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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/166/2020

ATAS/538/2022 du 13.06.2022 ( AI ) , REJETE

Recours TF déposé le 23.08.2022, rendu le 09.01.2023, REJETE, 9C_37/2022, 9C_375/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/166/2020 ATAS/538/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 13 juin 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié à CONCHES, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Catarina MONTEIRO SANTOS

 

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le 12 octobre 1968, a travaillé comme chauffeur-livreur pour B______ (ci-après : l’employeur), du 30 avril 2007 au 29 février 2016, avec un dernier jour de travail effectif le 7 août 2015. Antérieurement, il a exercé une activité de serveur auprès de plusieurs établissements.

b. Le 20 janvier 2014, l’assuré a subi une entorse métacarpo-phalangienne du pouce gauche, pour laquelle le centre de chirurgie et thérapie de la main CH8 a relevé une persistance de gêne douloureuse nécessitant une attelle de soutien (rapport CH8 du 5 mai 2015).

c. Le 27 août 2015, l’assuré a subi une intervention chirurgicale effectuée par le docteur C______, FMH chirurgie orthopédique, soit une arthroscopie opératoire de la hanche gauche et résection du flap / bourrelet replié du labrum postéro-supérieur de la hanche gauche. Le diagnostic préopératoire était celui de coxarthrose de la hanche gauche avec suspicion de lésion du labrum supéro-postérieur.

d. Le 13 novembre 2015, l’assuré a subi une intervention chirurgicale à la hanche droite, soit une arthroscopie opératoire de la hanche droite, shaving chondroplastie de la tête fémorale et résection de la lésion déchirée du labrum antérieur et antérolatéral au shaver. Le diagnostic préopératoire était celui de pré-arthrose hanche droite avec lésion du labrum supéro-externe.

B. a. Le 4 mars 2016, l’assuré a déposé auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) une demande de prestations.

b. Par communication du 2 juin 2016, l’OAI a pris en charge une remise à niveau en bureautique de l’assuré du 31 mai au 20 juin 2016.

c. Le 11 novembre 2016, l’assuré a subi une intervention chirurgicale, soit la pose d’une prothèse totale de la hanche gauche.

d. Le 30 novembre 2017, la doctoresse D______, du service médical régional (ci-après : SMR), a rendu un avis selon lequel les conclusions du Dr C______ pouvaient être suivies ; l’assuré était reconnu totalement incapable de travailler dans son activité habituelle et totalement capable de travailler du 7 avril au 31 juillet 2016 et dès le 1er mai 2017, dans une activité adaptée.

e. Le 4 décembre 2017, l’OAI a conclu à un degré d’invalidité nul (revenu sans invalidité de CHF 55'573.- et revenu d’invalide de CHF 60'320.- correspondant à celui issu de l’ESS 2014, TA1, homme, total, pour 41,7 heures de travail par semaine, adapté à l’année 2016, à 100%, avec une déduction de 10%).

f. Par projet d’acceptation de rente du 13 décembre 2017, l’OAI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er septembre 2016 au 31 juillet 2017. Dès le 1er mai 2017, le degré d’invalidité était nul, sa capacité de travail étant totale dans une activité adaptée.

g. Le 20 décembre 2017, le docteur E______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a rendu son rapport d’expertise judiciaire dans le cadre d’une procédure opposant l’assuré à son assurance perte de gain maladie.

