Skip to main content

Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

1 resultats
A/3479/2022

DCSO/528/2022 du 15.12.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Poursuite abusive
Normes : CC.2.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3479/2022-CS DCSO/528/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 15 DECEMBRE 202

 

Plainte 17 LP (A/3479/2022-CS) formée en date du 20 octobre 2022 par A______, comparant en personne.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______

______

______.

- B______ SÀRL

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 4 octobre 2022, B______ Sàrl a requis la poursuite de A______ pour 7'730 fr. et 770 fr., plus intérêts à 5% dès le 1er septembre 2022, réclamés à titre de "solde dû selon contrat d'employé freelance (vacances et heures payées non rattrapées), frais art. 106 CO".

b. Le commandement de payer, poursuite n° 1______, a été notifié le 12 octobre 2022 à A______, qui a immédiatement formé opposition totale à la poursuite.

B. a. Par acte posté le 20 octobre 2022, A______ a formé une plainte pour poursuite abusive auprès de la Chambre de surveillance. Il expose n'avoir jamais signé de contrat avec B______ Sàrl, de laquelle il n'avait pas été salarié.

b. L'Office a observé que les indications figurant dans la réquisition de poursuite ne mettaient pas en évidence l'existence d'un cas d'abus de droit.

c. Le 17 novembre 2022, l'Office et les parties ont été avisés de ce que l'instruction de la cause était close.

EN DROIT

1. La plainte est recevable pour avoir été déposée auprès de l'autorité compétente (art. 17 al. 1 LP; 6 al. 1 et 3 LaLP), par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), dans le délai utile de dix jours (art. 17 al. 2 LP) et selon la forme prescrite par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LaLP, 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), à l'encontre d'une mesure de l'Office sujette à plainte.

2. 2.1. Sont nulles les poursuites introduites en violation du principe de l'interdiction de l'abus de droit, tel qu'il résulte de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1).

La nullité d'une poursuite pour abus de droit (art. 2 al. 2 CC) ne peut être admise par les autorités de surveillance que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi; une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant fait notifier plusieurs commandements de payer fondés sur la même cause et pour des sommes importantes, sans jamais requérir la mainlevée de l'opposition, ni la reconnaissance judiciaire de sa prétention, lorsqu'il procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation, ou encore lorsqu'il reconnaît, devant l'office des poursuites ou le poursuivi lui-même, qu'il n'agit pas envers le véritable débiteur (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1; 115 III 18 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019 consid. 5.1; 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3). En revanche, celui qui poursuit son débiteur dans le seul but d'interrompre la prescription ne commet en principe pas d'abus de droit, la notification d'un commandement de payer représentant un moyen légal pour ce faire (art. 135 ch. 2 CO; arrêt du Tribunal fédéral 5A_250/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.2; PETER, Interrompre la prescription par une poursuite, in BlSchK 2018 p. 175 ss, 179).

Il n'appartient pas aux autorités de poursuite de décider si une prétention est exigée à bon droit ou non; l'examen du bien-fondé de la prétention invoquée en poursuite relève en effet exclusivement de la compétence du juge ordinaire (ATF 113 III 2 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019 consid. 5.1; 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1). C'est une particularité du droit suisse que de permettre l'introduction d'une poursuite sans devoir prouver l'existence de la créance; le titre exécutoire n'est pas la créance elle-même ni le titre qui l'incorpore éventuellement, mais seulement le commandement de payer passé en force (ATF 113 III 2 consid. 2b; cf. ég., parmi plusieurs : arrêt du Tribunal fédéral 5A_838/2016 du 13 mars 2017 consid. 2.1). Ainsi, l'exécution forcée s'opère sur la simple demande du créancier, sans jugement préalable des tribunaux (arrêt du Tribunal fédéral 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1). Il en découle que le grief tiré de l'abus de droit ne peut être invoqué devant les autorités de poursuite pour contester l'existence ou l'exigibilité de la prétention faisant l'objet de la poursuite, mais ne peut viser que l'utilisation abusive de la voie de l'exécution forcée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 déjà cité consid. 5.1).

Le débiteur qui entend contester la créance fondant la poursuite devra donc agir par le biais de l'opposition et faire valoir ses griefs dans le cadre de la procédure de mainlevée et, le cas échéant, dans le cadre d'une action en libération de dette. Suivant les circonstances, il a également la faculté d'agir en constatation de l'inexistence de la créance poursuivie (action négatoire de droit), en annulation ou en suspension de la poursuite (art. 85 et 85a LP), voire, en dernier ressort, de l'action en répétition de l'indu (art. 86 LP), domaines qui relèvent tous de la compétence exclusive du juge ou des tribunaux ordinaires.

2.2 En l'espèce, le plaignant fonde l'essentiel de son argumentation sur l'absence à ses yeux de fondement de la prétention invoquée, faute de contrat écrit et de l'exercice d'une activité salariée. Or, force est de constater que cette argumentation relève du juge civil, étant précisé que, d'une part, en droit suisse, la validité d'un contrat n'est en principe subordonnée à aucune forme particulière (cf. art. 11 CO), et que, d'autre part, une activité de "freelance" ne relève pas obligatoirement de l'activité salariée.

Ni le montant réclamé en poursuite, ni les indications fournies dans la réquisition de poursuite, ne permettent de retenir, sous l'angle restrictif de l'abus de droit, qu'en introduisant la poursuite litigieuse, l'intimée aurait poursuivi un but sans aucun rapport avec la procédure de poursuite, cherchant par exemple à tourmenter le plaignant délibérément, lui nuire, détruire sa réputation ou exercer sur lui une forme de contrainte sans relation avec les prétentions invoquées. De plus, à teneur du dossier, il apparaît que la poursuite litigieuse est la seule que la poursuivante a introduite l'encontre du plaignant.

Aussi, le caractère manifestement abusif de la poursuite ne résulte pas du dossier, de sorte que celle-ci n'est pas nulle.

La plainte doit dès lors être rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 20 octobre 2022 par A______ contre le commandement de payer, poursuite ° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et
Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.