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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2664/2022

DCSO/40/2023 du 02.02.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : lp.22.al1; cc.2.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2664/2022-CS DCSO/40/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 2 FEVRIER 2023

 

Plainte 17 LP (A/2664/2022-CS) formée en date du 18 août 2022 par A______ SA.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______ SA

______

______.

- B______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 


EN FAIT

A. a. Par réquisition adressée le 7 juillet 2022 à l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office), B______ a engagé à l'encontre de la société A______ SA, dont le siège est à Genève et l'adresse à la rue 2______ no. ______, une poursuite ordinaire en recouvrement d'un montant de 1'250 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 29 novembre 2021, allégué être dû selon une facture n° 3______ adressée le 29 novembre 2021 à "A______".

b. Le commandement de payer, poursuite n° 1______, établi par l'Office conformément à la réquisition de poursuite a été notifié le 8 août 2022 à A______ SA, soit pour elle à C______, en sa qualité d'"administrateur associations A______ atelier". Il a été immédiatement frappé d'opposition.

Cette opposition a été réitérée le lendemain par le dépôt auprès de l'Office, par C______, d'une déclaration d'opposition accompagnée d'une demande de production par le poursuivant des moyens de preuve afférents à la créance, au sens de l'art. 73 al. 1 LP.

c. Donnant suite à cette demande, B______ a remis à l'Office la facture mentionnée dans sa réquisition de poursuite ainsi que divers échanges de courriers et courriels avec une entité se désignant comme "A______" ou "association A______ ateliers", dont l'adresse est à la route 2______ no. ______ et dont l'"adjoint de direction" est C______.

B. a. Par acte adressé le 18 août 2022 à la Chambre de surveillance, A______ SA, agissant par son administrateur unique D______, a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre le commandement de payer, poursuite n° 1______, notifié le 8 août 2022, concluant à la constatation de sa nullité, à la constatation de l'inexistence de la créance invoquée à son encontre par le poursuivant et à ce qu'un émolument de 500 fr. soit mis à la charge de ce dernier en application de l'art. 20a al. 1 ch. 5 LP.

A l'appui de sa plainte, A______ SA a fait valoir qu'elle n'avait jamais eu aucune relation de quelque type que ce soit avec le poursuivant.

b. Dans ses observations du 6 octobre 2022, l'Office s'en est rapporté à justice sur le bien-fondé de la plainte.

c. Par détermination du 10 octobre 2022, B______ a conclu au rejet de la plainte. Tout en concédant que la plaignante n'était pas nommément mentionnée dans la facture litigieuse ni dans les échanges de courriels et courriers qu'il avait produits, il a souligné qu'elle entretenait entre elle et les entités "association A______ ateliers", "A______ ateliers" et "A______", pour autant qu'elles existent, une grande confusion. Toutes partageaient ainsi la même adresse, l'administrateur de A______ SA et l'"adjoint de direction" de l'"association A______ ateliers" avaient le même patronyme, le commandement de payer destiné à A______ SA


avait été réceptionné par l'"adjoint de direction" de l'"association A______ ateliers" et A______ SA était titulaire de la marque "A______ Ateliers". C'est donc par ignorance de la véritable identité de son partenaire contractuel qu'il avait engagé une poursuite contre A______ SA, mais il était disposé à la retirer s'il devait apparaître qu'il ne s'agissait pas de sa débitrice.

d. La cause a été gardée à juger le 2 novembre 2022.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

Pour le surplus, et dans la mesure où le grief invoqué par la plaignante est susceptible d'entraîner la nullité de la poursuite, il devrait être examiné même en l'absence de plainte recevable (art. 22 al. 1 LP, deuxième phrase).

2. La plaignante fait valoir que la poursuite litigieuse serait abusive, les pièces produites par le poursuivant démontrant que sa partenaire contractuelle était une personne morale tierce.

2.1 La nullité d'une poursuite pour abus de droit ne peut être admise par les autorités de surveillance que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi. Une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation. L'existence d'un abus ne peut être reconnue que sur la base d'éléments ou d'un ensemble d'indices démontrant de façon patente que l'institution du droit de l'exécution forcée est détournée de sa finalité (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1; ATF 115 III 18 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019, 5A_317/2015 du 13 octobre 2015 consid. 2.1, 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3; DCSO/321/10 du 8 juillet 2010 consid. 3.b).

La procédure de plainte des art. 17 ss LP ne permet en revanche pas d'obtenir, au motif de l'abus de droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC, l'annulation de la poursuite lorsque ce grief est invoqué à l'encontre de la créance litigieuse elle-même : l'autorité de surveillance n'est en effet pas compétente pour statuer sur le bien-fondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite, qui relève de la compétence du juge ordinaire. Elle n'est ainsi pas compétente pour déterminer si le poursuivi est bien le débiteur du montant qui lui est réclamé. S'il veut s'opposer aux prétentions du poursuivant, le poursuivi doit utiliser les moyens que lui offre la procédure de poursuite, soit notamment l'opposition au commandement de payer, l'action en libération de dette, l'annulation de la poursuite, l'action en constatation de l'inexistence de la dette ou l'action en répétition de l'indu (parmi d'autres ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée, ATF 115 III 18 consid. 3b, ATF 113 III 2 consid. 2b = JdT 1989 II 120; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1, 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1, 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3, 5A_595/2012 du 24 octobre 2012 consid. 5).

2.2 En l'occurrence, la plaignante soutient qu'elle ne serait manifestement pas partie aux relations contractuelles dans le cadre desquelles serait née la prétention invoquée en poursuite par le poursuivant, et que c'est donc de manière abusive au sens de l'art. 2 al. 2 CC que ce dernier a engagé une poursuite à son encontre. En d'autres termes, la plaignante invoque son défaut de légitimation passive. Or un tel moyen ne relève pas de la procédure de poursuite mais du fond de la créance, de telle sorte qu'il ne peut être examiné par la Chambre de céans.

Pour le surplus, la plaignante échoue à établir que la poursuite engagée à son encontre serait inspirée par des motifs étrangers à la procédure d'exécution forcée. Il résulte au contraire des explications crédibles fournies par le poursuivant qu'en introduisant la poursuite litigieuse celui-ci cherchait uniquement à recouvrer un montant qu'il estime lui être dû. Même si l'objection de défaut de légitimation passive invoquée par la plaignante devait en fin de compte être admise par le juge civil, ce qui n'est pas certain à ce stade de la procédure, il n'en résulterait pas pour autant qu'il faille admettre que le poursuivant aurait agi de mauvaise foi. Les nombreuses similitudes existant entre son éventuelle partenaire contractuelle ("association A______ ateliers" ou "A______") et la plaignante (adresses identiques, raisons sociales comportant le même élément distinctif, titularité par la plaignante d'une marque correspondant au nom de l'éventuelle association, organes ayant le même patronyme, réception par l'organe de l'une des actes de poursuite adressés à l'autre, etc.) constituent en effet autant de sources de confusion – vraisemblablement acceptées voire voulues par les intéressées – expliquant une éventuelle erreur de la part de l'intimé.

La poursuite n'est donc pas nulle, ce qui sera constaté. La plainte sera pour sa part rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 18 août 2022 par A______ SA contre le commandement de payer, poursuite n° 1______, notifié le 8 août 2022.

Au fond :

La rejette.

Constate que la poursuite n° 1______ n'est pas nulle.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur  Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.