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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1294/2020

JTAPI/468/2022 du 09.05.2022 ( LCR ) , REJETE

REJETE par ATA/783/2022

Descripteurs : RETRAIT DE PERMIS;FAUTE GRAVE
Normes : LCR.16c.al1.letc; LCR.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1294/2020 LCR

JTAPI/468/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 9 mai 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A ______

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Par décision du 20 mars 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours, le service cantonal des véhicules (ci-après : SCV) a prononcé le retrait du permis de conduire de Monsieur A ______, né le ______ 1957, pour une durée indéterminée, mais au minimum pour deux ans. Il lui était également interdit de conduire des véhicules des catégories spéciales F, G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'était pas nécessaire pendant la durée du retrait. Il lui était enfin fait obligation de se soumettre à une expertise auprès du Centre universitaire roman de médecine légale avant toute demande de restitution de son droit de conduire.

Cette décision se fondait sur le fait que, le 7 janvier 2020, à 3h00 du matin, il avait été contrôlé endormi au feu rouge au volant de sa voiture. Il ne pouvait pas justifier d'une bonne réputation, le système d'information relatif à l'admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître deux avertissements prononcés par décisions des 25 septembre 2006 et 30 juin 2010, un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 8 novembre 2007, un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 28 juin 2013 pour une durée d'un mois en raison d'une infraction moyennement grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 27 mars 2015, un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 5 mai 2015 pour une durée de six mois en raison d'une infraction grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 30 juin 2016, et enfin un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 4 août 2018 pour une durée de quatre mois en raison d'une infraction moyennement grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 31 juillet 2019.

Cette décision était prononcée en vertu des art. 16, 16c, 17, 22, 23, 24, 26, 27, 29ss de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), 1ss de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11), 1ss de l'ordonnance sur la signalisation routière du 5 septembre 1979 (OSR - RS 741.21) et 5k al. 2, 30 à 35 de l'ordonnance réglant l’admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51) en retenant que les faits survenus le 7 janvier 2020 constituaient une infraction grave aux règles de la circulation routière.

Le SCV avait pris note de ses observations des 14 janvier, 30 janvier, 10 février et 24 février 2020, ainsi que celles de son mandataire des 16 et 17 mars 2020.

2.             Par acte du 5 mai 2020, M. A ______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant principalement à son annulation, subsidiairement à la réduction de la durée du retrait, à la renonciation à l'interdiction de conduire des véhicules des catégories spéciales F, G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'est pas nécessaire et à l'obligation de se soumettre à une expertise auprès du Centre universitaire romande de médecine légale avant toute demande de restitution. Préalablement, il concluait d'une part à l'apport de la procédure pénale P/1572/2020 et, d'autre part, à la restitution de l'effet suspensif de son recours.

Les faits qui lui étaient reprochés ne correspondaient pas à la réalité. Rien ne permettait à la police, et a fortiori aux autorités administratives, de distinguer un endormissement/assoupissement d'un malaise momentané dû à des raisons médicales. Il a produit à cet égard un certificat médical rédigé le 4 mai 2020 par le Docteur B ______, médecin généraliste, qui atteste suivre le précité à sa consultation pour des problèmes ostéo-articulaires majeurs qui le mettent au bénéfice d'un macaron pour personnes handicapées et ajoute que M. A ______ a présenté au début du mois de janvier [2020] une période de stress intense avec nervosité et anxiété. Il a de plus été victime d'un claquage musculaire à cette même période, l'ayant empêché de marcher normalement. Dans ce contexte, il a été contraint d'utiliser son véhicule plus qu'habituellement, et, toujours selon le certificat médical susmentionné, il est tout à fait vraisemblable qu'il ait pu présenter un malaise dissociatif alors qu'il se trouvait arrêté à un feu rouge, ayant pu donner l'impression qu'il dormait. Depuis qu'il connaissait son patient, le médecin précité n'avait jamais pu constater de problèmes de consommation abusive d'alcool ou de stupéfiants.

M. A ______ a également produit un certificat médical établi le 20 février 2020 par le Dr. B ______, selon lequel l'état de santé du précité « lui impose de pouvoir utiliser sa voiture, pour le maintien de son état de santé ».

Lors de son audition par la police le 7 janvier 2020, il avait précisé qu'après une longue journée où il avait fait environ 21'000 pas au lieu de 7'000 habituellement, il n'était vraiment pas bien physiquement et avait de fortes douleurs au genou. Cependant, il avait ajouté qu'il pensait ne pas être fatigué.

Sur le plan juridique, M. A ______ a notamment fait valoir que l'infraction qui lui était reprochée n'était pas établie, compte tenu de la procédure pénale en cours.

Du reste, il était particulièrement disproportionné et excessif de lui interdire la conduite des véhicules des catégories spéciales F, G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'était pas nécessaire pendant la durée du retrait, en particulier compte tenu de sa condition médicale, puisqu'elle restreignait fortement sa mobilité, l'empêchait notamment de pouvoir employer un vélo ou trottinette électriques et le contraignait à recourir aux services de transports professionnels ou pour handicapés, étant par ailleurs précisé qu'il devait régulièrement se déplacer pour des examens médicaux.

3.             Produisant son dossier, le SCV s'est déterminé le 14 mai 2020 à la fois sur le fond, persistant dans les termes de sa décision, et sur la restitution de l'effet suspensif du recours en s'y opposant.

Invité à présenter des observations au sujet de l'infraction constatée par la police, M. A ______ avait admis dans un courrier du 14 janvier 2020 qu'il s'était assoupi au volant de son véhicule. Par lettre du 30 janvier 2020, il avait également indiqué ne pas contester le fait de s'être assoupi et enfin, par courrier du 24 février 2020, il avait reconnu s'être assoupi un instant en attendant le feu vert.

Cela étant, le SCV n'était pas opposé à ce que la procédure soit suspendue jusqu'à droit jugé sur le plan pénal.

4.             Il ressort encore du rapport de renseignements établi par la police le 11 janvier 2020 que, le 7 janvier 2020 à 3h00 du matin, l'attention d'une patrouille s'était portée sur un véhicule arrêté au feu rouge. Cette voiture restait immobile malgré le passage de plusieurs phases lumineuses qui l'autorisaient à continuer sa route, ceci durant plus de trois ou quatre minutes. Lorsque la patrouille s'était positionnée à la hauteur du conducteur, les policiers avaient remarqué qu'il dormait profondément, avec le moteur du véhicule allumé. Les policiers avaient alors réveillé le conducteur en engageant la conversation, après avoir ouvert sa portière.

5.             Du procès-verbal d'audition de l'intéressé, daté du 7 janvier 2020, il ressort qu'à la question de savoir s'il était excessivement fatigué pour une raison quelconque, il a répondu que oui, il était très fatigué, car il avait peu dormi les jours précédents. Invité à expliquer son emploi du temps depuis le samedi 4 janvier 2020, il a indiqué qu'il s'était rendu à Europa Park ce jour-là en partant de chez lui vers 6h00 du matin et qu'il était arrivé à 11h00 du matin. La journée, il avait beaucoup marché (environ 21'000 pas contre environ 7'000 pas habituellement). Il avait conduit au retour de 21h00 à 2h00 du matin le dimanche 5 janvier 2020. Après cette longue journée, il n'était vraiment pas bien physiquement et avait de fortes douleurs au genou. Il avait bu des RedBulls lors du retour à Genève et cela perturbait son sommeil. Le dimanche matin, il s'était levé vers 9h00. Il n'avait pas dormi dans la journée. Le soir, il avait regardé des séries et des films jusqu'à environ trois ou quatre heures du matin (le lundi 6 janvier 2020). Il ne s'était sans doute pas senti fatigué à cause des RedBulls consommées la veille. Le lundi 6 janvier 2020, il s'était levé vers 6h00 ou 6h30 du matin et n'avait pas dormi jusqu'à ce que la police le trouve. Il était alors en route pour rentrer chez lui afin d'aller dormir. Il aurait voulu aller se coucher plus tôt, mais deux amis l'avaient appelé successivement pour lui demander de les ramener chez eux. L'un ne pouvait pas conduire à cause de l'alcool et l'autre car elle n'avait pas de permis de conduire. Il avait ainsi dormi pour la dernière fois le lundi 6 janvier 2020 entre 3-4 heures du matin et 6h00 ou 6h30 du matin. A la question de savoir s'il lui était déjà arrivé de s'endormir au volant, il a répondu que jamais en roulant, mais qu'il lui était déjà arrivé de s'assoupir un instant une fois garé devant chez lui.

6.             Du dossier produit par le SCV, il ressort encore que les mesures prises à l'encontre de M. A ______ dans le passé concernent successivement deux conduites en état d'ébriété (mesures des 25 septembre 2006 et 8 novembre 2007), deux inattentions avec heurt d'un autre véhicule (mesures des 30 juin 2010 et 28 juin 2013), une conduite malgré un retrait du permis de conduire et franchissement d'une double ligne de sécurité (mesure du 5 mai 2015) et enfin une conduite avec un taux d'alcoolémie non-qualifié (mesure du 4 août 2018).

7.             Par décision du 20 mai 2020 (DITAI/184/2020), le tribunal a rejeté la demande d'effet suspensif au recours formée par M. A ______ et suspendu la procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure pénale P/1572/2020.

Par arrêt du 4 août 2020, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté par M. A ______ contre la décision sur effet suspensif. Par arrêt du 22 septembre 2020, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours interjeté par M. A ______ contre l'arrêt de la chambre administrative.

8.             Par jugement du 20 décembre 2021, entré en force, le Tribunal de police de Genève a reconnu M. A ______ coupable notamment de conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR).

Du procès-verbal de l'audience tenue par le Tribunal de police le 20 décembre 2021, il ressort notamment que M. A ______ s'est déterminé sur l'accusation d'avoir circulé au volant de son véhicule automobile immatriculé GE 753847 alors qu'il était en proie à une grande fatigue, étant précisé qu'il se serait endormi au volant alors qu'il se trouvait arrêté à la signalisation lumineuse située à l'intersection avec la rue François-Dussaud. Il a notamment précisé qu'il était à 500 mètres à vol d'oiseau de chez lui. La policière présente lors du contrôle et entendue à cette audience ne se souvenait pas si M. A ______ avait mentionné penser avoir été victime d'un malaise, mais si tel avait été le cas cela aurait été mentionné dans son procès-verbal d'audition. Enfin, selon le second policier présent lors du contrôle, M. A ______ n'avait à aucun moment mentionné penser avoir été victime d'un malaise.

9.             Par courrier du 13 janvier 2022, le tribunal a invité M. A ______ à lui fournir copie du jugement du Tribunal de police statuant dans le cadre de la procédure P/1572/2020, accompagné cas échéant de ses observations sur son incidence dans la présente procédure.

10.         Le 30 janvier 2022, dans le délai prolongé par le Tribunal, M. A ______ a produit une copie du jugement pénal et persisté dans ses conclusions et motifs. Il s'est prononcé à ce sujet, en soulignant en substance que le Tribunal de police avait considéré que, s'agissant de sa demande de défense d'office, « la procédure constitue une affaire de peu de gravité », et que cela ressortait par ailleurs de la peine retenue par le Tribunal de police, laquelle était bien inférieure aux réquisitions du Ministère public. Il a sollicité l'audition de M. C ______, son conseil juridique, afin d'être entendu sur les séquences du feu rouge/vert de la signalisation litigieuse, ainsi qu'un transport sur place en vue de la reconstitution des faits.

11.         Par courrier du 14 février 2022, le SCV s'est déterminé, persistant dans les termes de sa décision.

12.         Le 11 avril 2022, M. A ______ s'est adressé par courrier au SCV, avec copie au tribunal, en demandant en substance l'annulation de la décision litigieuse et en reprenant les explications qu'il avait déjà développées jusque-là.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Le recourant a sollicité son audition, celles de toutes les parties présentes le 7 janvier 2020, ainsi que celles du Dr. B ______ et de M. C ______. Il a également sollicité un transport sur place.

4.             Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1123/2014 du 24 avril 2015 consid. 2.1 ; 1C_272/2010 du 16 mars 2011 consid. 2.5).

5.             Ce droit ne s'étend toutefois qu'aux éléments pertinents pour décider de l'issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_842/2014 du 17 février 2015 consid. 6.2 ; 2C_597/2013 du 28 octobre 2013 consid. 5.3).

6.             En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (art. 41 in fine LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1) ou la tenue d'une inspection locale, en l'absence d'une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d'instruction, ce qui n'est pas le cas à Genève (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; 112 Ia 198 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1).

7.             En l'espèce, le recourant, qui a eu l'occasion de s'exprimer par écrit à plusieurs reprises durant la procédure, a déjà exposé les motifs à l'appui de son recours. Il a par ailleurs produit toutes les pièces qu'il estimait utiles à l'appui de ses allégués. Le dossier comporte en outre tous les éléments nécessaires et suffisants permettant au tribunal de statuer sur le recours, de sorte qu'il n'y a pas lieu de donner suite aux requêtes du recourant tendant à son audition, à celle de personnes tierces et à l'organisation d'un transport sur place, ces actes d'instruction, en lui-même non obligatoires, n'apparaissant pas nécessaires pour trancher le litige. Il convient encore d'ajouter que le Dr. B ______ et M. C ______, contrairement aux deux policiers entendus par le Tribunal de police, n'étaient pas sur place au moment des faits, de sorte que leur audition ne saurait en tout état apporter les précisions factuelles sur les faits reprochés au recourant. Enfin, il ne s'agit pas, dans la présente procédure, de recommencer l'instruction à laquelle a procédé le Tribunal de police, étant relevé que le recourant, comme on y reviendra plus loin, n'a pas contesté le jugement rendu par cette juridiction et qu'il y a donc d'autant moins de raison de remettre a priori en cause les constatations faites par cette dernière.

8.             Le recourant a sollicité l'apport de la procédure pénale P/1572/2020.

9.             En tant que prévenu dans cette procédure, il a nécessairement pu consulter le dossier (art. 101 al. 1 du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 - CPP - RS 312.0). Par ailleurs, même si celle-ci est actuellement clôturée, il dispose d’un droit d’accès aux pièces en application de l’art. 99 al. 1 CPP.

10.         Partant, cette requête doit être rejetée.

11.         Le recourant conteste les faits qui lui sont reprochés.

12.         Les autorités administratives appelées à prononcer un retrait du permis de conduire ne peuvent en principe pas s'écarter des constatations de fait d'une décision pénale entrée en force. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits. L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 ; 137 I 363 consid. 2.3.2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_470/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5.1.2 ; 1C_611/2018 du 18 avril 2019 consid. 2.2 ; 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_30/2017 du 21 avril 2017 consid. 2.1).

13.         Si les faits retenus au pénal lient donc en principe l'autorité et le juge administratifs, il en va différemment des questions de droit, en particulier de l'appréciation de la faute et de la mise en danger (arrêts du Tribunal fédéral 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_30/2017du 21 avril 2017 consid. 2.2.2 et l'arrêt cité ; 1C_146/2015 du 7 septembre 2015 consid. 2.1 et les arrêts cités).

14.         La jurisprudence considère qu’en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que la personne concernée a données en premier lieu, alors qu'elle en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (ATF 142 V 590 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/1197/2021 du 9 novembre 2021 consid. 9 ; ATA/1038/2021 du 5 octobre 2021 consid. 8).

15.         En l'espèce, le recourant a été entendu par le Tribunal de police sur le même état de fait que celui retenu par l'autorité intimée. Pour ces faits, par jugement du 20 décembre 2021, le Tribunal de police l'a reconnu coupable du chef de conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR). Non contesté, ce jugement est entré en force. Quant au recourant, il conteste s'être assoupi ou endormi au moment des faits et avance avoir été victime d'un malaise momentané. Il a cependant accepté le jugement pénal en renonçant à poursuivre la procédure pénale et à invoquer devant la juridiction d'appel qu'il aurait été victime d'un tel malaise. Il n'allègue par ailleurs pas l'existence de constatations de fait inconnues du juge pénal, non prises en considération par celui-ci, ou de preuves nouvelles. Dès lors, les faits de la cause ne peuvent plus être contestés et doivent être considérés comme établis.

A toutes fins utiles, il sied de relever que le dossier comporte de nombreuses indications allant dans le sens d'un endormissement du recourant au volant de sa voiture. Tout d'abord, le rapport de renseignement établi par la police indique que le recourant n'a pas fait bouger son véhicule pour lequel la phase lumineuse est devenue verte à plusieurs reprises. Les policiers ont dû ouvrir la portière de son véhicule pour le réveiller. Selon les propres déclarations faites à la police par le recourant, il s'était senti très fatigué en prenant son véhicule. La description qu'il a faite des trois jours qui venaient de s'écouler montre qu'il a cumulé des efforts physiques inhabituels et un grand retard de sommeil, en particulier depuis la journée du dimanche 5 janvier 2020 jusqu'au moment de l'infraction. Il ressort du procès-verbal d'audience du Tribunal de police que, selon les policiers, si le recourant avait évoqué un malaise au moment des faits, cela aurait été mentionné dans son procès-verbal d'audition, ce qui n'est pas le cas.

Les explications et documents apportés par le recourant ne renversent pas les éléments susmentionnés. Hormis les propres affirmations du recourant, qui contredisent le grand état de fatigue qu'il a admis à la police, le précité s'appuie sur des certificats médicaux qui ne sont que des hypothèses formulées par son médecin traitant. Si la possibilité d'un malaise dissociatif est évoquée, il n'est pas non plus indiqué qu'un endormissement soit impossible, et pour cause, puisque l'auteur des certificats médicaux n'était pas présent lors des faits. De plus, le recourant a admis qu'il lui est déjà arrivé de s'assoupir dans sa voiture une fois garé devant chez lui, soit durant une phase d'arrêt de son véhicule. Dans ces conditions, les explications avancées après-coup seront écartées.

L'ensemble des circonstances évoquées ci-dessus amènent donc le tribunal à retenir, à l'instar du Tribunal de police, que l'endormissement est la cause la plus probable de "l'absence" dont le recourant a été victime le 7 janvier 2020, soit que le recourant s'est assoupi au volant alors que sa voiture était à l'arrêt devant un signal lumineux en phase rouge.

