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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3544/2021

ATAS/206/2023 du 21.03.2023 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3544/2021 ATAS/206/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 mars 2023

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à PLAN-LES-OUATES, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Diane BROTO

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après: l'assurée, l'intéressée ou la recourante), citoyenne suisse (Genève) née en 1967, mariée et mère d'un fils né en septembre 2001, est titulaire d'une licence – équivalant à un master actuel – de 1990 en sciences commerciales et industrielles, mention "gestion d'entreprise", d'une université suisse.

b. Elle a travaillé pour divers employeurs depuis 1991, pour des revenus annuels compris entre environ CHF 35'000.- et CHF 160'000.- (selon l'extrait de son compte individuel [ci-après: CI]). En particulier, elle a travaillé entre décembre 1997 et avril 2015 comme "Finance & Administration & Ressources humaines [ci-après: RH]" au service de B______ SA (en réalité B______ AG devenue C______ AG; ci-après: C______), entre mai 2015 et mars 2018 en qualité d'économiste pour l'Etat de Genève, enfin de février 2018 à mai 2019 en tant que "HR and Operations Manager" auprès de D______ SA (ci-après: D______), à un taux d'occupation de 40 % en février 2018, 50 % en mars 2018 et 60 % dès avril 2018 à teneur du contrat de travail du 8 janvier 2018, en réalité de 80 % dès avril 2018. Ce dernier employeur a, par pli du 21 février 2019, résilié le contrat de travail avec effet au 31 mai 2019, avec dispense de venir au bureau dans ce laps de temps.

c. AXA, l'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie du dernier employeur (ci-après: l'assurance d'indemnités journalières) a instruit les questions de l'atteinte à la santé de l'intéressée et de son incapacité de travail attestée depuis le 3 septembre 2018 par certificats de la doctoresse E______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecin généraliste traitante de l'assurée, tout en commençant par verser des indemnités journalières à 100 % à compter de ladite date.

Dans un rapport d'expertise psychiatrique adressé le 9 novembre 2018 au médecin-conseil de l'assurance d'indemnités journalières, le docteur F______, psychiatre et psychothérapeute FMH, assisté de Madame G______, psychologue FSP, a posé les diagnostics, avec répercussion sur la capacité de travail, d'épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (CIM-10, F32.2), actuellement en rémission partielle, symptomatologie dépressive moyenne actuellement, avec syndrome somatique (F32.11), de même que de trouble panique (anxiété épisodique paroxystique), actuellement en rémission partielle, et, sans répercussion sur la capacité de travail, de difficultés liées à l'emploi ou au chômage (Z56) et d'accentuation de certains traits de la personnalité, trais de la personnalité anxieuse actuellement non décompensés (Z73.1). Selon cet expert, suivant l'évolution clinique actuellement objectivée, une reprise médico-théorique auprès du même employeur était attendue pour le 1er janvier 2019 à 50 % et pour le 1er février 2019 à 100 %, en cas d'introduction d'un traitement antidépresseur.

Il semble que sur cette base, le 16 novembre 2018, l'assurance d'indemnités journalières ait décidé de cesser le versement des indemnités journalières après le 30 novembre 2018, mais il apparaît que ladite assurance a ensuite, en décembre 2018, repris les versements, avec effet dès le 1er décembre 2018, et ce jusqu'au 1er septembre 2020.

Le 5 mai 219, la doctoresse H______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et psychiatre traitante de l'assurée, a mentionné, à l'intention du médecin-conseil de l'assurance d'indemnités journalières, une évolution lentement favorable malgré la décision de celle-ci de novembre 2018 et son licenciement "en mars 2019", à cause desquels la patiente s'était retrouvée sans salaire et sans chômage possible, l'ayant empêchée "de se poser et de se restructurer en toute sécurité". Il était fait état d'un traitement sous forme de thérapie cognitivo-comportementale et de prise de Cipralex à 15 mg avec éventuelle augmentation à 20 mg, ainsi que de limitations consistant en une asthénie, un épuisement, un ralentissement, un trouble de la concentration et de l'attention avec impossibilité de suivre une conversation pendant plus de 30 minutes, ainsi qu'en de l'angoisse, le pronostic étant favorable à moyen, voire long terme.

Le 6 juin 2019, la Dresse E______ a fait état d'une évolution favorable depuis son dernier rapport – du 29 octobre 2018 (après un autre du 16 octobre 2018), où elle diagnostiquait une dépression et retenait une incapacité de travail de 50 % dès le 27 août 2018 et de 100 % à partir du 3 septembre 2018 –, les limitations fonctionnelles de la patiente se manifestant par de l'asthénie, un épuisement, des troubles de l'attention ainsi que de l'angoisse.

À la demande de l'assurance d'indemnités journalières, le docteur I______, psychiatre et psychothérapeute FMH, a établi un rapport d'expertise psychiatrique le 29 août 2019, diagnostiquant un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2) et retenant une incapacité totale de travail dans l'activité professionnelle exercée en dernier lieu, avec la possibilité qu'une pleine capacité de travail soit progressivement récupérée au cours du premier trimestre de l'année 2020.

B. a. Le 10 février 2020, l'assurée a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité (ci-après: AI), mesures professionnelles et/ou rente, en raison d'une incapacité totale de travail depuis le 3 septembre 2018 due à une dépression.

b. Dans le cadre de l'instruction de la demande AI, l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'OAI, l'office ou l'intimé) a, dans un document du 9 juillet 2020 puis une note du 1er juillet 2021, retenu un statut mixte, soit 80 % de part d'activité professionnelle et 20 % de part de travaux habituels (tâches ménagères), et a en outre recueilli divers renseignements médicaux et non médicaux, notamment ceux qui suivent.

Dans un questionnaire AI rempli le 16 mars 2020, la Dresse E______ ne s'est pas prononcée sur la capacité de travail de l'intéressée.

Dans un questionnaire AI rempli le 30 mars 2020, la Dresse H______ a diagnostiqué un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2), a fait état d'une capacité de travail nulle dans l'activité habituelle de la patiente depuis le 3 septembre 2018, et de "50 % au début dans une activité sans stress, sans trop d'organisation", les limitations fonctionnelles étant une asthénie au moindre effort intellectuel et physique, et le Cipralex étant pris à raison de 20 mg par jour. Étaient notés un épuisement professionnel avant le début de l'incapacité de travail en septembre 2018, ainsi que, depuis lors, une amélioration lentement progressive, malgré plusieurs rechutes en relation avec des événements de vie difficiles.

c. À la demande du service médical régional de l'AI (ci-après: SMR) du 30 septembre 2020, la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique, avec examen neuropsychologique et tests de validation des symptômes, a été confiée au docteur J______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie.

Dans ce cadre, Monsieur K______, psychologue FSP et expert neuropsychologue de la SIM, a, dans son rapport d'expertise du 9 mars 2021 faisant suite à une séance d'examen de 3 heures dans son cabinet le 17 février 2021 de même qu'à la réception d'un rapport neuropsychologique établi au printemps 2018 par la neuropsychologue FSP L______, retenu, au titre de "diagnostic", une fatigabilité attentionnelle légère, soit des troubles neuropsychologiques légers, qui abaissaient le rendement de l'expertisée de 20 % dans des tâches exigeantes au plan cognitif.

Dans son rapport d'expertise psychiatrique du 20 mai 2021, l'expert J______, avec Madame M______, psychologue FSP, notamment à la suite de tests psychométriques réalisés le 18 décembre 2020 par ladite psychologue, d'un entretien de 2 heures le 20 janvier 2021 avec l'intéressée ainsi que de la réception d'un rapport du 21 février 2021 de la psychiatre traitante – qui mentionnait des difficultés passées à obtenir l'adhésion de la patiente quant à la dose d'antidépresseur –, a retenu les diagnostics, avec répercussion sur la capacité de travail, de trouble dépressif de gravité légère à moyenne (F32.1), et, sans répercussion sur la capacité de travail, de personnalité à traits anxieux ("73.1" [sic]), à la suite d'une surcharge professionnelle, et a conclu, par rapport à un emploi au taux de 100 %, depuis décembre 2019, dans l'activité habituelle, à une capacité de travail de l'assurée de 80 % (cas échéant 8 heures par jour, quatre jours sur cinq), avec une baisse de rendement de 20 %, ou, dans une activité moins astreignante, à une capacité de travail de 80 % sans baisse de rendement, ce avec une évolution favorable prévisible. Concernant les tâches ménagères, l'expertisée, qui ne bénéficiait pas des services d'une femme de ménage, pouvait, dans l'ensemble, réaliser toutes ses tâches domestiques, même si elle paraissait vouloir donner une image défavorable de son fonctionnement.

d. Dans un rapport du 11 juin 2021, le SMR a considéré l'expertise comme convaincante et a retenu comme "atteinte à la santé incapacitante", principale, un épisode dépressif sévère ayant évolué vers un épisode léger à moyen, l'autre atteinte, sans impact sur la capacité de travail, étant une personnalité à trait anxieux. Dans l'activité habituelle de "RH d'une société fiduciaire", la capacité de travail de l'assurée était de 50 % dès le 27 août 2018, nulle à partir du 3 septembre 2018, entière avec une diminution de rendement de 20 % à compter du 1er décembre 2019, tandis que, dans une activité adaptée avec pour limitations fonctionnelles une "endurance légèrement diminuée", elle était de 50 % dès le 27 août 2018, nulle à partir du 3 septembre 2018, entière (sans diminution de rendement) à compter du 1er décembre 2019.

e. Le 5 juillet 2021, l'office a adressé à l'assurée un projet de décision de refus de rente AI et des mesures professionnelles, qui suivait les dernières conclusions du SMR. À l'échéance du délai d'attente – d'un an – au 27 août 2019, le droit à une rente d'invalidité aurait pu être ouvert, mais, la demande de l'intéressée ayant été déposée le 10 février 2020, la rente n'aurait pu être versée qu'à compter du 1er août 2020 (soit six mois après), date à laquelle elle ne présentait plus d'incapacité de gain ouvrant le droit à des prestations de l'AI. Dans sa situation, des mesures professionnelles n'étaient bien entendu pas indiquées.

f. Par décision du 15 septembre 2021, l'OAI a repris les termes de son projet de décision précité.