L’assuré se plaignait de douleurs majoritairement au niveau de la hanche gauche, de l’impossibilité de rester assis ou debout plus de dix minutes, de la nécessité de marcher avec des cannes, de difficultés à se mouvoir et de perte d’autonomie. Le diagnostic actuel était un descellement de la prothèse de la hanche gauche ; le 27 août 2015 avait été posé un diagnostic de coxarthrose avec une éburnation de l’os et des lésions au niveau labral ; les clichés radiologiques de 2011 montraient déjà un état pré–arthrosique ; il existait aussi un diagnostic d’arthrose de la hanche droite. Les limitations fonctionnelles concernaient le port de charges, le maintien d’une station debout prolongée et des atteintes polyarticulaires ; les articulations engendrant des limitations fonctionnelles étaient les suivantes, dans l’ordre de la plus causale : hanche gauche, hanche droite, pouce gauche (l’assuré avait subi une entorse du pouce gauche dont le traitement avait été suspendu en raison de problèmes aux hanches), rachis lombaire, épaules ; il y avait une symptomatologie douloureuse au niveau de la colonne lombaire avec des épisodes de paresthésies au niveau du membre inférieur gauche, des douleurs à l’épaule, au genou gauche, aux deux poignets et aux doigts. Une activité adaptée (travail de bureau) était possible environ deux à trois mois après l’arthroscopie de la hanche droite, sous forme d’une formation dans une nouvelle profession. L’état de santé de l’assuré ne s’était pas amélioré depuis le 1er mai 2016. Après la pose de la prothèse, une activité pouvait en principe être reprise deux à six mois plus tard, en fonction du genre d’activité. En l’occurrence, le traitement conservateur n’avait pas permis d’améliorer la situation et la révision chirurgicale était probablement l’ultime traitement si le descellement était confirmé ; une reconversion dans un travail sédentaire était à envisager. Il n’était pas exclu qu’une prothèse de la hanche droite doive être posée et l’assuré présentait toujours des polyarthralgies qui se maintiendraient.

h. Les 19 décembre 2017 et 7 février 2018, l’assuré, représenté par son avocate, s’est opposé au projet de décision précité, en contestant une capacité de travail de 100% ainsi que le calcul de son degré d’invalidité. Il se référait aux conclusions de l’expert E______ selon lequel, en l’état actuel, même un travail sédentaire ne pouvait être envisagé ; par ailleurs, il avait été récemment opéré.

i. Le 11 janvier 2018, l’assuré a subi un changement total de la prothèse de la hanche gauche, laquelle s’était descellée (traité par le Professeur F______, FMH chirurgie orthopédique). Du 16 au 26 janvier 2018, il a bénéficié d’un séjour pour rééducation intensive à l’Hôpital de Beau-Séjour.

j. Le 12 mars 2018, la Dresse D______, du SMR, a rendu un avis, après avoir pris connaissance de l’expertise du Dr E______, en relevant qu’on pouvait retenir, au vu du descellement, que la capacité de travail était nulle dans toute activité depuis juillet 2017. Cependant, les conclusions du SMR restaient valables pour la période précédente puisque l’expert indiquait que, de manière médico-théorique, une activité adaptée aurait été possible sur les périodes précédentes mais que dans le cas de l’assuré, c’étaient des facteurs extra-médicaux qui n’avaient pas permis de reprise. L’aggravation était donc rendue plausible depuis juillet 2017. L’assuré était pris en charge par le Prof. F______, orthopédiste aux Hôpitaux universitaires de Genève. Elle proposait de lui envoyer un rapport initial et de demander une copie de ses consultations spécialisées.

k. À la demande de la chambre de céans dans la procédure opposant l’assuré à son assurance perte de gain maladie, le Dr E______ a rendu un complément d’expertise le 14 mars 2018. Un arrêt de travail de trois mois depuis le 13 novembre 2015 était justifié en raison des suites de l’arthroscopie de la hanche droite mais la hanche gauche présentait aussi des signes d’arthrose ; après trois mois, l’assuré pouvait reprendre une activité de type travail de bureau ; la douleur de la hanche gauche avait évolué graduellement ; après la pose de la prothèse de la hanche gauche, compte tenu de l’activité de l’assuré, qui impliquait des sollicitations mécaniques, il était plutôt proposé une reprise du travail après six mois ; pour une personne qui travaillait dans un bureau, une reprise de travail pouvait être ordonnée après six semaines.

l. Le 26 novembre 2018, le docteur G______, FMH rhumatologie, a écrit à l’OAI que l’assuré avait enchainé les problèmes musculosquelettiques depuis trois ans, au début essentiellement un problème de coxarthrose qui avait dû être opéré mais qui avait présenté des complications, ce qui avait entrainé une deuxième opération. À cela était venu s’ajouter un syndrome lombovertébral qui était très important au moment de la consultation. En parallèle, on relevait une décompensation psychiatrique importante avec actuellement une situation difficile requérant un suivi hebdomadaire. En résumé, d’un point de vue rhumatologique pur, on avait une incapacité de travail comme chauffeur-livreur à 100% en raison d’un syndrome lombovertébral très important avec des limitations dans la position assise, dans la marche, dans le port de charges, dans le piétinement et dans tout travail en porte-à-faux.

m. Le 13 décembre 2018, la Dresse D______, du SMR, a rendu un avis selon lequel on pouvait retenir, au vu du descellement, que l'aggravation était donc rendue plausible. L'assuré présentait également des lombalgies connues depuis 2013 actuellement à la marche et perturbant le sommeil. Il était proposé de demander une expertise pluridisciplinaire via la plateforme Med@p avec volets médecine interne, rhumatologie, orthopédie et psychiatrie.

n. À la demande de l’OAI, le H______ a rendu le 18 juillet 2019 une expertise pluridisciplinaire (docteur I______, FMH chirurgie orthopédique, docteur J______, FMH psychiatrie, docteur K______, FMH médecine interne générale, docteur L______, FMH rhumatologie).

Une évaluation consensuelle du 17 mai 2019 a conclu à une capacité de travail nulle depuis le 10 août 2015 dans l’activité habituelle et une capacité de travail de 100% dès août 2018 (soit six mois après l’intervention du 10 janvier 2018) dans une activité adaptée. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : pas de marche ni de position debout statique prolongée. Pas de position en porte-à-faux. Port de charges limité à 10kg. Pas de travail en hauteur. Pas d’effort en pro-supination forcée de la main gauche. Pas d’agenouillement ni d’accroupissement. Pas de gravissement d’escalier de façon répétée.

Les diagnostics étaient les suivants : coxalgies chez coxarthrose bilatérale avec arthroscopie de la hanche gauche le 27 août 2015, arthroscopie de la hanche droite le 19 novembre 2015, implantation d’une prothèse totale de la hanche gauche le 11 novembre 2016, changement de prothèse totale de la hanche gauche le 11 janvier 2018 pour descellement de la cupule. Lombalgies chroniques chez discopathie lombaire L4-L5. Arthrose débutante de l’articulation métacarpo-phalangienne I gauche après entorse le 20 janvier 2014 (arthrose visible sur l’IRM et non sur les radiographies). Pouce à ressaut gauche ayant subi une cure chirurgicale le 3 décembre 2018. Majoration des symptômes physiques pour des raisons psychologiques F68.0. Troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de cannabis, utilisation continue F12.25. Tabagisme actif. Allergie à la Céfuroxime.

o. Le 20 août 2019, la doctoresse D______, du SMR, a rendu un avis suivant les conclusions de l’expertise du H______ et retenant une incapacité totale de travail comme chauffeur-livreur depuis le 10 août 2015 et une capacité totale de travail dans une activité adaptée, du 7 avril au 31 juillet 2016 et dès le 1er août 2018. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : pas de marche ni de position debout statique prolongée, pas de piétinement prolongé. Pas de position en porte-à-faux. Port de charges limité à 10kg. Pas de travail en hauteur. Pas d’agenouillement ni d’accroupissement. Pas de gravissement d’escalier de façon répétée. Pas d’effort en pronation et en prono-supination forcée de la main gauche.

p. Par décision du 25 novembre 2019, l’OAI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er septembre 2016 au 31 octobre 2018, fondée sur une incapacité de travail totale depuis le 10 août 2015. La capacité de travail était totale dans une activité adaptée dès le 1er août 2018, entrainant un degré d’invalidité nul.

C. a. Le 15 janvier 2020, l’assuré, représenté par son avocate, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée en concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité ; préalablement, il a requis l’audition des Drs M______, FMH médecine interne, F______, G______ et N______, FMH psychiatrie et psychothérapie, ainsi que l’ordonnance d’une expertise médicale pour déterminer sa capacité de travail dans une activité adaptée. Les experts du H______ n’avaient pas évalué sa capacité de travail compte tenu de l’ensemble des atteintes, notamment celle du rachis. Or, ses médecins traitants attestaient d’une capacité de travail nulle ; le droit à des mesures d’ordre professionnel devait être réévalué une fois le degré d’invalidité recalculé. Il a joint un rapport du 12 janvier 2020, du Dr N______, déclarant qu’il soutenait le recours de l’assuré contre la décision de l’OAI ; l’assuré présentait un état dépressif majeur, sans symptômes psychotiques, réactionnel aux problèmes physiques ; sa fragilité et labilité émotionnelle étaient incompatibles avec une reprise de travail.

b. Le 7 février 2020, la Dresse O______, du SMR, a rendu un avis selon lequel les dernières pièces médicales n’amenaient aucun élément nouveau ; l’intensité des plaintes douloureuses et le traitement médicamenteux ne pouvaient être retenus comme un facteur objectif de limitations fonctionnelles et d’incapacité totale de travail.

c. Le 7 février 2020, l’OAI a conclu au rejet du recours, en relevant que l’expertise du H______ était probante, et s’est rallié à l’avis du SMR du même jour.

d. Le 5 juin 2020, l’assuré a répliqué en relevant que son droit d’être entendu avait été violé dès lors qu’il n’avait pas reçu le rapport d’expertise dès sa réception et qu’il n’avait pas pu se déterminer sur le choix des experts, le nom de ceux-ci ayant été envoyé par l’OAI, par erreur, à l’ancienne associée de son avocate. Une nouvelle expertise devait être ordonnée. Le calcul du degré d’invalidité n’avait pas été refait après l’expertise et il devait prendre en compte une baisse de rendement et un abattement plus importants, compte tenu de ses nombreuses limitations fonctionnelles. Le consilium des experts ne tenait pas compte des aspects psychiatrique et rhumatologique.

e. Le 3 novembre 2020, le Dr M______ a attesté d’une aggravation de l’état de santé physique et psychique.

f. Le 21 décembre 2020, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

Le recourant a déclaré qu'il devait se faire opérer de la hanche droite et qu'il avait des douleurs en permanence dans les deux hanches. Il se sentait totalement incapable de travailler en raison des douleurs, des effets secondaires des médicaments, de son âge et du COVID. L'expertise psychiatrique au H______ s'était mal passée.

Le recourant a transmis les deux pièces suivantes :

-          le 28 décembre 2020, le Dr N______ a attesté d'un état dépressif majeur sans symptômes psychotiques et de limitations pour une reprise de travail principalement physiques mais l'assuré présentait une fragilité psychologique importante ; les traitements effectués, sans succès, les préoccupations financières, les contrariétés administratives (contribuant à l'état dépressif), ainsi que les douleurs chroniques étaient incompatibles avec une reprise de travail ;

-          le 29 décembre 2020, le Dr M______ a attesté de douleurs chroniques invalidantes aux hanches ainsi que de lombalgies, nécessitant un traitement antalgique lourd et continu, partiellement efficace et grevé d'effets secondaires, dont des troubles cognitifs significatifs entrainant une incapacité de travail totale. Il présentait aussi des douleurs à la main gauche.

g. À la demande de la chambre de céans, les médecins suivants ont donné des renseignements complémentaires :

-          le Dr G______ a indiqué le 5 février 2021 qu'il avait vu l'assuré pour la dernière fois en octobre 2018 et qu'il avait reçu un bilan multidisciplinaire rédigé en mai 2019. Il ne pouvait évaluer la capacité de travail dans une activité adaptée. Il a posé les diagnostics de douleurs de la hanche gauche invalidantes après reprise d'une PTH gauche, coxarthrose droite et syndrome lombovertébral chronique secondaire. Il était surpris que l'expertise du H______ ne retienne pas de limitations fonctionnelles en position assise, lesquelles étaient courantes en cas de lombalgies chroniques et certaines pathologies de la hanche. Il n'avait ainsi pas constaté d'incohérence flagrante à l'examen clinique.

-          le Dr F______ a indiqué le 22 février 2021 qu'il avait vu l'intéressé la dernière fois le 19 février 2020, lequel était extrêmement gêné par sa hanche gauche et une tendinopathie du psoas associée avait été évoquée. L'assuré devrait pouvoir reprendre une activité professionnelle à un rythme de travail adapté dans une activité principalement sédentaire.

h. Le 23 mars 2021, la Dresse O______, du SMR, a estimé que les rapports des Drs F______ et G______ n'apportaient pas d'élément médical nouveau et qu'en 2019, les experts avaient bien indiqué que l'assuré devait pouvoir alterner les positions toutes les heures, dont la position assise.

i. Le 24 mars 2021, l'OAI a maintenu ses conclusions.

j. Le 3 mai 2021, l'assuré a sollicité une expertise judiciaire pluridisciplinaire. Le Dr F______ avait estimé que le taux de travail devait être évalué par les experts, de sorte que l'expertise était incomplète et le Dr G______ avait souligné que l'expertise ne tenait pas compte des limitations fonctionnelles.

Il a produit un rapport du Dr G______ du 23 avril 2021 faisant suite à une consultation de l'assuré du 7 avril 2021, selon lequel l'assuré présentait une importante limitation à garder une position assise stable plus de quelques minutes entrainant l'obligation de se relever 5-6x/h. La marche était limitée par une boiterie antalgique. Toutes les activités en position basse, y compris les soins corporels et l'habillage, étaient extrêmement perturbées. En raison de la durée des symptômes, le Dr G______ observait également les signes de déconditionnement physique. Il s'y ajoutait encore un épuisement physique et psychologique en lien avec des douleurs chroniques depuis des années. Pour toutes ces raisons, il estimait que la capacité professionnelle dans un poste de travail adapté aux limitations précédemment décrites était actuellement limitée à 50% au mieux. Ils avaient débuté une prise en charge multidisciplinaire dans le but qu'il récupère progressivement une capacité entière dans un poste de travail adapté, avec comme horizon six à douze mois.

k. Le 1er juillet 2021, le Dr N______ a posé le diagnostic d’état dépressif majeur sans symptômes psychotiques ; le traitement médicamenteux induisait une somnolence et une grande fatigue.

l. Le 12 juillet 2021, le Dr M______ a attesté de multiples problèmes orthopédiques entrainant des douleurs chroniques extrêmement invalidantes et nécessitant un traitement antalgique lourd de morphine en continu, avec des effets secondaires de somnolence, fatigue, trouble de la concentration.

m. Le 18 août 2021, le Dr G______ a attesté d’une prise en charge multidisciplinaire depuis juillet 2021, avec un bilan à effectuer dans six à douze mois.

n. Le 19 août 2021, la chambre de céans a confié une expertise judiciaire à la doctoresse P______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, en considérant ce qui suit : en l'occurrence, le recourant conteste essentiellement le volet somatique de l’expertise du H______, laquelle a conclu à une capacité de travail totale du recourant, depuis août 2018, dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles. Le Dr G______ a indiqué le 23 avril 2021 que le recourant présentait d'importantes limitations fonctionnelles diminuant sa capacité de travail. Cet avis, motivé, met en doute celui de l'expertise du H______, de sorte qu'il convient d’instruire l’aspect somatique en ordonnant une expertise judiciaire orthopédique.

o. Le Dr M______ a attesté d’une incapacité de travail totale en juin, juillet, août et septembre 2021.

p. Dès le 23 septembre 2021, l’assuré a été hospitalisé à la clinique Q____).

q. Le 2 février 2022, la Dresse P______ a rendu son rapport d’expertise.

L’assuré était hospitalisé dans une clinique de repos depuis le 23 septembre 2021. Il se plaignait de douleurs lombosacrées, coxalgies, gonalgies, de douleurs à la main gauche et de prostatite. L’experte a posé les diagnostics, avec répercussion sur la capacité de travail, de douleurs de l’articulation MP du pouce gauche, status post PTH gauche sur coxarthrose, syndrome lombovertébral, hernie sous-ligamentaire et inflammation des apophyses épineuses L5S1, coxalgies droites, bursite sous acromio-claviculaire des épaules et lésion partielle du tendon supra-épineux de l’épaule gauche.

Il y avait exagération des symptômes dans un contexte psychologique dépressif. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : l’assuré ne pouvait pas travailler sur des échelles et des échafaudages ; il ne lui était pas possible de soulever des charges de plus de 5 kg ni d’effectuer des travaux répétitifs au-delà du plan horizontal ; la station debout prolongée n’était pas possible, ni la station assise prolongée.

L’assuré pouvait travailler à 100% dans une activité respectant les limitations fonctionnelles, depuis le 22 février 2022 (sic) ; du point de vue de la capacité de travail, c’était le statu quo depuis le 1er août 2018 ; elle rejoignait les conclusions du H______.

r. Le 4 mars 2022, le SMR a estimé que l’expertise judiciaire était convaincante, l’experte se référait au rapport du Dr F______ du 22 février 2021 (et non pas 2022), lequel stipulait une capacité de travail totale dès le 1er août 2018, laquelle pouvait être confirmée, dans une activité adaptée, avec limitations fonctionnelles liées aux épaules et, le 9 mars 2022, l’OAI s’est rallié à l’avis du SMR précité.

s. Le 9 mars 2022, le recourant a observé que l’expertise indiquait une capacité de travail depuis le 22 février 2022 et que le Dr G______ avait indiqué une incapacité de travail de 100% depuis le 23 septembre 2021, date de son hospitalisation à la clinique S______ ; une expertise psychiatrique judiciaire était nécessaire.

t. A la demande de la chambre de céans, le Dr G______ a indiqué, le 29 mars 2022, que lors de l’expertise de la Dresse P______, l’assuré était hospitalisé depuis plusieurs mois en raison d’une affection psychiatrique ; durant l’hospitalisation, son état physique s’était amélioré mais après celle-ci, il avait rechuté du point de vue somatique et bénéficiait d’un traitement médicamenteux conséquent.

u. Le 2 mai 2022, le recourant a observé que, suite à son hospitalisation du 23 septembre au 30 décembre 2021, son évolution clinique était catastrophique, son état de santé s’aggravait ; il se ralliait à l’avis du Dr G______.

Il a communiqué les pièces suivantes :

-          une attestation de la clinique S______ pour une hospitalisation du 23 septembre au 30 décembre 2021 ;

-          une lettre de sortie de cette clinique du 10 janvier 2022 adressée au Dr N______, relevant une hospitalisation pour une aggravation des symptômes anxieux et dépressifs ;

-          un certificat d’arrêt de travail total du Dr M______ du 1er mars au 30 avril 2022 ;

-          un rapport du Dr N______ du 14 mars 2022, attestant d’un suivi depuis décembre 2017 et d’une évolution en dents de scie, avec une labilité émotionnelle et une fragilité psychologique importantes, dont il n’avait pas été tenu compte dans les différentes expertises ; fin 2021, l’assuré avait présenté une aggravation importante de son état anxieux et dépressif, avec à nouveau des idées suicidaires, de la fatigue et une concentration de douleurs, de sorte qu’une hospitalisation avait été décidée en septembre 2021 ; les symptômes s’étaient aggravés en fin de séjour, avec des diagnostics de trouble dépressif récurrent sévère, anxiété généralisée, personnalité anankastique ; il était totalement incapable de travailler en raison de son affection psychiatrique ;

-          un certificat médical du docteur R______, FMH chirurgie de la main, du 19 avril 2022, attestant d’une ténosynovite de Quervain à gauche et un syndrome du tunnel carpien bilatéral, indiquant une intervention chirurgicale ;

-          une copie d’une carte de stationnement pour personnes handicapées.

v. Les 5 et 19 mai 2022, le SMR a estimé que le rapport du Dr G______ du 29 mars 2022 n’apportait pas d’élément médical objectif nouveau et que l’hospitalisation psychiatrique de 2021 attestait d’une aggravation de l’état de santé de l’assuré, laquelle était toutefois postérieure à la décision litigieuse.

w. Les 5 et 24 mai 2022, l’OAI s’est rallié aux avis du SMR précités.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable.

1.3 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705). En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références). En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

1.4 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité au-delà du 31 octobre 2018, singulièrement sur sa capacité de travail dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles dès le 1er août 2018.

3.             En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

4.              

4.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

4.2 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

4.3 Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

4.4 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

4.5 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

4.6 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

5.             Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

5.1 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’ESS éditée par l'Office fédéral de la statistique (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

5.2 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne «total secteur privé» (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3). A cet égard, l’ESS 2018 a été publiée le 21 avril 2020; l’ESS 2016, le 26 octobre 2018 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018) ; et l’ESS 2014, le 15 avril 2016.

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 147 V 178 consid. 1.3 ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

6.             Selon l’art. 17 al. 1 LPGA, si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.

Les conditions de cette révision s’appliquent également par analogie dans le cas où la personne assurée présente une nouvelle demande de prestations après qu’une première demande a été rejetée (DUPONT-MOSER-SZELESS, Commentaire de la LPGA, 2018, p. 250).

Selon l’art. 87 al. 1 let. b RAI, la révision a lieu d’office lorsque des organes de l’assurance ont connaissance de faits ou ordonnent des mesures qui peuvent entraîner une modification importante du taux d’invalidité, du degré d’impotence ou encore du besoin de soins ou du besoin d’aide découlant de l’invalidité.

7.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

8.              

8.1 En l’occurrence, la chambre de céans, constatant que le recourant contestait valablement et essentiellement le volet somatique de l’expertise du H______, a ordonné une expertise judiciaire orthopédique.

Fondé sur toutes les pièces du dossier, comprenant une anamnèse, la description d’une journée-type, les plaintes du recourant, un examen clinique, posant des diagnostics et limitations fonctionnelles clairs et comprenant des conclusions motivées sur la capacité de travail exigible du recourant, le rapport d’expertise de la Dresse P______ répond aux réquisits jurisprudentiels précités pour qu’il lui soit reconnu une pleine valeur probante.

A la lecture des conclusions du rapport d’expertise, on comprend que la Dresse P______ retient une capacité de travail du recourant de 100% depuis le 1er août 2018. En effet, l’experte mentionne un taux de 100% « depuis le 22 février 2022 » mais cette réponse doit être interprétée en référence au rapport du Dr F______ du 22 février 2021, également cité, lequel atteste d’une capacité de travail du recourant de 100% dès août 2018 dans une activité adaptée (principalement sédentaire), ce d’autant plus que l’experte indique que la capacité de travail du recourant est restée la même (statu quo) depuis le 1er août 2018.

Cette conclusion rejoint celle des experts du H______ et les parties ont considéré que l’expertise judiciaire était probante.

En conséquence, du point de vue somatique, le recourant présente une capacité de travail totale depuis le 1er août 2018 dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, soit, selon l’experte judiciaire, sans travail sur échelle ou échafaudage, sans port de charges de plus de 5kg, sans travaux répétitifs au-delà du plan de l’horizontal et sans station debout ou assise prolongée. Il y a lieu d’ajouter à ces limitations fonctionnelles celles déjà admises par le SMR dans son avis du 20 août 2019, soit pas de marche prolongée, pas de piétinement prolongé, pas d’agenouillement ni d’accroupissement, pas d’effort en pronation et en prono-supination forcée de la main gauche.

8.2 Du point de vue psychique, le recourant conclut à l’ordonnance d’une expertise judiciaire psychiatrique, au motif que son état de santé s’est aggravé en septembre 2021 et a justifié une hospitalisation à la clinique Q______.

L’intimé admet une aggravation de l’état de santé psychique du recourant (en se référant aux avis du SMR des 5 et 19 mai 2022), en soulignant qu’elle est toutefois postérieure à la décision litigieuse.

A cet égard, de jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 130 V 130 consid. 2.1).

Force est de constater, avec l’intimé, que l’aggravation de l’état de santé psychique du recourant est survenue postérieurement à la décision litigieuse du 25 novembre 2019, de sorte qu’elle sort de l’objet du litige. En effet, le recourant a été hospitalisé dès le 23 septembre 2021 et le Dr N______ a relevé, le 14 mars 2022, que fin 2021 le recourant avait présenté une aggravation importante de son état anxieux et dépressif, avec des idées suicidaires et un manque d’entrain généralisé, nécessitant l’hospitalisation du 23 septembre au 30 décembre 2021.

L’intimé ayant admis, le 5 mai 2022, l’aggravation de l’état de santé du recourant, la cause lui sera transmise pour instruire une procédure de révision, dont il convient d’admettre qu’elle est ouverte au 5 mai 2022 (art. 87 al. 1 let. b RAI).

8.3 Au jour de la décision litigieuse, l’expertise psychiatrique du H______, concluant à l’absence de limitations fonctionnelles incapacitantes, n’était pas valablement contestée par d’autres rapports médicaux au dossier, de sorte qu’elle doit être confirmée. En particulier, les rapports du Dr N______ des 12 janvier 2020, 28 décembre 2020, 1er juillet 2021 et 14 mars 2022 ne contiennent pas d’éléments permettant d’établir une incapacité de travail psychiatrique au 25 novembre 2019. Le diagnostic d’état dépressif majeur sans symptômes psychotiques est à cet égard insuffisant pour établir une telle incapacité de travail, ce d’autant que les 12 janvier et 28 décembre 2020, le Dr N______ précisait que l’incapacité de travail était essentiellement physique.

8.4 Au vu de ce qui précède, il convient de retenir que le recourant présente dès le 1er août 2018 une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles.

9.             S’agissant du degré d’invalidité, l’intimé s’est référé au calcul effectué par sa division gestion, le 4 décembre 2017, soit un degré d’invalidité nul, fondé, d’une part, sur un revenu sans invalidité, en 2016, de CHF 55'573.- (selon le revenu signalé par l’employeur en 2015, de CHF 55'250.-) et, d’autre part, sur un revenu d’invalide de CHF 60'320.- (fondé lui-même sur l’ESS 2014, TA1, homme, total, niveau 1, pour 41,7 heures de travail par semaine, avec une déduction de 10%).

9.1 En l’occurrence, l’année de référence est l’année 2018. Selon le rapport de l’employeur et les comptes salaire annuel annexés, le revenu mensuel brut du recourant était de CHF 4'250.- en 2013 mais de CHF 4'300.- dès 2014. Le revenu sans invalidité est ainsi de CHF 55'900.- en 2015 (CHF 4'300.- x 13) ; en outre, il comprend une prime de fidélité de CHF 1'273.-, soit un salaire annuel en 2015 de CHF 57'173.-. Indexé à l’année 2018, il est de CHF 58'093.-.

9.2 Quant au revenu avec invalidité, il est de CHF 5'417.- par mois selon l’ESS 2018, TA1, homme, total, niveau 1. Ramené à 41,7 heures de travail par semaine, il est de CHF 5'647.-, soit CHF 67'764.- par année. Compte tenu des importantes limitations fonctionnelles du recourant (qui ne peut notamment rester ni en position debout ni en position assise prolongées), il convient d’admettre une déduction de 20%, de sorte que le revenu d’invalide est de CHF 54'211.-.

9.3 Le degré d’invalidité est ainsi de :

58'093 - 54'211 = 6,6%, arrondi à 7%

58’093

Ce degré d’invalidité est insuffisant pour ouvrir le droit à des prestations de l’assurance-invalidité, de sorte que la suppression de la rente d’invalidité du recourant au 1er novembre 2018 est justifiée.

10.         Partant, le recours ne peut qu’être rejeté.

11.         Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner le recourant au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1 bis LAI).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renvoie la cause à l’intimé dans le sens des considérants.

4.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le