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Décisions | Chambre de surveillance

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C/19242/2016

DAS/155/2022 du 15.07.2022 sur DTAE/4321/2022 ( PAE ) , RENVOYE

Normes : CC.426
En fait
En droit

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19242/2016-CS DAS/155/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU VENDREDI 15 JUILLET 2022

 

Recours (C/19242/2016-CS) formé en date du 8 juillet 2022 par Monsieur A______, actuellement hospitalisé à la Clinique de B______, Unité C______, ______ (Genève), comparant par Me D______, avocat, en l'Etude duquel il élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 15 juillet 2022 à :

- Monsieur A______
c/o Me D______, avocat
______, ______.

- Madame E______
Monsieur F
______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Case postale 5011, 1211 Genève 11.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

Pour information à :

- Direction de la Clinique de B______
______, ______.


EN FAIT

A.           a. La situation de A______, né le ______ 1979, a été signalée au Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après: le Tribunal de protection) par ses parents en date du 5 octobre 2016. Ceux-ci mentionnaient un état psychique dégradé, avec des idées délirantes et paranoïaques et un comportement agressif, tant verbalement que physiquement, puisque quelques jours auparavant il s’en était pris au concierge de son immeuble, qu’il avait saisi par un bras, puis à la gorge. Une plainte pénale avait été déposée pour ces faits et le bailleur de A______ avait menacé de résilier son contrat de bail en cas de nouvelle plainte. D’autres locataires s’étaient par ailleurs plaints des nuisances sonores émanant de l’appartement occupé par l’intéressé.

b. Par ordonnance du 26 octobre 2016, le Tribunal de protection a désigné D______, avocat, en qualité de curateur d’office, son mandat étant limité à la représentation de A______ dans la procédure pendante devant lui.

c. Par ordonnance du 5 décembre 2016 et après avoir entendu A______ le même jour, le Tribunal de protection a, sur mesures provisionnelles, institué une curatelle de représentation et de gestion, deux intervenants du Service de protection de l’adulte étant désignés en qualité de curateurs.

d. Par ordonnance du 4 août 2017, le Tribunal de protection a ordonné l’expertise psychiatrique de A______, qu’il a confiée au Centre universitaire romand de médecine légale (CURML).

Le Dr G______, expert, a rendu son rapport le 11 octobre 2017. Il en ressort que l’expertisé avait été hospitalisé à deux reprises à la Clinique de B______, en mai et juin 2015, en admission non volontaire. Il avait ensuite débuté un suivi auprès du Dr H______, psychiatre et psychothérapeute, ainsi qu’auprès d’une psychologue. Il prenait également des médicaments. Il n’était toutefois plus suivi depuis mi-2016, mais continuait de s’auto-médiquer. L’expert a posé un diagnostic de schizophrénie indifférenciée, soit un trouble psychique d’évolution chronique, justifiant un suivi et un traitement médicamenteux au long cours. L’absence de suivi exposait l’intéressé à un risque de décompensation pouvant se compliquer avec l’apparition de troubles du comportement, tels que ceux déjà présentés (agression du concierge, crise clastique, tension avec les voisins). Afin de mettre en place ce suivi de manière efficace, l’expert préconisait un placement à des fins d’assistance au sein de la Clinique de B______, avec pour objectif d’ancrer l’expertisé sur un suivi spécialisé. L’expertisé présentait une conscience partielle du caractère pathologique de ses troubles.

e. Après une nouvelle audience le 8 janvier 2018, le Tribunal de protection a, par ordonnance du même jour, institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______, confirmant les intervenants en protection de l’adulte dans leurs fonctions de curateurs.

f. Par courrier du 11 février 2022, A______ a sollicité auprès du Tribunal de protection la levée de la curatelle de représentation et de gestion.

g. Une audience a été tenue le 4 avril 2022.

Le Dr I______, psychiatre, a été entendu. Il a précisé que A______ avait interrompu son suivi auprès de lui à mi-décembre 2021. Selon lui, sans un suivi ambulatoire régulier, la prise de médicaments était nécessaire.

A______ a indiqué être prêt à reprendre son suivi psychiatrique. Son contrat de bail avait été résilié au mois de janvier 2022, mais ses curateurs avaient contesté le congé.

Selon l’un de ses curateurs, l’intéressé était prêt à reprendre la gestion de ses affaires; il percevait une rente invalidité ainsi que des prestations complémentaires et avait peu de factures à gérer, des ordres permanents pouvant être mis en place. A______ ne faisait l’objet d’aucune poursuite.

Au terme de l’audience, le Tribunal de protection a agendé la cause au 30 mai 2022, sans qu’aucune action n’ait toutefois été entreprise à cette date.

h. Par courrier du 15 juin 2022, les parents de A______ ont informé le Tribunal de protection du fait que ce dernier était très agité depuis un certain temps. Il était ainsi venu quatre fois en une semaine à leur domicile, leur adressant des reproches et lançant une pierre contre l’une de leurs fenêtres. Il leur avait également envoyé de nombreux messages, dont le contenu apparaissait désorganisé, voire incompréhensible, avec notamment des phrases telles que: «Je vous déteste tous», «si les gens continu je vais tuer qqn», «je vais agir contre la diablesse qui m’a menacé en 2015», «Je ne mourrai pas seul», «Vous êtes tous responsables, alors nous irons tous au paradis, jouer et détruire ma vie» «G pas besoin de médication, c’est mon environnement qui est mon poison, je ne suis pas en décompensation», «Je vais te faire peter la tête avec un scooter». La copie desdits messages était accompagnée de photographies montrant un ou deux murs, vraisemblablement de l’appartement de A______, très endommagés, ainsi que de ses mains, ensanglantées et présentant des coupures importantes. Selon les parents de l’intéressé, il avait vraisemblablement frappé les murs de son logement à mains nues. De surcroît, il était en possession d’armes à feu. Etant persuadé que ses parents le manipulaient, qu’ils cherchaient à lui nuire, il n’écoutait pas leurs conseils.

i. Par décision du 20 juin 2022, le Tribunal de protection a désigné D______, avocat, en qualité de curateur d’office, le mandat étant limité à la représentation de A______ dans la procédure pendante devant lui.

j. Par courrier du 20 juin 2022, le Tribunal de protection a invité le curateur à prendre contact avec A______ et à lui transmettre, au plus tard le 18 juillet 2022, ses observations concernant la situation sociale et médicale de l’intéressé, au vu des inquiétudes exprimées par les époux L______ dans leur courrier du 15 juin 2022.

Une requête similaire, avec le même délai, a été adressée aux curateurs du Service de protection de l’adulte, le Tribunal de protection indiquant envisager un élargissement de la mesure de protection au domaine des soins et à l’assistance personnelle.

k. A la suite d’une recherche effectuée par le Service de protection de l’adulte auprès de la police, il est apparu que A______ était détenteur de deux armes à feu, enregistrées dans la base de données cantonale. Selon la police, l’intéressé avait fourni «toutes les garanties demandées en adéquation au sens de la loi fédérale sur les armes».

l. Par courrier du 27 juin 2022, le Service de protection de l’adulte a indiqué au Tribunal de protection que la situation de A______ était inquiétante. A la fin de l’audience qui avait eu lieu le 25 avril 2022 devant la juridiction des baux et loyers, A______ n’avait pas supporté le fait que sa mère se soit entretenue avec la juge. Il avait commencé à frapper contre la porte de la salle d’audience. Il avait été décidé de reconvoquer la cause au mois de septembre 2022, mais la bailleresse avait sollicité la tenue d’une nouvelle audience à brève échéance, au motif que le comportement de l’intéressé s’était aggravé au point qu’un locataire avait résilié son contrat de bail et qu’un autre avait menacé de le faire. Le 22 avril 2022, le Dr I______, psychiatre, avait indiqué au Service de protection de l’adulte qu’il ne souhaitait plus suivre A______ en thérapie, celui-ci ayant besoin d’une structure différente d’un cabinet privé. Le 22 juin 2022, A______ avait contacté le Service de protection de l’adulte et avait tenu, pendant près de quinze minutes, un discours incohérent, exprimant des idées paranoïaques et délirantes. Il était persuadé que tout le monde «lui mettait la pression pour qu’il meure» et qu’il était effectivement en train de mourir «au vu de tout ce qui se passait autour de lui». Il était en outre persuadé d’être sur écoute et que ses voisins s’introduisaient chez lui en son absence. Il avait indiqué que si cette pression continuait, «quelque chose de tragique allait se passer», précisant qu’il allait «se suicider ou autre».

m. Selon un courrier du 28 juin 2022 adressé au Tribunal de protection, le Service de protection de l’adulte avait reçu A______ la veille. Il s’était présenté à l’heure au rendez-vous et avait exprimé des sentiments de persécution de la part de ses parents, qualifiés de «pervers narcissiques». Il semblait être obsédé par le contrôle du monde qui l’entourait: parents, voisinage, ex petite amie, police, médecin, administration. Il avait par ailleurs évoqué à plusieurs reprises la volonté de mettre fin à ses jours. Une grande souffrance se dégageait de lui.

n. Par décision du 30 juin 2022, le Tribunal de protection a prié le Service de protection de l’adulte d’intervenir auprès de la Brigade des armes, afin de solliciter leur collaboration pour que les armes en possession de A______ soient saisies.

Il ressort du dossier que la Brigade des armes a pu procéder au séquestre des armes en possession de A______ le 6 juillet 2022.

o. Par ordonnance du 30 juin 2022, le Tribunal de protection a rappelé que A______ était au bénéfice d’une curatelle de représentation et de gestion et a étendu les tâches des curateurs à la santé et au bien-être social de l’intéressé.

B. Par ordonnance DTAE/4321/2022 du 30 juin 2022, le Tribunal de protection a par ailleurs ordonné le placement à des fins d’assistance de A______ (chiffre 1 du dispositif), prescrit l’exécution du placement au sein de la Clinique de B______ (ch. 2), rendu attentive l’institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder des sorties temporaires ou de transférer le lieu d’exécution du placement appartient au Tribunal de protection (ch. 3), invité les curateurs de la personne concernée à exécuter la mesure (ch. 4), les a autorisés à faire appel au Département de la sécurité et de l’économie, soit pour lui le Service d’application des peines et mesures, peut leur prêter main forte et assurer l’exécution du placement (ch. 5) et rappelé que la procédure est gratuite (ch. 6).

Le Tribunal de protection a retenu que A______ était dans le déni du trouble psychiatrique dont il souffrait, lequel se péjorait de manière inquiétante. Il nécessitait urgemment un suivi psychiatrique, étant relevé qu’il ne bénéficiait plus du suivi du Dr I______. Ses idées persécutoires le mettaient en danger, puisqu’elles avaient des conséquences délétères sur sa situation de logement. Son adhésion totale à ses idées délirantes, son fort sentiment d’injustice et les angoisses liées à ses idées persécutoires étaient autant de facteurs susceptibles d’entraîner des comportements hétéro-agressifs (recte: auto-agressifs), comme en témoignaient ses récentes déclarations concernant sa volonté de mettre fin à ses jours. Les soins psychiatriques dont l’intéressé avait besoin ne pouvaient être prodigués de manière ambulatoire et une hospitalisation en milieu psychiatrique s’avérait nécessaire.

C.                a. Le 8 juillet 2022, A______ a formé recours contre l’ordonnance DTAE/4321/2022 du 30 juin 2022, concluant à l’annulation des chiffres 1 à 5 de son dispositif et à sa libération immédiate. Subsidiairement, il a conclu à ce qu’il soit sursis à l’exécution du placement moyennant le respect de toute condition que la Chambre de surveillance estimerait nécessaires. Plus subsidiairement, il a conclu au renvoi de la cause à l’autorité précédente pour nouvelle décision.

Il a fait grief au Tribunal de protection d’avoir violé son droit d’être entendu, le délai imparti à son curateur de représentation au 18 juillet 2022 pour se prononcer sur sa situation n’ayant pas été respecté, puisque la décision attaquée avait été rendue avant cette échéance, sans qu’il ait été entendu. De surcroît, l’ordonnance litigieuse ne se fondait sur aucun constat médical, ce qui contrevenait à l’art. 68 LaCC. Le recourant a allégué ne représenter aucun danger pour lui-même ou pour autrui. L’assistance ou le traitement nécessaires pouvaient lui être fournis d’une autre manière que par le biais d’un placement. Il avait été régulièrement suivi (soit à quatre ou cinq reprises), en avril et en mai 2022, par J______, psychologue, qui agissait sous la supervision d’un psychiatre dont il ignorait le nom. Les armes à feu qu’il détenait étaient désormais séquestrées. La perte de son logement n’était pas imminente, le congé ayant été contesté. Le recourant a enfin allégué s’être spontanément rendu au poste de police et ne pas s’être opposé à sa conduite à la Clinique de B______. Quant aux propos suicidaires qu’il avait tenus, ils «relevaient davantage d’une image que d’une quelconque intention concrète».

b. Le juge délégué de la Chambre de surveillance a tenu une audience le 14 juillet 2022, celle initialement convoquée pour le 13 juillet 2022 ayant été annulée, la Clinique de B______ ayant informé le greffe de la Cour du fait que le test Covid auquel le recourant avait été soumis s’était révélé positif. Un autre test, dont le résultat était négatif, ayant été transmis à la Cour, une nouvelle audience a pu être convoquée.

Lors de celle-ci, le recourant a expliqué s’être rendu au poste de police le 6 juillet 2022 afin de discuter de ses problèmes de voisinage. Il avait directement été conduit à la Clinique de B______. Il avait «pris ses marques» durant les premiers jours et avait recommencé à s’alimenter normalement; il était en effet un peu sous-alimenté en arrivant. Il ne prenait aucun médicament. Deux jours avant l’audience, l’équipe médicale lui avait proposé un médicament, mais il l’avait refusé. Il n’était pas totalement opposé à la prise d’un traitement, mais par le passé il avait souffert d’effets secondaires désagréables. Il avait pu avoir des idées suicidaires par le passé, mais n’avait pas envie de passer à l’acte actuellement. Il souhaitait retirer du positif de son hospitalisation et était disposé à la prolonger, mais sur une base volontaire et était prêt à solliciter l’aide dont il avait besoin. Il a affirmé être suivi par une psychologue, elle-même supervisée par un psychiatre. Il a contesté être impulsif.

La curatrice du Service de protection de l’adulte a indiqué qu’une audience de conciliation aurait lieu à la fin du mois d’août 2022 devant la juridiction des baux et loyers à la suite de la contestation du congé reçu par le recourant. Pour le surplus, la situation financière et administrative de ce dernier était saine et stable.

La Dre K______, cheffe de clinique au sein de la Clinique de B______, déliée de son secret médical, a indiqué qu’à l’arrivée du recourant un sentiment de persécution vis-à-vis de ses parents et une anosognosie par rapport au diagnostic de schizophrénie avaient été relevés. Elle a confirmé ce diagnostic. Une méfiance marquée et une insécurité étaient également présentes. Il n’y avait par contre pas de désorganisation et le recourant s’était montré collaborant par rapport à la procédure d’admission, aux divers examens subis et pour les entretiens. Il n’y avait pas eu d’actes auto ou hétéro-agressifs depuis son admission et il n’avait pas tenté de fuguer. Les idées de persécution étaient toujours présentes, ainsi que le sentiment d’insécurité, lequel s’était toutefois atténué, le lien avec les soignants s’étant amélioré. Un antipsychotique avait été proposé au patient, qui l’avait refusé tout en indiquant qu’il souhaitait pouvoir y réfléchir. Selon la Dre K______, la situation était par conséquent stable, avec une certaine ouverture. La préparation de la sortie du recourant n’avait pas encore été envisagée avec lui. Il devrait toutefois suivre un traitement médicamenteux et bénéficier d’un suivi sur le plan psychiatrique, ce qui ne paraissait pas infaisable puisqu’il avait déjà bénéficié d’un tel suivi. En cas de levée de la mesure et d’un retour du recourant à domicile sans traitement, le sentiment d’insécurité risquait d’être à nouveau exacerbé, ce qui pourrait entraîner des troubles du comportement. A la question de savoir si, dans une telle hypothèse, il pouvait exister un risque hétéro ou auto-agressif, la Dre K______ a indiqué qu’il lui était difficile de répondre. Les armes à feu en possession du recourant avaient été saisies, de sorte que ce risque était écarté. Toutefois, plus les idées de persécution s’amplifieraient, plus le retrait social augmenterait et plus grand serait le risque d’un acte hétéro ou auto-agressif. La Dre K______ a précisé que ses déclarations sur ce point se fondaient sur ce qui lui avait été rapporté, puisqu’elle-même n’avait constaté aucun acte agressif.

EN DROIT

1. Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent (art. 450 al. 1 CC). Dans le domaine du placement à des fins d'assistance, le délai de recours est de dix jours à compter de la notification de la décision entreprise (art. 450b al. 2 CC). Le recours formé contre une décision prise dans le domaine du placement à des fins d'assistance ne doit pas être motivé (art. 450e al. 1 CC).

En l'espèce, le recours a été formé dans le délai utile de dix jours et devant l'autorité compétente (art. 72 al. 1 LaCC). Il est donc recevable à la forme.

2. 2.1.1 Aux termes de l'art. 426 al. 1 CC, une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaire ne peuvent lui être fournis d'une autre manière (al. 1). La personne concernée est libérée dès que les conditions de placement ne sont plus remplies (al. 3). La personne concernée ou l'un de ses proches peut demander sa libération en tout temps. La décision doit être prise sans délai (al. 4).

La loi exige la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir une cause de placement (troubles psychiques, déficience mentale ou grave état d'abandon), un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant lui être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (MEIER/LUKIC, Introduction au nouveau droit de la protection de l'adulte, p. 302, n. 666).

En cas de troubles psychiques, la décision de placement à des fins d'assistance doit être prise sur la base d'un rapport d'expertise (art. 450e al. 3 CC). Dans son rapport, l'expert doit se prononcer sur l'état de santé de l'intéressé. Il doit également indiquer en quoi les éventuels troubles psychiques risquent de mettre en danger la vie de la personne concernée ou son intégrité personnelle, respectivement celles d'autrui, et si cela entraîne chez lui la nécessité d'être assisté ou de prendre un traitement (ATF 137 III 289 consid. 4.5 p. 292 ss.; arrêt 5A_469/2013 du 17 juillet 2013 consid. 2.4). Dans l'affirmative, il incombe à l'expert de préciser quels seraient les risques concrets pour la vie ou la santé de cette personne, respectivement pour les tiers, si la prise en charge préconisée n'était pas mise en œuvre (à propos de la notion de danger concret : arrêts 5A_288/2011 du 19 mai 2011 consid. 5.3; 5A_312/2007 du 10 juillet 2007 consid. 2.3; cf. également infra consid. 6.2.3). Il doit encore indiquer si, en vertu du besoin de protection de l'intéressé, un internement ou une rétention dans un établissement est indispensable, ou si l'assistance ou le traitement nécessaire pourrait lui être fourni de manière ambulatoire. Le rapport d'expertise précisera également si la personne concernée paraît, de manière crédible, prendre conscience de sa maladie et de la nécessité d'un traitement. Enfin, l'expert doit indiquer s'il existe un établissement approprié et, le cas échéant, pourquoi l'établissement proposé entre effectivement en ligne de compte (ATF 137 III 289 consid. 4.5 p. 292 s.; à propos de la notion d'institution "appropriée"; ATF
112 II 486 consid. 4c p. 490; 114 II 213 consid. 7 p. 218 s.).

La formulation de l’al. 3 de l’art. 450e CC met en évidence que l’expert doit être indépendant et ne pas être membre de l’instance judiciaire de recours. En cas de troubles psychiques, la décision doit être prise sur la base d’une expertise externe; le nouveau droit est ainsi conforme à la jurisprudence la plus récente de la CourEDH (Steck, Protection de l’adulte, in CommFam, ad art. 450e CC n. 16).

2.1.2 En cas de placement à des fins d’assistance, la personne concernée est en principe entendue par l’autorité de protection de l’adulte réunie en collège (art. 447 al. 2 CC).

2.1.3 Le droit d'être entendu est une garantie de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours au fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1, JdT 2010 I 255). Ancré à l'art. 29 al. 2 Cst. féd., il garantit au justiciable le droit de s'exprimer avant qu'une décision soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos dans la mesure où il l'estime nécessaire (ATF 139 I 189 consid. 3.2). Il ne confère en revanche pas le droit d'être entendu oralement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_225/2011 du 9 août 2011 consid. 3.2) et ne s'oppose pas à ce que l'autorité mette un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction, quand bien même le procès est soumis à la maxime inquisitoire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_11/2014 du 3 juillet 2014 consid. 2.1).

2.2.1 En l’espèce, le rapport d’expertise du 11 octobre 2017 a retenu le diagnostic de schizophrénie indifférenciée, soit un trouble psychique d’évolution chronique, justifiant un suivi et un traitement médicamenteux au long cours. Bien que le recourant ne reconnaisse pas ce diagnostic, il n’a fourni aucun élément concret qui permettrait de le mettre en doute, étant précisé qu’il a été confirmé par la Dre K______. Il sera dès lors admis que le recourant est atteint de troubles psychiques.

Les nombreux messages adressés par le recourant à ses parents, dont une copie a été transmise au Tribunal de protection le 15 juin 2022, apparaissent, pour certains, violents ou menaçants. Le recourant a par ailleurs tenu des propos incohérents, délirants et paranoïaques lors d’un entretien téléphonique du 22 juin 2022 avec une intervenante du Service de protection de l’adulte, selon les déclarations de celles-ci; il a en outre émis des idées suicidaires le 27 juin 2022 lors d’une rencontre avec ce même service, propos qu’il a toutefois relativisés devant la Cour.

Sur la base de ces éléments, le Tribunal de protection a pris la décision de prononcer, le 30 juin 2022, une mesure de placement à des fins d’assistance en faveur du recourant. Ce faisant, il a toutefois violé son droit d’être entendu. En effet, un délai au 18 juillet 2022 avait été imparti au curateur de représentation du recourant pour qu’il fasse part de ses observations concernant la situation sociale et médicale de l’intéressé, compte tenu des inquiétudes exprimées par ses parents. Le Tribunal de protection a toutefois rendu l’ordonnance litigieuse sans attendre l’échéance de ce délai et sans avoir procédé préalablement à l’audition de l’intéressé.

Par ailleurs, le Tribunal de protection n’était en possession que de l’expertise rendue en 2017. Si celle-ci pouvait certes permettre de retenir l’existence de troubles psychiatriques, elle n’était d’aucune utilité au Tribunal de protection pour déterminer l’état de santé précis du recourant au moment où son placement a été ordonné. Le Tribunal de protection ne pouvait par ailleurs pas, même s’il comprenait dans sa composition un médecin psychiatre, retenir sans aucun avis médical d’un expert indépendant que les soins psychiatriques dont le recourant avait besoin ne pouvaient pas lui être prodigués de manière ambulatoire et qu’une hospitalisation en milieu psychiatrique s’avérait nécessaire. Dès lors, le Tribunal de protection ne disposait pas des éléments nécessaires lui permettant de prononcer, au fond, une mesure de placement à des fins d’assistance.

Au vu de ce qui précède, l’ordonnance attaquée doit être annulée et la cause renvoyée au Tribunal de protection pour suite d’instruction dans le sens de ce qui précède et nouvelle décision.

2.2.2 Le recourant a tenu des propos agressifs et menaçants dans les messages adressés à ses parents, ainsi que des propos suicidaires lors de son entretien avec une intervenante du Service de protection de l’adulte. Les photographies versées au dossier permettent par ailleurs de retenir que le recourant s’est vraisemblablement blessé en frappant à mains nues les murs de son domicile. Compte tenu de la maladie psychiatrique dont souffre l’intéressé, il convient de ne pas banaliser ces faits, même s’il s’est montré collaborant lors de son hospitalisation à la Clinique de B______, au sein de laquelle il n’a pas fait preuve d’agressivité. Il convient également de tenir compte du fait que le recourant ne prend actuellement aucun médicament, alors qu’un traitement médicamenteux lui a été recommandé par l’équipe soignante de la Clinique de B______, qu’il a pour l’instant refusé. Il n’est par ailleurs plus suivi par un médecin psychiatre, mais s’est contenté d’avoir quelques entretiens avec une psychologue. Il ne peut dès lors être exclu, en cas de levée pure et simple de la mesure de placement sans que la sortie n’ait pu être préparée au préalable, que, comme l’a expliqué la Dre K______, les idées de persécution dont souffre le recourant s’amplifient et que son retrait social augmente, avec un risque de passage à l’acte auto ou hétéro-agressif. Un tel risque ne saurait être a priori exclu, étant rappelé que le recourant s’en était pris physiquement au concierge de son immeuble en 2016 et qu’un tel risque avait été retenu par le rapport d’expertise du 11 octobre 2017.

L’ensemble de ces éléments conduit la Chambre de surveillance à prononcer, sur mesures provisionnelles, le placement à des fins d’assistance du recourant au sein de la Clinique de B______, étant relevé que le recourant a déclaré avoir, quoiqu’il en soit, l’intention d’y demeurer volontairement hospitalisé.

3. La procédure est gratuite (art. 22 al. 4 LaCC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l’ordonnance DTAE/4321/2022 du 30 juin 2022 rendue par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/19242/2016.

Au fond :

Annule l’ordonnance entreprise.

Retourne la cause au Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant pour suite d’instruction et nouvelle décision.

Cela fait, statuant sur mesures provisionnelles :

Ordonne le placement à des fins d’assistance de A______.

Prescrit l’exécution du placement au sein de la Clinique de B______.

Sur les frais :

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente ad interim; Madame Pauline ERARD et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.