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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/143/2022

ATA/515/2022 du 17.05.2022 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/143/2022-FORMA ATA/515/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 mai 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Xavier Panchaud, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Monsieur A______ a été immatriculé à l’Université de Genève
(ci-après : l’université) et admis au programme de maîtrise interdisciplinaire en droits de l’enfant (ci-après : MIDE) dispensé par le centre interfacultaire en droits de l’enfant (ci-après : CIDE) à la rentrée académique 2020 / 2021.

2) Lors de la session d’examen de janvier – février 2021, M. A______ a passé sept évaluations. Il a échoué à quatre d’entre elles. Il a notamment obtenu 2,5 en droit pénal des mineurs. N’ayant pas acquis le minimum de quinze crédits ECTS nécessaires pour être admis aux séminaires interdisciplinaires et au projet de groupe du deuxième semestre, il a choisi de se présenter aux examens de rattrapage.

3) Par décision du 21 septembre 2021, M. A______ a été éliminé du MIDE. Il avait obtenu la note de 3,5 en droit pénal des mineurs lors de la session d’août – septembre 2021.

4) M. A______ a formé opposition le 15 octobre 2021. Il ne souhaitait pas justifier son échec par la situation liée au Covid-19, ni sa maladie chronique établie par certificat médical qu’il joignait en annexe, ni même par l’accident grave subi en juin 2021. Il avait été performant dans les trois autres examens passés lors de la session d’août – septembre 2021. Toutefois, les conditions de passation de l’examen, à savoir un oral de quinze minutes, à distance via le logiciel « zoom », n’étaient pas optimales. Suite à un problème technique, seul le mode audio fonctionnait. Le manque d’interactions visuelles avec l’enseignant l’avait déstabilisé, impactant sa réflexion et sa réactivité.

5) Consulté, l’enseignant responsable du cours de droit pénal des mineurs a indiqué ne pas avoir de raisons de revenir sur la situation académique de l’étudiant. Le problème technique était sans rapport avec la note attribuée. La situation aurait été différente s’il s’était agi d’un problème de son. Durant l’examen, M. A______ n’avait pas évoqué rencontrer de difficultés impliquant que la poursuite de son oral lui devienne impossible.

6) À sa demande, M. A______ a été reçu en entrertien par le directeur du CIDE, en présence d’une maître assistante et de la responsable administrative du CIDE. Il avait validé vingt-huit crédits sur les trente nécessaires. Son seul échec portait sur l’examen considéré. Il avait ressenti un stress important dû aux modalités de son évaluation.

7) Par décision du 15 décembre 2021, le directeur du CIDE a rejeté l’opposition. Ses arguments avaient été transmis au collège des professeurs qui avait émis un préavis défavorable confirmant la décision d’élimination.

8) L’exmatriculation de M. A______ a été prononcée le 23 décembre 2021.

9) Par acte du 14 janvier 2022, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision sur opposition. Il a conclu à sa reconsidération.

Il avait obtenu vingt-huit des trente crédits nécessaires. Aucune des circonstances difficiles qu’il avait vécues n’avaient été prises en compte dans son opposition. Il produisait un certificat médical attestant d’une maladie chronique et rappelait avoir été victime d’un accident grave en juin 2021. L’impact des mesures Covid sur l’enseignement devait aussi être retenu. Il maîtrisait le droit pénal des mineurs et ses notes avaient été presque suffisantes. Il avait échoué en raison de l’absence d’interactions visuelles avec le professeur. La décision était disproportionnée dès lors qu’elle privait un étudiant étranger, âgé de 31 ans, qui avait fourni d’importants sacrifices familiaux, financiers et professionnels, d’obtenir son master. L’exclure aurait des répercussions négatives tant sur
lui-même que sur le continent africain, vu son origine marocaine, contredisant ainsi la politique inclusive poursuivie par la Suisse en matière d’enseignement. La décision devait être reconsidérée pour des motifs humanitaires. Il était disposé à ce que ses compétences soient réévalués.

10) L’université a conclu au rejet du recours.

Elle n’avait pas pris en compte la maladie chronique, l’accident grave du mois de juin 2021 et l’impact de la situation sanitaire sur le cursus d’études de l’étudiant, dès lors que celui-ci avait indiqué, dans son opposition, écarter tout lien entre son échec à l’examen et ces éléments. Même à les prendre en considération, aucun des trois ne remplissait les conditions de circonstances exceptionnelles au sens du statut de l’université du 22 juin 2011 (approuvé par le Conseil d’État le 27 juillet 2011 ; ci-après : le statut).

Par ailleurs, les conditions de passation de l’examen du droit pénal des mineurs ne justifiaient pas la reconsidération de la note, conformément au préavis du professeur concerné.

11) Dans sa réplique, rédigée sous la plume d’un conseil, le recourant a formellement conclu à la nullité de la décision sur opposition du directeur du CIDE, subsidiairement à son annulation. La note de 4,0 devait lui être octroyée en droit pénal des mineurs. Plus subsidiairement, il devait pouvoir répéter ledit examen dans un délai raisonnable. Plus subsidiairement encore, la cause devait être renvoyée à l’université pour complément d’instruction. Préalablement, il proposait l’audition du chargé de cours et de l’assistante, une comparution personnelle des parties ainsi que la production du préavis du collège des professeurs du CIDE.

La décision sur opposition avait été prise par une autorité incompétente. Il appartenait au collège des professeurs et non au directeur du CIDE de décider.

Si l’opposition avait dûment été soumise à l’enseignant responsable, elle ne l’avait pas été à l’assistante qui avait fonctionné comme experte. Celle-ci devait être invitée à se prononcer.

L’université avait violé l’art. 28 al. 4 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’université du 16 mars 2009 (RIO-UNIGE, révisé le 25 mars 2015). Le document « expertise d’examen » était gravement lacunaire. On ignorait si le candidat était francophone, le sujet de l’examen, l’évaluation quant à la forme attribuée à l’étudiant, celle quant au fond, la note de l’expert, celle du professeur et la note finale. De plus, l’heure de sortie était erronée. Le procès-verbal du déroulement de l’examen ne permettait pas de comprendre véritablement quelles questions avaient été posées par l’enseignant et quelles réponses avaient été données par l’étudiant.

Le CIDE avait, par courriel du 2 juillet 2021, informé les étudiants des modalités d’examen via le logiciel « zoom ». Il avait mentionné que l’utilisation de la caméra était obligatoire et essentielle à son bon déroulement. Des tests informatiques préalables étaient possibles, auxquels M. A______ s’était livré. En maintenant l’examen, malgré les problèmes techniques visuels, il avait été procédé de façon manifestement contraire aux modalités fixées par le CIDE. L’oral s’était donc déroulé de façon irrégulière et contraire aux prescriptions du CIDE. Du fait du rapport hiérarchique de subordination, l’étudiant n’avait pas été en capacité de contester auprès de l’enseignant.

L’élimination du master était due à un demi-point sur le seul examen de droit pénal des mineurs, cours le moins valorisé en crédit ECTS de tout le cursus. Il était de langue maternelle arabe et souffrait d’une maladie chronique inflammatoire grandement liée au stress. Dans ces conditions, l’art. 58 al. 4 du statut avait été violé.

La décision d’exclusion était disproportionnée et contraire à l’art.  5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101). Elle devait être annulée.

12) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 43 al. 2 de la loi sur l’université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 91 du statut ; art. 36 al. 1 RIO-UNIGE ; art. 19 al. 2 du règlement d'études de la maîtrise universitaire interdisciplinaire en droits de l’enfant adopté par le rectorat lors de la séance du 6 juin 2016 (ci-après : RE).

2) Le présent litige est dirigé contre la décision d’élimination du recourant de la MIDE.

Le recourant est notamment soumis à la LU, au statut, au RIO-UNIGE, au RE ainsi qu’au plan d’études de la MIDE 2020 – 2021.

3) Le recourant sollicite préalablement son audition ainsi que celle de l’enseignant responsable de l’examen du droit pénal des mineurs et de son assistante, experte lors de l’oral litigieux. Il sollicite aussi la production par l’université du préavis du collège des professeurs du CIDE.

a. Selon la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral et reprise par la chambre de céans, tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.1 et les arrêts cités), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_58/2018 du 29 juin 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités).

Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1003/2017 du 21 juin 2018 consid. 3 et les arrêts cités ; ATA/255/2022 du 10 mars 2022 et les arrêts cités).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_487/2017 du 5 juillet 2018 consid. 2.1. ; ATA/188/2022 du 22 février 2022).

b. En l'espèce, la détermination de l’enseignant responsable du cours a été versée au dossier au titre de « préavis ». Le recourant n’indique pas en quoi son audition apporterait des éléments pertinents supplémentaires qui ne figureraient pas déjà à la procédure, notamment sur les modalités de l’examen. De même, le recourant ne précise pas sur quels faits l’audition de la seconde experte pourrait être pertinente. L’intéressé a eu l'occasion de s'exprimer par écrit, à plusieurs reprises, de manière détaillée, sur tous les éléments du dossier et de verser toutes les pièces qu’il jugeait utiles à la procédure.

La chambre de céans considère être en possession d’un dossier complet pour pouvoir trancher le litige. Il ne sera dès lors pas donné suite à la demande d’audition de témoins ni d’audience de comparution personnelle du recourant. Il ne sera pas non plus donné suite à la requête de production du préavis du collège des professeurs du CIDE, conformément aux considérants qui suivent.

4) a. Le CIDE est un centre interdisciplinaire et interfacultaire de formation et de recherche de l’université. Son fonctionnement est régi par le règlement d’organisation du CIDE du 1er janvier 2015 (ci-après : RO) et, pour le surplus, par les règles de l’université (art. 1.1 RO). Il a le statut d’unité d’enseignement et de recherche conformément à l’art. 19 al. 1 let. b du statut (art. 1.3 RO).

Il délivre le MIDE, maîtrise interdisciplinaire de nonante crédits ECTS (art. 1.2 RE).

b. Les nonante crédits nécessaires à l’obtention du MIDE sont acquis notamment à raison de trente dans le cadre des cours semestriels du premier semestre (art. 8 al. 1 let. a RE). Seuls les étudiants ayant obtenu au minimum quinze crédits ECTS dans le cadre des cours semestriels du premier semestre sont admis aux séminaires interdisciplinaires et au projet de groupe au deuxième semestre
(art. 8 al. 2 RE).

Pour chaque examen, le candidat doit obtenir une note minimum de 4,0. En cas d’échec, les examens peuvent être répétés une fois. Un deuxième échec est éliminatoire (art. 14 al. 5 RE).

c. Aux termes de l’art. 18 RE, est éliminé définitivement de la formation, l’étudiant qui, notamment, n’a pas présenté et réussi des examens pour des enseignements correspondant au moins à trente crédits ECTS au plus tard deux semestres après avoir commencé ses études (let. a) ; n’a pas obtenu la note minimum de 4,0, ou une moyenne minimum de 4,0 si l’évaluation se compose de plusieurs épreuves, à un examen, prestation ou évaluation conformément à l’art. 14 RE (let. b).

5) Dans un premier grief, le recourant invoque la nullité de la décision, au motif qu’elle aurait été prise par une autorité incompétente.

a. La décision d’élimination est prise par le directeur du CIDE (art. 18 al. 3 RE). Toutes les décisions prises dans le cas de l’application du RE peuvent faire l’objet d’une opposition, conformément au RIO-UNIGE. Cette opposition doit être adressée à l’instance qui a rendu la décision contestée (art. 19 al. 1 RE).

Selon l’art. 4 RIO-UNIGE, l’autorité qui statue sur l’opposition est celle qui a rendu la décision litigieuse.

b. La nullité d’une décision ne peut être admise qu'exceptionnellement. Elle n'est reconnue que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, s'il est manifeste ou du moins facilement décelable, et si en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Ces conditions sont cumulatives et elles ont pour conséquence que la nullité n'est que très rarement admise (ATF 132 II 21 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_270/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1). Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 20 janvier 2016 consid. 4.1)

c. En l’occurrence, la décision d’élimination du 10 septembre 2021 a été prononcée par le directeur du CIDE conformément à l’art. 18 al. 3 RE. De même, la décision sur opposition du 15 décembre 2021 a été rendue par la même autorité, conformément à l’art. 4 RIO-UNIGE.

L’art. 12.2 RO prévoit que le Collège des professeurs statue sur les résultats et les oppositions en matière de contrôle des connaissances. Selon la décision querellée, le collège des professeurs, statuant sur le cas du recourant, n’avait pas constaté de vice de forme ni de circonstances exceptionnelles justifiant l’octroi d’une grâce. Il avait émis un préavis négatif confirmant la décision d’élimination règlementaire. Dans le cas d’espèce, s’agissant d’une décision d’élimination au sens de l’art. 18 al. 1 let. a et b RE, même si elle était induite par la dernière évaluation, l’autorité compétente était le directeur du CIDE.

6) Devant la chambre de céans, le recourant ne remet pas en cause l’évaluation de la note de 3,5 obtenue à l’oral en droit pénal des mineurs. Dans sa réplique, il critique l’absence de clarté du document intitulé « expertise examen », sans toutefois préciser de grief.

a. Lorsque la décision porte sur le résultat d'un examen et que l'appréciation des expertes et experts est contestée, l'autorité satisfait aux exigences de l'art. 29
al. 2 Cst. si elle indique à la personne candidate, de façon même succincte, les défauts qui entachent ses réponses et la solution qui était attendue d'elle et qui eût été tenue pour correcte. De même, l'art. 29 al. 2 Cst. ne permet pas à une personne candidate d'exiger des corrigés-types et des barèmes (ATA/1745/2019 du 3 décembre 2019 consid. 4a). En matière d'examens, la jurisprudence admet que la non-remise de documents internes, comme les grilles de corrections, l'échelle des notes ou les notes personnelles des examinatrices et examinateurs lors des examens oraux, ne viole pas le droit d'être entendu des personnes candidates, à condition qu'elles aient été en mesure de comprendre l'évaluation faite de leur travail. À ce sujet, le droit d'être entendu n'impose aucune obligation de tenir un procès-verbal d'une épreuve orale ou de l'enregistrer sur un support audio ou vidéo. Cependant, l'autorité doit pouvoir exposer brièvement, même oralement, quelles étaient les attentes et dans quelle mesure les réponses de la personne candidate ne les satisfaisaient pas pour remplir son obligation de motivation (arrêts du Tribunal fédéral 2D_54/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.3 ; 2D_17/2013 du 21 août 2013 consid. 2.1 ; ATA/1745/2019 précité consid. 4a ; ATA/476/2016 du 7 juin 2016 consid. 4a).

b. Le document critiqué reprend, en style parfois télégraphique, les questions et réponses échangées pendant l’oral. L’heure de fin de l’examen, identique à celle de début, est erronée. Ce fait est toutefois sans pertinence. Si certes, la seule lecture dudit document ne permet pas de comprendre l’intégralité des échanges, le recourant n’a pas remis en question le contenu de l’examen et ne s’est plaint que des modalités de celui-ci.

L’intéressé n’ayant pas obtenu la note de 4,0 ni à l’issue du premier semestre ni lors de la session d’août – septembre 2021, et ne contestant pas l’insuffisance de sa prestation, la décision d’élimination est conforme à l’art. 14 al. 5 RE.

Pour le surplus, même à considérer que la critique du recourant dans sa réplique porte sur une violation de son droit à obtenir une décision motivée, le grief sera rejeté, le document répondant aux exigences jurisprudentielles susmentionnées.

7) Le recourant fait état d’une situation exceptionnelle et invoque sa maladie chronique, son grave accident de juin 2021, les conditions d’enseignement liées au Covid ainsi que les circonstances de l’oral, en l’absence de lien visuel avec les examinateurs.

a. À teneur de l'art. 58 al. 3 du statut, l'étudiant qui échoue à un examen ou à une session d'examens auxquels il ne peut plus se présenter en vertu du règlement d'études est éliminé (let. a). La décision d'élimination est prise par le doyen de l'unité principale d'enseignement et de recherche, lequel tient compte des situations exceptionnelles (art. 58 al. 4 du statut).

Le doyen ou la doyenne tient compte des situations exceptionnelles lors de la prise d'une décision d'élimination (art. 58 al. 4 du statut).

b. Selon la jurisprudence constante, l'admission d'une situation exceptionnelle doit se faire avec restriction. Il en va de l'égalité de traitement entre tous les étudiants s'agissant du nombre de tentatives qu'ils sont autorisés à effectuer pour réussir leurs examens. N'est ainsi exceptionnelle que la situation particulièrement grave et difficile pour l'étudiant, ce tant d'un point de vue subjectif qu'objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l'étudiant et être en lien de causalité avec l'événement. Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d'un large pouvoir d'appréciation, dont l'autorité de recours ne censure que l'abus. La chambre de céans n'annule donc le prononcé attaqué que si l'autorité intimée s'est laissée guider par des motifs sans rapport avec l'examen ou d'une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/281/2021 du 3 mars 2021 ; ATA/1121/2020 du 10 novembre 2020 consid. 4.d ; ATA/716/2020 du 4 août 2020 et les références citées).

Ont ainsi été considérées comme des situations exceptionnelles le décès d'un proche s'il est établi qu'il a causé un effet perturbateur en lien de causalité avec l'échec de l'étudiant, de graves problèmes de santé ou encore l'éclatement d'une guerre civile avec de très graves répercussions sur la famille de l'étudiant. En revanche, des difficultés financières, économiques ou familiales ainsi que l'obligation d'exercer une activité lucrative en sus des études ne constituent pas des circonstances exceptionnelles, même si elles représentent une contrainte. Ces difficultés sont certes regrettables, mais font partie d'une réalité commune à de très nombreux étudiants (ATA/281/2021 précité ; ATA/459/2020 du 7 mai 2020 consid. 5b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b et les références citées).

Un motif d'empêchement ne peut, en principe, être invoqué par le candidat qu'avant ou pendant l'examen (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] B-6593/2013 du 7 août 2014 consid. 4.2 ; ATA/281/2021 du 22 septembre 2020 ; ATA/906/2016 du 22 septembre 2020 ; ATA/712/2016 du 23 août 2016 ; ATA/721/2014 du 9 septembre 2014 consid. 17 et la référence citée).

Des exceptions au principe évoqué ci-dessus permettant de prendre en compte un certificat médical présenté après que l'examen a été passé ne peuvent être admises que si cinq conditions sont cumulativement remplies : la maladie n'apparaît qu'au moment de l'examen, sans qu'il ait été constaté de symptômes auparavant, le candidat à l'examen acceptant, dans le cas contraire, un risque de se présenter dans un état déficient, ce qui ne saurait justifier après coup l'annulation des résultats d'examens ; aucun symptôme n'est visible durant l'examen ; le candidat consulte un médecin immédiatement après l'examen ; le médecin constate immédiatement une maladie grave et soudaine qui, malgré l'absence de symptômes visibles, permet à l'évidence de conclure à l'existence d'un rapport de causalité avec l'échec à l'examen ; l'échec doit avoir une influence sur la réussite ou non de la session d'examens dans son ensemble (arrêt du TAF B-6593/2013 précité ; ATA/121/2018 du 6 février 2018 ; ATA/1242/2017 du 29 août 2017 ; ATA/906/2016 précité).

Les candidats qui ne se sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l'annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l'étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l'annulation des résultats obtenus (ATA/459/2020 précité ; ATA/345/2020 du 7 avril 2020 consid. 7b).

c. Dans son opposition du 15 octobre 2021, le recourant a expressément renoncé à se prévaloir de sa maladie chronique, de son accident grave de juin 2021 et des conditions d’enseignement lié au Covid. Il avait relevé, à juste titre, qu’au vu de ses bons résultats dans les trois autres disciplines passées lors de la session d’août – septembre 2021, à savoir les notes de 4,25, 4,75 et 5,0, il n’y avait pas de lien de causalité entre lesdites circonstances et un éventuel échec. Cette argumentation apparaît fondée.

Dans le cadre de son recours, l’intéressé s’est toutefois prévalu desdites circonstances. Or, le certificat médical produit consiste en un rapport de coloscopie des Hôpitaux universitaires de Genève du 13 août 2021. Il mentionne le suivi d’une rectocolite hémorragique classée E1, S1 selon la classification de Montréal diagnostiquée en 2019 et actuellement sans symptômes sous un traitement systémique de 5-ASA. Un prélèvement de biopsie était effectué, avec un suivi. Trois factures de consultation et une ordonnance se trouvent dans le dossier de l’autorité intimée. Les documents ont été établis entre le 2 et le 10 juin 2021. Conformément à la jurisprudence précitée, cinq conditions nécessaires et cumulatives doivent être remplies pour qu’il puisse en être tenu compte. Or, la maladie était connue du recourant avant l’examen, à l’instar de ses symptômes. Ces documents sont ainsi produits tardivement. Le même raisonnement vaut pour les éventuelles conséquences de l’accident de juin 2021 pour lequel aucun document n’est toutefois versé à la procédure. Si le recourant estimait ne pas être apte à se présenter à une session d’examens pour des raisons médicales, il lui aurait appartenu de s’en prévaloir avant ou pendant l’examen. Le risque qu’il a pris en se présentant aux examens, en les passant et en attendant les résultats avant d’y faire opposition lui est, partant, opposable.

Les conditions d’enseignement pendant les périodes de Covid ont certes été compliquées, mais ont été identiques pour tous les étudiants. L’intéressé a par ailleurs réussi ses autres examens.

Le même raisonnement vaut pour les difficultés techniques d’absence de vidéo lors de l’examen, alléguées par le recourant après avoir obtenu son résultat. Il n’en a pas fait état ni pendant l’oral ni juste après. Dans ces conditions, l’étudiant est forclos à s’en plaindre une fois la note insuffisante connue. Les mentions du CIDE, préalables au passage des examens, selon lesquelles l’utilisation de la caméra était obligatoire et essentielle au bon déroulement de l’examen, ne changent rien à ce qui précède, s’agissant de cautèles nécessaires pour éviter des fraudes.

Les conditions posées par la jurisprudence pour pouvoir invoquer un motif d’empêchement après l’examen n’étant pas réalisées, le grief sera rejeté.

8) Le recourant considère que l’art. 28 al. 4 RIO-UNIGE a été violé, l’université ayant renoncé à demander à la deuxième experte présente lors de l’examen litigeux de se prononcer sur son opposition.

La commission en charge d’établir un préavis lors d’opposition formée par les étudiants peut inviter toute personne ayant participé à l’élaboration de la décision litigieuse à se prononcer sur l’opposition, à moins que cette dernière ne soit manifestement irrecevable ou infondée (art. 28 al. 4 RIO-UNIGE).

La question de savoir si l’opposition du recourant était manifestement infondée souffrira de rester indécise dès lors que, même à considérer que tel n’était pas le cas, la commission n’avait aucune obligation, à teneur de ladite disposition, d’inviter un tiers ayant participé à l’élaboration de la décision. De surcroît, l’experte a contribué à l’évaluation de l’examen litigieux. Or, le litige porte sur la décision d’exclusion.

9) Le recourant se plaint d’une violation du principe de la proportionnalité.

a. Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., se compose des règles d’aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, l’on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 11).

b. Le recourant ne conteste pas que l’élimination est apte à atteindre le but d’intérêt public que seuls les étudiants ayant acquis les connaissances suffisantes puissent être autorisés à poursuivre leur formation. L’élimination en cas d’échec est nécessaire pour atteindre ce but. Elle respecte aussi le principe de l’égalité de traitement entre les étudiants, les conditions étant les mêmes pour tous les candidats. L’exigence de la note de 4,0 et du nombre de trente crédits à obtenir à la fin du premier semestre résulte du RE. Le fait de ne pas avoir rempli ces conditions conduit, en application du RE à l’élimination de l’étudiant. Le principe de la proportionnalité au sens étroit n’est en conséquence pas violé.

Enfin, le militantisme en matière de droits humains et de l’enfant, invoqué par le recourant dans son recours, à considérer qu’il soit pertinent, ne permet pas de retenir que l’autorité aurait abusé de son pouvoir d’appréciation.

C’est, partant, à juste titre que le CIDE a prononcé son élimination du MIDE.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400,- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 janvier 2022 par Monsieur A______ contre la décision du directeur du centre interfacultaire en droits de l’enfant du 15 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400,- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Xavier Panchaud, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :