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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/4111/2022

DCSO/80/2023 du 08.03.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : lp.275; lp.91.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4111/2022-CS DCSO/80/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU MERCREDI 8 MARS 2023

 

Plainte 17 LP (A/4111/2022-CS) formée en date du 1er décembre 2022 par A______ et B______, élisant domicile en l'étude de Me Laurent Fischer, avocat.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       B______ et A______

c/o Me FISCHER Laurent

Etude FISCHER-BUFFAT

Juste-Olvier 9

1006 Lausanne.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Sur requête conjointe de A______ et de B______, le Tribunal de première instance a ordonné le 2 novembre 2021 le séquestre, à hauteur de 15'729'434 fr. 35 plus intérêts au taux de 16% l'an à compter du 5 octobre 2021, de divers actifs supposés appartenir à C______, débiteur domicilié à D______ (France), mais localisés à Genève, soit les avoirs bancaires dont il était titulaire ou propriétaire auprès de [la banque] E______, notamment des "biens cédés à titre fiduciaire en garantie", ainsi que des avoirs dont il était titulaire ou propriétaire auprès de F______ SA, notamment des "biens cédés à titre fiduciaire en garantie".

b. Le séquestre (n° 1______) a été exécuté le jour même par l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office), par l'envoi à E______ et à F______ SA d'avis d'exécution d'un séquestre reprenant les termes de l'ordonnance de séquestre.

c. Le procès-verbal de séquestre a été établi le 12 novembre 2021 par l'Office et adressé le même jour au conseil des créanciers séquestrants.

Il en résulte que le séquestre exécuté en mains de F______ SA n'avait pas porté, alors que E______ n'entendait pas se déterminer sur son éventuelle portée avant la fin d'une éventuelle procédure d'opposition au séquestre.

d. Le 24 novembre 2021, A______ et B______ ont validé le séquestre par l'introduction d'une poursuite ordinaire n° 2______, tendant au recouvrement du montant en capital et intérêts à hauteur duquel le séquestre avait été ordonné, augmenté des dépens octroyés par le juge du séquestre.

Par réquisition du 27 octobre 2022, ils ont demandé la continuation de la poursuite.

e. Par courrier du 4 novembre 2022, l'Office a informé E______ de la conversion en saisie du séquestre n° 1______ et l'a invitée à se déterminer de manière précise et exhaustive sur les avoirs séquestrés en ses mains. La banque lui a répondu le 11 novembre 2022, indiquant que le poursuivi était titulaire en ses livres de la relation individuelle n° 3______, laquelle présentait au 2 novembre 2021 (date de l'exécution du séquestre) un solde débiteur global en USD de 5'952'857,19 USD "outre intérêts moratoires" et, au 8 novembre 2022 (date de la conversion du séquestre en saisie), un solde débiteur global en USD de 5'274'704,43 USD "outre intérêts moratoires".

f. Le procès-verbal de saisie (série n° 4______) a été établi le
17 novembre 2022 et expédié le 18 novembre 2022 au conseil des créanciers, qui l'a reçu le 21 novembre 2022.

Il résulte de ce document que la saisie n'avait pas porté.

g. Par lettre adressée le 21 novembre 2022 à l'Office, les poursuivants ont invité ce dernier à obtenir de E______ des informations complémentaires sur, d'une part, l'éventuelle existence d'un "safe" contenant des avoirs appartenant au poursuivi et, d'autre part, l'éventuelle existence d'actifs qui auraient été compensés dans le cadre d'une consolidation de la situation du poursuivi à l'égard de la banque.

L'Office a donné suite à cette demande en interpellant la banque par courrier du 23 novembre 2022. Celle-ci lui a répondu par lettre du 28 novembre 2022, indiquant en résumé que la relation individuelle n° 3______ se composait de quatre "sous-comptes" (n° 5______, 6______, 7______ et 8______) et que chacun de ces sous-comptes présentait un solde débiteur aussi bien à la date de l'exécution du séquestre qu'à celle de sa conversion en saisie. Le poursuivi ne détenait par ailleurs aucun compte titres et ne louait aucun compartiment de coffre-fort.

