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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1020/2022

JTAPI/324/2022 du 01.04.2022 ( MC ) , CONFIRME

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS)
Normes : LEI.76a.al1; LEI.76a.al2.letg; LEI.80a.al3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1020/2022 MC

JTAPI/324/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 1er avril 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Dominique BAVAREL, avocat

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1990, est originaire du Nigéria.

2.             Depuis 2018, M. A______ a été condamné à cinq reprises pour des infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et à une reprise pour infraction à l'art. 19 al. 1 let. c de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121).

3.             Les 6 février 2018 et 6 mars 2019, M. A______ a été transféré de Suisse en Italie, conformément au Règlement (UE) No 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (Règlement Dublin III, ci-après : le règlement).

4.             Le 10 mars 2022, M. A______ a été observé par la police en train d’effectuer un échange avec un toxicomane. Ce dernier, interpellé, a confirmé avoir acheté à M. A______ une demi-boulette de cocaïne de 0,52 gr. contre la somme de CHF 30.-. A la suite de cet événement, les forces de police ont procédé à l'arrestation de M. A______.

5.             Entendu dans les locaux de la police le 11 mars 2022, M. A______ a nié s'adonner au trafic de stupéfiants.

Il a expliqué avoir vendu par le passé de la cocaïne à une seule occasion, mais c'était une erreur de sa part. Il avait travaillé au noir en France pour gagner de l’argent. Il était venu à Genève le 15 février 2022 pour trouver du travail depuis la France, pays où il vivait. A Genève, il logeait à l'hôtel City Hoste. Il était démuni de moyens financiers et n'avait aucun lien particulier avec la Suisse ni autorisation pour y séjourner. Il était également démuni de documents d’identité.

6.             Prévenu d'infractions à la LStup (trafic de stupéfiants) et à la LEI (séjour illégal), M. A______ a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police.

7.             Il ressortait d’une comparaison avec la base de données européenne d'empreintes digitales (Eurodac) que l'intéressé avait déposé trois demandes d'asile, respectivement le 9 septembre 2015 en Italie, le 26 juin 2017 en Suisse, et le 22 mars 2019 en France.

8.             Le 11 mars 2022, l'intéressé, après avoir été entendu par le procureur, a été condamné par ordonnance public du Ministère public, pour infractions aux art. 19 al. 1 let. c LStup et 115 al. 1 let. a et b LEI à une peine privative de liberté de nonante jours.

Cette ordonnance n’a pas fait l’objet d’une opposition.

9.             Le 11 mars 2022 à 14h25, le commissaire de police a pris à l’encontre de M. A______ un ordre de mise en détention administrative pour une durée de sept semaines sur la base de l’art. 76a LEI.

Il ressortait du procès-verbal d’audition, dûment signé par M. A______, que la privation de liberté pour des motifs de droit des étrangers avait débuté à 14h. Par ailleurs, il était indiqué qu’il pouvait faire contrôler la légalité de sa détention en tout temps par écrit et s’entretenir et correspondre avec son mandataire.

M. A______ a quant à lui indiqué être d’accord d’être renvoyé dans un pays Dublin compétent pour la prise en charge de sa demande d’asile mais pas en Italie et éventuellement en France.

10.         Le même jour, il a été auditionné par la police dans le cadre de la procédure Dublin-III.

Il a notamment indiqué ne pas avoir déposé d’autre demande d’asile que celles déposées en Suisse, en Italie et en France, cette dernière ayant été refusée le décembre 2021. Il ne souhaitait pas retourner en Italie et était prêt à quitter la Suisse s’il devait être remis en liberté ; il souhaitait retourner en France par ses propres moyens.

Il contestait avoir vendu des stupéfiants.

11.         Toujours à la même date, l’OCPM a transmis par courriel au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) les documents nécessaires à l’ouverture d’une procédure Dublin-III

12.         Par requête du 31 mars 2022, M. A______, sous la plume de son conseil, a déposé une demande d'examen de la légalité et de l'adéquation de la détention administrative. Il a conclu à l’annulation de l’ordre de mise en détention et à sa mise en liberté.

Il avait déposé une demande d’asile en Italie le 9 septembre 2015 et en Suisse le 26 juin 2017. Il avait été renvoyé en Italie les 6 février 2018 et 6 mars 2019. Ne trouvant pas de moyens de subsister en Italie, il s’était rendu en France où il avait déposé une demande d’asile le 22 mars 2019, laquelle avait été refusée en janvier 2022, recevant alors l’ordre de quitter le territoire français. Il était ainsi revenu en Suisse début février 2022.

Aucun indice concret permettait de retenir une mise en danger de la vie ou de l’intégrité corporelle d’autrui par son comportement, aucune drogue n’ayant été retrouvée sur lui lors de son interpellation ou lors de la fouille de sa chambre d’hôtel et la dose retrouvée sur l’acheteur était faible. Il n’avait par ailleurs pas démontré un comportement récalcitrant contre l’autorité permettant de retenir qu’il ne prêtera pas son concours à l’exécution de son renvoi. Enfin, il n’y avait pas lieu de retenir un risque de récidive puisqu’il pouvait bénéficier de l’aide d’urgence. Ainsi, les conditions pour une détention n’étaient pas remplies.

La détention violait ensuite le principe de proportionnalité car aucune autre mesure moins incisive n’avait été envisagée.

Par ailleurs, il n’avait pas été dûment informé de ses droits et n’avait pas pu faire contrôler la légalité de la détention avant qu’un assistant social du centre de détention de Favra ne fasse une demande de défenseur d’office. Enfin, l’ordre de mise en détention n’était pas motivé et il ne ressortait pas du dossier vers quel pays le renvoi allait être exécuté.

13.         A réception de ladite demande d'examen, le tribunal a invité le commissaire de police à lui communiquer ses éventuelles observations écrites d’ici au 1er avril 2022 à 10h00.

14.         Le commissaire de police a transmis son dossier. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie « En droit ».

15.         Par courriel adressé dans le délai imparti, le commissaire de police a présenté des observations, concluant au rejet de la « demande de mise en liberté ».

Les arguments avancés à l’appui de la « demande de mise en liberté » n’étaient pas de nature à modifier sa position. Il n’avait par ailleurs aucune pièce nouvelle à produire.

16.         Le conseil de M. A______ a répliqué le 1er avril 2022à 12h15, relevant que le dossier en contenait qu’un courriel du 11 mars 2022 adressé au SEM et aucune autre information au sujet des démarches entreprises par le SEM aux fins du transfert de son client, ignorant même si une demande de reprise à l’Etat membre responsable avait été introduite.

Il maintenait dès lors ses conclusions, les principes de diligence et de célérité n’étant manifestement pas remplis.

17.         Par courriel du 1er avril 2022 à 14h09, le commissaire de police a indiqué de pas souhaiter dupliquer.

 

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance (ci-après le tribunal) est compétent pour examiner les demandes de levée de détention faites par l'étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. g de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.            Selon l'art. 80a al. 3 LEI, la légalité et l'adéquation de la détention ordonnée dans le cadre d'une procédure Dublin sont examinées, sur demande de la personne détenue, par une autorité judiciaire au terme d'une procédure écrite. Cet examen peut être demandé à tout moment.

3.            La LaLEtr, qui n'a pas été mise en jour suite à l'adoption et l'entrée en vigueur des art. 76a et 80a LEI, ne définit pas la compétence et ne détermine pas la procédure applicable dans les cas de figure envisagés par ces dispositions. Il ne fait néanmoins pas de doute que la compétence du tribunal est donnée s'agissant des demandes formées par les personnes détenues sur la base de l'art. 76a LEI (cf. not. JTAPI/803/2019 du 6 septembre 2019 ; JTAPI/720/2018 du 27 août 2018 ; JTAPI/13172018 du 13 février 2018 ; cf. aussi ATA/557/2017 du 16 mai 2017).

4.            En l'espèce, M. A______ a dûment requis du tribunal qu'il contrôle la légalité et l'adéquation de sa détention.

5.            Le tribunal peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police ; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger (cf. art. 9 al. 3 LaLEtr).

6.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

7.            Selon l'art. 28 par. 2 du règlement, les États membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément audit règlement lorsqu'il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, sur la base d'une évaluation individuelle et uniquement dans la mesure où le placement en rétention est proportionnel et si d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être effectivement appliquées. À teneur du par. 3 du même article, le placement en rétention est d'une durée aussi brève que possible et ne se prolonge pas au-delà du délai raisonnablement nécessaire pour accomplir les procédures administratives requises avec toute la diligence voulue jusqu'à l'exécution du transfert au titre du présent règlement.

8.            À teneur de l'art. 76a al. 1 LEI, afin d'assurer son renvoi dans l'État Dublin responsable, l'autorité compétente peut mettre l'étranger en détention sur la base d'une évaluation individuelle lorsque les conditions suivantes sont remplies :

a.            des éléments concrets font craindre que l'étranger concerné n'entende se soustraire au renvoi ;

b.           la détention est proportionnée ;

c.            d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être appliquées de manière efficace (art. 28 par. 2 du règlement [UE] n° 604/2013).

9.             À compter du moment où la détention a été ordonnée, l’étranger peut être placé ou maintenu en détention pour une durée maximale de sept semaines pendant la préparation de la décision relative à la responsabilité du traitement de la demande d’asile, les démarches y afférentes comprenant l’établissement de la demande de reprise en charge adressée à un autre État Dublin, le délai d’attente de la réponse à la demande ou de son acceptation tacite, la rédaction de la décision et sa notification (art. 76a al. 3 let. a LEI).

10.         Un comportement en Suisse ou à l'étranger adopté par l'intéressé permettant « de conclure qu'il refuse d'obtempérer aux instructions des autorités » constitue un élément concret faisant craindre qu'il entende se soustraire à l'exécution du renvoi (art. 76a al. 2 let. b LEI). Selon l'art. 76a al. 2 let. g LEI, le fait que l'étranger menace sérieusement d’autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et fait l’objet d’une poursuite pénale ou a été condamné pour ce motif fait aussi craindre qu'il entende se soustraire à l'exécution du renvoi.

11.         Il ressort du Message relatif à l'approbation et à la mise en œuvre des échanges de notes entre la Suisse et l'Union européenne concernant la reprise des règlements (UE) nos 603/2013 et 604/2013 (développements de l'acquis de Dublin/Eurodac) du 7 mars 2014 (FF 2014 2587, 2614) que l'art. 76a al. 2 LEI définit les critères relatifs au risque de passage à la clandestinité (cf. let. a à i). Il s'agit là d'indices concrets relevés au cas par cas justifiant de craindre que la personne concernée n'entende se soustraire à l'exécution du renvoi (non-observation des prescriptions des autorités, p. ex. violation de l'obligation de collaborer, dépôt de plusieurs demandes d'asile sous des identités différentes, etc.).

Ces critères s'apparentent aux motifs déjà existants de détention en phase préparatoire ou de détention en vue du renvoi définis aux art. 75 et 76 LEI (cf. Gregor CHATTON/Laurent MERZ, op. cit., n. 17 ad art. 76a p. 808).

