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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/425/2020

ATAS/510/2022 du 31.05.2022 ( LAA ) , ADMIS/RENVOI

Recours TF déposé le 04.08.2022, rendu le 22.02.2023, REJETE, 8C_443/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/425/2020 ATAS/510/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 31 mai 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à CONFIGNON, comparant avec élection de domicile en l’étude de Maître Thierry STICHER

 

recourante

 

contre

SWICA ASSURANCES SA, Service Juridique, Römerstrasse 37, WINTERTHUR

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1983, a travaillé en dernier lieu à temps partiel (à 80% dès le 1er juin 2016) comme vendeuse de viande pour la B______.

b. À une date indéterminée au courant du mois d’octobre 2016, l’assurée a fait une chute dans un escalier au travail. Son genou droit a heurté une marche. Elle a continué à travailler en pensant que « ça allait ». En décembre 2016, l’assurée a ressenti son genou « lâcher » en montant dans un tram. Elle a continué à travailler malgré des douleurs.

c. Le 11 janvier 2017, elle a passé un examen IRM du genou droit, en raison d’une indication de « craquements et instabilité en montant les marches, bilan méniscal et ligamentaire ». Dans son rapport d’IRM du 11 janvier 2017, le docteur C______ a retenu le diagnostic de « chondropathie focale de la crête patellaire de 7 mm de diamètre s’étendant jusqu’à l’os sous-chondral (grade III) ; chondropathie focale au niveau de la facette médiale de la trochlée fémorale mesurant 6 mm de diamètre (grade IV) ; pas de lésion ménisco-ligamentaire décelée ».

d. Victime d’une chute sur le genou droit, le 18 janvier 2017, l’assurée a été mise en arrêt de travail dès le 19 janvier 2017 par son médecin traitant, le docteur D______, médecin généraliste.

e. Le 20 janvier 2017, l’employeur a fait une déclaration d’accident auprès de Swica Assurances SA (ci-après : l’assureur-accidents) dans laquelle il indiquait qu’avant la chute du 18 janvier 2017, son employée avait déjà chuté à deux reprises, sans qu’elle ne se souvienne des dates de ces événements et sans qu’elle ne consulte de médecin. En raison de ces précédentes chutes, l’assurée n’avait plus de force. L’employeur avait décidé de retenir la date du dernier accident dans sa déclaration du 20 janvier 2017.

f. L’assurée a en outre fait une demande de prestations d’invalidité auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) le 11 juillet 2017. Dans ce cadre, le Dr D______ a attesté qu’en raison d’une maladie dès le 21 février 2017 et en raison d’un accident dès le 19 janvier 2017, la capacité de travail de sa patiente n’était pas exigible dans son activité habituelle ou dans une activité adaptée. L’accident avait entraîné une incapacité de travail du 19 janvier au 20 février 2017. La maladie avait ensuite été à l’origine d’une incapacité de travail complète du 21 février 2017 au 13 septembre 2017. La grossesse de sa patiente avait généré une incapacité de travail dès le 13 septembre 2017 (la patiente ayant été mise en arrêt de travail pour cette cause en septembre 2017 et accouché en décembre 2017). La maladie qui avait eu une répercussion sur la capacité de travail de sa patiente du 21 février au 13 septembre 2017 était décrite comme suit par le médecin traitant : « chondropathie crête patellaire grade III genou D ; chondropathie trochlée fémorale (grade IV) genou D ; épine calcanéenne talon D (2014) ; statut anxio-dépressif réactionnaire (2016) ». En revanche, le diabète gestationnel et l’asthme dont souffrait sa patiente n’avaient pas d’effet sur la capacité de travail. Ce médecin jugeait que d’un point de vue médical, l’activité habituelle pouvait être exigible à 100% au mois de février 2018 ou de mars 2018, soit après le congé maternité, mais devait être adaptée, la station debout devant être limitée au maximum à deux heures et les escaliers et la marche à pied également. Dans un formulaire adressé à l’OAI, le 1er octobre 2018, le Dr D______ a indiqué que l’état de sa patiente s’était aggravé, sans changement dans les diagnostics posés. À la fin du mois d’août 2018, sa patiente avait ressenti un craquement et un blocage du genou. La situation s’était aggravée au niveau des gonalgies, de sorte qu’une arthroscopie avait été programmée. Sa capacité de travail était de 50% dans un poste de caissière debout et de 100% dans une autre activité adaptée telle que l’activité de caissière assise. L’assurée était à nouveau en incapacité de travail de 100% depuis le 2 octobre 2018. Le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci-après : SMR) a retenu à l’issue de l’instruction que l’assurée avait présenté un problème au genou droit (chondropathie fémoro-patellaire stade III-IV), évoluant depuis 2016, ayant motivé une incapacité de travail dès le mois de janvier 2017. Les rapports médicaux du Dr D______ indiquaient une capacité de travail pleine dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles de la patiente, depuis toujours. Le degré d’invalidité de l’assurée a été déterminé le 14 janvier 2020. L’OAI a reconnu à l’assurée une incapacité de travail de 100% dans son activité habituelle dès le 19 janvier 2017, fin du délai d’attente d’un an, et une pleine capacité de travail dans une activité adaptée dès cette même date. Le statut d’actif à 80% a été retenu et un revenu annuel en 2016, soit avant l’atteinte, de CHF 65'090.- a été pris en compte. Le temps de travail exigible était de 100% sans diminution de rendement et le salaire avec invalidité était de CHF 54'783.-. La perte de gain était donc de CHF 10'548.- et le degré d’invalidité de 16.15%. Pour établir le revenu de 2016, l’OAI s’était fondé sur le salaire annuel de 2015 de CHF 51'440.-, actualisé pour l’année 2016 à CHF 52'072.- pour un taux d’activité de 80% ; le salaire annuel à 100% était donc de CHF 65'090.-. La demande de prestations a dès lors été refusée par l’OAI.