Le 28 novembre 2022, l'Office a communiqué une copie de la réponse de la banque par courriel au conseil des poursuivants.

h. Par lettre adressée le 30 novembre 2022 à l'Office, les créanciers, estimant que l'évolution du change USD/EUR ne permettait pas à lui seul d'expliquer l'évolution du solde débiteur en USD de la relation n° 3______ entre les
2 novembre 2021 (date d'exécution du séquestre) et 8 novembre 2022 (date de sa conversion en saisie), ont invité l'Office à requérir de la banque les décomptes des quatre sous-comptes composant cette relation entre ces deux dates. La banque devait en outre être interpellée sur les garanties dont elle disposait, dans la mesure où il était peu probable qu'elle se soit accommodée d'un découvert de l'ordre de 5'200'000 USD sans exiger des contreparties.

L'Office s'est derechef exécuté, transmettant à la banque, par courrier du
1er décembre 2022, les nouvelles interrogations des créanciers. Dans sa réponse du 8 décembre 2022, [la banque] E______ a confirmé n'avoir procédé à aucune opération de compensation ou d'exécution de garanties entre les dates d'exécution et de conversion du séquestre. Elle a relevé que la monnaie choisie pour donner une image globale de la situation de la relation était indicative et a précisé les taux de change USD/EUR appliqués aux dates déterminantes. Enfin, elle a indiqué disposer d'un droit de gage général sur les avoirs déposés auprès d'elle par le poursuivi, ce droit étant toutefois en l'état sans effet puisque lesdits avoirs étaient négatifs tant à la date d'exécution du séquestre qu'à celle de sa conversion.

L'Office a transmis cette réponse de la banque au conseil des poursuivants par courriel du 9 décembre 2022.

B. a. Dans l'intervalle, soit par acte adressé le 1er décembre 2022 à la Chambre de surveillance, les poursuivants ont formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre le procès-verbal de (non-lieu de) saisie du 17 novembre 2022, concluant à son annulation et à ce que l'Office soit invité à donner suite aux mesures d'instruction requises dans le courrier de leur conseil du 30 novembre 2022 (cf. lettre A.h ci-dessus).

b. Dans ses observations du 22 décembre 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte, relevant que les mesures d'instruction requises avaient depuis lors été mises en œuvre et que la banque dépositaire avait satisfait à son obligation de renseigner.

c. En l'absence de réplique spontanée, la cause a été gardée à juger le
5 janvier 2023.

 

EN DROIT

1. 1.1 Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

1.2 Postérieurement au dépôt de la plainte, l'Office a procédé, pour le moins partiellement, aux mesures d'instruction sollicitées par les plaignants, de telle sorte que la plainte a perdu dans une large mesure son objet. L'Office n'a cela étant pas obtenu de la banque dépositaire les décomptes des sous-comptes composant la relation qu'elle entretenait avec le débiteur pour la période entre l'exécution du séquestre et sa conversion. La banque dépositaire ne s'est du reste exprimée que partiellement sur l'existence en sa faveur d'éventuelles garanties, ne se prononçant pas, en particulier, sur d'éventuelles garanties données par des tiers.

Il y a donc lieu d'entrer en matière.

2. 2.1.1 L'Office, qui est en charge de l'exécution de la saisie, doit déterminer d'office les faits pertinents pour son exécution (ATF 108 III 10). Il lui revient d'interroger le poursuivi, d'inspecter sa demeure, voire les locaux qu'il loue comme bailleur ou locataire, de façon proportionnée aux circonstances (Gillieron, op. cit., n. 13 et 16 ad art. 91). Les tiers peuvent également être sollicités, dès lors que la loi leur impose la même obligation de renseigner qu'au débiteur (art. 91 al. 4 LP; Ochsner, CR LP, 2005, n. 25 ad art. 93; Jeandin, CR LP, 2005, n. 15 ad art. 91).

Dans la procédure de plainte, la question de savoir si et dans quelle mesure l'enquête officielle menée par l'Office est défectueuse et son résultat inexact doit être examinée au regard des éléments qui ont été critiqués par le créancier dans le délai de dix jours dès la communication du procès-verbal de saisie (ATF 127 III 572 consid. 3c; 86 III 53 consid. 1).

2.1.2 Une fois le séquestre validé par une poursuite, et une fois la continuation de cette poursuite requise, le séquestre aboutit à la saisie des biens séquestrés si le débiteur est soumis à la poursuite par voie de saisie (Stoffel/Chabloz, Voies d'exécution, 3ème édition, 2016, N 156 p. 277).

Si la poursuite en validation de séquestre se déroule au for spécial du séquestre (art. 52 LP), la saisie ne peut porter que sur les actifs séquestrés; il n'en va autrement que si le for du séquestre se trouve coïncider avec celui du domicile suisse du débiteur, prévu par l'art. 46 al. 1 LP, ce qui ne sera jamais le cas si le séquestre a été ordonné en application de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP (ATF 115 III 28 consid. 4b; 110 III 27 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 7B.180/2006 du 1er décembre 2006 consid. 1.3).

2.2 Dans le cas d'espèce, le débiteur est, selon les indications figurant dans l'ordonnance de séquestre, domicilié à l'étranger; le séquestre a du reste été ordonné en application – notamment – de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP. Il en résulte que la compétence des autorités de poursuite genevoises pour conduire la poursuite litigieuse est fondée sur le seul art. 52 LP.

Conformément aux principes rappelés ci-dessus, seuls peuvent en conséquence être saisis dans le cadre de cette poursuite les actifs ayant déjà fait l'objet du séquestre exécuté le 2 novembre 2021, à l'exclusion, par exemple, d'actifs qui auraient hypothétiquement été confiés par le débiteur à la banque postérieurement à l'exécution du séquestre.

L'établissement bancaire dépositaire a indiqué dans ses lettres des 11 et
28 novembre 2022 que le séquestre n'avait pas porté en ses mains, le débiteur poursuivi ne disposant auprès d'elle, à la date du 2 novembre 2022, d'aucun actif et toutes ses positions étant débitrices. L'Office aurait certes pu requérir la fourniture par la banque d'extraits – arrêtés à la date d'exécution du séquestre – confirmant ces explications mais cette exigence n'aurait guère eu de sens, les courriers précités étant clairs et sans équivoque et revêtant une force probatoire équivalente.

La demande des plaignants tendant à ce que l'Office obtienne de la banque des décomptes relatifs à la période postérieure à l'exécution du séquestre est pour sa part sans objet : on aurait pu concevoir qu'elle ait eu un sens si le séquestre avait porté, afin que l'Office puisse se convaincre que d'éventuelles opérations effectuées postérieurement par la banque (p. ex. perception de frais) respectent le cadre du séquestre, mais tel n'est pas le cas si, comme en l'espèce, aucun actif n'a été séquestré.

La demande des plaignants tendant à ce que la banque indique de quelles garanties elle bénéficie n'est, elle non plus, pas justifiée : si lesdites garanties avaient été des actifs mentionnés dans l'ordonnance de séquestre, par exemple des biens cédés à titre fiduciaire en garantie par le débiteur, ces actifs auraient été séquestrés en tant que tels et la banque les aurait annoncés à l'Office. Si en revanche elle dispose de garanties réelles ou personnelles ne correspondant pas à la liste des actifs devant être séquestrés, telles qu'elles figurent dans l'ordonnance de séquestre, on ne discerne pas leur pertinence pour l'établissement du procès-verbal de saisie.

La plainte est donc mal fondée dans la faible mesure où elle a conservé un objet.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 1er décembre 2022 par A______ et B______ contre le procès-verbal de saisie établi le 17 novembre 2022 dans la poursuite n° 2______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.