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C/4135/2022

ACJC/1220/2022 du 15.09.2022 sur JTPI/8038/2022 ( SML ) , CONFIRME

Normes : LP.82
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4135/2022 ACJC/1220/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du jeudi 15 SEPTEMBRE 2022

 

Entre

A______ SÀRL, sise ______, recourante contre un jugement rendu par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 juin 2022, comparant en personne,

et

B______ SÀRL, sise ______, intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. a. Le 10 février 2022, l'Office des poursuites, sur requête de B______ Sàrl du 23 décembre 2021, a notifié à A______ Sàrl un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur un montant de 1'292 fr. 40 avec intérêts à 5% dès le 13 août 2021 réclamé à titre de "renouvellement du contrat d'abonnement, facture du 12.08.2021" ainsi que des "frais de rappel" de 75 fr.

A______ Sàrl y a formé opposition le jour même.

b. Par requête expédiée le 1er mars 2022 au Tribunal de première instance, B______ Sàrl a requis la mainlevée de cette opposition, avec suite de frais.

Elle a exposé que, le 8 mai 2019, elle avait conclu avec A______ Sàrl un contrat d'abonnement "platinum" relatif à la fourniture de services de protection juridique pour un montant annuel de 1'292 fr. 40 TTC. Le 27 février 2021, A______ Sàrl avait résilié ce contrat. Dans la mesure où les conditions générales de celui-ci prévoyaient un délai de résiliation de trois mois, ladite résiliation ne pouvait prendre effet que le 13 mai 2022, compte tenu de la reconduction du contrat pour une année, ce qu'elle avait signalé à A______ Sàrl le 11 mars 2021. Le 31 août 2021, elle avait adressé un premier rappel à A______ Sàrl, facturé 25 fr., puis, le 15 septembre 2021, un second, facturé 50 fr., conformément aux conditions générales. Deux rappels avaient ensuite été envoyés à A______ Sàrl les 27 septembre et 22 novembre 2021, auxquels cette dernière n'avait pas donné suite.

Elle a produit un "contrat d'abonnement pour entreprise" conclu par elle avec A______ Sàrl, signé par l'associé gérant de cette dernière. Ledit contrat, qui devait prendre effet le 13 mai 2019, indique que le prix de l'abonnement "platinum" est de 500 fr. + 350 fr. par personne (employés et membres de la direction), soit deux personnes selon ce qui figure sur le contrat. Le signataire du contrat confirmait avoir pris connaissance des conditions générales et qu'en cas d'absence de résiliation, le contrat, d'une durée d'une année, était reconduit tacitement pour une nouvelle année. Les conditions générales prévoient que la résiliation doit se faire moyennant un préavis de 3 mois et que les rappels sont facturés 25 fr. pour le premier et 50 fr. pour le second. B______ Sàrl a également produit le courrier de résiliation de A______ Sàrl du 27 février 2021 ainsi que ses factures des 31 août et 15 septembre 2021.

c. Lors de l'audience devant le Tribunal du 24 juin 2022, B______ Sàrl n'était ni présente, ni représentée.

A______ Sàrl a déposé des notes de plaidoiries et des pièces. Elle s'est opposée à la requête de mainlevée qui était infondée selon elle, au vu des pièces produites. Elle a notamment produit une "procuration générale" donnant mandat à titre individuel à C______ aux fins de représenter A______ Sàrl et d'agir en son nom "pour défendre ses intérêts en la cause". Ce mandat était résiliable par chacune des parties en tout temps.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

B. Par jugement du 30 juin 2022, le Tribunal a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1 du dispositif), et mis à la charge de A______ Sàrl les frais judiciaires, arrêtés à 200 fr., montant qu'elle a été condamnée à verser à B______ Sàrl qui en avait fait l'avance (ch. 2 et 3).

Le Tribunal a considéré que les pièces produites valaient reconnaissance de dette et qu'A______ Sàrl n'avait fait valoir aucun moyen libératoire susceptible de faire échec au prononcé de la mainlevée.

C. a. Par acte déposé à la Cour de justice le 18 juillet 2022, A______ Sàrl a formé recours contre ce jugement. Elle a conclu à son annulation et à ce qu'il soit dit que la poursuite n° 1______ n'ira pas sa voie, avec suite de frais.

b. B______ Sàrl n'a pas répondu au recours dans le délai qui lui avait été imparti.

c. Le 18 août 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b ch. 1 et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Interjeté dans le délai de 10 jours prescrit et selon la forme requise par la loi (art. 321 al. 1 et 2 CPC), le recours est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, l'autorité a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait. (art. 320 CPC).

2. Le recourant soutient que sans aucune forme de motivation, le premier juge avait accordé la mainlevée de l'opposition sur la base de pièces contradictoires. Les pièces produites par les parties, à savoir d'une part le "contrat d'abonnement pour entreprise" et d'autre part la procuration générale prévoyaient des modalités de résiliation différentes, de sorte que le premier juge ne pouvait accorder la mainlevée requise sur la base de celles-ci. Les conditions générales n'avaient par ailleurs pas été valablement intégrées au contrat puisqu'elles ne lui avaient pas été soumises pour signature et qu'elles ne lui avaient pas été clairement expliquées.

2.1
2.1.1
Le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (art. 82 al. 1 LP). Le juge prononce la mainlevée si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (art. 82 al. 2 LP).

Constitue une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et échue (ATF 140 III 456 consid. 2.2.1; 139 III 297 consid. 2.3.1; 136 III 624 consid. 4.2.2; 136 III 627 consid. 2 et la jurisprudence citée).

La procédure de mainlevée provisoire est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée provisoire examine seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle - et non la validité de la créance - et lui attribue force exécutoire si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires (ATF 145 III 160 consid. 5.1 et la référence).

Il doit notamment vérifier d'office l'existence d'une reconnaissance de dette, l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et la dette reconnue (ATF 142 III 720 consid. 4.1 et la référence). Cela étant, sous réserve des vices manifestes, l'application du droit d'office ne signifie pas que l'autorité de recours – à l'instar de l'autorité d'appel – doive étendre son examen à des moyens qui n'ont pas été soulevés dans l'acte de recours. Elle doit se limiter aux griefs motivés contenus dans cet acte et dirigés contre la décision de première instance; l'acte de recours fixe en principe le cadre des griefs auxquels l'autorité de recours doit répondre eu égard au principe d'application du droit d'office (arrêt du Tribunal fédéral 5A_873/2021 du 4 mars 2022, consid. 4.2). A la lumière de ces principes, le Tribunal fédéral a jugé que c'était à tort qu'une autorité de recours cantonale avait examiné d'office si les documents produits valaient titre à la mainlevée au vu de leur contenu (ATF 147 III 176 consid. 4.2.1 et 4.2.2).

2.1.2 Un contrat écrit justifie en principe la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme d'argent incombant au poursuivi lorsque les conditions d'exigibilité de la dette sont établies.

Selon la jurisprudence, celui qui signe un texte comportant une référence expresse à des conditions générales est lié au même titre que celui qui appose sa signature sur le texte même de celles-ci, quand bien même il ne les aurait pas lues (ATF
119 II 443 consid. 1a p. 445; arrêt du Tribunal fédéral 5P.96/1996 du 29 mai 1996, in SJ 1996 p. 623). Les conditions générales font alors partie intégrante du contrat (ATF 133 III 675 consid. 3.3).

2.1.3 Le poursuivi peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil – exceptions ou objections – qui infirment la reconnaissance de dette (ATF 145 III 20 consid. 4.1.2 et la référence; 131 III 268 consid. 3.2).

Le poursuivi n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables, en principe par titre (art. 254 al. 1 CPC; ATF 145 III 20 consid. 4.1.2 et la référence). Le juge n'a pas à être persuadé de l'existence des faits allégués; il doit, en se fondant sur des éléments objectifs, avoir l'impression qu'ils se sont produits, sans exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (ATF 142 III 720 consid. 4.1 et la référence).

Le juge de la mainlevée n’intervient en principe pas d’office mais ne statue que sur le moyen soulevé par le poursuivi (Abbet, La mainlevée de l'opposition, 2017, n° 107 ad art. 82 LP, avec référence à l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_77/2011 du 16 février 2012 consid. 2).

2.1.4 La jurisprudence déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 145 IV 407 consid. 3.4.1; 143 III 65 consid. 5.2;
142 III 433 consid. 4.3.2). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 et les références; arrêt 5A_915/2019 du 18 mars 2020 consid. 4.2).

La jurisprudence admet qu'un manquement au droit d'être entendu puisse être considéré comme réparé lorsque la partie lésée a bénéficié de la faculté de s'exprimer librement devant une autorité de recours, pour autant que celle-ci dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et puisse ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références citées).

2.2 En l'espèce, l'intimée a produit un contrat d'abonnement signé par la recourante et des conditions générales s'y appliquant qui prévoient notamment des modalités de résiliation dudit contrat. L'intimée ne conteste pas qu'à teneur des documents précités, la date à laquelle elle a résilié le contrat ne lui permettait pas d'être libérée de ses obligations avant le 12 mai 2022 et qu'elle est donc tenue de s'acquitter du prix convenu pour la période venant à échéance à cette date. Le contrat constitue dès lors un titre de mainlevée pour le montant réclamé, qui n'est pas en lui-même contesté devant la Cour.

La recourante soutient que la procuration qu'elle a produite prévoit des modalités de résiliation différentes de celles du contrat d'abonnement. Cela étant, cette procuration accorde des pouvoirs à un autre mandataire que l'intimée et a un objet différent. Le recourant ne peut dès lors tirer aucun argument du fait que cette procuration prévoit des modalités de résiliation différentes de celles du contrat d'abonnement.

En outre, il ressort de la jurisprudence rappelée supra que les conditions générales auxquelles le titre de mainlevée produit se réfère lient le recourant qui ne peut se prévaloir du fait qu'il ne les a pas lues ou pas comprises. Lesdites conditions générales n'étaient par ailleurs pas particulièrement complexes à comprendre en tant qu'elles concernaient les modalités de résiliation du contrat.

Il sera enfin relevé que si le jugement attaqué est bref, il traite néanmoins de la question pertinente, à savoir la qualification du contrat produit par l'intimée comme titre de mainlevée. La recourante a d'ailleurs compris pour quel motif la mainlevée de l'opposition avait été prononcée au vu de ses explications devant la Cour. Le droit d'être entendu de la recourante a dès lors été respecté. Une éventuelle violation de celui-ci serait en tout état de cause réparable en l'espèce, la recourante ayant eu la possibilité de faire valoir devant la Cour les arguments qu'elle jugeait pertinents.

En définitive, au vu de ce qui précède, le recours n'est pas fondé, de sorte qu'il sera rejeté.

3. La recourante, qui succombe, sera condamnée aux frais judicaires du recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 300 fr. (art. 48 et 61 OELP) et compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui n'a pas répondu au recours et comparaît en personne (art. 95 al. 3 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 18 juillet 2022 par A______ Sàrl contre le jugement JTPI/8038/2022 rendu le 30 juin 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/4135/2022-22 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judicaires à 300 fr., les met à la charge de A______ Sàrl et les compense avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.