Skip to main content

Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

1 resultats
A/3376/2022

DCSO/93/2023 du 10.03.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Poursuite abusive; rejet; contestation de la créance en poursuite
Normes : cc.2.al2; lp.22
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3376/2022-CS DCSO/93/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 9 MARS 2023

 

Plainte 17 LP (A/3376/2022-CS) formée en date du 13 octobre 2022 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       A______

______

______.

- B______ SÀRL

c/o Me BURGER Dominique

Ming Halprin Burger Inaudi

Avenue Léon-Gaud 5

Cae postale

1211 Genève 12.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ est locataire depuis le 3 octobre 2013 d'une arcade située au rez-de-chaussée de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ / rue 2______ no. ______ à Genève, propriété de B______ SARL, dans laquelle il exploite un salon de coiffure sous la raison individuelle, inscrite au registre du commerce, A______-D______. Il a été titulaire du bail conjointement avec E______, jusqu'en août 2018. Il est seul titulaire du bail depuis lors. Le loyer s'élève à 2'956 fr. par mois depuis le 1er octobre 2019.

b. Le loyer n'étant pas régulièrement versé, la bailleresse a mis les locataires en demeure de régulariser les paiements sous la menace d'une résiliation du bail.

En l'absence de paiement, le bail a été résilié par avis du 21 juin 2021 pour le
31 juillet 2021.

c. Par jugement du 2 novembre 2021, le Tribunal des baux et loyers a ordonné l'évacuation de A______, sur requête en cas clair de B______ SARL. La Chambre des baux et loyers a annulé cette décision par arrêt du 31 mars 2022 et déclaré irrecevable la requête d'évacuation au motif que le cas n'était pas clair.

B______ SARL a par conséquent déposé le 22 juin 2022 devant le Tribunal des baux et loyers une demande en évacuation de A______ par voie de procédure simplifiée (cause C/3______/2022).

A______ a de son côté contesté le congé devant le Tribunal des baux et loyers (cause C/4______/2022).

Ces deux dernières procédures sont en cours.

d. Elle a par ailleurs requis une première poursuite contre A______ le
5 juillet 2021 pour des loyers et charges impayés du 1er au 30 juin 2021 en
3'213 fr. 35.

Le commandement de payer, poursuite n° 5______, notifié le 9 août 2021, a été frappé d'opposition.

La mainlevée de l'opposition n'ayant pas été requise, l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office), a rendu le 14 octobre 2022, sur demande de A______, une décision de non-divulgation de la poursuite.

e. Au 30 septembre 2022, la bailleresse allègue qu'un arriéré de loyer de
14'065 fr. 60 lui était dû par A______.

f. Elle a requis la poursuite de ce dernier le 27 septembre 2022 pour un montant de 11'806 fr. 35 plus intérêts à 5 % l'an dès le 30 mai 2022 à titre d'indemnité pour occupation illicite du 1er mai au 31 août 2022 et de 113 fr. 20 à titre de frais de contentieux.

Un commandement de payer, poursuite n° 6______ a été notifié le
5 octobre 2022 au débiteur qui a formé opposition.

B. a. Par acte expédié le 13 octobre 2022 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre la poursuite qu'il qualifiait d'abusive, la créancière cherchant à lui nuire personnellement et professionnellement. En outre, le loyer était erroné car il avait été calculé en fonction d'une surface de l'arcade de 70 m2, alors qu'elle n'était que de 49,3 m2, pour un loyer au mètre carré de surcroît excessif de 506 fr. 75, alors qu'il n'était que de 330 fr. dans le quartier pour des objets de même type – ce qu'il avait découvert en 2020. Des procédures étaient en cours sur cet objet auprès du Tribunal des baux et loyers.

Il souffre depuis deux ans d'un ulcère dont il impute l'apparition aux soucis qu'il rencontre avec sa bailleresse.

Il allègue enfin une usurpation de son identité et un piratage informatique de son compte professionnel Google dont il soupçonne B______ SARL d'être l'auteur, ce qui l'a conduit à déposer plainte pénale contre sa bailleresse.

b. Dans ses observations du 1er novembre 2022, l'Office s'en est rapporté à justice au motif qu'il lui était difficile de se prononcer en l'état sur le caractère abusif de la plainte alors que la créancière ne s'était pas encore prononcée. Pour le surplus, il ne lui appartenait pas de se prononcer sur le bienfondé de la créance en poursuite.

c. Le 4 novembre 2022, B______ SARL a conclu, avec suite de dépens, au rejet de la plainte, contestant le caractère abusif de la poursuite. Cette dernière s'inscrivait dans un litige plus large entre les parties. Les montants en poursuite étaient dus quoi qu'il en soit et elle contestait toute volonté de nuire au plaignant par ses poursuites. Elle relevait que le plaignant ne se privait pas, quant à lui, de tenir des propos calomniateurs contre elle en l'accusant sans fondement d'usurpation d'identité et de piratage informatique.

d. La Chambre de surveillance a informé les parties par courrier du
7 novembre 2022 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al. 1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3).

1.2 En l'espèce, la plainte, fondée sur le prétendu caractère abusif de la poursuite (art. 2 al. 2 CC), est recevable en tout temps, le caractère abusif d'une poursuite entraînant sa nullité (art. 22 al. 1 LP; ATF 140 III 481 consid. 2.3.1).

Pour le surplus, la plainte respecte les exigences de forme prévues par la loi et émane d'une personne qui, si son argumentation devait être retenue, serait lésée dans ses intérêts juridiquement protégés. Elle est par conséquent recevable.

2. 2.1 La nullité d'une poursuite pour abus de droit ne peut être admise par les autorités de surveillance que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi; une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant fait notifier plusieurs commandements de payer fondés sur la même cause et pour des sommes importantes, sans jamais requérir la mainlevée de l'opposition, ni la reconnaissance judiciaire de sa prétention, lorsqu'il procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation, ou encore lorsqu'il reconnaît, devant l'Office des poursuites ou le poursuivi lui-même, qu'il n'agit pas envers le véritable débiteur. L'existence d'un abus ne peut donc être reconnue que sur la base d'éléments ou d'un ensemble d'indices démontrant de façon patente que l'institution du droit de l'exécution forcée est détournée de sa finalité (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1; ATF 115 III 18 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019, 5A_317/2015 du
13 octobre 2015 consid. 2.1, 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3; DCSO/321/10 du 8 juillet 2010 consid. 3.b).

La procédure de plainte des art. 17 ss LP ne permet par ailleurs pas d'obtenir l'annulation de la poursuite en se prévalant de l'art. 2 al. 2 CC, dans la mesure où le grief pris de l'abus de droit est invoqué à l'encontre de la créance litigieuse. L'autorité de surveillance n'est en effet pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire, même si la cause de la créance semble peu plausible voire imaginaire (parmi d'autres ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée, ATF 115 III 18 consid. 3b, ATF 113 III 2 consid. 2b = JdT 1989 II 120; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1, 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1, 5A_890/2012 du
5 mars 2013 consid. 5.3, 5A_595/2012 du 24 octobre 2012 consid. 5).

2.2 En l'espèce, la créancière établit avoir utilisé la voie de la poursuite dans le but de recouvrer des sommes qu'elle estime lui être dues. Sa démarche ne saurait par conséquent être qualifiée d'abusive au sens de la jurisprudence susmentionnée. Le fait que la poursuite s'inscrive dans un litige plus large entre les parties n'y change rien, tout comme le fait que le plaignant considère que la somme n'est, à tout le moins partiellement, pas due en raison d'un calcul erroné du loyer; ces éléments sont en l'occurrence insuffisants à constituer des indices d'un recours abusif à la poursuite.

La plainte sera par conséquent rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte du 13 octobre 2022 de A______ contre la poursuite n° 6______ requise par B______ SARL.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Monsieur Luca MINOTTI et Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.