12.         Sous l'angle de l'art. 76a al. 2 let. g LEI, un étranger menace sérieusement d'autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle s'il commet des infractions pénales à l'encontre de la vie et de l'intégrité corporelle (art. 111 ss CP), contre la liberté (art. 180 ss CP) ou contre l'intégrité sexuelle, dès qu'il y a contrainte (cf. art. 189 et 190 CP) (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 et les références citées). Sont aussi visées les infractions à la LStup (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/aa ; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 5a), en particulier le trafic de drogues dures (cf. ATF 125 II 369 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; Nicolas WISARD, Les renvois et leur exécution en droit des étrangers et en droit d'asile, 1997, p. 268). Il a en revanche déjà été jugé (cf. ATA/641/1996 du 31 octobre 1996 consid. 9, rendu sous l'empire de l’art. 13a let. e de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 - aLSEE - RS 142.20, dont la teneur est similaire à l'art. 75 al. 1 let. g LEI [cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.2] ; JTAPI/1360/2017 du 19 décembre 2017 ; JTAPI/1159/2016 du 10 novembre 2016 ; JTAPI/892/2015 du 24 juillet 2015) que le fait qu'une personne se soit livrée à un trafic de haschisch ne permet pas à lui seul sa mise en détention administrative sur la base des dispositions légales précitées, puisque, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue en matière de stupéfiants, à l'instar de l'ecstasy (cf. ATF 125 IV 90 consid. 3), le cannabis et ses dérivés n’ont pas le caractère d’un produit mettant gravement en danger la vie ou l’intégrité corporelle de tiers (cf. not. ATF 145 IV 312 consid. 2.1.1 ; 120 IV 256 consid. 2b ; 117 IV 314 consid. 2 ; 6B_873/2015 du 20 avril 2016 consid. 2.3.2 ; 6B_478/2011 du 21 novembre 2011 consid. 2 ; on observera, cela étant, que le Tribunal fédéral a récemment retenu [ATF 146 IV 326 consid. 3.2] que, sans être létal, le cannabis reste une substance nocive pour la santé des consommateurs, notamment des jeunes et jeunes adultes en pleine phase de développement physique et psychique, sa consommation régulière et/ou à haute dose pouvant entraîner une addiction, voire des troubles physiques et psychiques, de sorte qu'un trafic de cannabis de grande envergure, portant, comme en l'occurrence, sur plus de 300 kg et réalisant le cas grave de l'art. 19 al. 2 let. c LStup menaçait de manière sérieuse, au sens de l'art. 221 al. 1 let. c du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 [CPP - RS 312.0], la santé et la sécurité des jeunes et des jeunes adultes, représentant une part importante des consommateurs et une frange de la population particulièrement vulnérable).

13.         Comme la disposition est tournée vers le futur et tend à empêcher que l'étranger continue son comportement dangereux, il faut établir un pronostic pour déterminer si, sur la base des circonstances connues, il existe un risque sérieux que d'autres mises en danger graves se reproduisent (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.1 et les nombreuses références citées). Un tel pronostic peut s'imposer notamment lorsqu'une procédure pénale a démontré que l'étranger s'est livré à un trafic de drogues dures ne portant que sur de faibles quantités ; dans un tel cas de figure, il faut se demander s'il s'agit seulement d'un comportement coupable isolé ou s'il existe un risque que l'intéressé poursuive son trafic. En effet, la détention administrative n'est pas d'emblée exclue en présence de petits trafiquants, s'ils présentent un risque de récidive (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.5). Il est fréquent que les petits revendeurs ne soient jamais en possession d'une grande quantité de stupéfiants, ce qui ne les empêche pas de procéder constamment à du trafic, de sorte qu'en peu de temps, ils parviennent à écouler une grande quantité de drogue. Or, un tel comportement constitue une mise en danger grave de la vie ou de l'intégrité corporelle des personnes permettant de justifier une détention (cf. ATF 125 II 369 consid. 3b/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/bb ; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 5b). En revanche, celui qui n'a agi que de manière isolée avec une petite quantité de stupéfiants ne représente pas encore un danger grave pour la vie ou l'intégrité corporelle d'autres personnes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.1 in fine ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/bb ; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 3b).

14.         Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 76a al. 1 let. b et c LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 et 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ATF 130 II 425 consid. 5.2).

15.         En l'espèce, les autorités genevoises ont débuté les démarches en vue de la reprise en charge par un Etat Dublin de l’intéressé. Elles ont procédé, le 11 mars 2022, à son audition dans ce cadre et transmis ensuite tous les documents utiles au SEM par courriel du même jour. Il ressort de l’extrait Symic produit dans le dossier, que l’ouverture de la procédure Dublin a été faite le 17 mars 2022. Elles sont dès lors dans l’attente d’informations du SEM sur la suite des démarches, sans qu’elles ne puissent interférer dans le processus en cours. Il leur appartient toutefois d’interpeler régulièrement le SEM afin de connaitre l’avancement des démarches et, cas échéant, d’en informer M. A______.

Il ressort par ailleurs du dossier que M. A______ a été condamné à plusieurs reprises en Suisse, et notamment à deux reprises pour des infractions touchant à des stupéfiants, soit les 27 septembre 2018 et 11 mars 2022 ; il sied de relever que cette seconde infraction, même si elle ne porte que sur une faible quantité de drogue, concernait une drogue dure, soit de la cocaïne. Il ressort de l’audition par la police de M. A______ lors de son interpellation que, dans un premier temps, il a nié avoir vendu de la drogue sans toutefois avoir ensuite fait opposition à l’ordonnance pénale le condamnant notamment pour cette infraction. Par ailleurs, il est sans source de revenu et sans domicile, ce qui laisse craindre qu’il continue à s’adonner au trafic de stupéfiants pour gagner de l’argent s’il était remis en liberté.

Enfin, il ressort des déclarations de l’intéressé le 11 mars 2022 qu’il n’est pas d’accord de repartir en Italie, pays dans lequel il a déjà été renvoyé à deux reprises et qu’il serait éventuellement d’accord de repartir en France. Il a par ailleurs, indiqué être revenu en Suisse pour trouver du travail alors qu’il est démuni de toute autorisation dans ce sens. Enfin, il a précisé vouloir quitter la Suisse par ses propres moyens et se rendre en France, alors même que sa demande d’asile a été refusée et qu’il ne ressort pas du dossier que les autorités françaises seraient disposées à le reprendre sur leur territoire, ni qu’elles en aient l’obligation dans le cadre de la procédure Dublin. Il découle de ce qui précède que le risque qu’il se soustraie à son renvoi dans le pays dans lequel celui-ci devra être effectué s’il était remis en liberté est avéré.

Au vu de ces éléments, un pronostic défavorable quant à l'existence de garanties suffisantes que M. A______ se conformera à son obligation de quitter la Suisse pour un pays dans lequel il est autorité à séjourner, dont l'exécution répond à un intérêt public certain, peut donc être formulé, les autorités suisses devant par ailleurs pouvoir s'assurer du fait qu'il quittera bien le pays. Le risque qu'il disparaisse sans que l'on puisse vérifier son départ pour le pays responsable du traitement de sa demande d'asile apparaît ainsi suffisamment élevé, de sorte que toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devra monter dans l'avion ou prendre un autre moyen de transport devant le reconduire dans l'État Dublin chargé de sa prise en charge, étant notamment encore rappelé qu'à teneur du dossier, il ne dispose pas de moyens de subsistance et n'a ni lieu de séjour ou attaches en Suisse.

Il convient ainsi d'admettre que les conditions prévues par l'art. 76a al. 1 et 2 LEI sont réunies et que la détention est conforme au principe de proportionnalité.

16.         Par ailleurs, la durée de la détention décidée par l'officier de police (soit sept semaines) respecte le cadre légal fixé par l'art. 76a al. 3 let. a LEI et est adéquate pour assurer l'exécution du renvoi (cf. ATA/76/2018 du 26 janvier 2018 ; ATA/672/2016 du 8 août 2016 consid. 7c ; ATA/949/2015 du 18 septembre 2015 consid. 8). Cette durée est quoi qu'il en soit relative puisque, compte-tenu des démarches en cours, il est tout à fait possible que la décision du SEM puisse intervenir dans un délai plus court.

Enfin, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ont été entreprises comme déjà indiqué précédemment.

17.         Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative litigieux.

18.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative émis par le commissaire de police le 11 mars 2022 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de sept semaines, soit jusqu'au 28 avril 2022 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière