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C/5458/2022

ACJC/1163/2022 du 31.08.2022 sur OTPI/373/2022 ( SP ) , CONFIRME

Normes : CPC.53; CST.29.al2; CPL.253; CPL.256.al1; CC.74; CC.75; CC.76; CC.77; CC.78; CPL.261
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5458/2022 ACJC/1163/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MERCREDI 31 AOÛT 2022

 

Entre

A______, sise ______, appelante d'une ordonnance rendue par la 16ème Chambre du Tribunal de première instance le 7 juin 2022, comparant par Me Sacha CAMPORINI, avocat, route de Florissant 64, 1206 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant par
Me Hadrien MANGEAT, avocat, Mangeat Avocats Sàrl, passage des Lions 6, case postale, 1211 Genève 3, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/373/2022 du 7 juin 2022, reçue par les parties le 9 juin 2022, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures provisionnelles, a ordonné la suspension des effets de la décision de modification des statuts de l'association A______ prise lors de l'assemblée générale de celle-ci du 22 février 2022 (chiffre 1 du dispositif), fait interdiction à A______ et à ses organes de prendre toute mesure visant à mettre en œuvre ou à ratifier ladite décision (ch. 2), dit que l'ordonnance déploierait ses effets jusqu'à droit jugé ou accord entre les parties (ch. 3), arrêté à 800 fr. les frais judiciaires, mis à la charge de chacune des parties par moitié et compensés avec l'avance de frais fournie par B______ (ch. 4), condamné A______ à verser à B______ 400 fr. à titre de restitution de l'avance de frais fournie (ch. 5) dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 6) dit qu'une audience serait convoquée par ordonnance séparé (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

B. a. Par acte expédié le 20 juin 2022 à la Cour de justice, A______ forme appel contre ladite ordonnance, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut, principalement, au rejet de la requête de mesures provisionnelles formée par B______ et, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Elle dépose une procuration en faveur de son conseil, signée par C______ le 26 mars 2022.

Elle forme des allégués nouveaux.

b. Par arrêt ACJC/885/2022 du 28 juin 2022, la Cour a rejeté la requête, formée par A______ à titre préalable, tendant à la suspension de l'effet exécutoire attaché à l'ordonnance attaquée et dit qu'il serait statué sur les frais dans l'arrêt sur le fond.

c. Dans sa réponse du 4 juillet 2022, B______ conclut, avec suite de frais, à la confirmation de l'ordonnance attaquée.

Il dépose deux pièces nouvelles, soit le procès-verbal de l'audience de conciliation qui s'est tenue le 13 juin 2022 devant le Tribunal dans la cause C/1______/2022 opposant les parties et l'autorisation de procéder ARTPI/336/2022 délivrée à l'issue de cette audience à B______.

d. Les parties ont été informées le 25 juillet 2022 que la cause était gardée à juger, A______ n'ayant pas fait usage de son droit de répliquer.


 

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour.

a. Dès 2011, divers partis et mouvements politiques se sont regroupés, sous la dénomination "D______", en une coalition électorale présente au niveau municipal et cantonal dans le canton de Genève.

La coalition prend régulièrement position sur divers objets soumis au vote populaire, tant au niveau fédéral, que cantonal et communal.

Aux élections cantonales de 2013, D______ a présenté une liste qui rassemblait diverses formations politiques, dont E______, F______ et G______. Le mandataire, au sens de la loi cantonale sur l'exercice des droits politiques (LEDP), de la liste était C______.

Les membres de E______, F______ et G______ qui ont été élus au Grand Conseil en 2013 et/ou en 2018 constituent le groupe parlementaire "D______", composé des députés H______, I______, J______, K______, L______, M______, C______, N______ et B______, ainsi que des députées suppléantes O______ et P______.

b. En ______ 2013 a été fondée l'association A______, sise à Genève.

A teneur de ses statuts, le but « exclusif » de A______ est de permettre le bon fonctionnement administratif et financier du groupe parlementaire de D______ au Grand Conseil genevois en matière notamment d'engagement de personnel, de location de bureau, d'achat de matériel, de perception et de redistribution des versements réglementaires du GC, de gestion de la trésorerie, etc. (art. 3).

Les membres de A______ sont toutes les personnes du groupe parlementaire D______, qu'elles soient députées ou députées suppléantes, la qualité de membre s'acquérant en devenant membre du groupe parlementaire et se perdant en cessant d'être membre dudit groupe (art. 4).

L'assemblée générale, laquelle réunit tous les membres de l'association, se réunit sur convocation du comité et prend ses décisions à la majorité simple des membres présents (art. 7).

Le comité est formé de l'ensemble des membres du groupe parlementaire (art. 8).

c. En ______ 2017 a été fondée l'association D______, sise à Genève. Selon ses statuts, il s'agit d'"une union de partis et d'associations à caractère politique" et de la continuation de la coalition politique D______ ayant déposé des listes électorales lors des élections municipales de 2011 et 2015, des élections cantonales de 2013 et de l'élection nationale de 2015, sous forme d'une association. Elle s'inscrit dans la continuation de R______ fondée en 1993 et de S______ qui en a pris le relais. (art. 3 des statuts).

D______ a été fondée par E______, représentée par C______, F______, représentée par T______, et G______, représentée par B______ (art. 2 des statuts).

Les décisions de l'assemblée générale de D______ se prennent à l'unanimité (art. 4 et 5 al. 1 des statuts). Il en va de même de celles du comité, formé des membres fondateurs (art. 6 al. 1 et 2 des statuts).

d. Dans sa réponse du 27 juin 2017 à un avocat (Me U______) qui semble être le conseil d'une troisième association (V______, actuellement en liquidation selon son inscription au Registre du commerce; fait notoire), la Chancelière d'Etat a indiqué qu'à l'aune des règles de droit public, en particulier celles relatives à l'exercice des droits politiques, "l'appellation D______ correspond[ait] à un parti politique siégeant au Grand Conseil depuis 2013 et pourra[it] être utilisé par celui-ci jusqu'à la fin de la législature actuelle". En outre, le seul interlocuteur reconnu par la Chancellerie, respectivement le Service des votations et élections, conformément à l'art. 27 de la loi sur l'exercice des droits politiques (LEDP), était le mandataire de la liste déposée en 2013, soit C______, cela pour la législature en cours.

Dans un courrier du 3 juin 2021 à L______ et B______, adressé à "D______ c/o E______", concernant l'invalidation d'un referendum lancé "au nom de D______", le Service des votations et élections a relevé que "D______ [était] un parti politique représenté au Grand Conseil" et que le mandataire et le mandataire remplaçant du referendum (K______ et C______) étaient députés au Grand Conseil.

e. Le 30 septembre 2019, E______, par l'intermédiaire de L______ et I______, a adressé à ses membres une circulaire indiquant que la présentation de toute liste faisant référence à "D______ aux élections municipales de ce printemps devra[it] être décidée à l'unanimité des trois composantes" de la coalition, conformément aux statuts.

Le 31 octobre 2019, T______, en tant que président du "F______" a écrit au Service cantonal des votations et élections que "la coalition D______ a[vait] vécu et que ses composantes partir[aient] en ordre dispersé aux élections municipales du 15 mars 2020". Pour cette raison et également parce qu'en l'absence d'une décision unanime des "trois composantes" de l'association, aucune de celles-ci ne pouvait se prévaloir à elle seule d'être "D______", le F______ n'allait pas utiliser "ce nom «D______»".

f. Par courrier du 28 février 2021, 36 membres de E______ - dont H______, I______, K______, M______ et C______ - ont informé celle-ci qu'ils avaient décidé de se regrouper au sein de l'association "W______", tout en continuant à se "revendiquer de E______.ch".

Dans un article du ______ 2021 intitulé "E______ explose: les dissidents lancent W______", le [journal] "X______" a rapporté que "le nouveau parti [était] rejoint par la plupart des députés de E______ et par sa conseillère nationale et que le mouvement [voulait] rester membre de D______".

Un article du ______ 2022 du [journal] "Y______", intitulé "D______: une fin de non-recevoir", a relaté que "les trois composantes de D______ refus[aient] de rencontrer W______ pour parler des prochaines échéances" et que "cette dernière proposait de discuter d'une refondation de D______ en vue des élections cantonales de 2023".

g. Par message WhatsApp du 15 février 2022 adressé aux "membres du comité de A______", C______ a proposé la tenue d'une assemblée générale de l'association A______ le 22 février 2022 sur la plateforme "Zoom", avec l'ordre du jour suivant:

" 1. Questions financières, notamment :

• proposition de L______ et P______ de remise en cause de la redistribution de l'indemnité de groupe 2027 (cf mail que vous avez reçu d'elles en date du 17.7,22 et réponse de PV le 74. 122)

• modalités du retour à D______ des 71 800 CHF versés par erreur par Z______ à E______ (AA______) plutôt qu'à A______, propriétaire de cette somme faisant partie de ses réserves (cf PJ en annexe au mail susmentionné de PV du 74. 1. soit mail de AB______ du 9 déc et échanges précédents AC______/Z______ etc.).

• allocation du solde de la « provision » constituée pour faire face aux procédures Orsini désormais closes.

2. Questions statutaires et principes de fonctionnement de l'association.' comment dans cette période garantir un fonctionnement démocratique répondant aux besoins du groupe et de notre combat politique commun... ?

3. Prises de position en vue de la votation populaire du 15 mai: mots d'ordre et récoltes de signatures pour un affichage D______ plus fort".