16.         Le recourant conteste ensuite la validité de la décision de retrait prononcée par le SCV et conclut à son annulation, subsidiairement à la réduction de la durée du retrait.

17.         S'agissant de la validité de la décision de retrait, selon l'art. 31 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence (al. 1). Toute personne qui n’a pas les capacités physiques et psychiques nécessaires pour conduire un véhicule parce qu’elle est sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de médicaments ou pour d’autres raisons, est réputée incapable de conduire pendant cette période et doit s’en abstenir (al. 2).

18.         Selon l'art. 2 al. 1 OCR est tenu de s'abstenir de conduire quiconque n'en est pas capable parce qu'il est surmené, sous l'effet de l'alcool, d'un médicament, d'un stupéfiant ou pour toute autre raison.

19.         Pour déterminer s'il y a lieu de prononcer un retrait d'admonestation et cas échéant sa durée, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR).

20.         Selon l'art. 16c al. 1 let. c LCR, commet une infraction grave la personne qui conduit un véhicule automobile alors qu'elle est incapable de conduire du fait de l'absorption de stupéfiants ou de médicaments ou pour d'autres raisons.

21.         Selon la jurisprudence (ATF 126 II 206 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_555/2008 du 1er avril 2009 consid. 4 ; 6A.84/2006 du 27 décembre 2006 consid. 3.2), le fait de s'assoupir au volant constitue en règle générale une faute grave, dès lors qu'on peut en effet exclure que l'assoupissement du conducteur dont l'aptitude à conduire n'est pas réduite par d'autres facteurs que la fatigue, ait pu survenir sans être précédé de l'un ou l'autre des signes avant-coureurs de la fatigue reconnaissables par l'intéressé. Ces symptômes touchent notamment les yeux et la vue (paupières lourdes, troubles de la vue, irritation, difficultés à focaliser de manière convergente avec strabisme momentané et formation d'images doubles, etc.), l'état psychique (idées vagabondes, somnolence, "hypnose de l'autoroute", indifférence, manque de volonté, anxiété, sursauts, absences les yeux ouverts), l'attitude corporelle générale (bâillements, sécheresse buccale et soif, effroi accompagné de sudation, perte inopinée du tonus musculaire) et la conduite (ralentissement des réactions, manœuvres sèches de l'embrayage et brusque des freins, passage des vitesses moins fréquents, louvoiement et perte de la sensation de vitesse).

22.         La gravité de la faute reprochée au conducteur qui s'est endormi au volant tient à ce qu'il a poursuivi sa route malgré la nécessaire apparition des signaux d'alerte physiques et psychiques annonciateurs de l'assoupissement. Or, le fait d'avoir effectué des pauses régulières, une sieste le cas échéant, ou encore d'avoir bu du café doit certes endiguer, voire supprimer la fatigue. Il n'en demeure pas moins, dans la règle, que lorsque le conducteur s'est, en définitive, endormi malgré les précautions prises, son assoupissement n'a pu qu'être précédé des signes avant-coureurs du sommeil reconnaissables par l'intéressé. Aussi, lorsque le conducteur qui a pris de telles mesures s'endort au volant, on ne peut que constater que les mesures prises concrètement n'étaient pas suffisantes pour endiguer la fatigue, empêcher l'apparition des signes avant-coureurs de l'assoupissement et permettre la poursuite sans risque du trajet. Il s'ensuit que la faute du conducteur qui poursuit sa route dans ces conditions demeure grave malgré les précautions prises qui peuvent, au demeurant, être exigées de tous les conducteurs qui effectuent de longs trajets. Par ailleurs, les précautions prises demeurent sans incidence sur l'appréciation de la gravité de la mise en danger du trafic, qui résulte de la perte totale de maîtrise du véhicule après l'assoupissement (ATF 126 II 206 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_555/2008 du 1er avril 2009 consid. 4 ; 6A.84/2006 du 27 décembre 2006 consid. 3.4).

23.         Le Tribunal fédéral a considéré que l'incapacité en raison du surmenage ou toute autre raison tombe sous le coup de l'art. 91 al. 2 let. b LCR et 16c al. 1 let. c LCR (arrêt 6B_252/2011 du 22 août 2011). Le fait de conduire dans un état de fatigue extrême était aussi dangereux pour la circulation que l’ivresse (RDAF 1977 p. 323 = JdT 1978 I 399 n° 12).

24.         L’infraction de conduite en état d’incapacité due au surmenage est donnée même s’il n’en est résulté aucun accident, puisque la conduite en état d’incapacité (art. 31 al. 2 LCR) n’est pas un délit de résultat (arrêts du Tribunal fédéral 1C_555/2008 du 1er avril 2009 ; 6A.55/2006 du 5 février 2007 consid. 3 ; Cédric MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, p. 499). Le conducteur surmené qui prend la route, nonobstant les signes de la fatigue, puis s'endort au volant à un carrefour, même en immobilisant son véhicule et en coupant le moteur, viole l'art. 31 al. 2 LCR (arrêt du Tribunal fédéral 1C_555/2008 du 1er avril 2009 ; BUSSY/RUSCONI, Code suisse de la circulation routière commenté, n. 2.2.4 ad art. 31 LCR).

25.         La conduite en état d’incapacité constitue pour le moins une mise en danger abstraite accrue grave de la sécurité routière (ATF 130 IV 32 consid. 5 ; Cédric MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, p. 499).

26.         En l'espèce, le recourant a admis avoir reconnu des signes avant-coureurs de la fatigue puisqu'il a expliqué qu'il aurait voulu se coucher plus tôt, mais que c'est parce qu'il a dû ramener des amis qu'il a dû retarder ses projets. La nécessaire apparition des signaux d'alerte physiques et psychiques annonciateurs de l'assoupissement concorde avec le fait qu'il a cumulé des efforts physiques inhabituels et un grand retard de sommeil durant les trois jours précédents. Or, l'absorption de boissons de la marque RebBulls la nuit du samedi 4 au dimanche 5 janvier 2020 avait d'ailleurs pour but de surmonter son état de fatigue et parallèlement de lui permettre de restreindre de manière extrême son besoin de sommeil. Il n'en demeure pas moins que, malgré le court trajet qui lui restait à parcourir, il s'est endormi au volant devant un signal lumineux en phase rouge. Un endormissement au volant sans signe de fatigue préalable identifiable est exclu chez une personne en bonne santé ou qui n'est pas incapable de conduire pour une autre raison. Hormis des problèmes ostéo-articulaires majeurs, le recourant ne prétend pas souffrir d'une maladie d'un genre qui expliquerait un endormissement imprévisible et soudain. Dès lors, il résulte des principes de jurisprudence rappelés ci-dessus que l'infraction commise par le recourant doit être qualifiée de grave.

Au vu de ce qui précède, le SCV n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en qualifiant l’infraction de grave au sens de l’art. 16c al. 1 let. c LCR.

27.         S'agissant de la durée du retrait, selon l'art. 16c al. 2 let. d LCR, après une infraction grave, le permis d’élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée, mais pour deux ans au minimum, si, au cours des dix années précédentes, le permis a été retiré à deux reprises en raison d’infractions graves ou à trois reprises en raison d’infractions qualifiées de moyennement graves au moins ; il est renoncé à cette mesure si, dans les cinq ans suivant l’expiration d’un retrait, aucune infraction donnant lieu à une mesure administrative n’a été commise.

28.         Selon l’art. 16 al. 3 LCR, la durée minimale du retrait du permis de conduire prévue par la loi ne peut pas être réduite. Selon la jurisprudence, une telle règle s’impose à l'autorité et aux tribunaux sans dérogation possible (ATF 132 II 234 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_312/2015 du 1er juillet 2015 consid. 3.3 ; 1C_585/2008 du 14 mai 2009 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/23/2015 du 6 janvier 2015).

29.         En l'espèce, le SCV ne s’est pas écarté du minimum légal prévu par l’art. 16 al. 2 let. d LCR en fixant à une durée indéterminée, mais au minimum à deux ans, la durée du retrait du permis de conduire du recourant. Etant lié par cette durée, qui constitue le minimum légal incompressible devant sanctionner l'infraction en cause, il a correctement appliqué les règles en vigueur et n'a pas excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation, ne pouvant en aucune manière tenir compte de la bonne réputation et des besoins professionnels allégués par le recourant.

30.         Le recourant conteste ensuite la portée de la sanction qui lui a été infligée, dans la mesure où elle s'étend aussi, pendant toute la durée du retrait, aux véhicules des catégories spéciales F, G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'est pas nécessaire. Il considère en effet que cette mesure est disproportionnée en tant qu'elle vise en particulier la conduite d'un vélo ou trottinette électriques.

31.         L'art. 33 al. 1 de l'OAC prévoit notamment que le retrait du permis d’élève conducteur ou du permis de conduire d’une catégorie ou d’une sous-catégorie entraîne le retrait du permis d’élève-conducteur et du permis de conduire de toutes les catégories, de toutes les sous-catégories et de la catégorie spéciale F (al. 1).

32.         Selon l'art. 33 al. 4 OAC, l’autorité compétente pour prononcer le retrait peut combiner le retrait du permis d’élève conducteur ou du permis de conduire d’une catégorie ou d’une sous-catégorie avec le retrait du permis de conduire des catégories spéciales G et M (let. a), combiner le retrait du permis d’élève conducteur ou du permis de conduire d’une catégorie spéciale avec le retrait du permis d’élève conducteur ou du permis de conduire des catégories et sous-catégories (let. b).

33.         Il convient de préciser que la catégorie spéciale M concerne les cyclomoteurs (art. 3 al. 3 OAC).

34.         L'art. 18 de l'ordonnance concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers du 19 juin 1995 (OETV - 741.41) distingue les cyclomoteurs des cyclomoteurs légers : les cyclomoteurs sont des véhicules automobiles monoplaces, à roues placées l'une derrière l'autre pouvant atteindre une vitesse de 30 km/h de par leur construction, d'une puissance maximale de 1,00 kW et équipés d'un moteur à combustion dont la cylindrée n'est pas supérieure à 50 cm³ ou d'un moteur électrique leur permettant d'atteindre 45 km/h au maximum en cas d'assistance au pédalage (let. a) ; les cyclomoteurs légers sont des véhicules équipés d'un moteur électrique d'une puissance maximum de 0,50 kW, pouvant atteindre une vitesse de 20 km/h de par leur construction et éventuellement équipée d'une assistance au pédalage jusqu'à 25 km (let. b).

35.         Dans cette dernière hypothèse, les vélos et trottinettes électriques sont considérés comme des cyclomoteurs légers (art. 18 let. b OETV).

36.         Selon l'art. 5 al. 2 let. d OAC, ne sont pas tenus d’avoir un permis de conduire les personnes conduisant un cyclomoteur léger.

37.         En conséquence, l'interdiction litigieuse en tant qu'elle prohibe la conduite des véhicules de la catégorie spéciale M, vise les cyclomoteurs auxquels sont assimilés les vélos équipés d'un moteur électrique leur permettant d'atteindre 45 km/h au maximum en cas d'assistance au pédalage.

38.         L'art. 36 al. 1 OAC prévoit que l'autorité administrative du canton de domicile est tenue d'interdire à des personnes de circuler avec des véhicules automobiles pour lesquels un permis de conduire n'est pas nécessaire, lorsqu'elles n'en ont pas l'aptitude par suite de maladies ou d'infirmités physiques ou mentales, pour cause d'alcoolisme ou d'autres formes de toxicomanie ou qui en sont incapables pour d'autres raisons.

39.         Quant à l'art. 37 OAC, il précise que l'interdiction de circuler est valable pour tous les genres de véhicules indiqués dans la décision.

40.         Selon la jurisprudence, pour des raisons évidentes de protection de la circulation, le retrait de sécurité est généralement étendu à toutes les catégories, sous catégories et catégories spéciales de permis (arrêts du Tribunal fédéral 1C_333/2014 du 23 septembre 2014 ; 6A.23/2006 du 12 mai 2006 ; 6A.7/2000 du 17 mai 2000 ; BUSSY/RUSCONI, Code suisse de la circulation routière commenté, n. 3 ad art. 33 OAC). Ce n'est que dans une soigneuse pesée des intérêts en présence que l'autorité compétente décide parfois le maintien d'une catégorie particulière, cas échéant sous conditions, ordinairement la catégorie spéciale M (cyclomoteurs) et/ou la catégorie spéciale G (tracteurs et véhicules agricoles n'excédant pas 30 km/h), au danger potentiel moins importants (C. MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait de permis de conduire, 2015, p. 553).

41.         En revanche, une motivation est nécessaire en ce qui concerne le retrait du permis des véhicules des catégories spéciales et l'interdiction de conduire des véhicules à moteur pour lesquels un permis n'est pas nécessaire, la loi ne prévoyant, dans ce cas, qu'un retrait facultatif. Le principe de base est donc celui de la « non-extension du retrait des catégories et des sous-catégories aux catégories spéciales G et M » (arrêts du Tribunal fédéral 6A.4/2004 du 22 mars 2004 consid. 2.3.2 ; 6A.37/2004 du 28 juillet 2004 consid. 2 ; ATA/600/2013 du 10 septembre 2013 ; JTAPI/1150/2015 du 30 septembre 2015 ; JTAPI/88/2012 du 26 janvier 2012 ; BUSSY/RUSCONI, Code suisse de la circulation routière commenté, n. 2 ad art. 33 OAC).

42.         En l'espèce, compte tenu de l'endormissement du recourant au volant de son véhicule au moment des faits, ainsi que de ses nombreux antécédents, les circonstances particulières du cas d'espèce laissent apparaître qu'il existe un doute concret et sérieux quant à son aptitude à conduire des véhicules à moteur, de sorte qu'il présente plus que tout autre le risque de se mettre au volant dans un état ne lui permettant pas de garantir la sécurité de la circulation. Ce danger subsiste pour la conduite des véhicules limités à une vitesse réduite, dès lors que la survenance d'un accident grave ne peut être exclue et la sécurité de la circulation garantie.

Le recourant n'a pour sa part pas fait valoir des intérêts privé et professionnel manifestement prépondérants à pouvoir conduire des véhicules des catégories spéciales ou pour lesquels un permis de conduire n'est pas nécessaire, le temps de la durée de son retrait de permis de conduire, ayant indiqué pouvoir recourir aux services de transports professionnels ou pour handicapés pour ses déplacements.Au vu de ce qui précède, le SCV n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en étendant la sanction, pendant toute la durée du retrait, aux véhicules des catégories spéciales F, G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'est pas nécessaire.

Le tribunal constate que l'interdiction de conduire ne s'étend pas aux vélos et trottinettes électriques pouvant atteindre la vitesse de respectivement 25 km/h et 20 km/h maximum. En effet, dans la partie « Motivation » de sa décision, le SCV ne l'indique pas expressément, ce qu'il lui aurait appartenu de faire s'il avait eu l'intention d'interdire au recourant de conduire des cyclomoteurs légers.

En effet, l'extension générale de l'interdiction de conduire aux « véhicules pour lesquels un permis de conduire n'était pas nécessaire » figurant dans la décision attaquée ne saurait concerner les cyclomoteurs légers - dont font partie les vélos et trottinettes électriques pouvant atteindre la vitesse de respectivement 25 km/h et 20 km/h maximum - dès lors que le SCV ne s'est pas référé dans sa décision à l'art. 36 OAC, qu'il n'a pas indiqué le genre de véhicules visés par l'interdiction conformément à l'art. 37 OAC précité et qu'il n'a aucunement motivé l'adoption d'une telle mesure en l'espèce.

En outre, nonobstant le grief soulevé par le recourant, l'autorité intimée ne s'est pas prononcée au sujet des vélos et trottinettes électriques au sens de l'art. 18 let. b OETV, ne cherchant pas à expliquer ce qui justifierait cas échéant l'interdiction de conduire ces engins dont la vitesse maximale est limitée à 20 km/h, voire 25 km/h.

Il faut dès lors en conclure que le ch. 1 let. b de la décision querellée ne fait pas interdiction au recourant de se déplacer en cyclomoteurs légers pendant la durée de la mesure, de sorte que le grief qu'il formule à cet égard est sans objet.

43.         Le recourant conteste enfin la portée de la sanction qui lui a été infligée, dans la mesure où elle prévoit une obligation de se soumettre à une expertise auprès du Centre universitaire romande de médecine légale avant toute demande de restitution.

44.         Cette obligation est sur le principe conforme à l'art. 17 al. 3 LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_153/2015 du 23 avril 2015 consid. 5 ; Cédric MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, n. 78.5 p. 596 et la référence citée), qui prévoit que le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire retiré pour une durée indéterminée peut être restitué à certaines conditions après expiration d'un éventuel délai d'attente légal ou prescrit si la personne concernée peut prouver que son inaptitude à la conduite a disparu.

45.         Sous l'angle du principe de la proportionnalité, cette exigence est apte à atteindre le but qu'elle poursuit, à savoir de s'assurer que le recourant ne retourne dans la circulation routière qu'à condition qu'il soit démontré qu'il est apte à la conduite de véhicules à moteur. Aucune autre mesure moins incisive ne semble de nature à atteindre un tel but. Enfin, l'atteinte qu'elle porte aux intérêts privés du recourant se justifie au regard du but d'intérêt public qu'elle poursuit, étant relevé la gravité du comportement du recourant consistant à prendre le volant de sa voiture alors qu'il était en manque sévère de sommeil. Par un tel comportement, le recourant fait sérieusement douter de son aptitude à mesurer les risques qu'il peut encourir pour lui-même et faire courir à autrui.

46.         Compte tenu de ce qui précède, il apparaît que l'autorité intimée a correctement appliqué les règles en vigueur et n'a pas excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation, de sorte que la décision litigieuse sera confirmée.

47.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 600.-.

48.         Le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d'une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

49.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 5 mai 2020 par Monsieur A ______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 20 mars 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             confirme la décision du 20 mars 2020 au sens des considérants ;

4.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 600.- ;

5.             le laisse à la charge de l'État de Genève, sous réserve de la décision finale de l'assistance juridique en application de l'art. 19 al. 1 RAJ ;

6.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

7.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière