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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/752/2022

ATA/572/2022 du 31.05.2022 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/752/2022-FPUBL ATA/572/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 mai 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Yves Nidegger, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né en 1984, a été engagé par la Ville de Genève (ci-après : la ville) à compter du 1er juin 2012 en qualité d'ouvrier auxiliaire au B______ (ci-après : B______) à un taux de 100 %.

Son contrat d'auxiliaire a été renouvelé à deux reprises jusqu'à sa nomination en qualité d'employé au même poste à compter du 1er septembre 2014.

2) Il était initialement rattaché à l'unité C______. Dès le 1er juin 2017, il a été rattaché à l'unité D______.

3) À teneur de son cahier des charges, qu'il a signé le 24 octobre 2017, sa mission générale consiste à effectuer tant des travaux de collecte des déchets, de nettoyage de l'espace public que des tâches relatives à la viabilité hivernale.

Ces dernières comprennent notamment le déneigement, y compris manuel, le salage, le transport des sacs de sel et l'épandage de sel. L'employé, dans ce cadre, doit respecter ses périodes de piquet et se présenter au travail dans le respect des délais fixés. Il doit sécuriser les routes et rues et assurer les accès à la circulation des véhicules d'urgence, publics et privés.

4) Lors de son engagement, M. A______ était domicilié en ville, à la rue E______.

Le 13 juillet 2017, il a annoncé à son employeur déménager à F______, soit dans la zone de domiciliation autorisée. Le temps de trajet de son domicile à son travail était alors, en l'absence du Léman Express, de plus d'une heure, de sorte qu'il a été mis au bénéfice d'une place de stationnement surnuméraire à compter du 15 janvier 2018, ce qui est encore le cas. Le loyer mensuel de CHF 155.- est prélevé directement sur son salaire.

Le 1er mars 2021, il a déménagé à G______, localité également comprise dans la zone de domiciliation autorisée. Il a dès lors été mis au bénéfice d'une autorisation frontalière (permis G). Selon la ville, sur la base de données cartographique de Google Maps, le temps de trajet entre son domicile et le travail est de 28 à 35 minutes en voiture et de 57 minutes à 1h01 en transports publics. Selon le recourant, cette distance de 34.6 km, parcourue en voiture, lui prend entre 37 et 46 minutes, hors ralentissements.

5) Le 3 août 2021, M. A______ a sollicité une dérogation à l'obligation de domiciliation prévue par le statut du personnel de la ville (ci-après : SPVG ; LC 21 151) en vue d'élire domicile dans la commune H______ sise dans le département du Jura, en France.

Il a précisé vouloir acheter un bien immobilier pour l'utiliser comme résidence secondaire. L'établissement bancaire finançant cet achat ne pouvait toutefois lui octroyer un prêt que s'il s'agissait de sa résidence principale à compter du 22 janvier 2022. Il souhaitait aussi faire une demande à la caisse de pension pour l'encouragement à la propriété, ce qui n'était possible que s'il avait son adresse principale à cet endroit. Il était toujours ponctuel au travail et s'organiserait de manière à continuer à l'être. Il pourrait, en cas de besoin, loger chez ses parents domiciliés en ville.

6) Selon la ville, sur la base de données cartographiques de Google Maps, le temps de trajet entre H______ et le lieu de travail de M. A______, séparé d'une distance de 71 km, est de 1h04 à 1h20 en voiture. Il n'y a pas de possibilité d'emprunter des transports publics.

7) La demande de M. A______ a transité par la direction des ressources humaines (ci-après : DRH) avant d'être transmise, à sa demande, à la commission de domiciliation.

8) Il ressort du procès-verbal établi en marge de son audition par cette commission, le 7 octobre 2021, en visioconférence en raison de la situation sanitaire, que M. A______ avait confirmé qu'il souhaitait utiliser le bien immobilier en question comme résidence secondaire, soit pour y passer les week-ends et les vacances. Son établissement bancaire lui demandait toutefois d'y élire domicile. Afin de limiter les déplacements, sa compagne travaillant à I______, continuerait à résider à G______ durant la semaine, dans un petit appartement de location. La commune H______ était très mal desservie par les transports publics.

9) Par décision du 12 octobre 2021, la commission de domiciliation a rejeté la demande de dérogation domiciliaire.

M. A______ ne remplissait pas les conditions nécessaires pour bénéficier de la dérogation requise.

10) M. A______ a, le 19 octobre 2021, demandé au président de ladite commission de reconsidérer cette décision.

Son poste ne l'obligeait pas à travailler le week-end et il n'avait pas de piquets pendant l'année. Il était toujours disponible en cas d'urgence. Il avait cherché à faire les choses honnêtement et ne comprenait pas le refus, ce d'autant plus qu'il connaissait des personnes qui habitaient bien plus loin, sans déclarer officiellement leur domicile réel. L'acquisition de sa maison était en cours ; le compromis de vente avait été signé et il ne pouvait pas se permettre de revenir en arrière car l'annulation de la vente coûterait cher. Il voulait aller de l'avant en toute sérénité et demandait que son cas soit réétudié pour éviter des problèmes juridiques ou une perte d'emploi.

11) Par courrier du 2 novembre 2021, M. A______ a été convoqué pour une seconde audition par cette commission le 9 novembre suivant.

Toutefois, selon la ville, en raison de problèmes de connexion de son côté, il n'a pas pu être auditionné malgré de multiples tentatives.

12) Par décision du 10 novembre 2021, la commission de domiciliation a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération au motif d'absence de tout fait nouveau.

13) M. A______ a recouru auprès du conseil administratif (ci-après : CA) le 21 novembre 2021 contre cette décision.

Il souhaitait réellement établir sa résidence principale dans la commune en question, comme le démontraient les changements d'adresse faits auprès de ses fournisseurs de gaz et d'Internet. Il ne comprenait pas le refus de la commission puisque plusieurs de ses collègues habitaient dans des zones bien plus éloignées sans s'être vu opposer de refus. Son chef de service lui avait dit qu'il ne voyait aucun inconvénient à la distance séparant son lieu de travail de son domicile, l'important étant qu'il soit à l'heure.

Il a notamment joint à son recours un courrier du 19 octobre 2021 adressé au président de la commission de domiciliation dans lequel il précisait que le compromis de vente avait été signé en juillet 2021 et qu'il n'avait appris la condition de domiciliation principale dans le Jura demandée par la banque qu'après coup, en raison du prix d'achat la maison qui s'élevait à plus de EUR 600'000.-. En cas d'annulation de la vente, il devrait payer les 15 % de ce montant, ce qui risquait de le faire « couler » avec sa compagne.

14) Par décision du 9 février 2022, le CA a rejeté le recours.

La question de la recevabilité de son recours pour non-respect du délai pouvait souffrir de demeurer indécise puisqu'il devait être rejeté.

Il n'était pas contesté que le changement de domicile sollicité excédait largement la zone autorisée. Il n'était justifié par aucun motif autre que le confort personnel de M. A______ et son souhait d'acheter un bien immobilier dans la commune H______. Par ailleurs, si l'on devait se fonder sur ses déclarations lors de son audition du 7 octobre 2021, selon lesquelles il continuerait de résider dans la zone de domiciliation autorisée, mais n'avait besoin de se domicilier officiellement dans ladite commune qu'en raison de conditions imposées par sa banque, sa demande de domiciliation dérogatoire viserait en réalité à tromper un établissement bancaire sur son réel domicile principal, ce que la ville ne pouvait en aucun cas cautionner.

Si au contraire il avait réellement l'intention de résider dans la commune en question, en l'absence de motif autre que sa convenance personnelle, la commission ne pouvait que refuser sa demande. Le fait que l'acquisition de sa maison était déjà en cours lors du dépôt de sa demande n'y changeait rien. Il ne pouvait pas mettre l'autorité devant le fait accompli et contraindre la commission à lui octroyer la dérogation sollicitée.

Par ailleurs, au vu de l'urgence climatique et de la stratégie municipale mise en œuvre à cet égard par la ville, le CA ne pouvait octroyer une dérogation domiciliaire dans une localité n'étant accessible que par transport individuel motorisé et impliquant des trajets quotidiens de plus de deux heures aller-retour.

Ses allégations en lien avec certains de ses collègues qui seraient domiciliés hors zone, sans s'être vu opposer un refus de la commission, n'étaient pas étayées et contestées. Elles ne sauraient justifier l'octroi d'une dérogation en vertu du principe de l'égalité de traitement. Si des collègues étaient officiellement domiciliés dans la zone autorisée mais habitaient en réalité ailleurs, il s'agirait d'une situation illégale dont il ne pouvait se prévaloir pour obtenir une dérogation.

15) M. A______ a formé recours contre cette décision par acte expédié à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 7 mars 2022. Il a conclu à l'annulation de ladite décision et à ce qu'il soit dit qu'il était autorisé à prendre domicile en la commune H______.

Le 1er décembre 2021, il avait, avec sa compagne, acquis la « maison de campagne de ses rêves » dans cette commune et tous deux avaient décidé d'en faire le nouveau centre de leur projet de vie. Si le trajet de cette commune à son lieu de travail était supérieur de 30 km, soit 65 km au total, par rapport à celui de G______, il ne nécessitait pas plus de temps de déplacement, à savoir 47 minutes selon le parcours kilométrique de Google Maps. Sa compagne et lui, sensibles aux questions environnementales, avaient acquis un véhicule à propulsion au gaz naturel compressé (ci-après : CGN) émettant de 25 à 50 % de CO2 en moins qu'une propulsion classique, mais également beaucoup moins de micropolluants.

La délimitation de la zone d'obligation domiciliaire reposait sur une carte annexée au règlement d’application du statut du personnel de la Ville de Genève du 14 octobre 2009 (REGAP - LC 21 152.0) et non sur une loi au sens formel exigible en cas d'atteinte grave à la liberté d'établissement, comme en l'espèce vu la concrétisation du projet de vie du couple dans la maison de leurs rêves, garantie par l'art. 28 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101).

La pratique de la ville se caractérisait par une grande souplesse tant dans l'octroi des dérogations sollicitées hors zone que dans la mansuétude dont faisait preuve le CA à l'égard de ses cadres et de ses collaborateurs domiciliés de fait en dehors de la zone dérogatoire. Il citait nommément le cas de six employés de la ville, l'un, ouvrier de voirie, domicilié à J______, au bénéfice d'une dérogation, avec un temps de trajet de 45 minutes, un autre, également ouvrier de voirie, domicilié sur les hauts de I______, au bénéfice d'une dérogation, avec un temps de trajet de 55 minutes, un ouvrier logistique et manifestations, domicilié en France hors zone, sans dérogation formelle, avec un temps de trajet de 50 minutes, un ouvrier dans ce même service, domicilié hors zone, au bénéfice d'une dérogation, avec un temps de trajet de 45 minutes, un adjoint à la direction technique du génie civil engagé hors zone sans passer par la commission de domiciliation, et le chef du service technique, domicilié hors zone. Dans ces conditions, l'interdiction de principe qui lui était opposée violait celui de l'égalité de traitement et l'obligation de bonne foi de l'administration.

Son supérieur hiérarchique, Monsieur K______, lui avait confirmé qu'un déplacement de domicile H______ ne posait aucun problème au service « tant qu'il arrivait à l'heure », ce qui était toujours le cas. Au demeurant, sa fonction ne comprenait ni horaire du week-end, ni service de piquet supposant une disponibilité accrue ou une proximité particulière. Dans une situation qui nécessiterait une soudaine disponibilité, il serait en mesure d'y répondre en passant les nuits chez ses parents en ville.

Le mode de communication lors de son audition du 7 octobre 2021 avait été source d'une certaine confusion, des malentendus étant survenus dans l'esprit de la commission quant à ses motivations et à ses intentions concrètes. Il réitérait sa volonté de déplacer son domicile effectif dans le Jura.

Il saisissait mal, sous l'angle de l'intérêt public, en quoi la ville serait affectée par son déplacement de domicile dès lors que le CA autorisait expressément l'établissement de ses collaborateurs en des lieux aussi éloignés que le nord-ouest lausannois, sis à 89 km de Genève et nécessitant un temps de déplacement allant jusqu'à 1h12. Les critères de la distance et du temps de déplacement nécessaire ne sauraient ainsi être invoqués à l'appui d'une interdiction de domicile en un lieu sis à 65 km de distance nécessitant un trajet de 47 minutes, ce d'autant moins qu'il correspondait à celui, quasi identique, actuel. La décision attaquée n'invoquait d'ailleurs aucun intérêt public, se bornant à lui opposer des reproches d'ordre moral, à savoir sa « convenance personnelle » et l'option d'un projet de vie dans la nature, par essence mal pourvue en transports publics. Elle était en cela arbitraire, ce d'autant plus qu'il se déplaçait au moyen d'un véhicule à CGN et disposait d'une place de parking mise à disposition par son employeur.

La zone de domiciliation réglementaire comprenant un très grand nombre de communes situées en dehors du territoire de la ville, mais également du canton et même de la Suisse, on ne pouvait lui opposer le principe selon lequel un fonctionnaire devait être proche du citoyen.

En l'absence d'intérêt public, son intérêt propre, de ne pas être entravé dans l'exercice de sa liberté d'établissement, l'emportait sur toute autre considération. La décision attaquée violait donc le principe de la proportionnalité.

16) La ville a conclu, le 8 avril 2022, au rejet du recours.

Elle dressait l'historique de la domiciliation des fonctionnaires de la ville depuis l'ancien statut du 15 juillet 1986, et sa politique en matière de développement durable depuis 1995, en particulier sous l'angle de la mobilité.

La demande de domiciliation dérogatoire constituait depuis le départ une démarche abusive de la part de M. A______, dans la mesure où il ressortait de ses déclarations initiales, soit de sa demande du 3 août 2021 puis de son audition devant la commission de domiciliation le 7 octobre 2021, qu'il ne prévoyait pas d'habiter effectivement dans la commune H______. Ce n'était que dans son recours du 21 novembre 2021 qu'il avait changé sa version des faits. Il fallait en retenir que sa demande de dérogation avait pour seul et unique but de tromper son établissement bancaire et sa caisse de pension, une démarche abusive que la ville ne pouvait cautionner.

Si la chambre administrative devait par impossible retenir qu'il avait la volonté de s'établir réellement dans cette commune, la dérogation sollicitée devrait dans tous les cas être rejetée. Rappelant l'autonomie communale, soit la grande liberté de décision des communes concernant les rapports de service qu'elles entretenaient avec leurs agents, elle était autorisée à définir librement les modalités concernant les rapports de service, ce qu'elle avait notamment fait par l'adoption du SPVG.

M. A______ soutenait qu'il souhaitait élire domicile dans une commune située largement au-delà de la zone de domiciliation autorisée, soit à 71 km de son travail et à plus de 25 km des communes les plus proches de la zone autorisée, notamment celle de L______. Le temps de déplacement entre cette commune et son lieu de travail était plus que doublé par comparaison à son domicile à G______. Par ailleurs, il n'y avait aucun moyen de transport public pour se rendre H______ à Genève. Cette situation ne constituait déjà, pour ce seul motif, pas un « cas limite » ouvrant la voie à une éventuelle dérogation, ce d'autant plus qu'il n'avait fait valoir aucun motif autre que son souhait d'acheter un bien immobilier dans la commune en question. Il avait mis la commission de domiciliation devant le fait accompli, puisque l'acquisition de sa maison était déjà en cours lors du dépôt de sa demande, le compromis de vente ayant été signé en juillet 2021, alors que sa demande datait du mois d'août 2021. Il avait ce faisant violé l'art. 94 al. 3 REGAP.

Dans la mesure où sa demande visait son établissement au-delà de la zone de domiciliation autorisée en France, et non en Suisse, il ne pouvait pas se prévaloir de la liberté d'établissement de l'art. 24 Cst. S'il devait par impossible être retenu qu'il pouvait se prévaloir de cette garantie constitutionnelle, son grief d'une violation devrait être écarté. La restriction imposée reposait sur une base légale, les art. 85 al. 1 SPVG et 94 REGAP et son annexe dûment publiée au recueil officiel de la législation genevoise (SILG), était fondée sur un intérêt public, à savoir l'exigence de sa présence à l'occasion des piquets hivernaux pour assurer la sécurité publique, étant relevé qu'un hébergement par ses parents n'était pas une solution viable sur le long terme. En étant domicilié à G______, à 1h01 en transports publics, la ville avait la garantie qu'il pourrait en tout temps se rendre sur son lieu de travail pour accomplir ses tâches en période hivernale.

La jurisprudence n'avait pas encore eu à se prononcer sur le second motif d'intérêt public pertinent en l'espèce, à savoir la protection de l'environnement et de la santé de la population. En tout temps, l'obligation de domicile des membres de son personnel s'était inscrite dans la ligne poursuivie par le CA en cette matière, puisque des domiciles éloignés du lieu de travail étaient générateurs de mouvements pendulaires, dispendieux en énergie et polluants, et contribuant à encombrer encore davantage les rues de la ville. Avec ses 4'200 collaborateurs, elle avait certainement un rôle à jouer à cet égard et, en tant qu'employeur public, devait être exemplaire sur la question. Le maintien de la zone de domiciliation autorisée et l'octroi uniquement exceptionnel de dérogations à cette obligation s'inscrivait naturellement dans le troisième axe stratégique climatique adopté en février 2022 concernant la mobilité et composé de six objectifs, dont l'un consistant à établir un plan de mobilité ambitieux pour l'administration communale visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) liés aux déplacements pendulaires et dans le cadre professionnel. Au vu de l'urgence climatique et de cette stratégie municipale, il était parfaitement légitime de considérer qu'elle ne pouvait octroyer de dérogation domiciliaire à M. A______ dans une localité qui n'était accessible que par un transport individuel motorisé et impliquant des trajets quotidiens de plus de deux heures aller-retour.

Face à ces importants intérêts publics, le faible intérêt privé de M. A______ à pouvoir s'établir dans la commune en question ne pouvait l'emporter. Il n'était âgé que de 37 ans et avait encore de nombreuses années de vie active devant lui, soit autant à effectuer des trajets pendulaires quotidiens de plus de deux heures. Le fait qu'il se soit acheté une voiture à CGN ne pouvait faire pencher la balance des intérêts à son avantage, les 20 % de moins de CO2 émis par rapport à une voiture classique n'étant que relatifs.

Si plus de vingt ans plus tôt elle avait fait preuve d'une certaine souplesse, elle avait informé l'ensemble de son personnel, le 1er mars 2004, de sa décision de revenir à une application stricte des dispositions statutaires et réglementaires et de n'accorder des dérogations que dans des situations exceptionnelles et à la condition supplémentaire que l'éloignement du domicile ne porte pas préjudice à l'accomplissement des devoirs de service. La situation des collègues de M. A______ ne pouvait être considérée comme semblable, de sorte qu'il ne pouvait s'en prévaloir pour fonder une quelconque violation du principe de l'égalité de traitement. En effet, seuls deux des employés cités étaient au bénéfice d'une dérogation domiciliaire. Le premier, domicilié à J______, l'avait obtenue en 2011 déjà, alors que les préoccupations écologiques n'étaient pas aussi prédominantes. Par ailleurs et surtout, cette commune se trouvait juste à côté de la zone de domiciliation autorisée et le temps de trajet jusqu'au lieu de travail était de 35 à 50 minutes, soit près de la moitié du temps que devrait faire M. A______. Le second était au bénéfice d'une telle dérogation depuis 2006. Deux autres employés cités étaient domiciliés dans le canton de Genève. Le cinquième était domicilié dans la zone autorisée. Le sixième avait demandé une dérogation qui avait récemment été refusée par la commission de domiciliation dont la décision ne serait pas produite pour des raisons de protection des données de l'intéressé. Cette décision faisait expressément référence à la déclaration d'urgence climatique du CA de février 2022. Au vu de l'engagement de longue date du CA dans les questions environnementales, de plus en plus marqué ces dix dernières années, la commission de domiciliation refusait systématiquement, sauf circonstances exceptionnelles, les demandes de dérogation impliquant l'usage quotidien d'un véhicule individuel motorisé pour une longue distance.

La décision ne pouvait être considérée comme étant entachée d'arbitraire, le simple souhait d'acheter un bien immobilier en dehors de la zone de domiciliation ne pouvant constituer un motif justificatif. Des situations exceptionnelles justifiant une dérogation pouvaient consister en l'acquisition d'une propriété antérieurement à l'engagement de l'employé, à des contraintes familiales graves ou à des répercussions disproportionnées pour l'intéressé, ce qui n'était nullement la situation de M. A______.

Le principe de la bonne foi n'avait pas été violé. M. A______ ne pouvait en effet se prévaloir d'aucune assurance qu'il aurait reçue de la ville sur laquelle il aurait réglé sa conduite. Il avait été parfaitement informé depuis son engagement de son obligation de domiciliation dans la zone autorisée. Le fait qu'il se soit vu octroyer une place de parking ne signifiait pas pour autant qu'elle tolèrerait un élargissement de la zone de domiciliation autorisée.

17) Dans une brève réplique du 11 mai 2022, M. A______ a relevé que la ville reconnaissait qu'un tiers de ses collègues proches, constituant l'échantillon qui lui était venu spontanément à l'esprit sans recherches particulières, était effectivement domicilié hors zone avec son accord. S'y ajoutaient deux cas supplémentaires, l'un sur lequel il n'avait pas encore pu se déterminer en raison d'une confusion et le second dont les enquêtes démontreraient qu'il avait été engagé dès le début par la ville en toute connaissance de cause d'un domicile hors zone, dans la commune de Les Gets en Haute-Savoie, lequel avait parfaitement été toléré jusqu'à ce qu'une dénonciation ne provoque la procédure évoquée par la ville. Le concernant, le délai de régularisation étant largement dépassé, la situation irrégulière devait également être considérée comme tolérée.

Il était de notoriété publique que parmi les collaborateurs de la ville, les domiciles annoncés au fichier RH n'étaient qu'imparfaitement confirmés par la matérialité des faits. Le bassin naturel de recrutement de la ville s'étendait en effet largement sur la France et le canton de Vaud et ne se laissait que difficilement concilier avec les exigences strictes affichées en matière de domicile.

Il persistait à dire qu'il entendait faire du bien acquis H______ la résidence principale de son couple.

18) Les parties ont été informées, le 12 mai 2022, que la cause était gardée à juger.

19) La teneur des pièces figurant à la procédure sera pour le surplus reprise dans la partie en droit dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant n'a nullement formellement conclu préalablement notamment à l'audition de témoins. Il a néanmoins offert de prouver, dans le corps de son état de faits puis sa réplique, certains faits par l'audition de témoins, en particulier à l'appui de son grief d'une violation de l'égalité de traitement.

a. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour la personne concernée de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2). Ce droit n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.2). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1) ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l'espèce, les écritures des parties et les pièces produites par leurs soins ont permis d'apporter à la chambre de céans les éléments suffisants pour lui permettre de trancher le litige en toute connaissance de cause. Le recourant a en particulier eu l'occasion de s'exprimer dans sa réplique sur les allégations de l'autorité intimée quant à la situation de collègues de la ville qu'il mettait en avant pour se plaindre d'une violation du principe de l'égalité de traitement dans son cas. La chambre de céans dispose pour le surplus d'un dossier complet lui permettant de statuer en connaissance de cause.

3) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de la ville opposant un refus à la demande du recourant, employé de B______, de domiciliation dans la commune H______, dans le Jura français.

4) a. Selon l'art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (al. 1 let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n'ont toutefois pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l'espèce (al. 2).

b. Les communes disposent d'une grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu'elles entretiennent avec leurs agents. Ainsi, l'autorité communale doit bénéficier de la plus grande liberté d'appréciation pour fixer l'organisation de son administration et créer, modifier ou supprimer des relations de service nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci, questions relevant très largement de l'opportunité et échappant par conséquent au contrôle de la chambre de céans (art. 61 al. 2 LPA). Ce pouvoir discrétionnaire ne signifie pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, dès lors qu'elle ne peut ni renoncer à exercer ce pouvoir, ni faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/430/2020 du 30 avril 2020 consid. 5b et la référence citée). Il en découle que le juge doit contrôler que les dispositions prises se tiennent dans les limites du pouvoir d'appréciation de l'autorité communale et qu'elles apparaissent comme soutenables (ATA/608/2020 du 23 juin 2020 consid. 4b ; ATA/983/2018 du 25 septembre 2018 consid. 3d).

5) a. En tant qu'employé de la ville, le recourant est soumis au SPVG ainsi qu'au REGAP.

b. Selon l'art. 85 SPVG, les employés doivent être domiciliés dans le canton de Genève (al. 1). Le CA peut prévoir des dérogations (al. 2). Lorsque les besoins du service l’exigent, un lieu de résidence déterminé peut être imposé aux employés concernés (al. 3).

c. L'art. 94 REGAP prévoit que les membres du personnel ont le devoir d’annoncer leur domicile réel à la DRH (al. 1). En application de l’art. 85 al. 2 SPVG, est admise sans autorisation spéciale une domiciliation hors du canton de Genève dans la zone définie par la carte annexée (al. 2). Toute domiciliation hors du territoire genevois et hors de la zone visée à l’al. 2 n’est possible qu’une fois obtenue l’autorisation formelle de la commission de domiciliation, après avoir auditionné la personne concernée. En cas de décision négative, une voie de recours est ouverte auprès du CA (al. 3). La commission de domiciliation est composée du secrétaire général de la ville, qui la préside, d’un représentant du collège des cadres, d’un représentant du collège des autres membres du personnel, ainsi que d’un représentant de la DRH (al. 4).

d. Selon l'annexe au REGAP, une carte, la zone de domiciliation valable à compter du 19 mars 2020 comprend, sur la rive gauche du Rhône, aux confins à l'est, Thonon-les-bains, au sud-est Bonneville, Annecy, la Roche-sur Fauron, au sud, Cercier. Au sud-ouest, sur la rive droite du Rhône, figurent Bellegarde-en-Valserine et, le long du Jura, notamment Lélex, L______, G______, Saint-Cergue, Arzier, Bassins, Saint-Georges. Le long du lac Léman, rive droite toujours, elle comprend les localités d'Allaman, Morges, et un peu en retrait, Lonay et Renens. Elle englobe enfin I______ apparemment dans sa globalité.

Cette zone a été définie par l'accord conclu en juin 2006 entre la direction générale de l'administration municipale, la commission du personnel et l'association des cadres de l'administration municipale (ci-après : l'accord). À cette occasion, la zone de domiciliation a été élargie, notamment en raison de la pénurie de logements sévissant sur le territoire genevois. La délimitation de la zone de domiciliation a été réfléchie et définie après une étude établie par un prestataire externe analysant les conséquences pour l'administration municipale d'une autorisation pour les membres du personnel d'être domiciliés hors du canton de Genève. L'analyse était fondée sur quatre indicatifs de productivité au travail liée à la mobilité, à savoir la perte de temps de travail, la santé des collaborateurs, la garantie d'accès au lieu de travail et l'impact environnemental. Cette étude était arrivée à la conclusion que plus la dispersion de l'habitat des collaborateurs et l'usage de la voiture étaient grands, plus cela induisait des coûts pour l'employeur.

Il ressort de l'art. 2 dudit accord, que la zone de domiciliation hors du canton de Genève a été définie de manière précise et comprend trois zones, à savoir celle comprise dans les deux cercles concentriques définis en calculant le plus grand rayon possible de l'extrémité de la ville jusqu'à celle de la commune de Chancy, respectivement depuis l'extrémité de la ville jusqu'à celle de Céligny (ch. 1). La deuxième zone comprend toutes les communes du canton de Vaud ainsi que de France voisine desservies par des transports publics permettant d'accéder en tout temps à la ville, à la condition que la durée du trajet soit inférieure ou égale à 45 minutes en tenant compte des dessertes et de la fréquence des transports publics (ch. 2). La troisième zone comprend la totalité du territoire des districts du canton de Vaud et des communes de France voisine à la condition que 75 % de leur territoire soient déjà considérés comme une zone de domiciliation autorisée hors du canton de Genève, conformément aux deux définitions précédentes (ch. 3).

Selon l'art. 7 de l'accord, sur la base de l'ancien SPVG du 15 juillet 1986, la domiciliation hors du territoire genevois et de la zone autorisée devait faire l'objet d'une demande d'autorisation formelle au CA conformément à l'art. 28 aSPVG, étant précisé que les dérogations n'étaient accordées qu'à titre exceptionnel. La commission de domiciliation ferait office d'autorité de conciliation facultative, la décision formelle devant être prise par le CA.

6) En l'espèce, le recourant a annoncé à la DRH son changement d'adresse à G______ le 18 janvier 2021 et a été mis au bénéfice d'un permis G le 2 mars 2021. Le recourant ne remet pas en cause le fait qu'en prenant les transports publics, son lieu de vie à G______ était à environ une heure de son lieu de travail, et par la route, à une cinquantaine de minutes au maximum, ni que cette commune figure dans la zone de domiciliation autorisée aux employés de la ville de Genève, selon la carte annexée au REGAP.

Le 3 août 2021, il a présenté une demande de dérogation domiciliaire, pour une résidence secondaire dans une commune du Jura français, ne figurant pas sur la carte précitée. Toutefois, sa banque lui demandait, pour obtenir le crédit nécessaire, d'y avoir sa résidence principale à partir de janvier 2022, ce qui était aussi une condition du retrait partiel de son deuxième pilier. Sa compagne et lui souhaitaient ardemment un espace de bien-être et d'apaisement après une semaine de travail et l'opportunité de construire une famille. Cette commune se trouvait à 50 minutes de son lieu de travail et à 10 minutes (sic) de L______, commune figurant sur la liste de l'autorité intimée autorisée à l'habitation principale. Il avait toujours été ponctuel et à l'heure au travail et pourrait s'organiser, si besoin, avec ses parents qui habitaient à Genève, pour y loger « pendant la semaine » si cela lui permettait d'avoir une réponse positive à sa demande.

Selon les données de Google Maps qu'il a produites, le trajet entre son adresse dans cette commune et son lieu de travail, via l'autoroute A 40, est de 71.5 km pour 1h04. Via l'autoroute A 404 et l’autoroute A 40, il est de 108 km pour 1h19 de trajet et via la départementale D 1206 de 1h20 pour 69.5 km. Le recourant ne remet pas en cause le fait que les transports publics ne relient pas ces deux points, pas plus que la commune où est sis le bien immobilier convoité ou acquis se trouve hors de la zone de domiciliation autorisée, d'où la demande de dérogation.

Si la requête du recourant a été préavisée favorablement par la direction du service voirie ville propre (VVP), selon courrier de transmission de la DRH à la commission de domiciliation du 24 août 2021, celle-ci, ayant seule la compétence en la matière sous réserve d'un recours auprès du CA, a, le 12 octobre 2021, conclu que le recourant ne remplissait pas les conditions nécessaires pour bénéficier d'une dérogation. Il ressort du procès-verbal de la séance du 7 octobre 2021, intervenue par visioconférence, que le recourant avait indiqué solliciter une dérogation domiciliaire pour élire domicile H______. Il a en revanche été mis dans sa bouche, une fois la connexion établie, qu'il « rêv[ait] d'une résidence secondaire » et que l'organisme bancaire lui demandait d'élire cette adresse comme domicile principal pour financer son acquisition. Afin de limiter les déplacements, comme sa compagne travaillait à I______, ils allaient louer un petit appartement à G______ afin d'y avoir un pied à terre. Le recourant avait pour velléité d'être en règle avec l'organisme bancaire, c'était « purement administratif ». Le recourant avait confirmé que la commune était très mal desservie en transports.

