Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/1310/2022

ACJC/797/2022 du 13.06.2022 sur JTBL/212/2022 ( SBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1310/2022 ACJC/797/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du LUNDI 13 JUIN 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant et recourant contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 17 mars 2022, comparant en personne,

et

1) B______ SA, sise ______ [VS], intimée, comparant par Me Myriam DE LA GANDARA, avocate, place du port 1, 1204 Genève, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile,

2) Monsieur C______, domicilié ______ [GE], autre intimé, comparant en personne.


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/212/2022 du 17 mars 2022, reçu par A______ le 25 mars 2022, le Tribunal des baux et loyers, après avoir ordonné la jonction des causes n° C/1310/2022 et n° C/4______/2022 sous le numéro de la première de celles-ci (ch. 1 du dispositif), a condamné A______ et C______ à évacuer immédiatement de leur personne et de leurs biens ainsi que de toute autre personne faisant ménage commun avec eux l'appartement de quatre pièces n° 1______ situé au 4ème étage de l'immeuble sis 2______ à D______ [GE], ainsi que la place de stationnement n° 3______ située à l'extérieur dudit immeuble (ch. 2), autorisé B______ SA à requérir l'évacuation par la force publique de C______ dès l'entrée en force du jugement et celle de A______ à compter du 1er mai 2022 (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5).

B. a. Le 4 avril 2022, A______ a formé appel et recours contre ce jugement, concluant principalement à ce que la Cour l'annule. Subsidiairement, il conclut à ce que la Cour dise que le recours à la force publique pour obtenir l'exécution du jugement d'évacuation ne soit autorisé que neuf mois après l'entrée en force de l'arrêt de la Cour.

Il a produit une nouvelle pièce.

b. Dans sa réponse du 19 avril 2022, B______ SA a conclu à la confirmation du jugement querellé.

C______ ne s'est pas déterminé.

c. Les parties ont été avisées le 9 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. a.a S.I. E______, en tant que bailleresse, et A______ et C______, en tant que locataires, ont conclu le 28 avril 1999 un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 4 pièces à usage exclusif d'habitation portant le n° 1______ et situé au 4ème étage d'un immeuble sis 2______ à D______.

Le montant du loyer mensuel a été fixé à 1'000 fr., auxquels s'ajoutaient 125 fr. de charges.

Le contrat précisait que les conditions générales et règles et usages locatifs appliqués dans le canton de Genève faisaient partie intégrante du contrat, lesquelles prévoient notamment que "le loyer et les frais accessoires sont payables par mois d'avance au domicile du bailleur ou à son compte bancaire ou postal".

a.b F______, G______, S.I E______ et S.I H______, en tant que bailleurs, et A______ et C______, en tant que locataires, ont conclu le 18 janvier 2022 un bail portant sur un emplacement extérieur (place de stationnement) portant le n° 3______, sis à l'extérieur de l'immeuble en question.

Le montant du loyer mensuel, payable par mois et d'avance, a été fixé à 50 fr.

a.c B______ SA a acquis la propriété de l'immeuble sis 2______ à D______ et s'est ainsi substituée aux bailleurs.

b. Aux termes d'un contrat daté du 15 juin 2018, A______ a sous-loué à I______ l'appartement objet du présent litige pour un loyer de 1'500 fr. charges comprises, sans que cela ne soit approuvé par la bailleresse.

c. c.a Au 13 janvier 2021, les locataires n'avaient pas réglé les loyers et charges afférents aux mois de décembre 2020 et janvier 2021.

c.b Par courrier recommandé du 13 janvier 2021, la bailleresse les a mis en demeure de lui régler sous 30 jours 2'380 fr. à titre d'arriérés de loyers et de charges (appartement et place de stationnement) pour les mois de décembre 2020 et janvier 2021, plus 30 fr. de frais de rappel, précisant qu'à défaut de paiement, les baux seraient résiliés conformément à l'art. 257d al. 2 CO.

A______ a reçu ledit courrier le 18 janvier 2021. C______ a, quant à lui, laissé échoir le délai de garde sans retirer le courrier recommandé.

c.c Le 20 février 2021, A______ a versé la somme de 1'175 fr. à la bailleresse.

c.d Par avis officiel du 23 février 2021, B______ SA a résilié les baux de l'appartement n° 1______ et de la place de stationnement pour le 31 mars 2021.

Ladite résiliation n'a pas été contestée par les locataires.

c.e Par requête du 15 avril 2021, la bailleresse a requis du Tribunal qu'il ordonne l'évacuation des locataires par la voie de la procédure en protection des cas clairs.

Par jugement JTBL/515/2021 du 11 juin 2021, le Tribunal a fait droit aux conclusions de la bailleresse.

Par arrêt ACJC/1333/2021 du 18 octobre 2021, la Cour a annulé ce jugement et déclaré irrecevables la requête de protection en cas clair formée par B______ SA, motif pris que l'exigence du paiement du loyer par mois d'avance ne résultait pas de la loi, n'avait pas été allégué et ne constituait pas un fait notoire, de sorte que le retard de paiement du loyer de janvier 2021 non-réglé dans le délai comminatoire par les locataires n'était pas évident.

d. d.a Le 26 janvier 2022, la bailleresse a déposé une nouvelle requête en en protection du cas clair, concluant à ce que le Tribunal condamne les locataires à évacuer, de leurs personnes, de leurs biens, ainsi que de tous tiers dont ils seraient responsables, l'appartement de 4 pièces, n° 1______, situé au 4ème étage de l'immeuble sis 2______ à D______, de même qu'à libérer la place de stationnement n° 3______ située à l'extérieur dudit immeuble et ordonne l'exécution immédiate du jugement d'évacuation par l'intervention d'un huissier judiciaire ou, si nécessaire, par l'intervention de la force publique.

d.b A l'occasion de l'audience du Tribunal du 17 mars 2022, la bailleresse a déclaré que les loyers étaient à jour depuis le mois de mai 2021, mais que le paiement des loyers antérieurs avait été irrégulier. Elle a exposé, sans être contredite sur ce point, avoir constaté qu'un deuxième nom (J______) figurait sur la boite aux lettres et relevé le manque de coopération des locataires, notamment leur absence de réponse à un courrier relatif au recensement des caves.

d.c Devant le Tribunal, A______ a déclaré que sa situation était très difficile. Il était chauffeur de taxi indépendant et avait été affecté par la pandémie de COVID-19. Il était père de trois enfants, avec lesquels il bénéficiait d'un droit aux relations personnelles qu'il exerçait dans l'appartement litigieux. Il avait repris sa situation en main et s'acquittait régulièrement des loyers, les paiements étant à jour depuis mai 2021. Il n'avait jamais sous-loué l'appartement mais avait offert un hébergement temporaire à un ami. S'agissant du nom du tiers sur sa boite aux lettres, il suggérait un transport sur place afin d'éclaircir la situation. Sans être contredit sur ce point, il a allégué être confronté à plusieurs problèmes de santé, notamment des problèmes d'hypertension, d'hépatite et de caillots sanguins urinaires. Il ne s'était pas inscrit à l'Office cantonal du logement, contestant néanmoins n'avoir pas entrepris de démarche pour retrouver un logement.

C______ n'était ni présent ni représenté à l'audience de plaidoiries finales.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a et 319 let. a CPC).

Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle. S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche le congé est également contesté, il y a lieu de prendre en compte la durée prévisible pendant laquelle l'usage de l'objet se prolongerait si le congé était éventuellement invalidé, soit la période de protection de trois ans de l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3 - JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239).

La locataire a contesté en l'espèce la résiliation du bail, de sorte que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. au vu du montant du loyer. La voie de l'appel est dès lors ouverte contre la décision d'évacuation, alors que celle du recours l'est contre la décision d'exécution de ladite évacuation.

1.2 L'appel et le recours ont été interjetés dans le délai et suivant les formes prescrites par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Ils sont ainsi recevables. Dirigés contre le même jugement, ils seront traités dans le même arrêt. Pour des motifs de simplification, A______ sera désignée comme "l'appelant".

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

En revanche, le recours est recevable pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

2. 2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, Commentaire Romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 6 ad art. 317 CPC).

Les exigences posées par l'art. 257 al. 1 CPC doivent être satisfaites en première instance déjà et le juge d'appel ne saurait contrôler l'appréciation du tribunal sur la base de pièces différentes, fussent-elles recevables au regard de l'art. 317 al. 1 CPC (arrêts du Tribunal fédéral 4A_420/2012 du 7 novembre 2012 consid. 5; 4A_312/2013 du 17 octobre 2013 consid. 3.2). Il en va de même des faits nouveaux, étant souligné que, dans la mesure où la maxime des débats est applicable à la procédure de protection dans les cas clairs, tout fait non contesté est un fait prouvé (cf. ATF 144 III 462 consid. 3.3.2).

Les faits qui sont immédiatement connus du Tribunal, notamment parce qu'ils ressortent d'une autre procédure entre les mêmes parties, peuvent être pris en considération même en l'absence d'allégation ou d'offre de preuve correspondante. Il s'agit en effet de faits notoires qui n'ont pas à être prouvés et ne peuvent pas être considérés comme nouveaux (arrêt du Tribunal fédéral 5A_610/2016 du 3 mai 2017 consid. 3.1, ACJC/207/2022 du 14 février 2022, 2.1).

2.2 En l'espèce, la pièce nouvellement produite par l'appelant est un procès-verbal d'audience tenue dans une cause opposant les mêmes parties et portant sur le même objet, de sorte qu'il s'agit d'un fait notoire.

A ce titre, elle est recevable.

3. Le Tribunal a considéré que les conditions du cas clair étaient réalisées. Lorsque le congé avait été donné, l'appelant était en retard dans le paiement des loyers et charges de décembre 2020 et janvier 2021 afférents à l'appartement et à la place de stationnement, qui étaient dus par mois d'avance. Dans le délai comminatoire, l'appelant avait réglé les loyers et charges afférents au mois de décembre 2020, mais pas ceux de janvier 2021. Aussi, la bailleresse était fondée à résilier le bail et aucune circonstance, en particulier l'absence de préjudice financier, ne permettait de retenir que le congé était contraire à la bonne foi.

L'appelant fait valoir que la bailleresse a commis un abus de droit en résiliant le bail, puisqu'elle ne pouvait justifier d'aucun intérêt à la résiliation au vu de l'absence de préjudice financier - le loyer étant à jour – et que la sous-location qu'elle alléguait n'avait pas été prouvée.

3.1. 3.1.1 La procédure de protection dans les cas clairs prévue par l'art. 257 CPC permet à la partie demanderesse d'obtenir rapidement une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire, lorsque la situation de fait et de droit n'est pas équivoque (ATF 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 620 consid. 5.1.1). En vertu de l'art. 257 al. 1 CPC, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b). Le tribunal n'entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée (art. 257 al. 3 CPC).

Selon la jurisprudence, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur; il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve est rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. La preuve n'est pas facilitée : le demandeur doit apporter la preuve certaine des faits justifiant sa prétention; la simple vraisemblance ne suffit pas. Si le défendeur fait valoir des objections motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure du cas clair est irrecevable (ATF 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 620 consid. 5.1.1 et les arrêts cités).

La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées (ATF 138 III 123 consid. 2.1.2, ATF 138 III 620 consid. 5.1.1, ATF 138 III 728 consid. 3.3). En règle générale (cf. cependant arrêt du Tribunal fédéral 4A_185/2017 du 15 juin 2017 consid. 5.4 et les références), la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce (ATF 141 III 23 consid. 3.2 p. 26; 138 III 123 consid. 2.1.2 p. 126; arrêt du Tribunal fédéral 4A_273/2012 du 30 octobre 2012 consid. 5.1.2, non publié in ATF
138 III 620).

3.1.2 Selon l'art. 257d al. 1 et 2 CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Le délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1). A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

Si le cas est clair, afin d'obtenir rapidement l'évacuation forcée des locaux loués, le bailleur peut mettre en œuvre la procédure sommaire prévue par l'art. 257 CPC alors même que le locataire a éventuellement introduit une action en annulation du congé sur la base des art. 271, 271a et 273 CO; la litispendance n'est alors pas opposable au bailleur (ATF 141 III 262 consid. 3).

Selon la jurisprudence, la résiliation fondée sur l'art. 257d al. 2 CO n'est contraire aux règles de la bonne foi, et donc annulable sur la base de l'art. 271 al. 1 CO, que dans des circonstances particulières. L'annulation entre en considération lorsque le bailleur a réclamé au locataire, avec menace de résiliation du bail, une somme largement supérieure à celle en souffrance, alors qu'il n'était pas certain du montant effectivement dû (ATF 120 II 31 consid. 4b). L'annulation entre aussi en considération lorsque l'arriéré est insignifiant, ou lorsque ce montant a été réglé très peu de temps après l'expiration du délai comminatoire, alors que, auparavant, le locataire s'était toujours acquitté à temps du loyer, ou encore lorsque le bailleur ne résilie le contrat que longtemps après l'expiration de ce même délai (arrêts du Tribunal fédéral 4A_472/2008 du 26 janvier 2009 consid. 5.3.1, RtiD 2009 II 681; 4C_430/2004 du 8 février 2005 consid. 3.1, SJ 2005 I p. 310/311).

3.2 En l'espèce, l'appelant ne conteste pas que les conditions d'application de l'art. 257d al. 2 CO sont réalisées.

Contrairement à ce qu'il soutient, l'intimée n'a pas commis un abus de droit en résiliant le bail. Aucun élément du dossier ne permet de retenir que cette résiliation visait un but autre que celui prévu par la loi. Au moment de la résiliation, le loyer était impayé et l'intimée subissait bien un préjudice financier de ce fait. Rien ne l'obligeait à retirer cette résiliation par la suite, après paiement de l'arriéré.

Par ailleurs, l'appelant, qui soutient que la sous-location n'a pas été prouvée, perd de vue que ce n'est pas ce motif qui a justifié la résiliation du bail.

Par conséquent, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que la résiliation du bail était valable et que l'évacuation de l'appelant devait être ordonnée.

4. Le Tribunal a octroyé à l'appelant un sursis humanitaire au 30 avril 2022, considérant, en sa faveur, son état de santé et l'absence de préjudice financier pour la bailleresse et, à son encontre, le fait qu'il n'avait fourni aucune explication quant au deuxième nom apparaissant sur sa boîte aux lettres et qu'il n'avait pas rendu vraisemblable qu'il s'était activé à rechercher un logement de remplacement.

L'appelant fait valoir que le Tribunal a violé le principe de proportionnalité et d'égalité de traitement en lui accordant un sursis humanitaire d'un mois seulement pour évacuer le logement, ce qui était beaucoup trop court compte tenu de son état de santé, de ses difficultés financières liées à la crise sanitaire, de l'absence de solution de relogement et des conséquences "dramatiques" d'une évacuation rapide, alors que, de son côté, l'intimée n'avait aucun intérêt à l'évacuation faute de dommage financier. Au vu de la casuistique et des circonstances, l'octroi d'un sursis humanitaire de neuf mois se justifiait.

4.1 L'exécution forcée d'un jugement ordonnant l'expulsion d'un locataire est réglée par le droit fédéral (cf. art. 335 et ss CPC).

En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b p. 339; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

Selon l'art. 30 al. 4 LaCC, le Tribunal peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement d'évacuation dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties.

4.2 Contrairement à ce que soutient l'appelant, le Tribunal a pris en compte toutes les circonstances pertinentes du cas d'espèce et a fait un usage approprié de son pouvoir d'appréciation en lui octroyant un sursis à l'exécution du jugement de plus d'un mois.

Le bail a été résilié en février 2021 et l'appelant n'a pas établi avoir fait de recherches de relogement. Aucun élément du dossier ne permet par ailleurs de retenir que les problèmes de santé qu'il allègue ou sa situation financière s'opposent à son déménagement.

Compte tenu de ce qui précède, le fait que le loyer soit à jour ne permet pas de retenir une solution différente de celle du Tribunal.

Les trois arrêts de la Cour cités par l'appelant pour soutenir qu'un sursis plus long serait adapté et n'équivaudrait pas à une prolongation de bail concernent des situations différentes.

Dans deux de ces arrêts (ACJC/161/2015 du 15 février 2015, consid. 2.2 et ACJC/213/2012 du 20 février 2012, consid. 2.3), le locataire avait démontré avoir effectué des recherches sérieuses pour se reloger, ce qui n'est pas le cas de l'appelant. Dans le troisième arrêt (ACJC/123/2017 du 6 février 2017, consid. 2), des circonstances particulières avaient été prises en considération pour octroyer un sursis à l'exécution de sept mois environ, soit notamment le fait que ce délai permettait à l'enfant des locataires de finir son année scolaire dans l'établissement qu'il fréquentait avant d'avoir à déménager.

Aussi, dans la mesure où les circonstances factuelles de ces trois arrêts diffèrent de la situation d'espèce, il n'y a aucune inégalité de traitement à retenir un sursis à l'exécution du jugement plus court (cf. ACJC/298/2019 du 27 février 2019, consid. 4.1.1, et les références citées).

Le Tribunal a donc fait une bonne application du principe de proportionnalité en octroyant à l'intimé un sursis jusqu'à l'entrée en force du jugement.

Par conséquent, le jugement querellé sera intégralement confirmé.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevables l'appel et le recours interjetés le 4 avril 2022 par A______ contre le jugement JTBL/212/2022 rendu le 17 mars 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/1310/2022-7-SE.

Au fond :

Le confirme.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Pauline ERARD, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 







Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.