Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/3569/2022

ACJC/787/2022 du 13.06.2022 sur JTBL/145/2022 ( SP ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3569/2022 ACJC/787/22

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du LUNDI 13 JUIN 2022

 

Entre

A______ SARL, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 25 février 2022, comparant par Me B______, avocat, A______, ______ [GE], en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

C______, domiciliée ______ [ZH], intimée, comparant par Me Emmanuelle GUIGUET-BERTHOUZOZ, avocate, BORY & ASSOCIES AVOCATS, place Longemalle 1, 1204 Genève, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance JTBL/145/2022 du 25 février 2022, reçue par A______ SARL le 1er mars 2022, le Tribunal des baux et loyers a débouté la précitée de ses conclusions en suspension du caractère exécutoire du jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers JTBL/990/2021 dans la cause C/1______/2021 (ch. 1 du dispositif), a dit que la procédure était gratuite (ch. 2) et a rayé la cause du rôle (ch. 3).

En substance, le Tribunal a considéré que A______ SARL n'avait pas rendu suffisamment vraisemblable l'avènement d'une circonstance permettant de surseoir à l'exécution du jugement d'accord du 29 novembre 2021, notamment que la décision aurait été par erreur déclarée exécutoire ou que des faits nouveaux empêchant l'exécution se seraient produits, tels un sursis ou le renoncement du créancier à l'exécution.

La requête devait ainsi être rejetée, tant sur mesures conservatoires et superprovisionnelles qu'au fond.

Cette ordonnance, rédigée sous la forme d'"attendus", ne comporte pas de partie EN FAIT.

B. a. Par acte déposé le 2 mars 2022 à la Cour de justice, A______ SARL a formé recours, subsidiairement appel, contre cette ordonnance, sollicitant son annulation. Elle a conclu à ce que la Cour interdise à titre superprovisionnel à C______ de procéder à un quelconque acte d'exécution ou de préparation d'exécution fondé sur le jugement JTPI/990/2021 (recte JTBL/990/2021), dise qu'il ne peut pas être procédé à son évacuation, notamment par la force publique ou toute autre mesure y relative, jusqu'à droit jugé sur la requête de mesures provisionnelles conservatoires et ordonne la suspension de l'exécution du jugement suscité. Sur mesures conservatoires, elle a conclu à ce que la Cour constate que le jugement JTPI/990/2021 (recte JTBL/990/2021) ne comporte aucune condamnation d'évacuer les locaux, lui donne acte de ce qu'elle entrera dans ses nouveaux locaux le 1er mai 2022 et interdise à C______ de procéder à un quelconque acte d'exécution.

Elle s'est plainte de l'absence de jugement d'évacuation susceptible d'être exécuté par la force publique, de la violation de son droit d'être entendue, motif pris de l'absence de partie en fait de la décision entreprise et d'un abus du pouvoir d'appréciation de l'autorité inférieure. Elle a notamment fait valoir que son conseil, B______, seul en charge de la relocation de A______ SARL, avait été victime, après le prononcé du jugement, d'une atteinte grave et durable à sa santé, persistant encore.

A______ SARL a produit des pièces figurant déjà au dossier.

b. Par arrêt ACJC/316/2022 du 8 mars 2022, la Présidente de la Chambre des baux et loyers a rejeté les conclusions formées par A______ SARL en prononcé de mesures conservatoires superprovisionnelles en suspension de l'exécution du jugement JTBL/990/2021 rendu le 29 novembre 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/1______/2021.

c. Dans sa réponse du 17 mars 2022, C______ a conclu à l'irrecevabilité du recours, et, subsidiairement, au déboutement de A______ SARL de toutes ses conclusions.

Elle a allégué de nouveaux faits et a produit une pièce nouvelle (n. 1 à 5).

d. Par détermination spontanée du 28 mars 2022, A______ SARL a persisté dans ses conclusions.

Elle a formé de nouveaux allégués et a versé de nouvelles pièces.

e. Par courrier du 11 avril 2022, C______ a contesté les faits contenus dans l'écriture susmentionnée et a persisté dans ses conclusions.

f. Les parties ont été avisées par plis du greffe du 4 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

a. A______ SARL, inscrite au Registre du commerce genevois, a notamment pour but toutes activités liées aux prestations de services et de conseils juridiques à des clients en Suisse et à l'étranger.

Elle exploite une étude d'avocats.

b. Les parties ont été liées par contrat de bail à loyer (non versé à la procédure), portant sur la location de locaux d'environ 145 m2 au rez supérieur et 220 m2 au rez inférieur, ainsi que le dépôt de 13 m2 au sous-sol de l'immeuble sis 2______ à Genève, propriétés de C______.

c. A une date qui ne résulte pas de la présente affaire, C______ a résilié le bail.

d. Par jugement JTBL/990/2021 du 29 novembre 2021, le Tribunal des baux et loyers, statuant d'accord entre les parties dans la cause C/1______/2021, a donné acte à C______ de ce qu'elle acceptait d'octroyer à A______ SARL une unique prolongation de bail portant sur les locaux d'environ 145 m2 au rez supérieur et 220 m2 au rez inférieur, ainsi que le dépôt de 13 m2 au sous-sol de l'immeuble  sis 2______ à Genève, échéant le 28 février 2021 (ch. 1 du dispositif), a donné acte à A______ SARL de ce qu'elle s'engageait à restituer les locaux susmentionnés, en les laissant en bon état de propreté, le 28 février 2022 au plus tard (ch. 2), a dit qu'à défaut de restitution par A______ SARL des locaux visés sous chiffre 1 d'ici au 28 février 2022, C______ était autorisée à requérir l'évacuation de A______ SARL desdits locaux et dépôts visés au chiffre 1, par la force publique dès le 1er mars 2022 (ch. 3), a autorisé A______ SARL à restituer les locaux en tout temps avant le 28 février 2022, moyennant un préavis de 30 jours pour le 15 ou la fin d'un mois (ch. 4), a donné acte aux parties de ce qu'elles règleraient le sort de leurs prétentions financières respectives jusqu'à la libération des locaux, dans le cadre de la procédure pendante devant la 1ère chambre du Tribunal des baux et loyers (cause C/3______/2019), chacune des parties conservant expressément ses droits à ce propos (ch. 5), a débouté les parties de toutes autres ou contraires conclusions en lien avec la restitution des locaux (ch. 6), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 7), a condamné les parties en tant que de besoin à respecter et à exécuter le jugement (ch. 8) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 9).

Ce jugement est définitif et exécutoire.

e. Par arrêt ACJC/1614/2021 du 6 décembre 2021, statuant d'entente entre les parties, la Cour a déclaré recevables l'appel et le recours formés par A______ SARL contre le jugement d'évacuation JTBL/637/2021 rendu le 12 juillet 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/4______/2021, a annulé ce jugement, a débouté C______ de toutes ses conclusions et a rayé la cause du rôle.

f. Par requête déposée le 25 février 2022 au Tribunal, A______ SARL a requis la suspension de l'exécution du jugement JTPI/990/2021 (recte JTBL/990/2021), assortie de mesures conservatoires superurgentes et superprovisionnelles.

Elle a conclu à ce que le Tribunal, à titre superprovisionnel et "sur les mérites de la présente requête", suspende l'exécution du jugement précité et interdise à C______ de procéder à un quelconque acte d'exécution ou de préparation d'exécution

Sur quoi, le Tribunal a rendu la décision entreprise.

EN DROIT

1.             1.1.1 Seule la voie du recours est ouverte contre les décisions rendues par le Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a et 319 let. a CPC).

Déposé selon la forme requise et dans le délai prescrit (art. 321 al. 2 CPC), le recours est recevable sous ces angles.

1.1.2 L'intimée soutient que le recours est irrecevable, motif pris de ce que la recourante ne dispose plus d'un intérêt digne de protection, son évacuation (partielle) ayant été exécutée. Outre qu'il s'agit d'un fait nouveau, irrecevable (cf. consid. 1) en recours, l'intimée admet que des meubles et des dossiers se trouvent encore dans les locaux litigieux. La recourante conserve dès lors un intérêt au recours.

Le recours est par conséquent recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, l'autorité a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant que les griefs formulés et motivés par le recourant (art. 320 CPC; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 2307).

1.3 La maxime des débats s'applique (art. 339 al. 2 CPC).

1.4 Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

Par conséquent, les allégués nouveaux des parties et les titres nouvellement produits sont irrecevables. Ils ne sont en tout état pas déterminants pour l'issue du litige.

2. La recourante fait grief au Tribunal d'avoir violé son droit d'être entendue, les premiers juges n'ayant pas examiné la question de savoir si le jugement JTBL/990/2021 pouvait être directement exécuté, l'ordonnance entreprise ne comportant pour le surplus pas d'état de fait ni de motivation. Elle reproche également au Tribunal d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation et d'avoir rendu une décision arbitraire, en rayant la cause du rôle après l'avoir déboutée de ses conclusions. Elle se plaint également d'une violation du principe de proportionnalité, les premiers juges n'ayant pas requis de détermination de l'intimée sur la requête avant de rendre leur décision.

2.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Il n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 134 I 83 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 9C_3/2011, 9C_51/2011 du 8 juin 2011 consid. 4.1). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_23/2009 du 25 mai 2009 consid. 3.1, publié in RDAF 2009 II p. 434; arrêts 9C_3/2011, 9C_51/2011 précité ibidem). En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (cf. ATF 133 III 235 consid. 5.2 p. 248; 126 I 97 consid. 2b p. 102; arrêts 9C_3/2011, 9C_51/2011 précité ibidem).

La violation du droit d'être entendu peut cependant être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen. Une telle réparation doit rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte qui n'est pas particulièrement grave aux droits procéduraux de la partie lésée. Cela étant, une réparation de la violation du droit d'être entendu peut également se justifier, même en présence d'un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 145 I 167 consid. 4.4; 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 5A_31/2020 du 6 juillet 2020 consid. 3.1). Ainsi, lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation de ce droit a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée. L'admission du grief de violation du droit d'être entendu suppose par conséquent que dans sa motivation, le recourant expose quels arguments il aurait fait valoir dans la procédure cantonale et en quoi ceux-ci auraient été pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 5A_699/2017 du 24 octobre 2017 consid. 3.1.3 et les arrêts cités ; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 4A_453/2016 du 16 février 2017 consid. 4.2.3 et 4.2.4, commenté par Bastons Bulletti in CPC Online, newsletter du 26 avril 2017).

Contrevenant au droit d'être entendu, une motivation insuffisante constitue une violation du droit, que la juridiction supérieure peut librement examiner aussi bien en appel que dans le cadre d'un recours au sens des art. 319 ss CPC (Tappy,
CR-CPC, 2019, n. 18 ad art. 239 CPC).

Il n'y a en particulier pas de violation du droit d'être entendu sous l'angle d'une motivation lacunaire lorsque le recourant est en mesure d'attaquer le raisonnement de l'arrêt attaqué, ce qui démontre qu'il l'a saisi (arrêt du Tribunal fédéral 5A_134/2013 du 23 mai 2013 consid. 4.2).

En procédure sommaire, la motivation peut être plus succincte qu'en procédure ordinaire (Mazan, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3ème éd., 2017, n. 7 ad art. 256 CPC).

2.2 Dans le présent cas, l'ordonnance entreprise est succincte, tenant sur deux pages. Il en va de même de sa motivation. Si la décision ne comporte certes pas de partie EN FAIT, les faits que les premiers juges ont considéré pertinents ont toutefois été explicités dans la mineure, après le rappel des dispositions légales applicables au présent cas. Les premiers juges ont rappelé qu'à teneur de l'art. 341 al. 3 CPC, la partie succombante, in casu la recourante, pouvait uniquement alléguer des faits s'opposant à l'exécution de la décision s'étant produits après la notification de celle-ci, par exemple le sursis, la prescription ou la péremption de la prestation. De plus, le Tribunal a, citant la doctrine, souligné qu'une suspension de l'exécution d'une décision était exceptionnelle. Sur ce point, il a notamment retenu que les problèmes de santé de l'un des avocats de l'Etude, problèmes sérieux et devant nécessairement avoir des effets sur la gestion du quotidien, y compris professionnel, dataient de trois semaines avant que le Tribunal ne soit saisi et qu'elle ne justifiait pas d'admettre la requête de suspension de l'évacuation. Les premiers juges, s'ils n'ont certes pas examiné plus avant l'argument de la recourante selon lequel l'intimée ne disposait pas d'un jugement d'évacuation, ont implicitement considéré que tel était le cas, dès lors qu'ils ont cité la teneur des art. 236 al. 3 et 337 CPC. Dans ces circonstances, la motivation est suffisante.

Par ailleurs, la recourante a formé recours contre ladite ordonnance, par écritures comportant douze pages et la Cour dispose d'un plein pouvoir d'examen en droit.

Ainsi, un renvoi de la cause au Tribunal n'aurait d'autre résultat que de voir les premiers juges confirmer cette appréciation et constituerait dès lors une vaine formalité.

Le grief de la violation du droit d'être entendu sera donc rejeté.

2.3 A teneur de l'art. 253 CPC, lorsqu'une requête déposée en procédure sommaire ne paraît pas manifestement irrecevable ou infondée, le Tribunal donne à la partie adverse l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit. L'art. 253 CPC est une mise en œuvre du droit d'être entendu, ancré à l'art. 29 al. 2 Cst. en tant que garantie constitutionnelle minimale, qui se trouve réglé au niveau légal par l'art. 53 CPC, pour le domaine d'application du Code de procédure civile.

Une requête manifestement mal fondée peut également être rejetée sans transmission préalable à la partie adverse (Bohnet, CR-CPC, 2019, n. 8 ad art. 253 CPC; Güngerich, BK ZPO, n. 2 ad art.252 CPC).

Dans le présent cas, le Tribunal a d'entrée de cause considéré la requête de la recourante, y compris s'agissant des conclusions conservatoires superprovisionnelles et provisionnelles, comme manifestement infondée et a débouté la recourante de toutes ses conclusions. Conformément à la disposition légale rappelée ci-avant, le Tribunal était fondé à statuer, sans transmettre la requête à l'intimée et sans lui fixer de délai pour se déterminer, dès lors qu'il a considéré que la recourante n'avait pas suffisamment rendu vraisemblable l'avènement de circonstances permettant de surseoir à l'exécution du jugement d'accord du 29 novembre 2021.

Ce grief est également infondé.

2.4 A teneur de l'art. 241 al. 3 CPC, le tribunal raye l'affaire du rôle, en cas de transaction, d'acquiescement ou de désistement d'action. Il en va de même si la procédure prend fin pour d'autres raisons que celles mentionnées ci-avant (art. 242 CPC).

La recourante reproche au Tribunal d'avoir rayé la cause du rôle, sans citer de disposition légale spécifique. S'il est exact que dans la présente affaire ni l'art. 241 CPC, ni l'art. 242 CPC ne trouvent application, la recourante n'expose pas d'intérêt juridique à voir la radiation du rôle annulée vu l'issue du litige.

Ce grief sera ainsi rejeté.

2.5 La recourante, à bien la comprendre, se plaint d'absence d'état de fait, dans la décision entreprise, ainsi que d'une mauvaise appréciation des preuves, le Tribunal ayant considéré que la transaction judiciaire valait jugement d'évacuation et en retenant que les motifs invoqués ne justifiaient pas une suspension de l'exécution. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3).

Selon la jurisprudence, le principe de la proportionnalité posé à l'art. 5 al. 2 Cst. n'a pas de portée propre par rapport à l'arbitraire (ATF 136 I 241 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_266/2020 du 26 mai 2020 consid. 5.3

2.6 Si le tribunal qui a rendu la décision a ordonné les mesures d’exécution nécessaires (art.236, al.3 CPC), la décision peut être exécutée directement (art. 337 al. 1 CPC).

Selon l'art. 337 al. 2 CPC, la partie succombante peut demander la suspension de l'exécution auprès du tribunal de l'exécution, l'art. 341 CPC étant applicable par analogie.

Il appartient à la partie qui s'oppose à l'exécution, qui supporte le fardeau de la preuve, de démontrer les objections qu'elle entend soumettre au tribunal de l'exécution (arrêt du Tribunal fédéral 4A_269/2012 du 7 décembre 2012 consid.4.1).

2.7 Le tribunal de l’exécution examine le caractère exécutoire d’office (art. 341 al. 3 CPC).

Sur le fond, la partie succombante peut uniquement alléguer que des faits s’opposant à l’exécution de la décision se sont produits après la notification de celle-ci, par exemple l’extinction, le sursis, la prescription ou la péremption de la prestation due. L’extinction et le sursis doivent être prouvés par titres (art. 341 al. 1 CPC).

Les faits postérieurs visés par l'art. 341 al. 3 CPC doivent être des faits susceptibles de modifier la prestation même tranchée par la transaction (le jugement au fond), comme l'extinction, le sursis, la prescription ou la péremption (arrêt du Tribunal fédéral 4A_43/2017 du 7 mars 2017 consid. 6).

A côté des motifs d’ordre matériel, des moyens formels peuvent être également soulevés par l’obligé intimé à l’exécution forcée. Ceux-ci sont toutefois restreints à plaider la nullité complète du titre exécutoire (Staehelin, Kommentar ZPO, n. 13 ad art. 340 CPC), ou à invoquer des moyens touchant au caractère exécutoire du titre lui-même (p. ex. une condition, art. 342 CPC, l’inexigibilité de la prestation selon le titre, ou encore l’irrégularité de toute l’instance (art. 338, 339 CPC) (Piotet, Petit commentaire Code de procédure civile, n. 14 ad art. 341 CPC).

2.8 Selon l'art. 241 al. 2 CPC, la transaction judiciaire a les effets d'une décision entrée en force. Elle est revêtue de l'autorité de chose jugée, et l'exécution forcée s'effectue comme pour un jugement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_254/2016 du 10 juillet 2017 consid. 4.1.1; Tappy, Commentaire romand, Code de procédure civile 2ème éd. 2019, n. 29 ad art. 241 CPC).

A teneur de l'art. 336 al. 1 let. a CPC, une décision - respectivement une transaction judiciaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_269/2012 du 7 décembre 2012 consid. 3.1 in RSPC 2013 p. 150) - est exécutoire lorsqu'elle est entrée en force et que le tribunal n'a pas suspendu l'exécution. La jurisprudence a précisé que pour être exécutoire au sens de l'art. 336 CPC, la décision doit décrire l'obligation à exécuter avec une précision suffisante sous l'angle matériel, local et temporel, de façon à ce que le juge chargé de l'exécution n'ait pas à élucider lui-même ces questions (arrêts du Tribunal fédéral 4A_640/2016 du 25 septembre 2016 consid. 2.2.; 4A_269/2012 précité consid. 3.2; 5A_880/2015 du 3 juin 2016 consid. 2 in fine).

La transaction judiciaire elle-même, en tant qu'acte juridique des parties, met fin au procès (ATF 139 III 133 consid. 1.3 p. 134). Le juge se borne à en prendre acte; il ne rend pas de décision judiciaire, même si, formellement, il raye la cause du rôle (art. 241 al. 3 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_150/2020 du 17 septembre 2020 consid. 2.2).

Une transaction passée en justice vaut jugement (art. 241 al. 2 CPC) et doit donc être attaquée par les voies de droit ouvertes contre les jugements.

Dans une affaire concernant une décision d'exécution d'une transaction judiciaire en matière de bail, le Tribunal fédéral a considéré que la transaction judiciaire passée, qui valait jugement, retenait que les locataires s'étaient engagés irrévocablement à quitter les locaux au 30 septembre 2016. Dès lors, non seulement le bail avait pris fin à cette date, mais encore les locataires s'étaient engagés à restituer les locaux à cette date, soit à une obligation de faire. La partie bailleresse pouvait donc agir en exécution de cet engagement, de la même façon qu'elle pourrait le faire si un jugement avait condamné les locataires à restituer les locaux. C'était ainsi parce qu'ils méconnaissent la nature de la transaction valant jugement que les recourants croyaient qu'il serait encore nécessaire d'obtenir un jugement les condamnant à restituer les locaux (arrêt du Tribunal fédéral 4A_43/2017 précité consid. 5).

2.9 L'exécution forcée d'un jugement ordonnant l'expulsion d'un locataire est réglée par le droit fédéral (cf. art. 335 et ss CPC).

En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b p. 339; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

2.10 Dans le présent cas, la transaction judiciaire conclue par les parties, homologuée par le Tribunal par décision JTBL/990/2021 du 29 novembre 2021, vaut jugement, conformément aux dispositions rappelées supra. Même si ladite transaction ne fait pas spécifiquement mention de ce que l'accord vaut jugement d'évacuation, il convient de retenir que comme cette transaction vaut jugement et qu'elle prévoit des mesures d'exécution au sens de l'art. 236 al. 3 CPC, soit la faculté pour le bailleur de requérir l'évacuation de la recourante par la force publique, qu'elle peut être exécutée directement (art. 337 al. 1 CPC). Par ailleurs, les conclusions d'accord, entérinées par le Tribunal, ont été négociées avant leur dépôt par la recourante, formée de plusieurs avocats et était, à cette occasion, également représentée par avocat.

S'agissant du jugement d'évacuation prononcé par le Tribunal dans la cause C/4______/2021 (JTBL/637/2021), les développements de la recourante ne lui sont d'aucun secours. En effet, le jugement précité n'a été annulé par la Cour qu'en raison de l'accord déposé par les parties, qu'elle a homologué. Par ailleurs, cet accord ne fait pas mention des motifs qui ont conduit les parties à transiger et à annuler ledit jugement. En tout état, et dans la mesure où les conclusions d'accord conclues par les parties, entérinées par le Tribunal par décision JTBL/990/2021 du 29 novembre 2021, doivent être considérées comme un jugement d'évacuation, l'annulation du jugement JTBL/637/2021 est sans aucune conséquence.

La recourante n'a ni allégué ni rendu vraisemblable qu'un vice aurait affecté le jugement JTBL/990/2021 du 29 novembre 2021, ni qu'une demande de révision aurait été déposée à son encontre.

La recourante semble soutenir que les problèmes de santé dont a été victime l'un des avocats constitueraient un motif de suspension de l'exécution. Comme l'a retenu le Tribunal fédéral, seuls des faits postérieurs au jugement susceptibles de modifier la prestation même tranchée par la transaction, soit en l'espèce l'octroi d'une prolongation de bail, l'engagement de la recourante de restituer les locaux en cause le 28 février 2022 au plus tard et l'autorisation de l'intimée à requérir l'évacuation de la recourante desdits locaux par la force publique dès le 1er mars 2022 peuvent être invoqués. Tant la jurisprudence que la doctrine ne traitent que de l'extinction, du sursis, de la prescription ou de la péremption. Les motifs avancés par la recourante ne sont pas conséquent pas de nature à modifier la transaction conclue. En tout état, même à considérer l'affection dont a souffert l'un des membres de l'Etude, il n'a pas été démontré que toute l'Etude d'avocats aurait été empêchée de restituer les locaux à la date convenue. Par ailleurs, il sera souligné que la recourante s'est engagée par transaction judiciaire à quitter les locaux au plus tard le 28 février 2022, qu'elle est composée de plusieurs avocats, de sorte qu'elle savait devoir quitter les lieux à la date précitée. Le fait qu'elle ait conclu un nouveau contrat de bail, avec prise de possession à une date postérieure à fin février 2022, n'est pas non plus de nature à justifier une suspension des mesures d'exécution convenues entre les parties et entérinée par jugement. Par conséquent, la recourante n'a pas démontré que l'une des conditions posées par l'art. 341 al. 3 CPC serait réalisée.

Enfin, le grief de la violation du principe de proportionnalité, dans l'examen des mesures d'exécution, est sans portée. En effet, ce n'est que lorsque le juge doit statuer sur les mesures d'exécution à ordonner (directement ou indirectement) que ce principe trouve application. Tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce, les mesures d'exécution ayant été discutées par les parties, faisant partie des conclusions d'accord signées et homologuées par le Tribunal dans son jugement du 29 novembre 2021.

Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, c'est à bon droit que le Tribunal a débouté la recourante de ses conclusions en prononcé de mesures conservatoires (superprovisionnelles et provisionnelles), de telles mesures revenant à accorder à la recourante le bénéfice de droits qu'elle n'a pas. En effet, dans leur transaction judiciaire, les parties sont convenues de l'octroi d'une unique prolongation du bail à la recourante, au 28 février 2022. Elle ne peut, par des mesures conservatoires, obtenir un sursis supplémentaire. Pour les mêmes motifs, les premiers juges étaient fondés à débouter la recourante de ses conclusions en suspension de l'exécution.

2.11 Le recours sera, partant, entièrement rejeté.

3.  A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 2 mars 2022 par A______ SARL contre l'ordonnance JTBL/145/2022 rendue le 25 février 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/3569/2022.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur
Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.