g. Le 15 avril 2019, l’assurée s’est soumise à une arthroscopie avec shaving et micro fracture des lésions cartilagineuses réalisée par le docteur E______, orthopédiste. L’atteinte principale était selon le diagnostic posé par ce praticien une chondropathie fémoro-patellaire de grade III-IV du genou droit. L’intervention a motivé une incapacité de travail totale dans toute activité jusqu’au 31 juillet 2019. Dans un document complémentaire du 16 mai 2019, le Dr E______ précisait que les lésions du genou droit constatées lors de l’arthroscopie étaient secondaires à un statut post-traumatique et non pas à une maladie. Les bilans radiologiques préopératoires avaient infirmé un problème de dysplasie fémoro-patellaire. Sa patiente avait déjà signalé à son employeur en octobre 2016 un traumatisme dans des escaliers avec un impact sur la face interne du genou droit contre une marche d’escalier. Son diagnostic était une chondromalacie stade 4 du pôle inférieur de la rotule et une probable nécrose focale condyle fémorale interne. L’orthopédiste estimait que la capacité de travail était nulle en post-opératoire, puis à réévaluer. Il a signé des arrêts de travail du 15 avril 2019 au 31 juillet 2019. La capacité de travail était retrouvée dès le 1er août 2019.

h. L’assureur-accidents a recueilli les avis des Drs D______ et E______ et a mandaté le docteur F______ à titre d’expert. Ce médecin a indiqué qu’un délai de trois mois était suffisant pour atteindre le statu quo sine après l’accident du 18 janvier 2017. Dès la fin du mois d’avril 2017, il n’y avait plus de rapport de causalité entre cet accident et les lésions de l’assurée au-delà de cette date. L’assurée présentait une arthrose fémoropatellaire avancée au genou droit, non étendue, mais importante et préexistante à l’événement du mois d’octobre 2016 et, a fortiori, à celui du 18 janvier 2017. Les lésions visibles sur l’IRM du 11 janvier 2017 s’étaient formées progressivement en raison de désaxation externe de la rotule et en présence d’un déséquilibre sur dysplasie fémoro-patellaire. L’apparition de ces lésions avait été progressive et n’était pas en relation avec un événement traumatique quelconque. Sa conclusion était que les lésions au genou droit de l’assurée, dont le diagnostic était une arthrose fémoropatellaire avancée droite sur dysplasie rotulienne et désaxation externe de la rotule, étaient d’ordre maladif et non la conséquence d’un traumatisme, contrairement à l’avis du Dr E______. L’atteinte cartilagineuse était imputable de manière prépondérante (à plus de 50%, voire à 100%) à l’état maladif constitutionnel de l’assurée. L’événement du 18 janvier 2017 avait pu aggraver la symptomatologie douloureuse.

i. Le 12 septembre 2019, l’assureur-accidents a informé l’assurée qu’il mettait fin au versement des indemnités journalières avec effet au 30 avril 2017.

j. L’assurée s’étant opposée à cette décision et ayant sollicité une décision formelle le 26 septembre 2019, l’assureur-accidents a rendu une décision le 24 octobre 2019. En se fondant sur le rapport du Dr F______, il a décidé de mettre fin au versement des indemnités journalières avec effet au 30 avril 2017.

k. L’assurée ayant formé opposition à cette décision le 18 novembre 2019, l’assureur-accidents a confirmé dans une décision sur opposition du 6 janvier 2020 sa décision du 24 octobre 2019.

B. a. Le 3 février 2020, l’assurée a déféré cette décision à la chambre des assurances sociales de la cour de justice (ci-après : CJCAS), concluant à l’audition des Drs F______ et E______ et à la mise en œuvre d’une expertise. Au fond, elle a conclu à l’annulation de la décision du 6 janvier 2020 et à ce que la chambre de céans dise que l’intimée est tenue de verser des prestations en lien avec l’accident du 18 janvier 2017, sous suite de frais et dépens.

b. L’intimée a conclu au rejet du recours, le 3 mars 2020.

c. La chambre de céans a versé, le 21 juillet 2020, le dossier de l’OAI à la procédure et les parties ont été invitées à se déterminer sur celui-ci. Les parties ont persisté dans leurs conclusions les 18 et 27 août 2020. Un échange d’écritures a eu lieu les 3 septembre, 6 et 26 octobre 2020.

d. La chambre de céans a informé les parties, par courrier du 15 juillet 2021, de son intention de mettre en œuvre une expertise et leur a communiqué les questions qu’elle avait l’intention de poser à l’expert, tout en leur impartissant un délai au 19 août 2021 pour compléter celles-ci et faire valoir une éventuelle cause de récusation contre l’expert G______.

e. La recourante s’est déterminée sur les questions à poser par pli du 12 août 2021. Elle n’avait pas de cause de récusation et sollicitait que les questions 7.1 et 7.2 soient reformulées pour que l’expert se détermine sur la capacité de travail en temps de présence et en terme de rendement.

f. L’intimée s’est déterminée le 17 août 2021. Elle n’avait pas de cause de récusation et ne voyait pas pourquoi la question 10 devait être posée à l’expert, aucune pièce au dossier ne mentionnant de troubles psychiques faisant suite à l’accident du 18 janvier 2017.

g. Par ordonnance du 7 septembre 2021, la chambre de céans a confié l’expertise au Prof. G______ en ajoutant les questions des parties et en maintenant la question 10.

h. Le 10 décembre 2021, l’expertise a été rendue, puis transmise aux parties pour détermination. L’expert a pris en compte l’intégralité du dossier et a procédé à l’examen des documents médicaux dont les radiographies des 19 janvier 2017, 6 mars 2019 et 4 novembre 2021 et l’IRM du 11 janvier 2017, et à un examen clinique d’une heure trente le 1er novembre 2021. Selon l’anamnèse, l’expertisée a rappelé son historique médical et a estimé pouvoir reprendre son ancienne activité de caissière, son genou droit allant bien et ne craquant plus. Elle voulait que l’on reconnaisse le caractère accidentel de son problème de genou droit. Son licenciement prononcé par la B______ avait été injustifié et était dû à la non reconnaissance dudit caractère accident de son atteinte. Selon sa lecture des radiographies du 19 janvier 2017 et du 6 mars 2019, l’expert ne constatait ni lésion traumatique ni dégénérative du genou droit, étant précisé que les clichés de 2019 n’étaient pas lege artis. Il en va de même de la radiographie du 4 novembre 2021. En revanche, l’IRM du 11 janvier 2017 met en évidence une lésion du revêtement cartilagineux, sans œdème osseux du pôle inférieur de la rotule. Ces images très localisées pouvaient être interprétées comme des lésions traumatiques ou dégénératives. Le fait qu’elle ne soit pas associée à un œdème osseux faisait plutôt pencher pour une lésion traumatique, mais la question restait légitimement ouverte. L’expert notait en outre des micro-géodes ou lésions kystiques sur la partie antérieure du condyle interne, lesquelles pouvaient selon les auteurs être considérées comme dégénératives ou idiopathiques. Selon les calculs faits sur la base de l’expertise, il n’était pas correct de dire qu’il existait une dysplasie ou une désaxation significative de la rotule qui serait la cause d’une arthrose fémoropatellaire. Sur la CT du genou droit du 6 mars 2019, des micro-géodes étaient mises en évidence, d’origine soit idiopathique soit arthrosique selon les auteurs. L’examen était dans la norme et ne permettait pas de retenir une dysplasie patellaire ou un défaut d’alignement patellaire significatif. Après avoir fait un exposé de la procédure et des prises de positions de chacun, l’expert a apporté une revue de la littérature en la matière. L’expert a retenu le diagnostic de chondropathie rotulienne post-traumatique droite et chondropathie fémorale grade III-IV circonscrite à droite, apparue à la suite d’une chute dans l’escalier en octobre 2016. L’état de santé était stabilisé depuis le 1er août 2019 pour une reprise de l’activité habituelle adaptée à la suite de l’intervention du genou et, dès le 1er décembre 2020, l’assurée a commencé un stage de vendeuse pour six mois, soit son activité habituelle. Tant la CT que l’IRM montraient des anomalies du revêtement cartilagineux de la rotule et du condyle fémoral du genou droit. Le lien de causalité entre cette atteinte et la chute d’octobre 2016 et celle de décembre 2016 est certaine (100%) et a été aggravée par la chute de janvier 2017. D’octobre 2016 à juillet 2019, l’assurée avait de nombreuses limitations fonctionnelles. Elle a eu une capacité nulle, à l’exception d’une pleine capacité (caissière assisse), mais adaptée, soit sans port de charges, limitation à 2 heures de station debout, pas d’échelle et de position accroupie, du 23 mars 2018 au 1er octobre 2018. Le statu quo sine a ainsi été atteint le 1er août 2019. L’expert a expliqué pourquoi il ne parvenait pas au même diagnostic que l’expert F______, ce dernier s’étant basé sur des radiographies médiocres et non adéquats pour retenir de diagnostic précis. La lecture des images du 4 novembre 2021 sur lequel le Prof. G______ s’était fondé aboutissait à un résultat différent. L’expert F______ ne préconisait pas de traitement, alors qu’il posait un diagnostic qui en aurait justifié un. Enfin, la suite favorable de l’arthroscopie du 15 avril 2019 infirmait les diagnostics et conclusions du Dr F______.

i. La recourante a fait siennes les conclusions de l’expert.

j. L’intimée a produit un rapport complémentaire du Dr F______ à teneur duquel ce dernier a redonné sa lecture des images au dossier. Pour lui, il était étonnant que l’assurée ait passé sous silence les chutes d’octobre et de décembre 2016, alors qu’une chute sur la rotule donne de fortes douleurs, une tuméfaction et rend les déplacements difficiles. L’expert n’avait en outre pas suffisamment souligné l’obésité morbide et les jambes en X que l’assurée présentait et qui constituent fréquemment la cause de la chondropathie. Le Dr F______ a ensuite remis en cause l’avis du Dr E______ et les diagnostics posés par l’expert G______ en relevant notamment que si les valeurs analysées sont dans la norme, elles n’en demeurent pas moins proches d’un état pathologique. Selon lui, il n’y avait pas de preuve de l’état du genou avant la première chute, donc il était tendancieux de dire qu’elles étaient apparues après celle-ci. Elles pouvaient avoir été silencieuses comme le sont souvent les atteintes dégénératives. L’évolution, bien que bonne, n’allait pas durer et l’arthrose ne pouvait que s’accentuer et le pronostic était très réservé. L’intimée a conclu que le rapport d’expertise contenait des contradictions, des incohérences et manquait d’analyse, de sorte qu’il ne pouvait pas se voir reconnaître de valeur probante.

k. Le 1er février 2022, la recourante a relevé que si l’expert avait estimé que le statu quo ante était atteint le 1er août 2021, l’intimée ne l’avait en revanche pas avertie de l’obligation de se reconvertir, de sorte qu’il fallait lui laisser quelques mois, conformément à la jurisprudence pour retrouver une activité et ainsi retenir la date du 1er janvier 2020, date à laquelle son état lui permettait de reprendre son activité habituelle. Elle avait ainsi droit à la prise en charge des frais du traitement du 15 avril 2019 et à des indemnités journalières sur la base de l’incapacité de travail jusqu’à la date de 1er janvier 2020.

l. L’intimée n’a pas fait d’observations et la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l’entrée en vigueur de la LPGA ; il n’en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

La modification du 25 septembre 2015 de la LAA est entrée en vigueur le 1er janvier 2017.

Dans la mesure où l’accident est survenu après cette date, le droit de la recourante aux prestations d’assurance est soumis au nouveau droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2017.

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

3.             Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestations de l’assurance-accidents au-delà du 30 avril 2017.

4.              

4.1 En vertu de l’art. 6 de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l’assurance-accidents (LAA ; RS 832.20), si la présente loi n’en dispose pas autrement, les prestations d’assurance sont allouées en cas d’accident professionnel, d’accident non professionnel et de maladie professionnelle. Selon l’art. 4 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA ; RS 830.1), applicable par le renvoi de l’art. 1 al. 1 LAA, est réputé accident toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort.

4.2 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec l’événement assuré. Les prestations d’assurance sont donc également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives (art. 11 de l’ordonnance du 20 décembre 1982 afférente à la LAA [OLAA ; RS 832.202]). Selon la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu’elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c’est la même maladie qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu’une atteinte apparemment guérie produit, au cours d’un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 138 consid. 3a et les références). À cet égard, la jurisprudence considère que plus le temps écoulé entre l’accident et la manifestation de l’affection est long, et plus les exigences quant à la preuve, au degré de la vraisemblance prépondérante, du rapport de causalité naturelle doivent être sévères (RAMA 1997 p. 191 consid. 1c).

La condition du lien de causalité naturelle est remplie lorsqu’il y a lieu d’admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière. Savoir si l’événement assuré et l’atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l’administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d’ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l’appréciation des preuves dans l’assurance sociale. Ainsi, lorsque l’existence d’un rapport de cause à effet entre l’accident et le dommage paraît possible, mais qu’elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l’accident assuré doit être nié (ATF 129 V 181 consid. 3.1 ; ATF 129 V 406 consid. 4.3.1 ; ATF 119 V 337 consid. 1 ; ATF 118 V 289 consid. 1b et les références). Si l’on peut admettre qu’un accident n’a fait que déclencher un processus qui serait de toute façon survenu sans cet événement, le lien de causalité entre les symptômes présentés par l’assuré et l’accident doit être nié lorsque l’état maladif antérieur est revenu au stade où il se trouvait avant l’accident (statu quo ante) ou s’il est parvenu au stade d’évolution qu’il aurait atteint sans l’accident (statu quo sine) (RAMA 1992 p. 75 consid. 4b). Enfin, admettre l’existence d’un lien de causalité au seul motif que des symptômes sont apparus après un accident revient à se fonder sur l’adage « après l’accident, donc à cause de l’accident » (« post hoc ergo propter hoc », lequel ne permet pas d’établir l’existence d’un tel lien (arrêt TF 8C_6/2009 du 30 juillet 2009 consid. 3 ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408 s. consid. 3b).

Le droit à des prestations de l’assurance-accidents suppose, outre un lien de causalité naturelle, un rapport de causalité adéquate entre l’accident et l’atteinte à la santé, question de droit qu’il appartient à l’administration et, en cas de recours, au juge de trancher. Selon la jurisprudence, la causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience générale de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 117 V 359 consid. 5a ; ATF 117 V 369 consid. 4a et les références citées). En tant que principe répondant à la nécessité de fixer une limite raisonnable à la responsabilité de l’assureur-accidents social, la causalité adéquate n’a pratiquement aucune incidence en présence d’une atteinte à la santé physique en relation de causalité naturelle avec l’accident, du moment que dans ce cas l’assureur répond aussi des atteintes qui ne se produisent habituellement pas selon l’expérience médicale (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb et les références).

Si le rapport de causalité avec l’accident est établi avec la vraisemblance requise, l’assureur n’est délié de son obligation d’octroyer des prestations que si l’accident ne constitue plus la cause naturelle et adéquate de l’atteinte à la santé, c’est-à-dire si cette dernière repose seulement et exclusivement sur des facteurs étrangers à l’accident. C’est le cas soit lorsqu’est atteint l’état de santé (maladif) tel qu’il se présentait directement avant l’accident (status quo ante), soit lorsqu’est atteint l’état de santé, tel qu’il serait survenu tôt ou tard, indépendamment de l’accident, selon l’évolution d’un état maladif antérieur (status quo sine). L’administration et, le cas échéant, le juge tranchent la question de la rupture du lien de causalité en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante. La simple possibilité de cette rupture ne suffit pas (RAMA 1994 p. 326 consid. 3b et les références).

4.3 En présence d’avis médicaux contradictoires, le juge doit apprécier l’ensemble des preuves à disposition et indiquer les motifs pour lesquels il se fonde sur une appréciation plutôt que sur une autre. À cet égard, l’élément décisif pour apprécier la valeur probante d’une pièce médicale n’est en principe ni son origine, ni sa désignation sous la forme d’un rapport ou d’une expertise, mais bel et bien son contenu. Il importe, pour conférer pleine valeur probante à un rapport médical, que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu’il ait été établi en pleine connaissance de l’anamnèse, que la description du contexte médical et l’appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l’expert soient dûment motivées (ATF 125 V 351 consid. 3a ; ATF 122 V 157 ; RAMA 1996 n°U 256 p. 217 et les références).

4.4 Le simple fait que le médecin consulté soit lié à l’assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l’objectivité de son appréciation ni de soupçonner une présomption à l’égard de l’assuré. Ce n’est qu’en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l’impartialité de son appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l’importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères en ce qui concerne l’impartialité de l’expert (ATF 122 V 157 consid. 1c et les références).

4.5 Selon la jurisprudence, un rapport médical établi sur la base d’un dossier a valeur probante si ledit dossier contient suffisamment d’appréciations médicales, qui elles, se fondent sur un examen personnel de l’assuré (RAMA 2001 no U 438 p. 345 ; arrêt du Tribunal fédéral U 233/02 du 14 juin 2004 consid. 3.1).

4.6 Enfin, quant aux rapports émanant des médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait relevant de l’expérience que, de par sa position de confident privilégié que lui confère son mandat, le médecin traitant tranchera dans le doute en faveur de son patient (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références).

5.             Est litigieuse, en l’espèce, la question de savoir s’il existe une relation de causalité entre l’événement du 18 janvier 2017, voire l’événement du mois d’octobre 2016, et les lésions au genou droit dont souffre la recourante. La recourante s’est fondée sur l’avis de son médecin traitant, le Dr E______, alors que l’intimée s’est fondée principalement sur le rapport du Dr F______.

La chambre de céans a jugé qu’il se justifiait de mettre en œuvre une expertise judiciaire orthopédique et traumatologique, qu’elle a confiée au professeur G______, spécialiste en traumatologie au CHUV, eu égard aux avis divergents exprimés par les Drs E______ et F______ sur les diagnostics et l’origine de l’atteinte à la santé.

5.1 Sur la forme, le rapport d’expertise du Dr G______ remplit toutes les exigences auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d’un tel document. En effet, il comprend une analyse du dossier y compris des imageries effectuées, l’anamnèse, les indications subjectives de la recourante, les observations cliniques, ainsi que l’appréciation du cas. L’expert a exposé pour quelle raison il ne pouvait pas retenir le diagnostic de lésions dégénératives posé par le Dr F______ et sur quoi son analyse était fondée.

Sur le fond, contrairement à l’avis exprimé par le Dr F______ au sujet de l’expertise du Dr G______, la conclusion de ce dernier, selon laquelle l’atteinte au genou droit résulte, de manière certaine, des chutes du mois d’octobre et décembre 2016 et ont été aggravé par une chute en janvier 2017, emporte la conviction de la chambre de céans pour les motifs suivants.

L’expert fonde son expertise sur l’ensemble des avis médicaux au dossier et la lecture qu’il donne de l’imagerie. Il rejoint l’avis du Dr E______ sur le diagnostic et l’origine traumatique de la lésion. L’expert a pris en compte les différentes chutes décrites par l’assurée. Le fait de s’étonner, comme le fait le Dr F______, que cette dernière ait continué à travailler plutôt que d’être mise en arrêt à la suite d’une chute dans un escalier sur son lieu de travail en octobre 2016 et après avoir ressenti un lâchement en décembre 2016, ne saurait suffire à considérer que ces événements n’ont pas eu lieu ou qu’ils n’auraient pas causé de lésions. En effet, le 20 janvier 2017, l’employeur a fait une déclaration d’accident dans laquelle il indiquait qu’avant la chute du 18 janvier 2017 son employée avait déjà chuté à deux reprises, sans qu’elle ne se souvienne des dates de ces événements et sans qu’elle ne consulte de médecin. Quant à la gravité des lésions, force est de constater que c’est à la suite de ces événements et compte tenu des douleurs en ayant résulté que la recourante a consulté un médecin à la fin de l’année 2016 et a passé un IRM le 11 janvier 2017, soit avant l’événement du 18 janvier 2017. Le Dr F______ n’a ainsi pas pris en compte l’intégralité des éléments déterminants du dossier pour se prononcer. Il n’a en revanche pas contesté que le dernier évènement était accidentel et qu’il avait eu des répercussions sur la capacité de travail jusqu’en avril 2017. L’expert a dès lors une vision plus complète du dossier et son appréciation n’en n’est que plus convaincante.

Si l’expert et le Dr F______, tous deux médecins disposant de connaissances médicales spécialisées dans la discipline médicale pertinente et qui se sont appuyés sur la littérature topique, ont une opinion divergente concernant le caractère dégénératif ou traumatique des lésions, il sied de constater que le Prof. G______ a expliqué de manière convaincante ses diagnostics sur la base en particulier des images de novembre 2021 tout en expliquant pour quelle raison les images sur lesquelles le Dr F______ s’était pour sa part fondé étaient de qualité médiocre et impropres à retenir les diagnostics de lésions dégénératives. En outre, l’évolution du genou après l’intervention d’avril 2019 permet de confirmer l’avis de l’expert et semble aller à l’encontre de celui du médecin mandaté par l’intimée à titre d’expert.

Pour ces motifs, rien ne permet de douter de la valeur probante de l’expertise du Dr G______ malgré l’avis divergent du Dr F______.

5.2 La chambre de céans retiendra dès lors les diagnostics posés par l’expert qu’elle a mandaté et que le statu quo sine dans l’activité habituelle n’a été atteint selon l’expert que le 1er janvier 2020, de sorte que la recourante a droit à des indemnités journalières jusqu’à cette date, si tant est que les autres exigences d’assurances sont remplies (durée du droit aux prestations).

En effet, il ne pouvait être attendu de l’assurée qu’elle change de profession entre le 1er août 2019, date à laquelle sa capacité de travail dans une activité adaptée a été retrouvée, et le 1er janvier 2020, date à laquelle elle pouvait reprendre son activité habituelle.

Au vu de ce qui précède et de l’expertise réalisée, les auditions requises par la recourante sont, par appréciation anticipée des preuves (ATF 122 II 464 consid. 4a), inutiles.

5.3 La recourante obtenant gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), arrêtée en l’espèce à CHF 2'500.-.

5.4 Les frais de l’expertise judiciaire seront laissés à la charge de l’État.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet et annule la décision sur opposition du 6 janvier 2020.

3.        Dit que la recourante a droit au remboursement du traitement médical en lien avec l’atteinte au genou droit et au versement des indemnités journalières qui lui sont dues, jusqu’au 1er janvier 2020, sous réserve des autres conditions d’assurance.

4.        Renvoie la cause à l’intimée pour calcul des prestations dues.

5.        Alloue une indemnité de CHF 2'500.- à la recourante à titre de dépens, à la charge de l’intimée.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le