait - notamment - les containers devrait correspondre aux critères d’aptitude fixés pour les surfaces d’assolement. En outre, l’usage qu’il faisait de sa parcelle devait être examiné « avec plus de souplesse », au vu de son non assujettissement à la LDFR et de la reconnaissance par la CFA du fait qu'elle n’était d’aucune utilité à l’agriculture.

Il utilisait sa parcelle pour son activité de construction métallique, soit notamment la réalisation de portails, clôtures, garde-corps et pergolas, qui impliquait le stockage de nombreux matériaux, et pour parquer les six véhicules de l’entreprise, ainsi que ceux des employés et des clients.

Le bateau litigieux quitterait la parcelle le 17 novembre 2021. En outre, le sol sur lequel les containers étaient entreposés n’était pas une surface d’assolement et ne bénéficiait d’aucune protection particulière, ce sol étant par ailleurs inchangé depuis les années 1970. Enfin, les déchets de chantier, inhérents à son activité, pouvaient être facilement évacués.

Les conditions de validité de l’ordre de remise en état querellé n’étaient pas remplies, l'activité qu'il déployait étant demeurée inchangée depuis plus de cinquante ans. Encore une fois, la majeure partie n’étant pas en surface d’assolement, le seul intérêt public à la remise en état était de pouvoir déployer des activités agricoles au sens strict, pour autant qu’il revendît cette « toute petite parcelle » à un agriculteur. Or, il avait été confirmé par la CFA que celle-ci ne répondait pas aux critères d’assujettissement à la LDFR, ce qui impliquait qu’elle n’était d’aucune utilité pour l’agriculture. Il n’y avait donc aucun intérêt à requérir la remise en état d’une parcelle ne servant pas à l’agriculture.

13.         Dans ses observations du 10 janvier 2022, auxquelles étaient joints son dossier et des documents relatifs aux demandes d’autorisation de construire définitive et préalable mentionnées ci-après, le DT a conclu au rejet du recours.

Le 28 novembre 1974, un permis d’occuper le bâtiment n° 6______ - transformé, selon l’autorisation de construire DD 11______, en « forge, réparation de machines agricoles et serrurerie » - avait été délivré. Le 21 décembre 1988, le département avait autorisé la rénovation des locaux et des modifications intérieures (APA 8______). La condition n° 5 de cette autorisation, inscrite au registre foncier le 2 janvier 1990, précisait que « Les locaux seront exclusivement destinés à l’activité qui s’y exerce actuellement, à savoir : - L’exploitation d’une tôlerie, serrurerie et constructions métalliques, importation, commerce et réparation de machines agricoles et industrielles et vente d’essence ; - En cas de cessation de l’exploitation par Monsieur H______, ce dernier ne pourra vendre ou louer le bâtiment qu’à une personne ou une société qui déploierait une activité identique à la sienne ; - S’il devait s’avérer impossible de maintenir, en cas de vente ou de location, l’actuelle affectation du bâtiment, ce dernier devrait alors être impérativement restitué à un usage agricole ». Le plan de masse visé ne varietur dans le cadre de l’APA 8______ le 21 décembre 1988 indiquait clairement les aménagements extérieurs autorisés, soit notamment six places de parking visiteurs, quatorze places de parking pour le personnel et aucune construction, hormis une remise existante. Après avoir refusé, le 5 novembre 1992, d’autoriser l’installation d’un portail et d’une clôture (APA 9______), le département avait donné son accord, le 23 février 1993 à l’installation d’un portail et d’une clôture, dont le périmètre avait été limité à la partie de la parcelle non-comptabilisée dans les surfaces d’assolement du canton (APA 10______). Aucune autre requête en autorisation de construire n’avait été déposée depuis lors.

La décision de non-assujettissement à la LDFR à laquelle se référait le recourant n’avait aucune conséquence sur la zone d’affectation, qui était agricole, ce que démontrait le fait que la restriction inscrite le 2 janvier 1990 au registre foncier n’avait pas été radiée suite au désassujettissement à la LDFR.

S’agissant notamment des containers, soumis à la LCI, leur utilisation n’étant pas conforme à la zone, de sorte qu'ils ne pouvaient être autorisés et devaient être enlevés.

Enfin, l’ordre d’évacuation était proportionné, au regard des intérêts publics prépondérants concernés.

14.         Par réplique du 11 février 2022, sous la plume de son conseil, le recourant a conclu à ce qu’il soit constaté que la procédure était devenue sans objet s'agissant de l’évacuation du bateau, des déchets de chantier et du « camion/container » et à l’annulation de la décision attaquée en tant qu’elle ordonnait l’évacuation du container, subsidiairement au renvoi de la cause à l’autorité intimée pour complément d’instruction et nouvelle décision - s’agissant dudit container -, toujours sous suite de frais et dépens.

Il avait acquis la parcelle et le bâtiment qui s’y trouvait « dans le but explicite et admis de mener des activités de paysagisme mais également de constructions et clôtures métalliques » et avait besoin de faire perdurer toutes ses activités, afin que son entreprise pût survivre.

Le bateau, les déchets de chantier et l’un des containers, qui était en réalité un camion, avaient désormais été évacués, comme le démontraient les photographies qu'il produisait.

Cela étant, la présence du second container, qui lui permettait de stocker ses matériaux, devait être admise ou, à tout le moins, tolérée, eu égard au fait que cet élément était « intrinsèquement lié » à son activité de construction métallique, laquelle avait été expressément autorisée le 28 novembre 1974 dans le cadre de la DD 11______, puis confirmée dans son principe par l’APA 8______. Ce container n’étant pas situé sur la partie de la parcelle sise en surface d’assolement, sa présence n’avait aucune conséquence. Son intérêt au maintien de ce container l’emportait sur l’intérêt public à la préservation du sol, qui ne serait plus jamais utilisé pour l’agriculture, si ce n’était de manière purement hypothétique.

Enfin, il sollicitait du DT qu’il « reconsidère » la décision attaquée, « si besoin après nouvelle instruction ».

15.         Par duplique du 15 mars 2022, le DT a persisté dans ses conclusions.

L’évacuation d’une partie des installations litigieuses démontrait que ces points - non contestés - de l’ordre de remise en état litigieux devaient être confirmés.

L’application de la « clause du besoin », s’agissant du container dont le maintien était sollicité, nécessiterait une « instruction minutieuse et la consultation de plusieurs préaviseurs ». C’était précisément pour ce motif qu’il avait été indiqué au recourant, dans sa décision du 30 avril 2021, qu’il lui était loisible de déposer une requête en autorisation de construire dans un délai de nonante jours. Aucune demande n’ayant été déposée, il n’avait eu d’autre choix que d’ordonner l’évacuation de la construction illégale litigieuse, les intérêts publics liés à la préservation de la zone agricole étant prépondérants.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le DT en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et de ses dispositions d'application (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente par le destinataire de la décision querellée, le recours est recevable (art. 57, 60 et 62 à 65 LPA).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

4.             Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Toutefois, le juge peut renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu'il parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/1637/2017 du 19 décembre 2017 consid. 3d), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1).

5.             En l'occurrence, l'audition du recourant, qui ne dispose à d'un droit à un tel acte d'instruction et a amplement eu la possibilité de se déterminer par écrit dans le cadre de son recours, puis de sa réplique, n'apporterait pas d'éléments supplémentaires susceptibles d'influer sur l'issue du litige, le tribunal disposant d'un dossier complet lui permettant de statuer en connaissance de cause sur le litige. Il n'y sera dès lors pas procédé.

6.             Dans son jugement, le tribunal prend en considération l'état de fait existant au moment où il statue, en tenant compte des faits et des moyens de preuve nouveaux invoqués pendant la procédure de recours et qui sont déterminants dans l'appréciation du bien-fondé de la décision entreprise (cf., par analogie, arrêts du Tribunal administratif fédéral E-5824/2018 du 14 février 2020 consid. 2 et l'arrêt cité ; D-573/2020 du 12 février 2020 ; F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 3 et la jurisprudence citée ; F-3202/2018 du 28 février 2019 consid. 3 ; F-3460/2017 du 25 janvier 2019 consid. 2 et l'arrêt cité).

7.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a ; ATA/242/2020 du 3 mars 2020 consid. 2a). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés (cf. not. ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a ; ATA/376/2016 du 3 mai 2016 consid. 2b et les références citées).

8.             En l'occurrence, il ressort des déclarations du recourant, lesquelles sont corroborées par les photographies qu'il a produites avec sa réplique, que le bateau, les déchets de chantier, ainsi que l’un des containers concernés par la décision attaquée ont été évacués de la parcelle litigieuse. Par conséquent, les conclusions prises par ce dernier dans le cadre de son recours tendant à l’annulation de cet ordre, en tant qu’il concernait ces installations, sont devenues sans objet. Seule reste ainsi litigieuse à ce stade la question de l’évacuation du dernier container encore présent sur la parcelle.

9.             Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (art. 22 al. 1 LAT). L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

Selon la jurisprudence, sont considérés comme des constructions ou installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT tous les aménagements durables et fixes créés par la main de l'homme, exerçant une incidence sur l'affectation du sol, soit parce qu'ils modifient sensiblement l'espace extérieur, soit parce qu'ils chargent l'infrastructure d'équipement ou soit encore parce qu'ils sont susceptibles de porter atteinte à l'environnement (ATF 140 II 473 consid. 3.4.1 ; 123 II 256 consid. 3). L'exigence de la relation fixe avec le sol n'exclut pas la prise en compte de constructions mobilières, non ancrées de manière durable au sol et qui sont, cas échéant, facilement démontables (cf. ATA/208/2021 du 23 février 2021 consid. 5).

10.         Selon l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a), ainsi que modifier, même partiellement, le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (let. b).

11.         Conformément à l'art. 129 let. e LCI, le DT peut notamment ordonner, à l'égard des constructions, des installations ou d'autres choses, la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition. Ces mesures peuvent être prises lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la loi, des règlements qu'elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires (art. 130 LCI).

12.         Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel ; il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (ATF 147 II 309 consid. 5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.1). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues par la loi, demeurer d'application stricte. Si des constructions illégales, contraires au droit de l'aménagement du territoire, sont indéfiniment tolérées en dehors de la zone constructible, le principe de la séparation du bâti et du non-bâti est remis en question et un comportement contraire au droit s'en trouve récompensé. S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole, ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (arrêts du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.1 et les arrêts cités ; 1C_76/2019 du 28 février 2020 consid. 7.1 et les références citées). A cet égard, l'absence de vocation agricole et la proximité d'habitations ne sont pas déterminantes (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3 ; ATA/290/2016 du 5 avril 2016 consid. 7a ; ATA/1190/2015 du 3 novembre 2015 consid. 4b).

Dans ces conditions, en règle générale, les constructions érigées sans droit en zone agricole doivent être supprimées. A titre exceptionnel, l'autorité peut toutefois renoncer à un ordre de démolition, conformément au principe de la proportionnalité, si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit (ATF 132 II 21 consid. 6 ; 123 II 248 consid. 3a/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.2 ; 1C_162/2019 du 25 novembre 2019 consid. 3.2 ; 1C_83/2018 du 22 juillet 2019 consid. 3.1 ; 1C_276/2016 du 2 juin 2016 consid. 3.1). Des constructions ou aménagements formellement non autorisés doivent en principe être démolis s'ils ne peuvent pas être légalisés a posteriori (cf. ATF 136 II 359 consid. 6 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_300/2016 du 16 mai 2017 consid. 4.1 et les arrêts cités ; 1C_276/2016 du 2 juin 2016 consid. 3.1). Dans ce cadre, il incombe aux cantons de veiller, par une organisation appropriée de la police des constructions, à ce que le droit fédéral soit observé sur leur territoire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_276/2016 du 2 juin 2016 consid. 3.1 et la référence citée).

Selon la jurisprudence, l'ordre de démolir une construction ou un ouvrage édifié sans permis et pour lequel une autorisation ne pouvait être accordée n'est en principe pas contraire au principe de la proportionnalité. Celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit en effet s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe plus de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.2 ; 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.1 ; 1C_569/2020 du 25 février 2021 consid. 2.4 ; 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 6.1 ; 1C_114/2018 du 21 juin 2019 consid. 5.1.2 ; 1C_237/2018 du 29 janvier 2019 consid. 2.3 ; 1C_29/2016 du 18 janvier 2017 consid. 7.1).

Même si la bonne foi du constructeur peut être reconnue, elle ne saurait le prémunir contre l'intervention de l'autorité de surveillance destinée à rétablir une situation conforme au droit, lorsque cette intervention respecte le principe de la proportionnalité (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_162/2014 du 20 juin 2014 consid. 6.2 ; 1C_250/2009 du 13 juillet 2009 consid. 4.2 ; cf. aussi arrêts 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.3 ; 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.1 ; 1C_50/2020 du 8 octobre 2020 consid. 8.1.2).

Sous l'angle de la proportionnalité, on peut notamment prendre en compte le fait que la démolition et la remise en état des lieux engendreraient des frais excessifs que l'intéressé ne serait pas en mesure de prendre en charge (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_370/2015 du 16 février 2016 consid. 4.4 ; 1C_537/2011 du 26 avril 2012 ; 1C_101/2011 du 26 octobre 2011 consid. 2.4 ; 1C_248/2010 du 7 avril 2011 consid. 4.2 ; 1C_273/2008 du 7 octobre 2008 consid. 3.2 ; 1C_164/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3). Néanmoins, les règles relatives à la délimitation de la zone à bâtir, respectivement à la prohibition de construire hors des zones à bâtir répondant à une préoccupation centrale de l'aménagement du territoire (art. 75 al. 1 Cst. ; 1 al. 1 LAT), l'intérêt public sur lequel elles sont fondées ne peut qu'être qualifié d'important, de sorte que celui-ci l'emporte sur l'intérêt privé purement financier du propriétaire à s'opposer au rétablissement d'une situation conforme au droit (cf. arrêts 1C_508/2018 du 17 juillet 2019 consid. 2.3 ; 1C_482/2017 du 26 février 2018 consid. 2.6.2 ; 1C_276/2016 du 2 juin 2017 consid. 3.3 ; 1C_29/2016 du 18 janvier 2017 consid. 7.2 ; 1C_544/2014 du 1er avril 2015 consid. 4.2 ; 1C_136/2009 du 4 novembre 2009 ; cf. aussi ATA/874/2020 du 8 septembre 2020 consid. 8d, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_569/2020 du 25 février 2021).

13.         En l’espèce, il n'est pas contesté que le container litigieux n’a été autorisé ni avant d'être installé par le recourant, ni a posteriori, aucune demande d’autorisation de construire n’ayant été déposée par le recourant en lien avec cet objet. En outre, en soi, l’ordre de remise en état querellé apparaît proportionné et propre à atteindre le but visé. Aucune mesure moins incisive ne permettrait en effet de préserver le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, étant rappelé que la jurisprudence accorde une protection stricte de la zone agricole. Le fait que la partie de la parcelle sur laquelle se trouve ce container ne soit pas répertoriée comme une surface d’assolement et a été qualifiée de « non appropriée à l’agriculture » par la CFA par décision du ______ 2017 n'est à cet égard pas déterminant. De plus, il ne ressort pas du dossier que le coût de la remise en état des lieux, s'agissant de l’évacuation d’un élément qui, de l’aveu même du recourant, est posé à même le sol et entièrement amovible, engendrerait une difficulté particulière ou placerait ce dernier en situation de difficulté financière, ce qu'il n’allègue d’ailleurs pas. En tout état, selon la jurisprudence, le montant, même important, de cette remise en état ne serait pas décisive. L'intérêt privé du recourant à pouvoir, selon ses explications, utiliser ce container pour y entreposer du matériel utilisé à des fins professionnelles relève uniquement de sa convenance personnelle et ne saurait à l'évidence prévaloir sur l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit (cf. ATA/874/2020 du 8 septembre 2020 consid. 8d), ce d'autant qu'il aurait eu la faculté, qui lui avait été offerte par l’autorité intimée, de déposer une demande d’autorisation de construire pour tenter l'obtenir la légalisation de cette installation, dans le cadre de laquelle son argumentation aurait pu être examinée le cas échéant.

Dans ces circonstances, force est de constater que le DT n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en requérant la suppression dudit container litigieux. Le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée au DT, ne saurait revenir sur cette décision, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA ; cf. aussi ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les différents arrêts cités). Dite décision ne peut dès lors qu'être confirmée.

14.         Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

15.         Vu cette issue, un émolument de CH 900.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA et 1 s. du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03) et celui-ci n’a pas droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 1er novembre 2021 par Monsieur A______ contre la décision prise à son égard par le département du territoire le 1er octobre 2021 dans le cadre de la procédure I - 7______ ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 900.- à la charge du recourant , lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Yves JOLIAT, président, Saskia RICHARDET VOLPI et Diane SCHASCA, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier