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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/2502/2022

ACJC/930/2022 du 07.07.2022 sur JTBL/205/2022 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Normes : CPC.311
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2502/2022 ACJC/930/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du JEUDI 7 JUILLET 2022

 

Entre

A______ Sàrl, c/o B______ SA, ______ (VD), appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 17 mars 2022, comparant en personne,

et

Madame C______ et Madame D______, domiciliées ______ (GE), intimées, comparant toutes deux par Me Aurèle MULLER, avocate, rue des Deux-Ponts 14, case postale 219, 1211 Genève 8, en l'étude de laquelle elles font élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/205/2022 du 17 mars 2022, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ Sàrl à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens ainsi que de toute personne dont elle est responsable, les deux arcades commerciales de 17 m2 et de 44 m2, situées au rez-de-chaussée, et le local d'environ 29 m2 situé au sous-sol, de l'immeuble sis 1______ à Genève (ch. 1 du dispositif), autorisé C______ et D______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______ Sàrl, dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 29 mars 2022 à la Cour de justice, A______ Sàrl a formé "recours" contre ce jugement. Elle n'a pas pris de conclusion, mais a exposé avoir investi 100'000 fr. pour la reprise du fonds de commerce de l'arcade louée et la réalisation de travaux et souhaiter remettre ledit fonds de commerce afin de solder ses dettes.

b. Dans leur réponse du 1er avril 2022, C______ et D______ ont conclu à la confirmation du jugement entrepris.

c. Le 4 mai 2022, en l'absence de réplique, les parties ont été avisées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. C______ et D______, bailleresses, et A______ Sàrl, locataire, sont liées par un contrat de bail portant sur la location de deux arcades de 17 m2 et de 44 m2, situées au rez-de-chaussée, et d'un local d'environ 29 m2 situé au sous-sol, de l'immeuble sis 1______ à Genève.

Le loyer a été fixé en dernier lieu à 3'450 fr. par mois, à compter du 1er janvier 2021.

b. Par avis comminatoire du 12 novembre 2021, les bailleresses ont mis en demeure la locataire de lui régler dans les 30 jours le montant de 7'000 fr. correspondant aux loyers et acomptes provisionnels pour les mois d'octobre et novembre 2021, avec frais de mise en demeure, et l'ont informée de leur intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

c. La locataire a effectué un paiement unique de 3'500 fr. (loyer d'octobre 2021) le 15 novembre 2021.

d. Considérant que la somme réclamée n'avait pas intégralement été réglée dans le délai imparti, les bailleresses ont, par avis officiel du 20 décembre 2021, résilié le bail pour le 31 janvier 2022.

e. Le 6 janvier 2022, la locataire s'est acquittée du loyer de novembre 2021.

f. Le 17 janvier 2022, la locataire a contesté le congé par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers.

g. Par requête du 10 février 2022, les bailleresses ont introduit une action en évacuation devant le Tribunal des baux et loyers et ont en outre sollicité l'exécution directe de l'évacuation.

h. Lors de l'audience du 17 mars 2022 devant le Tribunal, les bailleresses ont persisté dans leurs conclusions. Elles ont exposé que l'arriéré se montait à 14'161 fr. La situation était à jour au 30 novembre 2021.

La locataire a confirmé le montant de l'arriéré. Elle a exposé avoir trouvé un tiers prêt à reprendre le magasin en l'état avec le stock, à compter du mois d'avril 2022.

Les bailleresses ont confirmé que des pourparlers étaient en cours et que la porte n'était pas fermée de leur côté, mais qu'elles souhaitaient, en l'état, que la procédure aille de l'avant.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

i. Dans son jugement du 17 mars 2022, le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation selon l'art. 257d al. 1 CO étaient manifestement réunies en l'espèce. Les bailleresses étaient ainsi fondées à donner congé et la locataire ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux loués. En continuant à les occuper, elle violait l'art. 267 al. 1 CO. Dès lors, il serait fait droit à la demande et l'évacuation de la locataire serait prononcée.

Les bailleresses avaient en outre requis le prononcé de l'exécution de l'évacuation, ce à quoi il serait fait droit.

EN DROIT

1. La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC).

En l'espèce, il doit être compris des explications de la locataire qu'elle conteste non seulement l'exécution de son évacuation, mais cette évacuation elle-même.

1.1 Si les conditions pour ordonner une expulsion selon la procédure sommaire en protection des cas clairs sont contestées, la valeur litigieuse correspond à la valeur du loyer pour la chose louée pour six mois (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1).

Le loyer a été fixé en dernier lieu à 3'450 fr. par mois. La valeur litigieuse est ainsi de 20'700 fr. Etant supérieure à 10'000 fr., la voie de l'appel est ouverte.

1.2 L'acte a été formé dans le délai prévu par la loi. Reste à examiner s'il répond aux autres conditions de recevabilité, en particulier celle de motivation.

1.2.1 Selon l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel, c'est-à-dire de démontrer le caractère erroné de la motivation attaquée. Pour satisfaire à cette exigence, il ne lui suffit pas de renvoyer à une écriture antérieure, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision que l'appelant attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 p. 375).

La motivation de l'appel constitue une condition de recevabilité, qui doit être examinée d'office. Lorsque l'appel est insuffisamment motivé, l'autorité n'entre pas en matière (arrêts du Tribunal fédéral 5A_247/2013 du 15 octobre 2013 consid. 3.1; 4A_651/2012 du 7 février 2013 consid. 4.2).

La motivation du recours doit, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un acte d'appel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_488/2015 du 21 août 2015 consid. 3.2.1 et les arrêts cités).

L'intitulé erroné d'un recours ne nuit pas à son auteur pour autant que l'écriture déposée remplisse les conditions formelles de la voie de droit qui lui est ouverte (ATF 136 II 497 consid. 3.1 p. 499; 134 III 379 consid. 1.2 p. 382).

1.2.2 En l'espèce, le fait que l'acte formé soit erronément intitulé "recours" est sans incidence sur l'issue du litige dans la mesure où les exigences quant à la motivation de l'acte sont identiques pour l'appel et le recours.

L'appelante fait uniquement valoir qu'elle souhaiterait pouvoir remettre son fonds de commerce pour rembourser ses dettes. Il ne s'agit toutefois pas d'un élément pertinent pour déterminer si les conditions pour l'évacuation et l'exécution de celle-ci sont remplies; mais il peut, tout au plus, faire l'objet de discussions entre les parties, hors procédure.

L'appelante ne conteste pas de manière motivée le jugement attaqué en tant qu'il a considéré que les conditions pour résilier le bail étaient réunies, et que l'évacuation devait être prononcée, de même que l'exécution de celle-ci. Elle n'a notamment pas soutenu s'être acquittée du montant réclamé à titre d'arriéré de loyers dans le délai fixé dans l'avis comminatoire.

Dès lors, en l'absence de toute motivation conforme aux exigences en la matière, même interprétées de manière large à l'égard d'un plaideur en personne, l'appel sera déclaré irrecevable.

2. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable l'appel interjeté le 29 mars 2022 par A______ Sàrl contre le jugement JTBL/205/2022 rendu le 17 mars 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/2502/2022-8-SE.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Serge PATEK et Madame Elodie SKOULIKAS, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.