C. a. Par acte du 15 octobre 2021, l'assurée, représentée par une avocate, a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) contre cette décision, concluant, avec suite de dépens, à son annulation et à l'octroi d'une rente AI dont le degré devait être fixé après instruction complémentaire.

b. Le 23 décembre 2021, elle a complété son recours, dont elle a repris les conclusions au fond, concluant préalablement à l'audition de sa psychiatre traitante ainsi qu'à la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique judiciaire.

Était produit un rapport du 17 novembre 2021 de la Dresse H______, selon laquelle, en raison d'une fatigabilité excessive au moindre effort physique et mental ainsi que d'une capacité de concentration limitée à 30 minutes, difficultés qui entraînaient une restriction des activités sociales et une tendance au repli sur soi afin de se protéger, la patiente présentait actuellement une incapacité totale de travail.

c. Dans sa réponse du 10 février 2022, l'intimé a conclu au rejet du recours, un avis du SMR du 31 janvier 2021 étant en outre produit.

d. Le 4 mars 2022, la recourante a répliqué.

e. Le 5 juillet 2022 s'est tenue devant la chambre de céans une audience de comparution personnelle des parties et d'enquêtes.

La recourante a décrit sa situation, et son conseil a estimé que le statut de celle-ci devait être celui d'une personne active professionnellement à 100 %.

La Dresse H______, entendue en qualité de témoin, a critiqué l'expertise du Dr J______ et a fait état d'une interruption du suivi auprès d'elle de fin décembre 2019 à septembre 2020 car la patiente était suivie par un psychologue pour une recherche d'emploi et aussi à cause du COVID-19. D'après la psychiatre traitante, une capacité de travail de l'assurée de 50 % dans une activité adaptée aurait été envisageable seulement à partir de 2022; en outre, le bruit et les mouvements rapides dérangeaient l'assurée, problème qui persistait le plus jusqu'à présent, d'où notamment les problèmes avec l'ordinateur.

f. Le 30 août 2022, la recourante a produit plusieurs pièces, dont son contrat de travail conclu le 8 janvier 2018 avec RSM ainsi que son certificat de travail et d'autres documents émanant de cet employeur ainsi que du précédent employeur, l'Etat de Genève. À cela s'ajoutaient une attestation du 16 août 2022 de la psychiatre traitante relative aux dates de consultations en 2020 (les 7 et 21 janvier, 4 février, 3, 23 et 30 mars, 15 avril, 17 septembre, 8 et 26 octobre, 12 et 26 novembre ainsi que 10 décembre 2020), de même qu'une attestation du 17 août 2022 de Monsieur N______, psychologue FSP spécialisé en psychothérapie, indiquant un suivi de l'intéressée entre le 31 janvier 2019 et le 17 décembre 2020, avec notamment onze consultations entre le 23 juin et le 17 décembre 2020.

g. Dans un rapport du 12 octobre 2022, le psychologue N______ a répondu à des questions de la chambre des assurances sociales, en énonçant notamment les diagnostics d'épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2), de trouble anxieux mixte (F41.3) et de burnout (Z73.0), et en indiquant que, durant son suivi, la patiente n'était pas capable d'exercer son activité habituelle ou une activité adaptée "malgré tous ses efforts déployés".

h. Le 17 octobre 2022, la Dresse E______ a également répondu à des questions de la chambre de céans, en faisant notamment état d'une capacité de travail nulle dans toute activité au 15 septembre 2021 (date de la décision querellée).

i. Le 7 novembre 2022, l'intimé a produit un avis du SMR du même jour et a persisté dans ses conclusions de rejet du recours.

j. Le 28 novembre 2022, la recourante a persisté dans les conclusions de ses précédentes écritures, réclamant en outre la reconnaissance d'un statut de personne active professionnellement à 100 %.

k. Le 16 février 2023, en réponse à une lettre de l'assurée du 14 février 2023, la chambre de céans a indiqué qu'une décision sur mesures d'instruction ou au fond serait prochainement rendue.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'AI, à moins que la loi n'y déroge expressément.

La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Elle est ainsi applicable, dès lors que le recours a été interjeté postérieurement à cette date (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Interjeté dans la forme et le délai - de trente jours - prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA ainsi que 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).

4.             L'objet du litige porte sur le droit éventuel de la recourante à une rente de l'AI, étant en outre précisé qu'elle conteste le statut mixte, soit 80 % de part d'activité professionnelle et 20 % de part de travaux habituels (tâches ménagères), retenu par l'intimé et se prévaut d'un statut de personne active professionnellement à 100 %. Pour le reste, l'assurée ne sollicite pas l'octroi de mesures professionnelles.

De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

5.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l'AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l'occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

6.              

6.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

Aux termes de l'art. 6 LPGA, est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l'aptitude de l'assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d'activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité.

En vertu de l'art. 28 al. 2 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

6.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique suppose la présence d'un diagnostic émanent d'un expert (psychiatre) et s'appuyant selon les règles de l'art sur les critères d'un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

Dans l'ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'AI, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

6.3 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d'analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

Ces indicateurs sont classés comme suit :

I. Catégorie " degré de gravité fonctionnelle "

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l'instrument de base de l'analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A. Axe " atteinte à la santé "

1. Caractère prononcé des éléments et des symptômes pertinents pour le diagnostic

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l'atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l'étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.1).

L'influence d'une atteinte à la santé sur la capacité de travail est davantage déterminante que sa qualification en matière d'AI (ATF 142 V 106 consid. 4.4). Diagnostiquer une atteinte à la santé, soit identifier une maladie d'après ses symptômes, équivaut à l'appréciation d'une situation médicale déterminée qui, selon les médecins consultés, peut aboutir à des résultats différents en raison précisément de la marge d'appréciation inhérente à la science médicale (ATF 145 V 361 consid. 4.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_212/2020 du 4 septembre 2020 consid. 4.2 et 9C_762/2019 du 16 juin 2020 consid. 5.2).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Le déroulement et l'issue d'un traitement médical sont en règle générale aussi d'importants indicateurs concernant le degré de gravité du trouble psychique évalué. Il en va de même du déroulement et de l'issue d'une mesure de réadaptation professionnelle. Ainsi, l'échec définitif d'une thérapie médicalement indiquée et réalisée selon les règles de l'art de même que l'échec d'une mesure de réadaptation - malgré une coopération optimale de l'assuré - sont en principe considérés comme des indices sérieux d'une atteinte invalidante à la santé. A l'inverse, le défaut de coopération optimale conduit plutôt à nier le caractère invalidant du trouble en question. Le résultat de l'appréciation dépend toutefois de l'ensemble des circonstances individuelles du cas d'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2.1.3 et la référence).

 

 

3. Comorbidités

La présence de comorbidités ou troubles concomitants est un indicateur à prendre en considération en relation avec le degré de gravité fonctionnel (arrêt du Tribunal fédéral 9C_650/2019 du 11 mai 2020 consid. 3.3 et la référence). On ne saurait toutefois inférer la réalisation concrète de l'indicateur "comorbidité" et, partant, un indice suggérant la gravité et le caractère invalidant de l'atteinte à la santé, de la seule existence de maladies psychiatriques et somatiques concomitantes. Encore faut-il examiner si l'interaction de ces troubles ayant valeur de maladie prive l'assuré de certaines ressources (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3 et le référence). Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l'influence du trouble avec l'ensemble des pathologies concomitantes. Une atteinte qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidante en tant que telle (cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_98/2010 du 28 avril 2010 consid. 2.2.2, in : RSAS 2011 IV n° 17, p. 44) n'est pas une comorbidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1040/2010 du 6 juin 2011 consid. 3.4.2.1, in : RSAS 2012 IV n° 1, p. 1) mais doit à la rigueur être prise en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Ainsi, un trouble dépressif réactionnel au trouble somatoforme ne perd pas toute signification en tant que facteur d'affaiblissement potentiel des ressources, mais doit être pris en considération dans l'approche globale (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3).

En d'autres termes, même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d'un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

B. Axe " personnalité " (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Le " complexe personnalité " englobe, à côté des formes classiques du diagnostic de la personnalité qui vise à saisir la structure et les troubles de la personnalité, le concept de ce qu'on appelle les " fonctions complexes du moi " qui désignent des capacités inhérentes à la personnalité, permettant des déductions sur la gravité de l'atteinte à la santé et de la capacité de travail (par exemple : auto-perception et perception d'autrui, contrôle de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation; cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Etant donné que l'évaluation de la personnalité est davantage dépendante de la perception du médecin examinateur que l'analyse d'autres indicateurs, les exigences de motivation sont plus élevées (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2).

Le Tribunal fédéral a estimé qu'un assuré présentait des ressources personnelles et adaptatives suffisantes, au vu notamment de la description positive qu'il avait donnée de sa personnalité, sans diminution de l'estime ou de la confiance en soi et sans peur de l'avenir (arrêt du Tribunal fédéral 8C_584/2016 du 30 juin 2017 consid. 5.2).

C. Axe " contexte social "

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l'assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut toujours s'assurer qu'une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d'autres difficultés de vie (ATF 141 V 281 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3).

Lors de l'examen des ressources que peut procurer le contexte social et familial pour surmonter l'atteinte à la santé ou ses effets, il y a lieu de tenir compte notamment de l'existence d'une structure quotidienne et d'un cercle de proches [ ]. Le contexte familial est susceptible de fournir des ressources à la personne assurée pour surmonter son atteinte à la santé ou les effets de cette dernière sur sa capacité de travail, nonobstant le fait que son attitude peut rendre plus difficile les relations interfamiliales (arrêt du Tribunal fédéral 9C_717/2019 du 30 septembre 2020 consid. 6.2.5.3). Toutefois, des ressources préservées ne sauraient être inférées de relations maintenues avec certains membres de la famille dont la personne assurée est dépendante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2).

II. Catégorie " cohérence "

Il convient ensuite d'examiner si les conséquences qui sont tirées de l'analyse des indicateurs de la catégorie " degré de gravité fonctionnel " résistent à l'examen sous l'angle de la catégorie " cohérence ". Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l'assuré (ATF 141 V 281 consid. 4.4). A ce titre, il convient notamment d'examiner si les limitations fonctionnelles se manifestent de la même manière dans la vie professionnelle et dans la vie privée, de comparer les niveaux d'activité sociale avant et après l'atteinte à la santé ou d'analyser la mesure dans laquelle les traitements et les mesures de réadaptation sont mis à profit ou négligés. Dans ce contexte, un comportement incohérent est un indice que les limitations évoquées seraient dues à d'autres raisons qu'une atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.3).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s'agit ici de se demander si l'atteinte à la santé limite l'assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l'exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu'ici doit désormais être interprété de telle sorte qu'il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l'assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d'activité sociale de l'assuré avant et après la survenance de l'atteinte à la santé (ATF 141 V 281 consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

L'interruption de toute thérapie médicalement indiquée sur le plan psychique et le refus de participer à des mesures de réadaptation d'ordre professionnel sont des indices importants que l'assuré ne présente pas une évolution consolidée de la douleur et que les limitations invoquées sont dues à d'autres motifs qu'à son atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_569/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5.2).

La prise en compte d'options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d'évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n'est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l'absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d'une incapacité (inévitable) de l'assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s'appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d'autres raisons qu'à l'atteinte à la santé assurée (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2).

6.4  

6.4.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d'assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, qui - en tenant compte des facteurs incapacitants externes d'une part et du potentiel de compensation (ressources) d'autre part -, permettent d'estimer la capacité de travail réellement réalisable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d'investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).

6.4.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

En principe, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

6.4.3 On ajoutera qu'en cas de divergence d'opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. A cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

6.5  

6.5.1 Le point de départ de l'évaluation prévue pour les troubles somatoformes douloureux (ATF 141 V 281), les troubles dépressifs (ATF 143 V 409), les autres troubles psychiques (ATF 143 V 418) et les troubles mentaux du comportement liés à l'utilisation de substances psychoactives (ATF 145 V 215) est l'ensemble des éléments médicaux et constatations y relatives. Les experts doivent motiver le diagnostic psychique de telle manière que l'organe d'application du droit puisse comprendre non seulement si les critères de classification sont remplis (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1), mais également si la pathologie diagnostiquée présente un degré de gravité susceptible d'occasionner des limitations dans les fonctions de la vie courante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_551/2019 du 24 avril 2020 consid. 4.1 et la référence).

6.5.2 Dans un arrêt de principe du 2 décembre 2019 (ATF 145 V 361), le Tribunal fédéral, à la lumière de l'ATF 141 V 281, a notamment posé une délimitation, entre l'examen (libre), par les autorités chargées de l'application du droit, de l'admission d'une incapacité de travail par l'expert psychiatre, d'une part, et une appréciation juridique parallèle inadmissible, d'autre part.

Selon le Tribunal fédéral, dans tous les cas, l'administration et, en cas de recours, le juge, doivent examiner si et dans quelle mesure les experts ont suffisamment et de manière compréhensible étayé leur évaluation de l'incapacité de travail, en tenant compte des indicateurs pertinents (questions de preuve). À cette fin, les experts doivent établir un lien avec la partie précédente de l'expertise médico-psychiatrique (avec extraits du dossier, anamnèse, constatations, diagnostics, etc.), c'est-à-dire qu'ils doivent se référer en détails aux résultats médico-psychiatriques des examens et explorations cliniques menés dans les règles de l'art qui relèvent de leur compétence. Le médecin doit donc exposer de manière détaillée les raisons médico-psychiatriques pour lesquelles les éléments constatés sont susceptibles de restreindre la capacité fonctionnelle et les ressources psychiques en termes qualitatifs, quantitatifs et temporels (ATF 143 V 418 consid. 6). A titre d'exemple, dans le cadre de troubles dépressifs récurrents de degrés légers à modérés qui sont souvent au premier plan dans l'examen de l'invalidité au sens de l'AI, cela signifie qu'il ne suffit pas que l'expert psychiatre déduise directement de l'épisode dépressif diagnostiqué une incapacité de travail, quel qu'en soit le degré ; il doit bien plutôt démontrer si et dans quelle mesure les constatations qu'il a faites (tristesse, désespoir, manque de dynamisme, fatigue, troubles de la concentration et de l'attention, diminution de la capacité d'adaptation, etc.), limitent la capacité de travail, en tenant compte - à des fins de comparaison, de contrôle et de plausibilité - des autres activités personnelles, familiales et sociales de la personne requérant une rente. Si les experts s'acquittent de cette tâche de manière convaincante, en tenant compte des éléments de preuve établis par l'ATF 141 V 281, l'évaluation des répercussions de l'atteinte psychique sera également valable du point de vue des organes chargés de l'application du droit, que ce soit l'administration ou le juge. A défaut, il se justifie, juridiquement, de s'en écarter (ATF 145 V 361 consid. 4.3 et la référence).

En ce qui concerne l'évaluation du caractère invalidant des affections psychosomatiques et psychiques, l'appréciation de la capacité de travail par un médecin psychiatre est soumise à un contrôle (libre) des organes chargés de l'application du droit à la lumière de l'ATF 141 V 281 (ATF 145 V 361 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_585/2019 du 3 juin 2020 consid. 2 et les références). Il peut ainsi arriver que les organes d'application du droit se distancient de l'évaluation médicale de la capacité de travail établie par l'expertise sans que celle-ci ne perde sa valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_128/2018 du 17 juillet 2018 consid. 2.2 et les références). Du point de vue juridique, il est même nécessaire de s'écarter de l'appréciation médicale de la capacité de travail si l'évaluation n'est pas suffisamment motivée et compréhensible au vu des indicateurs pertinents, ou n'est pas convaincante du point de vue des éléments de preuve instaurés par l'ATF 141 V 281. S'écarter de l'évaluation médicale est alors admissible, du point de vue juridique, sans que d'autres investigations médicales ne soient nécessaires (arrêt du Tribunal fédéral 9C_832/2019 du 6 mai 2020 consid. 2.2). Toutefois, lorsque l'administration ou le juge, au terme de son appréciation des preuves, parvient à la conclusion que le rapport d'expertise évalue la capacité de travail en fonction des critères de médecine des assurances établis dans l'ATF 141 V 281 et qu'il satisfait en outre aux exigences générales en matière de preuves (ATF 134 V 231 consid. 5.1), il a force probante et ses conclusions sur la capacité de travail doivent être suivies par les organes d'application de la loi. Une appréciation juridique parallèle libre en fonction de la grille d'évaluation normative et structurée ne doit pas être entreprise (cf. ATF 145 V 361 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_213/2020 du 19 mai 2020 consid. 4.3 et les références).

6.5.3 En fin de compte, la question décisive est toujours celle des répercussions fonctionnelles d'un trouble. La preuve d'une incapacité de travail de longue durée et significative liée à l'état de santé ne peut être considérée comme rapportée que si, dans le cadre d'un examen global, les éléments de preuve pertinents donnent une image cohérente de l'existence de limitations dans tous les domaines de la vie. Si ce n'est pas le cas, la preuve d'une limitation invalidante de la capacité de travail n'est pas rapportée et l'absence de preuve doit être supportée par la personne concernée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_423/2019 du 7 février 2020 consid. 3.2.2 et les références).

6.6 Tant lors de l'examen initial du droit à la rente qu'à l'occasion d'une révision de celle-ci (art. 17 LPGA), il faut examiner sous l'angle des art. 4 et 5 LAI quelle méthode d'évaluation de l'invalidité il convient d'appliquer (art. 28a LAI, en corrélation avec les art. 27 ss RAI). Le choix de l'une des trois méthodes entrant en considération (méthode générale de comparaison des revenus, méthode mixte, méthode spécifique) dépendra du statut du bénéficiaire potentiel de la rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel, assuré non actif. On décidera que l'assuré appartient à l'une ou l'autre de ces trois catégories en fonction de ce qu'il aurait fait dans les mêmes circonstances si l'atteinte à la santé n'était pas survenue. Lorsque l'assuré accomplit ses travaux habituels, il convient d'examiner, à la lumière de sa situation personnelle, familiale, sociale et professionnelle, si, étant valide il aurait consacré l'essentiel de son activité à son ménage ou s'il aurait exercé une activité lucrative. Pour déterminer le champ d'activité probable de l'assuré, il faut notamment prendre en considération la situation financière du ménage, l'éducation des enfants, l'âge de l'assuré, ses qualifications professionnelles, sa formation ainsi que ses affinités et talents personnels (ATF 144 I 28 consid. 2.3; ATF 137 V 334 consid. 3.2; ATF 117 V 194 consid. 3b; Pratique VSI 1997 p. 301 ss consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_722/2016 du 17 février 2017 consid. 2.2). Cette évaluation tiendra également compte de la volonté hypothétique de l'assuré, qui comme fait interne ne peut être l'objet d'une administration directe de la preuve et doit être déduite d'indices extérieurs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2015 du 11 mai 2015 consid. 2.3 et l'arrêt cité) établis au degré de la vraisemblance prépondérante tel que requis en droit des assurances sociales (ATF 126 V 353 consid. 5b).

Selon la pratique, la question du statut doit être tranchée sur la base de l'évolution de la situation jusqu'au prononcé de la décision administrative litigieuse, encore que, pour admettre l'éventualité de la reprise d'une activité lucrative partielle ou complète, il faut que la force probatoire reconnue habituellement en droit des assurances sociales atteigne le degré de vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 28 consid. 2.3 et les références; ATF 141 V 15 consid. 3.1; ATF 137 V 334 consid. 3.2; ATF 125 V 146 consid. 2c ainsi que les références).

6.7  

6.7.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

6.7.2 Au surplus, si l'administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d'office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d'autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d'administrer d'autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d'être entendu selon l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst. ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

7.              

7.1 En l'espèce, l'intimé a, dans sa note du 1er juillet 2021, retenu le statut de 80 % de part d'activité professionnelle et de 20 % de part de travaux habituels (tâches ménagères), aux motifs que, hormis l'activité en contrats à durées déterminées (ci-après: CDD) auprès de l'Etat de Genève, aucune pièce ne relevait que l'assurée aurait souhaité exercer à un taux supérieur à 80 % et que celle-ci avait réalisé la majorité de son parcours professionnel au taux d'occupation de 80 %.

7.2 Le conseil de la recourante a, lors de l'audience du 5 juillet 2022, mis en doute ce statut retenu par l'intimé, ce qu'a confirmé l'intéressée elle-même en audience en déclarant que, si elle n'était pas malade, elle aurait voulu travailler à 100 % comme elle avait "toujours fonctionné".

À l'appui de cette position, l'assurée fait, dans sa dernière écriture (du 28 novembre 2022), valoir ce qui suit. Il est vrai que, de 1997 à 2015, elle a réalisé la majorité de son parcours auprès de Career au taux de 80 %. En revanche, après son départ de cette société, elle a toujours exercé une activité lucrative à 100 %. C'est à la suite de son activité exercée à 100 % au service de l'Etat de Genève qu'elle s'est écroulée au début du mois de septembre 2018, rendant une reprise à un tel taux inconcevable. Toujours d'après l'intéressée, au vu de la très courte période durant laquelle elle a, de fait, exercé une activité professionnelle à 80 %, soit de mai à septembre 2018 auprès de RSM, il ne saurait être retenu que ce taux d'occupation découlait d'un choix de vie définitif, ce d'autant moins que l'unique raison pour laquelle elle avait travaillé au taux de 80 % dans le passé était de s'occuper de son fils en bas âge.

7.3 Selon le certificat de travail établi le 17 février 2021 par RSM - produit le 30 août 2022 -, l'assurée a commencé avec un taux d'activité de 60 % qui a été progressivement augmenté pour atteindre 80 % durant une courte période, et ses décomptes de salaire d'avril et mai 2018 indiquent un taux de 80 %. À teneur du document d'"engagement en qualité d'auxiliaire" par l'Etat de Genève à compter du 1er mai 2015 et "pour une durée maximale de : 12 mois", signé le 12 avril 2015 par l'intéressée, son taux d'activité était de 100 %, soit 40 heures par semaine, et, dans une lettre du 26 janvier 2018, son supérieur hiérarchique au sein de l'Etat a pris note, à la suite d'une demande de la recourante du 20 décembre 2017, que du 1er février au 31 mars 2018, son taux d'activité passerait de 100 % à 50 %. Il ressort en outre du questionnaire pour employeur rempli le 8 juin 2020 par l'Etat de Genève que l'intéressée a démissionné de son poste.

Dans l'anamnèse contenue dans le questionnaire AI rempli le 30 mars 2020 par la Dresse H______, il est exposé notamment ce qui suit: pendant plusieurs années, la patiente a travaillé dans des postes à responsabilité. Dans le cadre de ses CDD de trois ans de 2015 à 2018 pour un projet majeur de l'Etat de Genève, elle était très investie et travaillait beaucoup d'heures, y compris le week-end; au début de cette période, son mari avait perdu son travail; le travail au sein de la fiduciaire (RSM) plaisait beaucoup à l'assurée, même s'il était stressant et représentait jusqu'à 65 heures de travail par semaine. Selon l'expertise, l'époux de l'expertisée a été au chômage durant une longue période en 2013 environ, et il était, au début de l'année 2021 à tout le moins, gérant d'un établissement de restauration rapide.

À cet égard, le questionnaire pour employeur rempli le 26 mai 2020 par RSM mentionne notamment 32 heures par semaine depuis le 1er avril 2018 par rapport à un horaire normal de 40 heures, ainsi que de grandes exigences sur tous les points pour l'emploi exercé auprès de cette société par la recourante, avec la précision que "le poste [demandait] une bonne maîtrise du management"; à la question de savoir quel travail pourrait effectuer l'intéressée était répondu : "Eventuellement un poste avec moins de responsabilité, moins de tâches à gérer, travail en-dessous de 100 %". Selon les décomptes de salaire d'avril et mai 2018, le salaire brut mensuel s'élevait à CHF 9'000.- (pour le taux de 80 %). Par ailleurs, à teneur du document de RSM "Auszahlung Überstunden Austritt" signé "pour solde de tout compte" le 6 juin 2019 par l'assurée et produit par elle le 30 août 2022, devait lui être versée la somme de CHF 7'689.12 pour ses heures supplémentaires, au nombre de 95.14, correspondant, sur la période de travail effectif de février à août 2018, soit sept mois, à environ 3 heures supplémentaires par semaine (95.14 / [52 semaines x 7 mois / 12 mois]), ce qui correspondait à 7.5 % (3 heures x 100 / 40 heures).

Selon les déclarations faites par l'assurée en audience, elle travaillait à 100 % chez Career lorsqu'elle a été licenciée en 2015, pour compenser le fait que son mari était au chômage à 100 %. Ensuite, elle a travaillé à 100 % pour l'Etat de Genève sur la base de CDD renouvelables. Ces contrats n'ont pas pu être renouvelés parce qu'au bout de trois CDD, l'Etat ne peut plus légalement "refaire" un CDD. Après cet emploi à l'Etat, où elle avait d'importantes responsabilités, elle était épuisée. Il a fallu qu'elle retrouve un emploi, ce qui a été le cas auprès d'une fiduciaire (RSM). La difficulté de cette transition a été que l'intéressée a, à la demande de l'Etat, continué à terminer ses mandats à un taux de 50 % jusqu'au mois d'août 2018 inclus et a - en parallèle - commencé à 50 % à la fiduciaire pour les travaux et projets qui lui étaient confiés. Elle avait alors "deux casquettes" (la finance et la RH) - les RH et les "opérations" selon le questionnaire pour employeur rempli par RSM. Elle a tenu ainsi six mois même si c'était très compliqué et elle s'est écroulée au moment où commençait son arrêt maladie. La fiduciaire (RSM) voulait l'engager à 100 %, mais, vu son travail passé à l'Etat de Genève, elle a demandé un 80 % que ce dernier employeur a accepté, comme cela figurait dans le contrat. L'intéressé a, toujours durant l'audience, encore précisé qu'au début de son activité pour l'Etat de Genève, cela s'était bien passé, mais qu'ensuite cela était devenu de plus en plus dur physiquement et psychiquement, en terme de pression, de fatigue, de masse financière à gérer; le fait qu'il s'agissait d'un contrat renouvelable chaque année exigeait d'elle qu'elle soit extrêmement performante.

7.4 Il découle de ce qui précède qu'en février et mars 2018, la recourante a travaillé à un taux de 110 % (50 % pour l'Etat de Genève et 60 % pour RSM), mais son assertion selon laquelle elle aurait continué à travailler à 50 % pour l'Etat de Genève encore jusqu'en août 2018 est contredite par le contenu du questionnaire pour employeur rempli le 31 août 2020 par l'Etat de Genève et ses annexes.

On peut en revanche déduire des déclarations de l'assurée en audience, crédibles sur ce point, que sa demande adressée à RSM de travailler à un taux de 80 % plutôt que 100 % était fondée sur des raisons de santé - crainte d'épuisement - qui n'étaient alors pas encore invalidantes stricto sensu au sens de l'AI, la recourante rencontrant alors déjà des difficultés professionnelles dans le cadre d'un état de santé fragilisé pour des raisons similaires à celles qui ont conduit à l'incapacité de travail commencée le 27 août 2018, notamment un burnout (cf., par analogie, arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3). Il apparaît donc vraisemblable que, sans ces difficultés de santé qui ont par la suite évolué vers son incapacité de travail commencée le 27 août 2018, l'intéressée aurait, dans des conditions normales, continué à travailler à un taux de 100 %.

Vont dans le même sens d'un taux d'emploi de 100 % le fait qu'en été 2018, avant ladite incapacité de travail, le fils de l'assurée avait presque 17 ans et pouvait mieux s'occuper de lui-même que par le passé, de même que le fait que son mari a, durant une certaine période, été au chômage complet et que la recourante disposait d'importantes compétences en matière de management et de prise de responsabilité, avec aussi la maîtrise du français, de l'anglais et de l'allemand, comme cela ressort notamment du certificat de travail de RSM, qui faisait état de son entière satisfaction.

Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, il convient de reconnaître à l'intéressée le statut de personne active professionnellement à 100 %.

8.              

8.1 Au plan médical, dans sa décision querellée et suivant l'avis du 11 juin 2021 du SMR, l'intimé retient, dans l'activité habituelle ("RH d'une société fiduciaire"), une capacité de travail de la recourante de 50 % dès le 27 août 2018, nulle à partir du 3 septembre 2018, entière avec une diminution de rendement de 20 % à compter du 1er décembre 2019, tandis que, dans une activité adaptée avec pour limitations fonctionnelles une "endurance légèrement diminuée", ladite capacité est selon l'office de 50 % dès le 27 août 2018, nulle à partir du 3 septembre 2018, entière (sans diminution de rendement) à compter du 1er décembre 2019.

8.2 Les rapports d'expertise de M. K______ et du Dr J______ répondent, sur le plan formel, aux exigences posées par la jurisprudence pour qu'on puisse leur accorder une pleine valeur probante : ces expertises ont été conduites par des spécialistes des domaines en question, à savoir un expert neuropsychologue de la SIM, respectivement un psychiatre et psychothérapeute FMH, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier. Ces experts ont personnellement examiné la recourante préalablement à l'établissement de leurs rapports. Ils ont consigné les renseignements anamnestiques pertinents, recueilli les plaintes de l'assurée et résumé leurs propres constatations. Ils ont en outre énoncé les diagnostics retenus et répondu à toutes les questions posées. Enfin, leurs conclusions sont claires et bien motivées.

8.3 Dans son rapport, l'expert K______ retient, au titre de "diagnostic", une fatigabilité attentionnelle légère, soit des troubles neuropsychologiques légers, qui abaissent le rendement de l'expertisée de 20 % dans des tâches exigeantes au plan cognitif, comme les tâches administratives exigeantes antérieures (finances, gestion de projets, réorganisations d'entreprises), mais pas dans des tâches plus simples, moins exigeantes en termes d'attention, soit dans des tâches administratives peu complexes, soit dans une activité plus relationnelle. En effet, l'évaluation neuropsychologique, sans indices d'exagérations de symptômes, met en évidence des indices de fatigabilité attentionnelle se manifestant par une certaine lenteur et par des indices qualitatifs (erreurs, omissions) inférieurs aux normes, voire à la limite du déficit, dans des tâches informatisées d'attention (sous-tests de la TAP) ayant été effectuées en toute fin de séance et s'étant de surcroît déroulées sur écran alors que l'expertisée s'est dite très sensible et fatigable lorsqu'elle doit travailler sur un tel support. Toutes les autres fonctions cognitives testées sont dans la norme, voire supérieures à la moyenne, comme c'était déjà le cas à l'été 2018. Il sied de relever que, selon les constatations de ce rapport d'expertise, l'expertisée se plaint d'une fatigue croissante avec la durée de l'examen, avec une fatigue estimée par elle à 6 sur 10 après 1h30 de séance (qui a duré 3 heures), à 8 sur 10 en fin de séance, ainsi que de maux de tête, sous la forme d'une tension au sommet du crâne, évalués à 6 sur 10 "à 15h30", à 7 sur 10 en fin de séance. Selon cet expert, il n'y a aucun indicateur "intratests" d'une exagération de symptômes, ni dans les tâches de mémoire, ni dans celles d'attention.

L'expert J______, assisté de la psychologue FSP M______ (tests psychométriques), retient quant à lui les diagnostics, avec répercussion sur la capacité de travail, de trouble dépressif de gravité légère à moyenne (F32.1; soit, selon la CIM-10, "épisode dépressif moyen") constituant un premier épisode, et, sans répercussion sur la capacité de travail, de personnalité à traits anxieux, à la suite d'une surcharge professionnelle. Il conclut, par rapport à un emploi au taux de 100 %, depuis décembre 2019, dans l'activité habituelle, à une capacité de travail de l'assurée de 80 % (cas échéant 8 heures par jour, quatre jours sur cinq), avec une baisse de rendement de 20 %, ou, dans une activité moins astreignante, à une capacité de travail de 80 % sans baisse de rendement, ce avec une évolution favorable prévisible. Concernant les tâches ménagères, l'expertisée, qui ne bénéficie pas des services d'une femme de ménage, peut, dans l'ensemble, réaliser toutes ses tâches domestiques, même si elle paraît vouloir donner une image défavorable de son fonctionnement. Selon les constations dudit expert psychiatre lors de l'examen, l'expertisée évoque, au plan somatique, des céphalées fréquentes et de la fatigabilité; il n'y a pas d'argument pour un trouble de l'anxiété généralisé. Sous l'angle de la personnalité, le contact est agréable, avec une assurée qui paraît néanmoins un peu rigide et qui a en outre de fortes attentes de réalisation, un besoin de contrôle, des exigences élevées; il n'y pas de trouble majeur de la personnalité, si ce n'est des traits anxieux. L'intéressée dispose d'un excellent environnement, avec une bonne entente avec son époux et leur fils, ainsi qu'avec ses beaux-parents et ses frère et sœur. Elle a des efficiences intellectuelles et compétences supérieures à la moyenne.

8.4 Dans son complément de recours, l'assurée reproche au SMR d'avoir, dans son avis, suivi une appréciation fondée sur des expertises ponctuelles - celles de M. K______ et du Dr J______ -, sans jamais établir les raisons pour lesquelles les appréciations des médecins la connaissant depuis des années - les Dresses E______ et H______ - n'étaient pas suivies, ce qui justifie selon l'intéressée la mise en œuvre d'une nouvelle expertise psychiatrique. Dans ses écritures et ses déclarations formulées en audience, la recourante ne conteste pas les constatations effectuées par ces deux experts, ni même leurs diagnostics, mais seulement leurs conclusions quant à sa capacité de travail.

Des critiques à l'encontre des rapports de M. K______ et du Dr J______, en réalité principalement à l'encontre du rapport de ce dernier, sont émises essentiellement dans les déclarations faites en audience par la Dresse H______, entendue en qualité de témoin.

8.5 Cela étant, il convient de relever ce qui suit, à l'aune des indicateurs développés pour les troubles psychiques par le Tribunal fédéral.

8.5.1 Il est incontesté, tant par les experts K______ et J______ que par les parties, qu'entre le 27 août ou 3 septembre 2018 et le 30 novembre 2019, la recourante a souffert d'un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2) justifiant une incapacité de travail de 50 % dès le 27 août 2018 et de 100 % à compter du 3 septembre 2018.

8.5.2 Selon la psychiatre traitante entendue à l'audience, le diagnostic pour l'intéressée est celui d'"épisode dépressif moyen" (F32.1), comme dans son rapport du 28 février 2021, alors qu'il s'agirait d'un "trouble dépressif récurrent moyen (F33.1)" (d'après la CIM-10: trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen) selon son rapport du 17 novembre 2021. Il s'est agi d'un épisode sévère en tout cas de septembre 2018 jusqu'à fin 2019, puis plutôt moyen, raison d'ailleurs pour laquelle la patiente lui a dit vouloir chercher du travail et consulter à cette fin un psychologue; lorsque la Dresse H______ a revu celle-ci en septembre 2020, elle était de nouveau "extrêmement mal" avec un épisode plutôt sévère, à cause du COVID-19, de son échec dans la recherche d'un emploi, des difficultés professionnelles de son mari et en général de ses soucis par rapport au revenu, tous ces éléments lui causant des inquiétudes et de la culpabilité de ne pas pouvoir assumer la charge familiale comme elle le faisait avant; d'une manière générale, en cas de stress, la recourante "plonge vers une aggravation de son état dépressif"; après septembre 2020 et grâce à la remontée du dosage de Cipralex à 20 mg, les choses se sont progressivement améliorées, avec une humeur un peu meilleure, un peu moins de fatigue, un peu plus de motivation, moins de trouble de la concentration et de l'attention ; la psychiatre traitante retiendrait un épisode dépressif moyen dès mars 2021 environ; depuis lors, c'est selon elle très fluctuant, l'état – dépressif – de la patiente se trouvant entre moyen et léger, mais parfois avec des périodes d'une ou deux semaines où cet état est sévère en raison d'un stress causé par exemple par une expertise ou une responsabilité qu'on lui demande, périodes durant lesquelles elle a beaucoup de peine à sortir du lit; heureusement, son chien l'oblige à sortir pour le promener; s'il est difficile pour la Dresse H______ d'indiquer la fréquence exacte de ces périodes d'épisodes dépressifs sévères d'une à deux semaines, elle retient néanmoins environ en moyenne une fois tous les deux mois.

Le psychologue N______, qui a suivi l'intéressée entre le 31 janvier 2019 et le 17 décembre 2020, énonce quant à lui par écrit les diagnostics d'épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2), de trouble anxieux mixte (F41.3) et de burnout (Z73.0). Cependant, ces diagnostics ne sont pas confirmés par la Dresse H______, qui, étant spécialiste FMH en psychiatre et psychothérapie, doit être considérée comme plus spécialisée en matière de diagnostics et qui a continué à recevoir la recourante à sa consultation durant toute l'année 2020 bien qu'à une fréquence inférieure à celle des autres périodes.

Le diagnostic exprimé en audience par la psychiatre traitante est le même que celui posé par l'expert J______ dans son rapport de mai 2021, à savoir un épisode dépressif moyen (F32.1), et c'est ce diagnostic qui doit être retenu. Il s'agit d'un épisode dépressif, d'une durée certes importante, et non d'un trouble dépressif récurrent, aucun médecin, si ce n'est la Dresse E______ qui n'est cependant pas spécialiste, n'évoquant un trouble dépressif récurrent (F33.-; épisode actuel moyen [F33.1] d'après ladite médecin généraliste). À cet égard, l'expert psychiatre a retenu ledit diagnostic d'épisode dépressif moyen sur la base notamment d'un entretien avec l'expertisée le 20 janvier 2021, la Dresse H______ à la suite de ses dernières consultations qui avaient eu lieu les 4, 18 et 25 février 2021, soit très peu de temps après l'entretien d'expertise. La seule différence entre ces deux médecins spécialistes au plan du diagnostic réside dans le fait que, selon la psychiatre traitante, il y a des épisodes dépressifs sévères d'une durée d'une à deux semaines en moyenne une fois tous les deux mois.

8.5.3 Le Tribunal fédéral a récemment rappelé qu'en principe, seul un trouble psychique grave peut avoir un caractère invalidant. Un trouble dépressif de degré léger à moyen, sans interférence notable avec des comorbidités psychiatriques, ne peut généralement pas être défini comme une maladie mentale grave. S'il existe en outre un potentiel thérapeutique significatif, le caractère durable de l'atteinte à la santé est notamment remis en question. Dans ce cas, il doit exister des motifs importants pour que l'on puisse néanmoins conclure à une maladie invalidante. Si, dans une telle constellation, les spécialistes en psychiatrie attestent sans explication concluante (éventuellement ensuite d'une demande) une diminution considérable de la capacité de travail malgré l'absence de trouble psychique grave, l'assurance ou le tribunal sont fondés à nier la portée juridique de l'évaluation médico-psychiatrique de l'impact (ATF 148 V 49 consid. 6.2.2 et les références).

En outre, des traits de personnalité signifient que les symptômes constatés ne sont pas suffisants pour retenir l'existence d'un trouble spécifique de la personnalité. Ils n'ont, en principe, pas valeur de maladie psychiatrique et ne peuvent, en principe, fonder une incapacité de travail en droit des assurances au sens des art. 4 al. 1 LAI et 8 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.3 et les références).

8.5.4 Dans le cas présent, dans son rapport du 28 février 2021, la Dresse H______ écrit ne pas retenir de trouble de la personnalité, mais – seulement – des traits narcissiques et anankastiques, tandis que l'expert psychiatre reconnaît quant à lui l'existence, sans répercussion sur la capacité de travail, de personnalité à traits anxieux. Aucun de ces traits ne constitue une comorbidité pouvant être invalidante en tant que telle. En revanche, lesdits traits, dans une appréciation globale, sont de nature à affaiblir les ressources de la recourante et, par leurs effets réciproques avec l'épisode dépressif moyen (F32.1) diagnostiqué par l'expert J______ et admis par la psychiatre traitante, peuvent en principe rendre compatibles avec la jurisprudence du Tribunal fédéral l'incapacité de travail (y compris diminution de rendement) retenue par les experts psychiatre et neuropsychologue, à savoir, par rapport à un taux d'activité de 100 %, depuis décembre 2019, dans l'activité habituelle, une capacité de travail de l'assurée de 80 % avec une baisse de rendement de 20 %, ou, dans une activité moins astreignante, adaptée, une capacité de travail de 80 % sans baisse de rendement.

Il est précisé que les conclusions des experts J______ et K______ en matière de capacité de travail apparaissent concordantes, celles du premier reposant sur des diagnostics exhaustifs tandis que celles du second se focalisent sur les effets d'un seul des symptômes du trouble dépressif que constitue la fatigabilité attentionnelle légère.

8.5.5 Selon la psychiatre traitante entendue en audience, l'assurée est une patiente compliante, motivée par le traitement. Toutefois, toujours d'après cette spécialiste en audience et dans son rapport du 28 février 2021, la patiente n'y croit pas beaucoup et, surtout, après être passée de 3 mg de Cipralex (escitalopram) en septembre 2018 à 20 mg en fin 2019 puis avoir continué à suivre ce traitement pendant l'interruption (partielle de décembre 2019 à septembre 2020), elle a diminué la dose à 10 mg en septembre 2020 car elle pensait que ce médicament réduisait ses émotions et affects (absence de joie par exemple), avant d'accepter à fin janvier 2021 que la dose soit remontée à 20 mg, qui est suffisante selon la psychiatre traitante. Si la dose de 10 mg est considérée comme très faible par l'expert J______, ce dernier, tout en évoquant dans ses conclusions un refus par l'expertisée d'un traitement antidépresseur à une posologie efficace ainsi que d'autres traitements possibles, n'indique pas clairement que celle de 20 mg serait insuffisante. Ne ressort ainsi pas de l'instruction du cas un défaut de coopération ou de compliance au traitement de la part de l'assurée.

Il ne découle en outre pas de ce qui précède que le traitement médicamenteux suive, en termes de doses prescrites et prises, les survenances des aggravations périodiques de l'état dépressif telles que décrites en audience par la psychiatre traitante.

8.5.6 Il n'apparaît pas qu'avec l'incapacité de travail retenue par les experts – capacité de travail de 80 % avec une baisse de rendement de 20 % dans l'activité habituelle ou capacité de travail de 80 % sans baisse de rendement dans une activité moins astreignante –, l'assurée n'aurait pas des ressources personnelles suffisantes pour surmonter les effets du trouble d'ordre dépressif dont elle est atteinte. Sur ce point, l'expert K______ note que les ressources de l'expertisée sont préservées d'un strict point de vue neuropsychologique, hormis l'endurance qui est légèrement diminuée.

Selon les déclarations en audience de la Dresse H______, ce qui empêche l'assurée de sortir du burnout qu'elle a subi en été 2018 est son exigence envers elle-même et "par rapport à être toujours au top", c'est-à-dire l'impossibilité ou la difficulté de faire le deuil de ce qu'elle était autrefois et du fait qu'elle ne sera plus cadre supérieure dans le futur, comme le fait que, si elle voit des amis, elle doit maintenir la façade de la personne qu'elle considérait être avant la fin de l'été 2018, de même que sa volonté de diriger complètement sa vie et le fait de considérer devoir être au service des autres comme autrefois lorsqu'elle allait bien alors qu'elle n'est plus capable de faire. Toujours d'après la psychiatre traitante, c'est, d'une manière générale, en cas de stress que la patiente subit une aggravation de son état dépressif; par exemple, lorsqu'elle a revu l'intéressée en septembre 2020, celle-ci était "de nouveau extrêmement mal" avec un épisode plutôt sévère, à cause du COVID-19, de son échec dans la recherche d'un emploi, des difficultés professionnelles de son mari et en général de ses soucis par rapport au revenu, tous ces éléments lui causant des inquiétudes et de la culpabilité de ne pas pouvoir assumer la charge familiale comme elle le faisait auparavant.

Ces difficultés passagères de la recourante et ses exigences trop élevées envers elle-même, aussi compréhensibles soient-elles, apparaissent relever en grande partie de traits de sa personnalité en lien notamment avec la gestion du stress et ne sont pas de nature à justifier une incapacité de travail supérieure à celle retenue par les experts, y compris s'agissant des courtes périodes d'épisode dépressif sévère mentionnées en audience par la psychiatre traitante.

Par ailleurs, l'intéressée dispose de bonnes relations au plan familial, ce qui est de nature à l'aider à surmonter son atteinte à sa santé et les effets de celle-ci. Elle semble avoir, depuis le début de son incapacité durable de travail, réduit ses relations sociales, mais rien ne permet de penser qu'elle serait désormais limitée dans sa capacité d'interagir avec autrui. Selon les déclarations de la recourante en audience, son mari et son fils ne mettent pas de pression sur elle, si ce n'est une attitude bienveillante, mais c'est elle-même qui "[se] met une pression à leur égard pour guérir, pour redevenir celle qu'ils ont connu", mais n'y arrive pas.

8.5.7 Pour ce qui est des activités journalières, à teneur des déclarations en audience de l'intéressée, au 15 septembre 2021, date du prononcé de la décision litigieuse, elle réagissait très mal aux stimulis; à la date de l'audience le 5 juillet 2022, elle est toujours en épuisement et en extrême fatigabilité; chaque effort ou activité lui demandant une grande concentration lui coûte le lendemain : elle dort une partie de la journée; dès qu'elle a rattrapé un certain niveau de force, elle continue sa journée avec des activités très simples, et évite tout ordinateur qui est un déclencheur de malaise pour elle; elle fait plutôt des tâches simples et manuelles (promenade, préparation du repas pour sa famille si elle y arrive). "Si c'est un bon jour cela va"; "si c'est un moins bon jour", elle ne cuisine pas et elle dort bien durant la nuit malgré le fait qu'elle a dormi toute la journée précédente; si elle a des journées avec une absence d'intensité, elle arrive à tenir trois à quatre jours dans ses activités simples sans problèmes.

Selon la Dresse H______ entendue en audience, l'intéressée a été aidée par la poterie, le yoga, les séjours à la montagne, une maison de retraite en Espagne, et peut-être les encouragements de son mari; elle effectue des tâches ménagères mais pas toutes; elle fait des courses si elle se sent capable de les faire, sinon ce sont les membres de sa famille qui les font.

Ces déclarations de la recourante et de la psychiatre traitante ne contredisent pas la journée type de l'assurée telle que décrite dans le rapport d'expertise du Dr J______ (p. 12) et dans celui du neuropsychologue K______ (p. 4) sur la base des indications de l'expertisée. Selon cette description effectuée par l'expert psychiatre, l'assurée se lève à 7h30; son mari lui prépare le petit-déjeuner; si elle se sent bien, elle fait les courses, la lessive, le repas du soir; elle promène son chien durant 45 minutes le matin ainsi qu'une à deux fois par jour si elle en a la motivation; elle a repris la lecture, mais seulement les romans policiers à défaut de quoi elle peinerait à se concentrer; elle regarde un peu la télévision, des documentaires assez simples; elle prend "maintenant" un cours de poterie à domicile; le week-end, elle se promène avec son époux et leur chien, ils essaient de faire des jeux de société, mais l'expertisée déclare avoir beaucoup de peine à se concentrer. L'expert neuropsychologue précise au surplus que l'expertisée n'utilise plus son ordinateur à cause de ses problèmes visuels et des maux de tête qui en résultent.

Il n'y a pas d'incohérence entre d'une part ces descriptions des activités quotidiennes de l'intéressée après le début de son incapacité durable de travail et d'autre part les diagnostics et les effets de ceux-ci tels que retenus par les experts. Pour le reste, aucune exagération ou majoration de symptômes de la part de l'assurée n'est évoquée par les experts.

8.6 Au regard de ce qui précède, les appréciations des médecins et psychologue traitants en matière de capacité de travail, qui font état d'une incapacité de travail (y compris diminution de rendement) supérieure à celle retenue par les experts, ne sont pas convaincantes. Telle est notamment le cas de l'avis de la Dresse H______ selon laquelle il n'y aurait pas eu une capacité de travail à 50 % dans une activité adaptée, c'est-à-dire moins stressante et sans ordinateur, avant 2022, sans qu'il soit selon elle exclu de faire un essai dès septembre ou octobre 2021 dans ce sens, essai qui n'aurait pas forcément été concluant, alors qu'en 2022 la psychiatre traitante serait plus optimiste.

Quant au SMR, il ressort de son avis du 11 juin 2021, à la base de la décision attaquée, qu'il a fondé ses conclusions en matière de capacité de travail certes sur les expertises du psychologue K______ et du Dr J______, mais il retranscrit les conclusions de ce dernier de manière erronée, faisant retenir par cet expert, dès le 1er décembre 2019, une capacité entière de travail avec une diminution de rendement de 20 % dans l'activité habituelle et une capacité entière (sans baisse de rendement) dans une activité adaptée, à moins que ledit service n'ait pris en compte que le rapport de l'expert K______. La façon dont le SMR a compris par la suite le rapport de l'expert psychiatre ne ressort pas clairement des avis qu'il a présenté dans le cadre de la présente procédure de recours, avis qui ne remettent néanmoins aucunement en doute les conclusions des experts psychiatre et neuropsychologue en matière de capacité de travail, étant rappelé que leurs conclusions respectives sont compatibles entre elles.

En définitive, rien ne permet de mettre en doute le caractère convaincant des conclusions – concordantes – des experts J______ et K______ relativement à la capacité de travail de l'assurée, à savoir, par rapport à un statut de personne exerçant une activité professionnelle à 100 %, depuis le 1er décembre 2019, une capacité de travail de 80 % avec une baisse de rendement de 20 % dans l'activité habituelle, ou une capacité de travail de 80 % sans baisse de rendement dans une activité moins astreignante, adaptée, c'est-à-dire, selon l'expert psychiatre dans le vaste champ de compétences de l'intéressée mais dans une petite structure (y compris avec les tâches de l'activité antérieure, mais pas dans une entreprise internationale, dans un service d'Etat avec beaucoup de responsabilités ou dans une grande fiduciaire), selon l'expert neuropsychologue dans des tâches plus simples que les activités administratives exigeantes antérieures (qui étaient dans les finances, la gestion de projets et les réorganisations d'entreprises), donc dans des tâches moins exigeantes en termes d'attention, soit dans des tâches administratives peu complexes, soit dans une activité plus relationnelle.

À ces limitations fonctionnelles apparaît s'ajouter, pour que l'activité soit adaptée, la nécessité d'éviter un temps prolongé au-delà d'une certaine durée – limite temporelle non encore déterminée en l'état du dossier – au volant d'une voiture (comme mentionné par l'expert neuropsychologue) de même que devant un écran d'ordinateur à cause du scintillement et de la lumière de l'écran (d'après la Dresse H______), et d'éviter également, comme cela ressort de manière convaincante des déclarations en audience de la psychiatre traitante, des emplois où le bruit et les mouvements rapides sont d'une forte intensité. À cet égard, selon les déclarations de la Dresse H______ en audience, l'intolérance à l'écran d'ordinateur et au bruit ne fait certes pas partie des critères diagnostics selon les classifications internationales de l'état dépressif, mais dans la pratique beaucoup de personnes souffrant de troubles dépressifs ou anxieux sont agressés par ces éléments, et, s'agissant en particulier de l'écran d'ordinateur, devant lequel on passe de nombreuses heures en cas de travail sur ordinateur, il y a forcément des mouvements qui passent d'un endroit à l'autre de manière rapide.

Il n'y a pas lieu de mettre en œuvre une expertise judiciaire.

8.7 Le droit à une éventuelle rente de l'AI naît le 1er août 2020 conformément à l'art. 29 al. 1 LAI, soit six mois après le dépôt de sa demande AI le 10 février 2020, la condition d'avoir présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable selon l'art. 28 al. 1 let. b LAI étant manifestement réalisée au vu de ce qui précède, comme du reste énoncé par l'office dans la décision attaquée.

9.              

9.1 Chez les assurés actifs – comme l'est la recourante –, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 137 V 334 consid. 3.3.1).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références).

