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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3774/2021

ATAS/486/2022 du 24.05.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3774/2021 ATAS/486/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 mai 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE

 

 

recourant

 

contre

UNIA CAISSE DE CHOMAGE, sise SC 121, LAUSANNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant), né le ______ 1987, a été engagé par B______ (ci-après : l'employeur) dès le 1er septembre 2020 en qualité de vendeur.

b. Les 14 décembre 2020 et 20 février 2021, l'employeur a adressé des avertissements à l'assuré.

c. Par lettre remise en mains propres à l'issue d'un entretien, le 26 mars 2021, l'employeur a résilié le contrat de l'assuré pour le 30 avril 2021.

B. a. L'assuré a sollicité des indemnités de chômage et un délai-cadre d'indemnisation a été fixé au 3 mai 2021 auprès de UNIA caisse de chômage (ci-après : la caisse ou l'intimée).

b. La caisse a sollicité l'employeur pour connaître les raisons du licenciement. Celui-ci a indiqué que l'assuré avait commis plusieurs oublis et erreurs et que des avertissements lui avaient été notifiés. Une mesure avait été prise dans le cadre de ces avertissements : une check-list avait été remise à l'assuré et ce dernier était tenu de la remplir. L'assuré n'avait cependant pas correctement suivi celle-ci et avait continué à ne pas respecter les consignes malgré les avertissements. L'assuré a pour sa part expliqué son licenciement par le fait qu'il avait reçu un premier avertissement, parce qu'il avait oublié de déstocker des produits, et un deuxième avertissement, parce qu'il n'avait pas vérifié la disponibilité d'un produit. Il avait reçu un avertissement verbal le 26 mars 2021, parce qu'il n'avait pas rempli une grille de contrôle. Il lui était difficile de remplir la grille de contrôle durant les ventes. Après le deuxième avertissement, il avait indiqué à son employeur souffrir de problèmes de concentration en raison de la prise d'antidépresseurs. L'assuré a en outre transmis à la caisse un certificat dans lequel la docteure C______ attestait qu'il prenait un traitement de SEROPLEX depuis décembre 2016 pour un trouble anxieux dépressif.

c. Par décision du 14 juillet 2021, la caisse a décidé de suspendre l'indemnité de chômage de l'assuré pour 25 jours, au motif qu'il avait donné un motif de licenciement à son employeur.

d. L'assuré a fait opposition, le 23 juillet 2021, à cette décision en exposant que l'avis de l'employeur était contredit par la teneur de son certificat de travail. La check-list était quasiment impossible à remplir. Il avait été mis sur la surface de vente immédiatement et sans formation. Bien qu'il ait travaillé en France dans le domaine de la téléphonie, il considérait le fonctionnement en Suisse très différent. Ses collègues l'avaient formé tout au long du contrat.

e. Par décision du 12 octobre 2021, la caisse a rejeté l'opposition de l'assuré, en rappelant avoir pris en compte le fait que l'assuré prenait un traitement qui pouvait influencer sa concentration, en fixant une sanction de 25 jours pour une faute objectivement grave, mais qualifiée par la caisse de moyenne pour tenir compte de la situation médicale de l’assuré.

C. a. Par acte du 21 octobre 2021, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre des assurances sociales) d’un recours contre la décision sur opposition de la caisse, en concluant à l’annulation de la décision et au renvoi de la cause à la caisse pour qu’elle statue à nouveau sur la suspension en tenant compte du fait qu’il n’avait pas été formé par son employeur en sus du fait déjà pris en compte, à savoir qu’il prenait des antidépresseurs qui influençaient sa concentration. Il n’avait pas reçu de formation concernant l’utilisation du matériel informatique, malgré plusieurs demandes à l’employeur, de sorte qu’il avait dû apprendre sur le tas avec l’aide de collègues. Il avait reçu un premier avertissement le 14 décembre 2020 pour avoir oublié un déstockage. Conscient de son erreur, il avait entrepris des efforts pour ne pas « récidiver ». Avant cela, il avait été contacté par son responsable, le 11 décembre 2020, alors qu’il était en congé. Il s’était permis de le relever et avait été considéré comme un insolent impertinent. Le 20 février 2021, il avait reçu un deuxième avertissement pour non vérification de la disponibilité d’un produit et comportement irrespectueux envers la hiérarchie. Il avait alors pris contact avec le service des ressources humaines pour évoquer son mal-être dans l’entreprise et le fait qu’il prenait des médicaments qui nuisaient à sa concentration et le rendaient somnolent. Aucune mesure n’avait été prise à l’exception de la mise en place d’une check-list qu’il lui était demandé de remplir lors des ventes. Il n’avait pas été en mesure de remplir cette liste et de rester à l’écoute de la clientèle. Malgré de nombreuses remarques qu’il avait adressées à son employeur à ce sujet, la situation n’avait pas changé. Il ne contestait pas les incidents survenus et que ceux-ci avaient conduit aux avertissements reçus, mais relevait que son employeur n’avait pas pris en compte ses remarques et sa situation médicale. La caisse n’avait pas pris en considération le stress engendré par le manque de formation en informatique et le fait qu’il avait dû apprendre « sur le tas » avec l’aide de ses collègues. Il avait certes une expérience significative dans le même domaine en France mais ne connaissait pas le système informatique de l’employeur en Suisse lequel était différent de celui qu’il utilisait en France.

b. Par réponse du 1er décembre 2021, la caisse a conclu au rejet du recours, faute d’allégation d’éléments qui n’auraient pas été pris en compte dans la décision du 12 octobre 2021.

c. La chambre de céans a sollicité le certificat de travail de l’assuré que ce dernier lui a fait parvenir par pli du 22 mars 2022. Ce document mentionne la liste des tâches dont était chargé l’assuré et indique que ce dernier possédait de larges connaissances en téléphonie. L’employeur avait pu apprécier son aisance dans les outils informatiques Microsoft office, Marilyn et Odoo. L’assuré était efficace et capable d’atteindre les objectifs à la satisfaction de son employeur, en respectant les délais impartis. L’assuré était décrit comme flexible et capable d’identifier rapidement les besoins de la clientèle et d’y répondre. « Orienté service », il était parfaitement à l’aise avec les clients. Grâce à sa disponibilité, sa politesse et son intégrité, l’assuré avait été apprécié de ses collègues et supérieurs.

d. La caisse a observé le 28 mars 2022 que le certificat ne correspondait pas à la réalité du court rapport de travail entre l’assuré et son ancien employeur. Il avait été établi dans une optique bienveillante pour favoriser l’avenir professionnel de l’assuré.

e. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit du recourant à l'indemnité de chômage pour une période nominale de 25 jours pour chômage fautif.

Selon l’art. 30 al. 1 let. a LACI, il convient de sanctionner par une suspension du droit à l’indemnité de chômage celui qui est sans travail par sa propre faute. Tel est notamment le cas de l’assuré qui, par son comportement, en particulier par la violation de ses obligations contractuelles de travail, a donné à son employeur un motif de résiliation du contrat de travail (art. 44 al. 1 let. a de l’ordonnance du 31 août 1983 sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité [OACI]). En d’autres termes, il n’est pas nécessaire que l’assuré ait violé ses obligations contractuelles de travail pour qu’une suspension de son droit à l’indemnité de chômage puisse lui être infligée (arrêt du Tribunal fédéral C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 4.2). Il suffit que le comportement à l’origine de la résiliation ait pu être évité si l’assuré avait fait preuve de la diligence voulue, en se comportant comme si l’assurance n’existait pas (ATF 112 V 242 consid. 1) Pour qu’une sanction se justifie, il faut que le comportement de l’assuré ait causé son chômage. Un tel lien fait défaut si la résiliation est fondée essentiellement sur un autre motif que le comportement du travailleur. Il est par ailleurs indifférent que le contrat de travail ait été résilié de façon immédiate et pour de justes motifs ou à l’échéance du congé légal ou contractuel. Il suffit que le comportement à l’origine de la résiliation ait pu être évité si l’assuré avait fait preuve de la diligence voulue, comme si l’assurance n’existait pas. Le comportement reproché doit toutefois être clairement établi (ATF 112 V 242 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 8C_370/2014 11 juin 2015 consid. 2.2; Thomas NUSSBAUMER, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Arbeitslosenversicherung, vol. XIV, 3ème éd. 2016, p. 2515 n. 837). En outre, il est nécessaire, en application de l’art. 20 let. b de la Convention n° 168 du 21 juin 1988 concernant la promotion de l’emploi et la protection contre le chômage (RS 0.822.726.8), que l’assuré ait délibérément contribué à son renvoi, c’est-à-dire qu’il ait au moins pu s’attendre à recevoir son congé et qu’il se soit ainsi rendu coupable d’un dol éventuel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_268/2015 du 6 août 2015 consid. 4.2 et les références). Le dol simple entraîne a fortiori une sanction (cf. Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 24 ad art. 30 LACI). Il doit y avoir un lien de causalité juridiquement pertinent entre le motif de licenciement, c'est-à-dire le comportement fautif de l'assuré, et le chômage (Circulaire du SECO, D15).

Un assuré qui entend se prévaloir d’un motif de santé (art. 16 al. 2 let. c LACI) pour quitter ou refuser un poste de travail doit en principe fournir un certificat médical circonstancié, reposant sur une analyse clinique et technique (ATF 124 V 234 consid. 4b), indiquant précisément quelles activités sont contre-indiquées (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 60/05 du 18 avril 2006 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 182/01 du 22 février 2002).

2.1 L’art. 30 al. 3 LACI prévoit notamment que la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, soixante jours.

2.2 Conformément à l’art. 45 OACI, la suspension dure d’un à quinze jours en cas de faute légère (al. 3 let. a), de seize à trente jours en cas de faute de gravité moyenne (al. 3 let. b) et de trente-et-un à soixante jours en cas de faute grave (al. 3 let. c).

Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi (al. 4 let. a) ou qu’il refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence.

2.3 En tant qu’autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l’intention des organes d’exécution (Bulletin LACI IC). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d’exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d’apprécier le comportement de l’assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d’espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

La durée de la suspension est fixée en tenant compte de toutes les circonstances du cas particulier, telles que le mobile, les circonstances personnelles (l’âge, l’état civil, l’état de santé, une dépendance éventuelle, l’environnement social, le niveau de formation, les connaissances linguistiques, etc.), des circonstances particulières (le comportement de l’employeur ou des collègues de travail, le climat de travail, etc.), de fausses hypothèses quant à l’état de fait (par exemple quant à la certitude d’obtenir un nouvel emploi (Bulletin LACI IC, D64).

2.4 S’agissant de la quotité de la sanction, l’art. 45 al. 3 OACI prévoit trois catégories de fautes, soit les fautes légères, les fautes moyennes et les fautes graves, à sanctionner en principe d’une suspension du droit à l’indemnité de chômage pour une durée respectivement de 1 à 15 jours, de 16 à 30 jours et de 31 à 60 jours.

2.5 Tout chômage fautif ne constitue pas ipso jure un cas de faute grave. L’art. 45 al. 4 OACI érige en effet en faute grave l’abandon d’un emploi réputé convenable sans assurance d’obtenir un nouvel emploi et le refus d’un emploi réputé convenable, dans les deux cas sans motif valable.

2.6 Une preuve absolue n'est pas requise en matière d'assurances sociales. L'administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute le cas échéant d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références).

2.7 En l’espèce, le recourant ne conteste pas qu’il a reçu deux avertissements durant les premiers mois de son travail pour son ancien employeur. Il ne conteste pas davantage le lien de causalité entre les manquements commis et le licenciement qui en a résulté, mais les explique par une lacune dans la formation qu’il espérait recevoir de son employeur et par un manque de concentration et une somnolence dus à la prise de médicaments antidépresseurs. Le recourant expose d’ailleurs lui-même qu’il n’avait pas été en mesure de compléter une liste de contrôle que son employeur attendait qu’il remplisse lors des ventes. Le recourant évoque en outre un différend qu’il a eu avec son responsable lorsque ce dernier l’a contacté durant un congé. Force est ainsi de constater que des manquements d’ordre professionnel et le comportement général de l’assuré ont donné lieu au licenciement de ce dernier.

Le fait que l’employeur du recourant n’a pas mentionné d’éléments négatifs, comme les avertissements, dans le certificat de travail ne saurait occulter les manquements que le recourant ne conteste pas.

Le fait qu’il était suivi par un thérapeute et prenait un traitement médical pouvant avoir un effet sur la concentration et la fatigue ne privait pas le recourant de sa capacité de travail. En revanche, la caisse en a tenu compte dans la qualification de la faute du recourant, laquelle a été qualifiée de moyenne et non de grave.

Dans l’exercice du pouvoir d’appréciation qui est le sien en la matière, incluant un contrôle de l’opportunité (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.3), la chambre de céans constate que la suspension prononcée par l’intimée tient adéquatement compte de ces circonstances.

Ainsi, la suspension du droit aux indemnités de 25 jours, prononcée par l’intimée, qui respecte le principe de proportionnalité, sera confirmée.

2.8 Compte tenu de ce qui précède, le recours est rejeté.

2.9 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA, dans sa version – applicable en l’occurrence – en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020 en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le