Par courrier électronique du 20 février 2022 adressé aux membre de A______, C______ a rappelé le contenu de l'ordre du jour, précisant que H______, I______, K______, M______, N______ et L______ avaient communiqué leur accord sur la tenue de l'assemblée générale, avec une réserve de cette dernière au sujet du contenu du premier point de l'ordre du jour. O______ et P______ s'étaient opposées tant à certains points de l'ordre du jour qu'à la tenue de l'assemblée générale. J______ et B______ n'avaient pas réagi.

h. L'assemblée générale de A______ s'est tenue le 22 février 2022, en présence de H______, I______, K______, L______, M______, C______, B______, O______ et P______. Q______ y a assisté en qualité d'assistant parlementaire.

i. Durant l'assemblée générale, par courrier électronique envoyé à 21h41, I______ a soumis aux 10 autres membres une proposition d'amendement des statuts de A______, laquelle prévoyait notamment:

- une modification de l'art. 1: l'association deviendrait "V______" et représenterait "la force politique du même nom qui est présente notamment au Grand Conseil et [au]Conseil national";

- une modification de l'art. 3 relative au but; les buts de l'association seraient les suivants: "a) soutenir activement les campagnes politiques décidées par l'association; b) prendre les décisions nécessaires sur les mots d'ordres de votation populaire et sur les objets importants traités au Grand Conseil, etc; c) permettre le bon fonctionnement administratif et financier du groupe parlementaire de D______ au Grand Conseil genevois en matière notamment d'engagement de personnel, de location de bureau, d'achat de matériel, de perception et de redistribution des versements réglementaires du GC, de gestion de la trésorerie, de maitrise de ses outils de communications, etc; d) œuvrer à la présentation de listes uniques de la ______ de la ______ aux élections organisées dans le canton de Genève sur un programme de législature commun, sans exclusives, l'intitulé de la liste pouvant le cas échéant associer d'autres organisations".

- l'admission de membres n'étant ni députés ni suppléants (art. 4 ch. 3);

- le fait que l'assemblée générale était "seule habilitée à déposer à Genève des listes électorales au nom de D______" (art. 7 al. 4);

- la possibilité pour l'assemblée générale de modifier les statuts à la majorité des deux tiers (art. 7 al. 5).

i.a La proposition de modification des statuts a été acceptée par 5 voix contre 4.

i.b Par ailleurs, lors de l'assemblée générale, une nouvelle répartition des jetons de présence et de l'indemnité de groupe a été approuvée par 5 voix contre 4.

Enfin, il a été décidé, par 5 voix contre 4, de conserver une réserve de 30'000 fr. pour une affectation à une prochaine campagne électorale commune conduite par A______ après sa transformation en V______.

j. Le 23 février 2022, A______ a émis un communiqué de presse intitulé "D______ s'ouvre aux adhésions individuelles", dans lequel elle a exposé les décisions intervenues la veille quant à la modification de ses statuts.

Un article du journal "Y______" du ______ 2022, intitulé "D______, la mal nommée" a relaté, en se référant au changement de statuts qui avait "mis le feu aux poudres", que "les présidents de E______, du F______ et du G______ [avaient] dénoncé un "coup de force" de W______ destiné à faire main basse sur l'appellation D______".

k. Le 22 mars 2022, B______ a formé une requête de mesures provisionnelles à l'encontre de A______ concluant à ce que le Tribunal, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP:

- ordonne la suspension jusqu'à l'entrée en force de la décision sur demande au fond des effets des décisions, prises lors de l'assemblée générale de l'association A______ du 22 février 2022, d'acceptation de la modification des statuts, de confirmation de la répartition des jetons de présence et de l'indemnité de groupe 2021, et de conservation de la réserve d'un montant d'environ 30'000 fr.;

- fasse interdiction à A______ et à ses organes de prendre toute mesure visant à mettre en œuvre ou à ratifier les décisions dont les effets avaient ainsi été suspendus jusqu'à l'entrée en force de la décision sur demande au fond;

- fasse interdiction à A______ et à ses organes de prendre toute mesure de rétorsion contre B______ du fait de la présente procédure;

- fasse interdiction à A______ et à ses organes de disposer de tout ou partie des actifs sociaux déposés au nom de A______ sur le compte 2______ auprès de AD______ de manière contraire aux buts statutaires adoptés le 3 novembre 2013 jusqu'à l'entrée en force de la décision sur demande au fond.

- dise qu'il serait statué sur les dépens en même temps que la décision sur le fond.

B______ a précisé dans la partie "En droit" de la requête qu'il avait déposé parallèlement, le 22 mars 2022, une requête en conciliation (p. 21).

l. Par acte du même jour, B______ a agi au fond devant le Tribunal contre A______, la cause ayant été enregistré sous le n° C/1______/2022. Une première audience de conciliation, fixée par citation du 2 mai 2022, reçue le 4 mai 2022 par A______, a été annulée. La cause n'a pas été conciliée lors d'une audience de conciliation du 13 juin 2022 et a donné lieu à une autorisation de procéder (faits notoires ressortant d'une autre procédure entre les mêmes parties).

m. Par ordonnance du 31 mars 2022, faisant référence à l'art. 253 CPC, le Tribunal a transmis à A______ la requête sur mesures provisionnelles et les pièces de B______, en lui impartissant un délai au 25 avril 2022 pour se déterminer par écrit et en précisant qu'à défaut, celle-ci serait réputée y renoncer.

Par citation du même jour, annexée à l'ordonnance précitée, le Tribunal a cité les parties à comparaître à une audience fixée au 9 mai 2022.

A______ n'ayant pas réclamé le pli recommandé contenant les deux actes précités, celui-ci lui a été renvoyé par pli ordinaire du 19 avril 2022.

m.a Par courrier de son conseil du 26 avril 2022, accompagné d'une procuration qui semble datée du même jour, A______ a sollicité une prolongation du délai pour déposer sa détermination écrite, ainsi que le report de l'audience du 9 mai 2022.

m.b Par ordonnance du 2 mai 2022, le Tribunal a refusé tant la prolongation que le renvoi. Il a considéré que la demande de prolongation, formée après l'expiration du délai initial, était tardive (art. 144 al. 2 CPC) et que A______ n'expliquait pas en quoi le défaut ne lui était pas imputable ou n'était imputable qu'à une faute légère (art. 148 al. 1 CPC). En particulier, elle n'expliquait pas pour quelle raison elle n'avait pas retiré le pli recommandé du Tribunal du 31 mars 2022. En toute hypothèse, A______ pourrait se déterminer oralement lors de l'audience.

m.c Par courrier déposé le 4 mai 2022, A______ a invité le Tribunal à lui "confirmer que le bordereau de moyens de preuve remis par l'adverse partie [était] bien établi au nom de "Madame L______", qu'il cont[enait] 26 pièces et une unique procuration émise par Madame L______".

n. Le Tribunal a tenu une audience le 9 mai 2022.

n.a B______ a déposé des pièces complémentaires, soit une citation à comparaître à une audience de conciliation fixée au 19 mai 2022 dans la cause C/1______/2022 opposant les parties sur le fond et un message électronique du 23 mars 2022 de C______ relatif à une convocation à une assemblée générale de "V______" fixée au 28 mars 2022.

A______ a déposé des déterminations sur les allégués de la requête de mesures provisionnelles, ainsi qu'un chargé comprenant 18 pièces (pièces 28 à 45). Elle a déclaré qu'elle n'avait reçu que le jour même les pièces déposées par B______, sans autre commentaire.

n.b Dans lesdites déterminations, A______ a notamment allégué:

- en se référant aux statuts de D______ de mai 2017, à la circulaire de E______ du 30 septembre 2019 et au courrier du 31 octobre 2019 du F______ au Service des votations et élections (pièce 31), que l'association D______ avait été dissoute de plein droit du fait de son incapacité à réunir ses organes;

- que le groupe parlementaire D______ était une "structure de droit public instituée par la loi portant règlement du Grand Conseil (LRGC)";

- que l'association A______ avait été "créée en 2013 après l'élection au Grand Conseil de ses membres et a[vait] très vite occupé des missions plus larges que ce que prévoyaient ses statuts. V______, anciennement D______, agi[ssait] ainsi depuis de nombreuses années comme un parti politique à part entière reconnu comme tel par les autorités"; à l'appui de ces allégations, elle se référait à la lettre du 27 juin 2017 de la Chancelière d'Etat à Me U______, avocat (pièce 32), à la lettre du 3 juin 2021 du Service des votations et élections à B______ (pièce 34), au résultat de la liste "D______" lors de l'élection au Conseil municipal de la ville de Genève du 15 mars 2020 (pièce 35), ainsi qu'à des pièces qu'elle désignait comme "diverses affiches financées par A______ avant le 28 février 2022", "affiches financées par V______ après le 28 février 2022", "preuve de paiement du matériel de propagande électorale par l'association V______", "liste des Partis politiques représentés au Grand Conseil" et "prise de positions de V______" (pièces 36 à 40).

Se fondant sur ces mêmes pièces (32 et 34 à 40), A______ a fait valoir que la modification du nom de l'association visait "à une mise en adéquation du nom avec les buts poursuivis par l'association depuis de nombreuses années".

n.c Le conseil de B______ a plaidé et persisté dans ses conclusions.

Le conseil de A______ a plaidé et conclu au rejet de la requête, sous suite de frais.

A l'issue de cette audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

o. Dans l'ordonnance attaquée, le Tribunal relève que A______, lors de l'audience précitée, a fait valoir que D______ - à trois composantes - n'existait plus depuis 2019, qu'elle-même agissait depuis de nombreuses années comme un parti politique à part entière, reconnu comme tel par les autorités, que la modification statutaire litigieuse visait à une mise en adéquation du nom avec les buts poursuivis par l'association depuis lors et que la décision avait été prise à la majorité des membres présents.

p. Sur le seul point demeuré litigieux en appel, le Tribunal a considéré qu'à teneur de ses statuts, il n'apparaissait pas que A______ avait choisi de déroger au principe du vote à l'unanimité prévu par l'art. 74 CC s'agissant d'une modification de son but social. La majorité simple, prévue à l'article 7 de ses statuts, ne concernait pas expressément une telle modification. Il y avait lieu d'examiner, sous l'angle de la vraisemblance, si la modification votée le 22 février 2022 constituait une modification profonde du but social, nécessitant une décision à l'unanimité.

Dans sa version initiale, l'article 3 des statuts de A______ prévoyait que le but «exclusif» de cette dernière était de permettre le bon fonctionnement administratif et financier du groupe parlementaire de D______ au Grand Conseil genevois en matière notamment d'engagement de personnel, de location de bureau, d'achat de matériel, de perception et de redistribution des versements réglementaires du GC, de gestion de la trésorerie, etc. Si A______ alléguait que la modification votée le 22 février 2022 ne venait en réalité que concrétiser la situation et les attributions de l'association depuis de nombreuses années, il n'en demeurait pas moins que le but de l'association tel que modifié constituait vraisemblablement une modification profonde et un élargissement certain de son but initial.

Dans ces circonstances et en tant que ladite modification avait été acceptée à la majorité simple des votants seulement, l'action en annulation des décisions prises par l'assemblée générale du 22 février 2022, formée par B______, n'apparaissait pas d'emblée dénuée de chances de succès s'agissant de la modification du but social.

Il se justifiait donc de suspendre les effets de la décision de l'assemblée générale y relative jusqu'à droit jugé sur le fond du litige, interdiction étant faite à l'association et à ses organes de prendre toute mesure visant à mettre en œuvre une telle décision.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur les mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC). Le Tribunal fédéral considère les contestations d'une décision d'une association comme des causes non patrimoniales (arrêt du Tribunal fédéral 5A_978/2015 du 17 février 2016 consid. 1.1 et les références citées). Les décisions sur mesures provisionnelles de première instance rendues dans les affaires non patrimoniales sont toujours attaquables par la voie de l'appel (JEANDIN, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 19 ad art. 309 CPC).

En procédure sommaire, applicable aux mesures provisionnelles (art. 248 let. d CPC), le délai d'appel est de 10 jours (art. 314 al. 1 CPC)

En l'espèce, l'appel, déposé dans la forme (art. 311 al. 1 CPC) et le délai prévus par la loi (cf. aussi art. 142 al. 3 CPC), est recevable.

1.2 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable -, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5).

Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire, la cognition du juge est néanmoins limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_792/2016 du 23 janvier 2017 consid. 4.1).

2. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé son droit d'être entendue et le principe d'égalité des armes, en refusant de prolonger le délai pour qu'elle se détermine par écrit sur la requête et en ne lui transmettant les pièces de l'intimé que le jour de l'audience.

2.1

2.1.1 Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 53 CPC accorde aux parties le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à leur détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves et de se déterminer à leur propos (ATF 136 I 265 consid. 3.2; 135 II 286 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_252/2021 du 6 octobre 2021 consid. 4.1).

2.1.2 Tel qu'il est ancré à l'art. 29 al. 1 Cst., le principe d'égalité des armes requiert que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (ATF 122 V 157 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_218/2014 du 25 juin 2014 consid. 6.1).

2.1.3 En procédure sommaire, lorsque la requête ne paraît pas manifestement irrecevable ou infondée, le tribunal donne à la partie adverse l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit (art. 253 CPC).

Le caractère écrit ou oral de la procédure est laissé à la libre appréciation du tribunal, ce qui permet de tenir compte du cas d'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2014 du 19 août 2014 consid. 4.1). Le juge rend à cet égard une ordonnance de conduite de la procédure. S'il choisit de convoquer une audience, il doit veiller à ce que l'intéressé dispose de suffisamment de temps pour se préparer (arrêt du Tribunal fédéral 5A_120/2012 du 21 juin 2012 consid. 3). Il n’est pas tenu d'accepter toutes les écritures que l'une des parties présente lors de cette audience (arrêts du Tribunal fédéral 5A_256/2020 du 8 novembre 2021 consid. 4.2, 4.3.2 et 4.3.3; 5A_403/2014 précité consid. 4.2.1 et 4.2.2).

Conformément à l'art. 256 al. 1 CPC, si le juge demande des observations écrites, il décide ensuite, toujours dans le cadre de son pouvoir d'appréciation à moins que la loi ne l'oblige à tenir des débats, de citer les parties à une audience ou de statuer sur pièces uniquement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2014 précité consid. 4.2.1).

Savoir s'il convient, en procédure sommaire, de fixer un bref délai supplémentaire à la partie intimée qui n'a pas déposé de déterminations écrites dans le délai imparti prête à discussion. Le Tribunal fédéral a exclu l'octroi d'un délai supplémentaire dans la procédure en mainlevée provisoire, en raison du principe de célérité (ATF 138 III 483 consid. 3.2.4, 3.2.5 et 3.3). Certains auteurs souhaitent étendre cette solution à toute procédure sommaire. D'autres estiment qu'un nouveau délai doit être donné s'il n'y a pas d'urgence. Enfin, d'aucuns plaident sans réserve pour un délai supplémentaire. La doctrine insiste en tout cas sur la nécessité de rendre les parties attentives aux conséquences du défaut, conformément à l'art. 147 al. 3 CPC (cf. aussi ATF 138 III 483 consid. 3.2.5); en cas de non-respect, le défaut est en principe exclu (certains auteurs réservent le cas où une partie devrait connaître les conséquences du défaut). Le fait de ne pas avertir des conséquences du défaut et de ne pas fixer de délai supplémentaire au défendeur contrevient d'une manière ou d'une autre au CPC, mais n'est pas nécessairement source de nullité de la décision, du moins lorsque le défendeur lui-même ne prétend pas avoir été induit en erreur parce qu'il n'a pas été prévenu des conséquences du défaut, ni avoir été empêché de participer à la procédure parce que le juge a omis de lui offrir une seconde chance (délai de déterminations supplémentaire ou citation à comparaître) (arrêt du Tribunal fédéral 4A_224/2017 du 27 juin 2017 consid. 2.4.2 et les références doctrinales citées).

2.2 En l'espèce, le Tribunal a choisi la procédure écrite et décidé de tenir des débats. Il a rendu attentive l'appelante - assistée d'un avocat depuis le 26 mars 2022 selon la procuration produite en appel - aux conséquences du défaut, en lui indiquant de manière claire et non équivoque que si elle ne produisait pas d'observations, elle serait réputée renoncer à déposer des déterminations écrites. Le premier juge a ensuite refusé, de manière motivée, la prolongation du délai, en précisant que l'appelante pourrait se déterminer oralement lors de l'audience du 9 mai 2022. Lors de cette audience, l'appelante a néanmoins déposé des déterminations, qui ont été acceptées par le Tribunal. A teneur du procès-verbal, l'appelante n'a soulevé aucune objection au sujet de cette manière de procéder, ni du fait qu'elle n'avait reçu les pièces de sa partie adverse que le jour de l'audience. Il y a ainsi lieu d'admettre qu'elle a été en mesure de s'expliquer et de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision à rendre, qu'elle a eu accès au dossier, qu'elle a participé à l'administration des preuves et qu'elle a pu se déterminer à leur propos. D'ailleurs, l'appelante ne recourt pas contre l'ordonnance du Tribunal du 2 mai 2022 et, à juste titre, ne critique pas la motivation figurant dans cette décision.

Au vu de ce qui précède, le grief de l'appelante de violation du droit d'être entendu et du principe d'égalité des armes se révèle infondé.

3. L'appelante allègue des faits qui ne figurent pas dans ses déterminations de première instance du 9 mai 2022 ni n'ont été articulés à l'audience du Tribunal du même jour. L'intimé allègue des faits nouveaux en réponse auxdits allégués de sa partie adverse et produit deux pièces nouvelles.

3.1 L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1). S'agissant des vrais nova, la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova, il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

3.2 En l'espèce, les pièces nouvelles de l'intimé sont postérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger. Produites avec la réponse à l'appel, elles sont recevables, comme les faits qu'elles visent.

En revanche, les allégués nouveaux de l'appelante auraient pu être formés devant le Tribunal, si celle-ci avait fait preuve de la diligence requise. Ils sont donc irrecevables. Il en va de même des allégués nouveaux formés par l'intimé en réponse auxdites allégations de sa partie adverse, à l'exception de ceux constituant des faits notoires.

4. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir indiqué la date à laquelle l'action au fond avait été formée par l'intimé. Celui-ci n'aurait pas respecté le délai péremptoire de l'art. 75 CC, de sorte que son action au fond serait d'emblée vouée à l'échec.

L'appelante fait ensuite grief au Tribunal d'avoir "fait abstraction de la nature particulière de l'association objet de la présente procédure", qui serait un parti politique. Le premier juge aurait ainsi violé le principe de la proportionnalité, puisque "l'ordonnance attaquée a pour conséquence de contraindre les membres de l'association à cesser, séance tenante, toute forme d'activité politique organisée" et "d'interdire à V______ de financer ses campagnes politiques", ce qui serait "particulièrement problématique à moins d'une année des élections parlementaires cantonales". Dans ce contexte, l'appelante invoque également une violation de l'art. 11 CEDH, au motif que les mesures ordonnées conduiraient, "de manière directe et indirecte, l'association et ses membres à l'inaction politique".

Enfin, l'appelante fait grief au Tribunal d'avoir considéré que la modification statutaire litigieuse constituait une modification profonde de son but social, alors qu'il ne s'agirait en réalité que de "la mise en adéquation des statuts avec les activités poursuivies par l'Appelante depuis de nombreuses années".

4.1
4.1.1 Le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 CPC).

Le requérant doit rendre vraisemblable tant l'existence de sa prétention matérielle de nature civile que sa mise en danger ou atteinte par un préjudice difficilement réparable, ainsi que l'urgence (Huber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 23 ad art. 261 CPC)

Ainsi, le requérant doit rendre vraisemblable que le droit matériel invoqué existe et que le procès a des chances de succès, la mesure provisionnelle ne pouvant être accordée que dans la perspective de l'action au fond qui doit la valider (cf. art. 263 et 268 al. 2 CPC; ATF 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1016/2015 du 15 septembre 2016 consid. 5.3; Bohnet, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 261). Il doit en outre rendre vraisemblable une atteinte au droit ou son imminence, sur la base d'éléments objectifs (Bohnet, op. cit., n. 10 ad art. 261 CPC).

Doit également être rendue vraisemblable l'existence d'un préjudice difficilement réparable, qui peut être de nature patrimoniale ou immatérielle (Message relatif au CPC, FF 2006 p. 6961; Bohnet, op. cit., n. 11 ad art. 261 CPC; Huber, op. cit., n. 20 ad art. 261 CPC). Le requérant doit rendre vraisemblable qu'il s'expose, en raison de la durée nécessaire pour rendre une décision définitive, à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement à intervenir devait lui donner gain de cause. En d'autres termes, il s'agit d'éviter d'être mis devant un fait accompli dont le jugement ne pourrait pas complètement supprimer les effets. Est difficilement réparable le préjudice qui sera plus tard impossible ou difficile à mesurer ou à compenser entièrement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1).

4.1.2 Rendre vraisemblable signifie qu'il n'est pas nécessaire que le juge soit convaincu de l'exactitude de l'allégué présenté, mais qu'il suffit que, sur la base d'éléments objectifs, le fait en cause soit rendu probable, sans qu'il doive pour autant exclure la possibilité que les faits aient aussi pu se dérouler autrement (ATF 130 III 321 consid. 3.3, JdT 2005 I 618, SJ 2005 I 514; ATF 120 II 393 consid. 4c; ATF 104 Ia 408).

La vraisemblance requiert plus que de simples allégués: ceux-ci doivent être étayés par des éléments concrets ou des indices et être accompagnés de pièces (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2 et 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_893/2013 du 18 février 2014 consid. 3).

4.1.3 La transformation du but social d'une association ne peut être imposée à aucun sociétaire (art. 74 CC).

De simples modifications du but social ne sont pas visées par l’art. 74 CC et peuvent donc être adoptées à la majorité prévue par la loi (CC 67 al. 2 CC) ou par les statuts. La distinction entre transformation et simple modification n’est pas facile à opérer. Il doit s’agir d’un changement important, d’une modification profonde du but social, voire d’une rupture avec le passé. Il ne faut toutefois pas en conclure que l’art. 74 CC ne s’appliquerait qu’à des cas crasses ou que lorsque l’association devient «toute autre» («völlig anderer») suite au changement de but social. C'est du point de vue du membre rénitent qu’il convient d’apprécier s’il y a transformation du but social, sans s’en remettre à sa seule appréciation subjective. Selon la jurisprudence, il convient de rechercher si le but social «est modifié sur un point qui, selon les règles de la bonne foi, peut sérieusement mettre en balance la décision du sociétaire de faire partie de la société et de remplir ses devoirs statutaires» (FOEX, in Commentaire romand, CC I, 2010, n. 5 et 9 ad art 74 CC).

L’art. 74 CC n’institue pas l’intangibilité du but social: une transformation du but social est possible, mais elle ne saurait être imposée à un sociétaire; le but social peut donc fort bien être transformé, pourvu que la décision soit prise à l’unanimité des membres (ou, en cas de clause statutaire ayant dérogé valablement à l’art. 74 CC, à la majorité prévue par les statuts). (FOEX, op. cit., n. 12 ad art 74 CC).

Il peut survenir, en pratique, que l'association vienne à étendre le cercle de ces opérations et déploie une activité qui n'est plus couverte par le texte écrit des statuts. Si ce changement et durable, ce texte ne traduit plus la réalité. Il y a changement du but social. Si la majorité des sociétaires prétend qu'il s'agit d'une simple adaptation à la situation actuelle, elle devra proposer une nouvelle rédaction du but. Si cette nouvelle rédaction traduit un changement du but, celui-ci ne peut être imposé à aucun sociétaire (PERRIN/CHAPPUIS, Droit de l'association, 3ème éd. 2008, p. 162).

A teneur de l'article 75 CC, tout sociétaire est autorisé de par la loi à attaquer en justice, dans le mois à compter du jour où il en a eu connaissance, les décisions auxquelles il n'a pas adhéré et qui violent des dispositions légales ou statutaires.

4.1.4 L’association peut décider sa dissolution en tout temps (art. 76 CC). L’association est dissoute de plein droit lorsqu’elle est insolvable ou lorsque la direction ne peut plus être constituée statutairement (art. 77 CC). La dissolution est prononcée par le juge, à la demande de l’autorité compétente ou d’un intéressé, lorsque le but de l’association est illicite ou contraire aux mœurs (art. 78 CC).

4.1.5 Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts (art. 11 al. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950; ci-après: CEDH)

Selon l'art. 11 al. 2 CEDH, l’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’État.

4.2

4.2.1 En l'espèce, s'il est vrai que le Tribunal ne mentionne pas expressément la date du dépôt de l'action au fond par l'intimé, l'on comprend que celle-ci a été déposée le même jour que la requête de mesures provisionnelles, soit le 22 mars 2022 (l'assemblé générale ayant eu lieu le 22 février 2022) ce qui était indiqué dans cet acte (p. 21) et que l'appelante n'a pas contesté. En toute hypothèse, cette dernière ne pouvait ignorer le dépôt de l'action au fond dès le 4 mai 2022, jour où elle avait reçu une citation pour une audience de conciliation et donc la requête de conciliation (cf. art. 202 al. 3 CPC) De plus, les faits qui ressortent d'une autre procédure entre les mêmes parties sont des faits notoires au sens de l'art. 151 CPC, qui ne doivent donc pas être prouvés (cf. par exemple arrêt du Tribunal fédéral 5A_610/2016 du 3 mai 2017 consid. 3.1). Ces faits ont d'ailleurs été intégrés dans la partie "En fait" ci-dessus (let. C.l).

Le grief de l'appelante relatif à l'existence du droit allégué, en lien avec la prétendue inobservation du délai d'un mois pour attaquer les décisions de l'assemblée générale d'une association (art. 75 CC) tombe ainsi à faux.

4.2.2 Si la Chancelière d'Etat ou le Service des votations et élections ont eu l'occasion d'indiquer à deux reprises que l'appellation D______ correspond à un parti politique siégeant ou représenté au Grand Conseil (ci-dessus, "En fait", let. C.d), il apparaît, au stade de la vraisemblance, que ces deux services étatiques visaient le groupe parlementaire ou la coalition politique D______ et non pas l'association A______ fondée en 2013, laquelle n'est pas citée dans les courriers auxquels se réfère l'appelante.

A ce propos, les pièces sur lesquelles se fonde l'appelante pour démontrer que l'association D______ fondée en 2017 aurait été dissoute (ci-dessus, "En fait", let. C.e) ne rendent pas ce fait vraisemblable. L'appelante n'indique d'ailleurs pas laquelle des hypothèses des art. 76 à 78 CC se serait réalisée.

Il apparaît ainsi que l'argumentation que l'appelante développe notamment au sujet de la proportionnalité de la mesure ordonnée et de la prétendue atteinte aux garanties de la CEDH repose sur des prémisses qui ne sont pas rendues vraisemblables. Il est donc superflu de s'attarder à cette argumentation.

De surcroît, il est contradictoire de prétendre, d'une part, que la modification du but social ne ferait que concrétiser une situation existante et, d'autre part, que la décision attaquée condamnerait l'appelante à l'inaction.

4.2.3 L'appelante ne conteste pas que la modification litigieuse votée le 22 février 2022 constitue, en soi et pour le moins au stade de la vraisemblance, une modification profonde de son but originel (et "exclusif"), tel que défini à l'art. 3 des statuts. Il résulte des principes rappelés ci-dessus, prima facie, que même un changement du but social qui constituerait une simple adaptation à la situation actuelle ne pourrait être imposé à un sociétaire. En toute hypothèse, les pièces produites ne suffisent pas à rendre vraisemblable que la modification votée viserait à mettre en adéquation les statuts avec les activités poursuivies par l'appelante depuis de nombreuses années. C'est au cours de l'action au fond, soumise à la procédure ordinaire, lors de laquelle les parties pourront faire valoir tous leurs moyens de preuve, que cette question sera examinée de manière approfondie.

Par ailleurs, l'intimé rend vraisemblable qu'il est exposé à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement au fond devait lui donner gain de cause. En effet, il n'est pas contesté que l'appelante, qui se présente sous le nouveau nom adopté lors de l'assemblée générale litigieuse, a déjà entrepris des démarches publiques démontrant qu'elle associe l'intimé à un nouveau mouvement politique sans son adhésion. Cela, prima facie, est susceptible de créer une confusion dans l'esprit des électeurs de l'intimé et d'affecter ainsi son image en tant que personnalité publique. Un tel préjudice est difficilement réparable, puisqu'il sera plus tard difficile à mesurer ou à compenser entièrement.

Pour le surplus, la Cour fait entièrement sienne l'argumentation du premier juge.

En définitive, tous les griefs de l'appelante se révèlent infondés, de sorte que l'ordonnance attaquée sera entièrement confirmée.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'000 fr., y compris pour l'arrêt sur effet suspensif du 28 juin 2022 (art. 26 et 35 RTFMC), mis à la charge de l'appelante, qui succombe intégralement (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec l'avance effectuée, acquise à l'Etat de Genève.

L'appelante sera condamnée à verser à l'intimé 1'500 fr. à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris (art. 84, 86, 88 et 90 RTFMC; art. 20, 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 20 juin 2022 par A______ contre l'ordonnance OTPI/373/2022 rendue le 7 juin 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5458/2022-16 SP.

Au fond :

Confirme l'ordonnance attaquée.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance effectuée, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ 1'500 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.