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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/16915/2020

ACJC/640/2022 du 16.05.2022 sur JTBL/583/2021 ( OBL ) , RENVOYE

Normes : CO.257d
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16915/2020 ACJC/640/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 16 MAI 2022

 

Entre

A______ SARL, sise ______ [VD], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 28 juin 2021, comparant par Me Flore PRIMAULT, avocate, rue Belle-Fontaine 2, 1003 Lausanne, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile,

 

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, comparant par Me Jacques BERTA, avocat, place Longemalle 1, 1204 Genève, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/583/2021 du 28 juin 2021, reçu par les parties le 5 juillet 2021, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a débouté A______ SÀRL de ses conclusions (ch. 1 du dispositif), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3 (recte 2)) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4 (recte 3)).

B. a. Par acte expédié le 4 août 2021 à la Cour de justice, A______ SARL (ci-après : la locataire ou l'appelante) forme appel contre ce jugement. Elle conclut, préliminairement, à la suspension de la présente procédure jusqu'à droit connu sur la procédure C/1______/2020 et, principalement, à l'annulation du jugement entrepris, à ce qu'il soit dit que le bail à loyer conclu le 6 mars 2018 lie B______ à A______ SARL, à l'exclusion de C______, et à ce que le congé notifié le 18 août 2020 soit annulé. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause au Tribunal.

b. Dans sa réponse du 13 septembre 2021, B______ (ci-après : le bailleur ou l'intimé) conclut à la confirmation du jugement entrepris.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.

d. Les parties ont été avisées le 9 novembre 2021 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Un contrat de bail à loyer pour locaux commerciaux a été conclu le 6 mars 2018 portant sur la location d'une arcade d'environ 150m2 au rez-de-chaussée de l'immeuble sis 2______ [GE], avec un sous-sol d'environ 50m2 à usage d'exploitation d'un restaurant.

Le bail a débuté le 1er mars 2018 et son échéance a été fixée au 28 février 2028. Le loyer annuel s'élève à 90'000 fr. du 1er mars 2018 au 28 février 2023, puis à 96'000 fr. du 1er mars 2023 au 29 février 2028, provisions pour chauffage et eau-chaude de 4'800 fr. par année en sus.

S'agissant des parties, le contrat mentionne B______ à titre de bailleur et A______ SARL (en cours de création), représentée par C______, ainsi que C______, agissant conjointement et solidairement entre eux, à titre de partie locataire.

Les adresses distinctes de A______ SARL et de C______ figurent après leurs noms respectifs.

En dernière page du contrat, sous les signatures, C______ a signé à deux reprises, tant pour A______ SARL qu'à son nom. Figure à nouveau la mention que A______ SARL et C______ agissent conjointement et solidairement entre eux.

Le bail déclare au surplus applicables les conditions générales pour locaux commerciaux (édition 2010).

b. La société A______ SARL a été inscrite au Registre du commerce du Canton de Vaud le 8 mars 2018. C______ en est l'associé gérant avec signature individuelle.

c. Le 15 juin 2020, A______ SARL et C______ ont déposé par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers une requête en réduction de loyer durant la réalisation de certains travaux et durant la période de fermeture de l'établissement due au COVID-19, visant à l'adaptation à la baisse du loyer tant que l'art. 6 de l'Ordonnance 2 COVID-19 demeurait en vigueur, et à ce qu'il soit dit et constaté que C______ n'était pas partie au contrat de bail. La procédure est enrôlée sous le numéro de cause C/1______/2020 et est actuellement pendante devant le Tribunal.

d. Par avis comminatoires du 23 juin 2020, le bailleur a mis en demeure A______ SARL et C______ de lui régler le montant de 7'900 fr. à titre d'arriéré de loyer pour le mois de juin 2020 dans les 30 jours, et les a informés de son intention, à défaut de paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

Ces avis ont été distribués le 24 juin 2020.

e. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement réglée dans le délai imparti, le bailleur a, par avis officiels du 18 août 2020 adressés à A______ SARL et C______, résilié le bail pour le 30 septembre 2020.

Ces avis ont été distribués les 19 et 22 août 2020.

f. Le loyer du mois de juin 2020 a été payé le 20 août 2020.

g. Le 21 août 2020, A______ SARL a contesté le congé auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, concluant, principalement, à son annulation et à ce que la procédure soit jointe à celle faisant l'objet de la cause C/1______/2020 et, subsidiairement, à la constatation de son inefficacité, en raison du fait que le bailleur devait impartir un délai comminatoire de 90 jours pour acquitter le loyer en souffrance.

h. A______ SARL a porté la cause devant le Tribunal le 15 octobre 2020 suite à l'échec de la tentative de conciliation le 16 septembre 2020. Elle a conclu, principalement, à l'annulation du congé et, subsidiairement, à ce qu'il soit dit qu'il était inefficace.

i. Dans sa réponse du 12 février 2021, le bailleur a conclu au rejet de la demande, au motif, principalement, que C______ n'avait pas contesté le congé aux côtés de A______ SARL.

Lors de l'audience de débats du 31 mai 2021, C______ a déclaré ne pas se souvenir si la société A______ SARL était déjà constituée au moment de la signature du bail. Il ne s'était pas engagé à titre personnel en signant le bail et n'avait jamais eu l'intention d'être personnellement locataire. Il était associé gérant de la société depuis le début. Ce qui comptait pour le bailleur était d'avoir une sécurité financière et il avait donc signé le bail comme garant; il n'avait aucun intérêt à constituer une société si c'était pour être locataire à titre privé. Par ailleurs, l'autorisation d'exploiter avait été donnée à la société et lui-même n'avait pas d'autorisation d'exploiter un restaurant. Il était vrai qu'il avait signé le bail, mais il en avait discuté avec le bailleur et lui avait dit qu'il ne souhaitait pas être locataire. Il souhaitait conclure le bail et il n'avait pas eu d'autre choix, il devait réserver ce bail pour la société. Il n'avait donc pas contesté la résiliation à titre privé car il ne s'estimait pas locataire. Le loyer de juin 2020 n'avait pas été réglé à temps en raison de problèmes de liquidités liés à la situation COVID. Il avait calculé qu'avec les 90 jours prévus par l'Ordonnance COVID, il allait pouvoir payer le loyer.

j. A l'issue de l'audience, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel des locaux, charges comprises, s'élève à 94'800 fr. jusqu'au 28 février 2023 puis à 100'800 fr. dès le 1er mars 2023.

En prenant en compte la période de protection de trois ans, la valeur litigieuse est ainsi largement supérieure à 10'000 fr.

1.3 L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. L'appelante conclut préalablement à la suspension de la cause jusqu'à droit jugé de la procédure C/1______/2020 actuellement pendante devant le Tribunal dans le cadre de laquelle la titularité du bail est discutée. Au fond, elle fait grief au Tribunal d'avoir retenu que C______ était titulaire du contrat de bail et qu'il aurait dû contester la résiliation du bail, alors qu'il avait agi au nom de l'appelante avant l'inscription de cette dernière au Registre du commerce au sens de l'art. 779a CO; elle se prévaut en outre de l'abus de droit que commettrait l'intimé en invoquant son défaut de légitimation active.

2.1 Aux termes de l'art. 126 al. 1 CPC, le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d'opportunité le commandent. La procédure peut notamment être suspendue lorsque la décision dépend du sort d'un autre procès.

En l'espèce, s'il apparaît que l'appelante et C______ ont agi en réduction de loyer et à la constatation que le second n'est pas partie au contrat de bail dans une cause actuellement instruite par le Tribunal, l'appelante n'expose pas en quoi le Tribunal serait plus à même de répondre à la question de la titularité du bail dans le cadre de ladite procédure plutôt que ce qu'il l'a été dans la présente cause.

Partant, aucun motif d'opportunité n'existe pour suspendre la présente procédure jusqu'à droit jugé de la procédure C/1______/2020.

2.2 L'appelante se plaint principalement de la violation de l'art. 779a CO et soutient que C______ avait agi en son nom avant son inscription au Registre du commerce, en sorte qu'il était libéré de ses obligations après l'inscription, elle-même demeurant seule engagée. Dans ce contexte, C______ n'avait selon elle pas à contester le congé signifié le 18 août 2020.

Pour les raisons exposées ci-dessous, la question de savoir si C______ a été libéré des obligations qui auraient été contractées expressément au nom de l'appelante, au sens de l'art. 779a al. 2 CO, peut demeurer ouverte.

2.3 Aux termes de l'art. 257d CO, lorsque, après la réception de la chose, le locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai il résiliera le bail. Ce délai est de 30 jours au moins pour les baux de locaux commerciaux. Faute de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.

Les résiliations de bail qui respectent les exigences légales de forme mais pour lesquelles une condition matérielle, légale ou contractuelle fait défaut sont inefficaces. L'inefficacité est une forme de nullité. Elle peut être soulevée en tout temps, sauf abus manifeste de droit, même à l'occasion de la procédure d'expulsion et doit être constatée d'office par le juge (Lachat, Le Bail à loyer, Lausanne, 2019, p. 951; Lachat, in Commentaire romand du Code des obligations, n. 3 ad art. 266o, qui précise alors que le juge doit soulever l'inefficacité ou la nullité d'office).

Lorsque le congé est nul ou inefficace, il ne déploie dès l'origine aucun effet (Montini, in Droit du bail à loyer et à ferme, 2ème édition, Bâle, 2017, n. 10 ad art. 266o CO).

Le congé motivé par le défaut de paiement du loyer alors qu'en réalité le loyer a été payé est un cas de congé inefficace. Dans un tel cas, celui qui reçoit un congé inefficace ou sans effet n'est nullement tenu d'agir dans les 30 jours devant l'autorité de conciliation, et son inaction dans ce délai ne saurait rendre le congé efficace. Dès lors, celui qui reçoit un congé inefficace ou prétendu tel peut attendre que son cocontractant agisse en exécution de ce qu'il croit être son droit ou agir lui-même en exécution du contrat sans observer le délai de 30 jours prévu par la disposition précitée, l'abus de droit de celui qui garderait le silence face à un congé qu'il estimerait inefficace et dénué d'effet, amenant son cocontractant à inférer de son silence ou de son inaction qu'il admet la validité du congé, étant réservé (ATF 121 III 156, consid. 1c; arrêts du Tribunal fédéral 4A_351/2015 du 5 août 2015 consid. 3.2; 4C.135/2001 du 4 septembre 2001 consid. 1b).

2.4 Le 27 mars 2020, le Conseil fédéral a arrêté l'Ordonnance sur l'atténuation des effets du Coronavirus en matière de bail à loyer et de bail à ferme (Ordonnance COVID-19 bail à loyer et bail à ferme), entrée en vigueur le 28 mars 2020 à minuit et produisant ses effets jusqu'au 31 mai 2020 (art. 5).

Aux termes de l'art. 2 de cette ordonnance, si le locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires, échus entre le 13 mars 2020 et le 31 mai 2020, en raison des mesures prises par le Conseil fédéral pour lutter contre le coronavirus, le bailleur accorde, en dérogation à l'art. 257d al. 1 CO, un délai d'au moins 90 jours pour l'acquittement des montants dus.

Selon le rapport explicatif de la division droit de l'Office fédéral du logement, « [l]a prolongation du délai de paiement ne s'applique qu'au loyer et aux frais accessoires échus entre la publication des mesures du Conseil fédéral, le 13 mars, et le 31 mai 2020. Une prolongation de ce délai en vertu du droit de nécessité ne se justifie que dans ces cas. Cette restriction établit clairement que, pour les loyers dus en dehors de cette période, le délai minimal de 30 jours reste applicable. Si les conditions mentionnées sont remplies, le délai de paiement est porté à au moins 90 jours. Il en va de même pour les sommations notifiées après le 31 mai 2020. Souvent, le loyer est dû mensuellement et payable avant la fin du mois précédent. Par conséquent, l'ordonnance concerne en premier lieu les loyers échus à la fin des mois de mars, d'avril et de mai pour les mois d'avril, de mai et de juin 2020. Le contenu du bail en vigueur est déterminant en ce qui concerne les échéances de versement (ch. 3.2) ».

Au sujet de la portée de cette ordonnance, le Tribunal fédéral a rendu un arrêt dans lequel il a validé le raisonnement de la cour cantonale selon lequel le loyer du mois de juin 2020, payable mensuellement d'avance, était échu le 31 mai 2020 et qu'il convenait donc d'accorder aux locataires un délai comminatoire de 90 jours, comme le prévoyait l'art. 2 de l'ordonnance, la recourante bailleresse ne contestant pas la date d'échéance du loyer (arrêt du Tribunal fédéral 4A_252/2020 du 6 octobre 2021 consid. 3.3 et 3.5).

Dans l'arrêt précité, le Tribunal fédéral a également relevé que le moment de la levée des mesures sanitaires ne coïncidait pas forcément avec celui où leurs effets économiques avaient cessé pour les locataires, de sorte que l'on ne pouvait affirmer que la date de réouverture du restaurant était déterminante (consid. 3.5).

L'arrêt précité a été commenté par la doctrine, qui a relevé que la Haute cour ne s'était pas posée la question de l'application de l'art. 78 CO. Or, selon l'alinéa 1 de cette disposition, l'échéance qui tombe sur un dimanche ou sur un autre jour reconnu férié par les lois en vigueur dans le lieu du paiement, est reportée de plein droit au premier jour non férié qui suit. Dans la mesure où la plupart des lois cantonales prévoit que le lundi de Pentecôte est un jour férié, et que le 31 mai 2020 était un dimanche et le 1er juin le lundi de Pentecôte, il aurait fallu déterminer si l'échéance du délai de paiement du mois de juin 2020 était reportée au 2 juin 2020, soit à une date postérieure à la durée de validité de l'Ordonnance COVID-19 bail à loyer et bail à ferme. A cet égard, D______ a relevé qu'un tel résultat serait choquant car l'art. 78 CO avait pour but d'améliorer la position du débiteur. Par ailleurs, il apparaissait clairement que le but de l'Ordonnance COVID-19 bail à loyer et bail à ferme était de permettre aux locataires de bénéficier d'un délai de mise en demeure prolongé à 90 jours pour les mois d'avril, de mai et de juin 2020, en cas de défaut de paiement causé en raison des mesures prises par le Conseil fédéral pour lutter contre le coronavirus. Par conséquent, il fallait partir du principe que l'art. 2 de l'ordonnance concernait sous l'angle temporel tous les loyers qui étaient échus jusqu'à fin mai, en faisant abstraction du week-end de Pentecôte (Koller, Kommt Pfingsten 2020 dem « Corona-Mietnotrecht » in die Quere ?, Justletter du 20 décembre 2021).

2.5 En l'espèce, en vertu des conditions générales pour locaux commerciaux appliquées dans le Canton de Genève, édition 2010, auxquelles renvoie le contrat de bail à loyer, le loyer et les provisions ou forfaits pour les frais accessoires sont payables par mois d'avance (art. 1 § 4).

Par ailleurs, le lundi de Pentecôte est un jour férié à Genève (art. 1 al. 1 let. e LJF, Loi sur les jours fériés, RS/GE J 1 45).

La Cour de céans approuve la conclusion de la doctrine précitée, selon laquelle le fait que le 31 mai 2020 était un dimanche et le 1er juin 2020 le lundi de Pentecôte, ne doit pas empêcher les locataires qui en remplissaient les exigences de bénéficier d'un délai comminatoire de 90 jours au lieu de 30 jours, compte tenu de la volonté du Conseil fédéral exprimée dans le rapport explicatif de l'Office fédéral du logement. A cet égard, comme le relève du reste D______, il ne peut être fait grief au Conseil fédéral de ne pas avoir anticipé que le 31 mai 2020 était un dimanche et le lendemain le lundi de Pentecôte, compte tenu de l'urgence dans laquelle l'ordonnance a été édictée.

Dès lors, en faisant abstraction du week-end de Pentecôte, le loyer de juin 2020 était échu le 31 mai 2020, alors que l'Ordonnance COVID-19 bail à loyer et à ferme édictée par le Conseil fédéral était en vigueur.

Au vu du fait que l'appelante était dans une situation de défaut de paiement pour le loyer de juin 2020, échu le 31 mai 2020, les deux premières conditions de l'ordonnance en question étaient donc remplies. Quant à savoir si le retard du paiement s'expliquait en raison des mesures prises par le Conseil fédéral pour lutter contre le coronavirus, il n'appartient pas à la Cour de trancher cette question pour la première fois, n'étant par ailleurs pas en possession de tous les éléments nécessaires à cette fin.

Dans sa demande en contestation de congé déposée auprès du Tribunal, l'appelante a en effet soutenu que sa situation financière avait été gravement impactée par lesdites mesures, allégués qui ont été contestés par l'intimé. Entendu par le Tribunal, C______ a expliqué qu'il n'avait pas payé le mois de juin 2020 à temps en raison de problèmes de liquidités liés à la situation, mais l'analyse des premiers juges n'a pas porté sur cette question.

Par conséquent, le jugement entrepris sera annulé et la cause sera retournée au Tribunal afin qu'il réponde à cette question, cas échéant après des mesures complémentaires d'instruction, et examine si l'art. 2 Ordonnance COVID-19 bail à loyer et bail à ferme trouvait application, auquel cas, faute pour l'intimé d'avoir imparti un délai comminatoire de 90 jours, le congé notifié le 18 août 2020 alors que le loyer avait été réglé le 20 août 2020 serait inefficace.

3. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 4 août 2021 par A______ SARL contre le jugement JTBL/583/2021 rendu le 28 juin 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/16915/2020-5-OSB.

Au fond :

Annule ce jugement.

Renvoie la cause au Tribunal des baux et loyers dans le sens des considérants.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN et Madame Elodie SKOULIKAS, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.