9.2 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait - au degré de la vraisemblance prépondérante - réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu'il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2).

Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après: ESS) éditée par l'Office fédéral de la statistique (ci-après: OFS; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

9.3 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l'ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne " total secteur privé " (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

Les tableaux TA1, T1 et T17 de l'ESS 2020 ont été publiés le 23 août 2022; l'ESS 2018 a été publiée le 21 avril 2020; l'ESS 2016, le 26 octobre 2018 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018).

Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu'avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table "TA1" (secteur privé) pour se référer à la table "TA7" (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), respectivement "T17" (à partir de 2012) si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (ATF 133 V 545 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_124/2021 du 2 août 2021 consid. 4.4.1 et 8C_111/2021 du 30 avril 2021 consid. 4.2.1 et les références).

Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a estimé qu'il n'existe pas de motifs sérieux et objectifs justifiant une modification de sa jurisprudence relative à l'application des ESS dans le cadre de la détermination du degré d'invalidité des assurés (arrêt du Tribunal fédéral 8C_256/2021 du 9 mars 2022, destiné à la publication).

Depuis la 10ème édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'OFS par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau "T17" de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau "TA1_skill_level" de l'ESS 2012; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux "tâches physiques ou manuelles simples" (à teneur de l'ESS), tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une "capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé" (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des "tâches pratiques complexes [qui nécessitent] un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé" (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux "tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules" (arrêt du Tribunal fédéral 9C_370/2019 du 10 juillet 2019 consid. 4.1 et les références).

9.4 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25 % sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références; ATF 135 V 297 consid. 5.2; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références). Une telle déduction ne doit pas être opérée automatiquement, mais seulement lorsqu'il existe des indices qu'en raison d'un ou de plusieurs facteurs, l'intéressé ne peut mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché du travail qu'avec un résultat économique inférieur à la moyenne (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références; ATF 146 V 16 consid. 4.1 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/bb et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 3.3 et les références).

D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l'appréciation de l'abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

10.          

10.1 Dans le cas présent, l'office n'a pas établi une comparaison des revenus – sans et avec invalidité –, pas même dans sa "note relative au choix de la méthode d'évaluation de l'invalidité" du 1er juillet 2021.

Il convient donc d'effectuer ci-après cette comparaison des revenus, sur la base des éléments figurant au dossier, 2020 étant l'année durant laquelle l'éventuel droit de la recourante à une rente AI aurait pu prendre naissance (au plus tôt six mois après le dépôt de la demande AI le 10 février 2020, en application de l'art. 29 al. 1 LAI).

10.2 Cela étant, concernant le revenu sans invalidité, il y a lieu de se fonder sur le salaire perçu par l'assurée auprès de son dernier employeur, RSM, qui s'élevait en 2018 à CHF 9'000.- par mois pour un taux d'activité de 80 %, multiplié par 12 pour atteindre le salaire brut annuel, donc sans 13ème salaire, ce qui donne CHF 108'000.- annuellement pour un taux de 80 % et correspond à CHF 135'000.- pour un taux de 100 %, comme cela ressort du reste du document de RSM "Auszahlung Überstunden Austritt" signé "pour solde de tout compte" le 6 juin 2019 par l'assurée.

Conformément à l'indice suisse des salaires (ISS; cf. le site internet "https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/salaires-revenus-cout-travail/indice-salaires.assetdetail.22304319.html"), ce salaire annuel brut de CHF 135'000.- doit être indexé en 2019 de 0.9 %, ce qui donne CHF 136'215.-, montant encore augmenté en 2020 de 0.8 % pour atteindre CHF 137'305.-.

10.3 Pour ce qui est du revenu avec invalidité, dans la mesure où rien ne permet de supposer que l'intéressée pourrait retrouver l'emploi qu'elle avait auprès de RSM, il convient de se référer à l'ESS 2020, plus précisément le tableau "Salaire mensuel brut selon les branches économiques, le niveau de compétences et le sexe - Secteur privé et secteur public ensemble (T1_skill-level)" (téléchargeable sur le site internet "https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/salaires-revenus-cout-travail/niveau-salaires-suisse.assetdetail.2298
8218.html"), compte tenu des circonstances, notamment du fait que l'intéressée a travaillé pour l'Etat de Genève de mai 2015 à mars 2018 (avec notamment, pour l'année 2017 durant laquelle elle a entièrement œuvré auprès de cet employeur au taux de 100 %, un salaire annuel brut, 13ème salaire compris, de CHF 160'884.-, selon les indications fournies le 31 août 2020 par l'Etat de Genève à l'OAI).

Si l'on prend en compte l'activité habituelle à laquelle se réfèrent les experts J______ et K______ pour retenir une capacité de travail de 80 % avec une baisse de rendement de 20 %, il convient de partir du niveau de compétence 4 ("capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé") au regard des relativement hautes fonctions qu'exerçait l'intéressée pour l'Etat de Genève puis pour RSM avant le début de son incapacité de travail à fin août 2018. Selon le tableau de l'ESS 2020 précité, pour une femme, ce salaire mensuel brut s'élevait, sous "total", à CHF 8'140.-. Conformément à la pratique usuelle, ce revenu devrait être adapté à la "durée normale du travail dans les entreprises", soit 41.7 heures par semaine selon l'Office fédéral de la statistique (cf. "https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/
enquetes/dnt.assetdetail.22708561.html") au lieu des 40 heures figurant dans l'ESS, ce qui donne un salaire brut de CHF 8'486.- par mois, CHF 101'832.- par an. Compte tenu d'une réduction de capacité de travail de 20 % et de rendement de 20 % également, on arrive au revenu annuel brut avec invalidité de CHF 61'099.-, ce qui, par rapport au revenu annuel sans invalidité de CHF 137'305.-, donne un degré d'invalidité de 55.5 %.

Si l'on prend en considération l'activité moins astreignante, adaptée à laquelle les deux experts appliquent une capacité de travail de 80 %, entrant selon l'expert psychiatre dans le vaste champ de compétences de l'intéressée mais dans une petite structure, selon l'expert neuropsychologue dans des tâches plus simples que les activités administratives exigeantes antérieures, en termes d'attention, soit dans des tâches administratives peu complexes, soit dans une activité plus relationnelle, il sied de se référer au niveau de compétence 3 ("tâches pratiques complexes [qui nécessitent] un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé", notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier"). Dans ce niveau de compétence 3 se trouvent manifestement suffisamment d'emplois compatibles avec la nécessité d'éviter d'une part des durées prolongées devant un ordinateur et d'autre part le bruit et les mouvements rapides d'une forte intensité. Toujours selon le tableau de l'ESS susmentionné, pour une femme, le salaire mensuel brut s'élevait- en 2020, sous "total", à CHF 6'459.-. Conformément à la pratique usuelle, ce revenu devrait être adapté à la "durée normale du travail dans les entreprises", soit 41.7 heures par semaine au lieu des 40 heures figurant dans l'ESS, ce qui donne un salaire brut de CHF 6'734.- par mois, CHF 80'808.- par an. Compte tenu d'une réduction de rendement de 20 %, on arrive au revenu annuel brut avec invalidité de CHF 64'646.-, ce qui, par rapport au revenu annuel brut sans invalidité de CHF 137'305.-, donne un taux d'invalidité de 52.9 %, proche de celui calculé relativement à l'activité habituelle.

10.4 Pour le reste, il n'existe pas de circonstances personnelles et/ou professionnelles particulières qui pourraient justifier dans le cas présent un "abattement" – ou déduction globale – par rapport au salaire statistique.

10.5 Sur cette base d'un degré d'invalidité de 55.5 % ou 53.2 %, la recourante a, en application de l'art. 28 al. 2 LAI – dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021 –, droit à une demi-rente de l'AI.

11.         Vu ce qui précède et au regard de la conclusion du recours au fond selon laquelle le degré de la rente devrait être fixé après instruction complémentaire, le recours sera admis et la décision querellée réformée en ce sens que la recourante a, à compter du 1er août 2020, droit à une demi-rente d'invalidité.

Dans l'hypothèse où, compte tenu notamment de la nécessité d'éviter d'une part des durées prolongées devant un ordinateur et d'autre part le bruit et les mouvements rapides d'une forte intensité, l'intéressée se trouvait gênée dans la recherche et l'obtention d'un emploi, il lui serait loisible de solliciter, le cas échéant, l'octroi d'éventuelles mesures professionnelles.

12.         La recourante, qui obtient gain de cause et est représentée par une avocate, a droit à une indemnité de dépens, de CHF 3'000.- (cf. art. 61 let. g LPGA a contrario).

La procédure de recours en matière de contestation portant sur l’octroi ou le refus de prestations de l’assurance-invalidité étant soumise à des frais de justice, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l’intimé (cf. art. 69 al. 1 bis LAI).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Réforme la décision rendue le 15 septembre 2021 par l'intimé en ce sens que la recourante a droit à une demi-rente d'invalidité dès le 1er août 2020.

4.        Alloue à la recourante une indemnité de dépens de CHF 3'000.-, à la charge de l'intimé.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le