Dans la mesure où les propos rapportés dans le procès-verbal du 7 octobre 2021 correspondent aux motifs présentés par le recourant à l'appui de sa demande du 24 août 2021, il y a lieu de retenir qu'au début du mois d'octobre 2021, il n'entendait pas prendre une résidence principale dans la commune du Jura français en cause. En revanche, telle est bien la volonté affichée à compter du 21 novembre 2021, dans son recours formé auprès du CA contre la seconde décision négative de la commission de domiciliation. Il a alors cherché à démontrer sa résidence principale dans la commune en question par des changements d'adresse annoncés auprès de ses fournisseurs de gaz et d'Internet. Dans la mesure où le CA disposait de cette information et a tranché la question en connaissance de cause, il sera retenu qu'en définitive le fondement de la demande du recourant tient à une volonté de se domicilier dans la maison qu'il a acquise dans le Jura français.

7) Le recourant se plaint d'une violation du principe de la liberté d'établissement.

a. Selon l'art. 24 Cst., les Suisses et les Suissesses ont le droit de s'établir en un lieu quelconque du pays (al. 1). Ils ont le droit de quitter la Suisse ou d'y entrer (al. 2). La liberté d'établissement enjoint ainsi à la Confédération, aux cantons et aux communes de permettre à tout ressortissant suisse de s'établir sur leur territoire, soit pour y constituer un domicile, soit pour y séjourner, et a pour but de promouvoir et de garantir la libre circulation des personnes sur l'ensemble du territoire national (ATF 135 I 233 consid. 5 ; 131 I 266 consid. 3 ; 128 I 280 consid. 4.1.1 ; ATA/597/2016 du 12 juillet 2016 consid. 3a).

b. En l'espèce, le recourant comptant s'établir en France, il ne peut se prévaloir de cette garantie constitutionnelle.

Son grief sera rejeté, sans qu'il ne soit nécessaire d'analyser les conditions d'une atteinte à ce droit constitutionnel.

8) Le recourant soutient que la décision attaquée serait arbitraire et violerait le principe de proportionnalité.

a. Le principe de proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l’aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 142 I 76 consid. 3.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_360/2019 du 15 janvier 2020 consid. 3.5).

b. En l'espèce, l'autorité intimée peut se prévaloir de trois motifs justifiant qu'elle n'accorde pas de dérogation à un employé de B______ voulant s'établir à plus de 70 km de son lieu de travail par l'itinéraire le plus court, pour un trajet en voiture de plus d’une heure, le plus long comptant plus de 100 km, pour une durée de route de pratiquement 1h20. La commune du Jura français concernée est éloignée de 25 km de la commune la plus proche figurant sur la zone autorisée, L______. Le trajet emprunté par le recourant n'est pour l'essentiel pas desservi par les transports publics. Il s'agit là de deux paramètres en contradiction avec sa politique de protection environnementale ayant encore récemment connu une accélération étant donné l'urgence climatique. De plus et contrairement à ce que soutient le recourant, sa tâche, conformément à son cahier des charges, l'amène à devoir effectuer des piquets en hiver pour procéder au déblaiement de neige et au salage nécessaires ou autres tâches de viabilité hivernale. À cet égard, comme justement relevé par l'autorité intimée, le fait que ses parents habitent en ville et puissent l'héberger ne suffit pas, à long terme, à pallier les inconvénients dus aux conditions météorologiques hivernales.

La zone de domiciliation autorisée s'avère certes vaste, ce qui a priori peut aller dans le sens inverse de la politique environnementale voulue par la ville, mais a été mûrement réfléchie, notamment en lien avec la question de la desserte par les transports publics. Il en est ainsi en particulier de la région de I______ dont se prévaut le recourant, laquelle est largement reliée au canton de Genève par chemin de fer.

Ainsi, étant rappelé le large pouvoir d'appréciation et l'autonomie dont jouissent les communes dans leurs rapports avec leurs employés, il apparaît que le refus opposé en l'espèce au recourant de s'établir en dehors de la zone autorisée, par le biais d'une dérogation, qui doit donc par essence rester exceptionnelle, répond à d'importants intérêts publics que sont la garantie d'un service public efficace de viabilité hivernale et l'enjeu environnemental.

L'intérêt privé que lui oppose le recourant et qui n'a trait qu'à son seul souhait de s'y installer avec sa compagne, respectivement d'ordre financier pour le cas où il devrait verser le 15 % du montant du prix d'acquisition de la maison convoitée s'il devait ne pas en devenir propriétaire, ne suffit pas à réaliser des circonstances exceptionnelles auxquelles une dérogation devrait lui être accordée. En tout état, le recourant ne saurait reporter sur l'autorité intimée la responsabilité d'un potentiel dommage financier, dans la mesure où il l'a placée devant le fait accompli, alors que l'art. 85 al. 3 REGAP indique spécifiquement que l'employé n'a la possibilité de s'établir hors de la zone autorisée qu'une fois la dérogation obtenue.

L'acquisition par le recourant d'une voiture moins polluante, émettant tout de même du CO2, ne change rien à son temps de déplacement ni au fait que la saison hivernale s'avère problématique pour ses déplacements en l'absence de transports publics pour l'essentiel du trajet, étant de plus relevé que la commune H______ culmine à 960 mètres. Il en est de même de la place de parking qui lui a été mise à disposition dans la mesure où il résidait à G______. Ceci ne lui donne pas pour autant droit à une dérogation pour une domiciliation hors de la zone autorisée.

Ainsi, le refus opposé au recourant de s'établir dans la commune du Jura français en cause est la seule mesure qui soit apte à produire les résultats escomptés, qui ne peuvent être atteints par une mesure moins incisive. Par ce refus, l'autorité intimée n'est pas allée au-delà du but visé par l'exigence d'une domiciliation dans une zone autorisée et a valablement tenu compte des intérêts privés et publics en présence.

C'est ainsi sans arbitraire ni violation du principe de proportionnalité que l'autorité intimée a refusé la dérogation sollicitée.

Ce grief sera rejeté.

9) Le recourant se plaint d'une violation du principe d'égalité de traitement.

a. Une décision viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 144 I 113 consid. 5.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3).

b. Le principe de la légalité de l'activité administrative (art. 5 al. 1 Cst.) prévaut en principe sur celui de l'égalité de traitement. En conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité devant la loi lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d'autres cas. Cela présuppose cependant, de la part de l'autorité dont la décision est attaquée, la volonté d'appliquer correctement à l'avenir les dispositions légales en question. Le citoyen ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'autorité persévérera dans l'inobservation de la loi. Il faut encore que celle-ci n'ait pas respecté la loi selon une pratique constante, et non pas dans un ou quelques cas isolés, et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant n'impose de donner la préférence au respect de la légalité (ATF 139 II 49 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_338/2019 du 24 juin 2020 consid. 3.1.2 et les références citées). C'est seulement lorsque toutes ces conditions sont remplies que le citoyen est en droit de prétendre, à titre exceptionnel, au bénéfice de l'égalité dans l'illégalité (arrêts du Tribunal fédéral 2C_949/2019 précité consid. 6.3 ; 6B_921/2019 du 19 septembre 2019 consid. 1.1).

c. En l'espèce, le recourant se prévaut des situations de six ou sept autres employés pour solliciter l'octroi d'une dérogation. Il n'amène toutefois aucune preuve tangible d'une volonté avérée de la ville de ne pas respecter la loi. Il apparaît au contraire qu'une fois de potentielles situations non conformes connues, dont par dénonciation, la ville prend les mesures nécessaires pour y mettre un terme. Par ailleurs, la ville explique de manière crédible que, vu en particulier l'engagement du CA sur les questions environnementales, la commission de domiciliation refuse désormais systématiquement les demandes de dérogations, sauf circonstances exceptionnelles, non réalisées en l'espèce.

Ce grief sera également rejeté.

10) Le recourant considère que l'autorité intimée a violé le principe de la bonne foi.

a. Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 7.1).

b. À certaines conditions, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_626/2019 du 8 octobre 2020 consid. 3.1 ; 2C_136/2018 du 24 septembre 2018 consid. 3.2). Conformément au principe de la confiance, qui s'applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent recevoir le sens que l'administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 2.1).

c. Le droit à la protection de la bonne foi peut également être invoqué en présence simplement d'un comportement de l'administration, notamment en cas de silence de l'autorité dans une situation de fait contraire au droit, susceptible d'éveiller chez l'administré une attente ou une espérance légitime (ATF 129 II 361 consid. 7.1). Entre autres conditions, l'autorité doit être intervenue à l'égard du citoyen dans une situation concrète et celui-ci doit avoir pris, en se fondant sur les promesses ou le comportement de l'administration, des dispositions qu'il ne saurait modifier sans subir de préjudice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_628/2017 du 9 mai 2018 consid. 2.2).

d. La précision que l'attente ou l'espérance doit être « légitime » est une autre façon de dire que l'administré doit avoir eu des raisons sérieuses d'interpréter comme il l'a fait le comportement de l'administration et d'en tirer les conséquences qu'il en a tirées. Tel n'est notamment pas le cas s'il apparaît, au vu des circonstances, qu'il devait raisonnablement avoir des doutes sur la signification du comportement en cause et se renseigner à ce sujet auprès de l'autorité (ATF 134 I 199 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2015 du 6 août 2015 consid. 5.1).

e. En l'espèce, le recourant n'a reçu à aucun moment l'assurance de la commission de domiciliation, seule compétente pour en décider, que la dérogation demandée serait accordée. À cet égard, le fait que son supérieur hiérarchique lui aurait affirmé qu'un déplacement de domicile H______ ne poserait aucun problème au service « tant qu'il arrivait à l'heure » n'engagerait nullement ladite commission. Comme déjà dit, il a mis l'autorité devant le fait accompli en faisant l'acquisition d'une maison apparemment en été 2021 déjà, alors même que ladite commission n'avait pas encore statué, puisqu'elle l'a fait pour la première fois en octobre 2021.

La mise à disposition du recourant d'une place de parking sur son lieu de travail, alors qu'il était domicilié dans une commune sise dans la zone autorisée, ne signifie pas pour autant que l'autorité intimée accepte, en l'absence de circonstances exceptionnelles, une dérogation à l'obligation de résidence dans ladite zone, obligation connue du recourant depuis son engagement.

Entièrement mal fondé, son recours sera rejeté.

11) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à sa charge (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (Art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 mars 2022 par Monsieur A______ contre la décision de la Ville de Genève du 9 février 2022 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Nidegger, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mmes Lauber et McGregor, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :