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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1835/2022

DCSO/450/2022 du 10.11.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Recours TF déposé le 01.12.2022, rendu le 05.09.2023, IRRECEVABLE, 5A_905/2022
Descripteurs : For de la poursuite; for de l'établissement en Suisse; compétence de la CSO respectivement du juge de la mainlevée; avocat indépendant
Normes : lp.88; lp.46; lp.50
Résumé : Recours au TF interjeté par le débiteur le 24.11.2022, déclaré irrecevable par ATF du 04.07.2023 (5A_905/2022)
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1835/2022-CS DCSO/450/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 10 NOVEMBRE 2022

 

Plainte 17 LP (A/1835/2022-CS) formée en date du 3 juin 2022 par A______, élisant domicile en l'étude de Me B______, avocate.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       A______

c/o Me B______

C______

______
Genève.

- ETAT DE GENEVE, ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE, SERVICE NUMERISATION ET COURRIER

Rue du Stand 26

Case postale 3840

1211 Genève 3.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 22 février 2021, sur réquisition de l'Etat de Genève, Administration fiscale cantonale, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a fait notifier à A______, rue 2______[GE], un commandement de payer, poursuite n° 1______, en recouvrement de 54'624 fr. 50, plus intérêts, et 11'089 fr. 60, allégués dus au titre de "décision de scission 3______ du 27 juillet 2020, issue du bordereau couple 4______ du 6 mai 2019".

A______ a formé opposition totale à la poursuite.

b. Par requête du 9 novembre 2021, l'Etat de Genève a requis la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, faisant notamment valoir que nonobstant le déménagement du poursuivi en France voisine, il existait toujours un for de la poursuite à Genève, en vertu de l'art. 50 LP.

c. Par jugement JTPI/5060/2022 du 2 mai 2022, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ au commandement de payer, poursuite n° 1______.

Selon le Tribunal, A______ avait exercé en tant qu'avocat indépendant à Genève pendant la période fiscale concernée par la décision de taxation. De plus, la dette d'impôt concernait le bénéfice provenant de l'activité indépendante, de sorte que les conditions de l'art. 50 LP étaient réunies.

A______ a interjeté recours contre ce jugement devant la Cour de justice le 19 mai 2022, sans requérir l'octroi de l'effet suspensif.

d. L'Etat de Genève ayant requis la continuation de la poursuite le 10 mai 2022, l'Office a communiqué à A______, par courrier du 20 mai 2022, un avis de saisie pour le 8 juin 2022.

B. a. Par acte posté le 3 juin 2022, A______ a formé plainte auprès de la Chambre de surveillance contre l'avis de saisie du 20 mai 2022, lequel était selon lui nul, tout comme le commandement de payer, dès lors qu'il n'existait plus de for de la poursuite à Genève depuis qu'il avait quitté le territoire suisse pour s'installer en France en mai 2021.

b. Dans son rapport du 26 août 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Le commandement de payer avait été notifié au for ordinaire de la poursuite au sens de l'art. 46 LP, le poursuivi étant domicilié à Genève à la date de cette notification. Il était par ailleurs avéré que le poursuivi possédait un établissement en Suisse au sens de l'art. 50 al. 1 LP, dès lors qu'il exerçait à Genève la profession ______. S'agissant de la seconde condition posée à l'art. 50 al. 1 LP, à savoir la question de savoir si les dettes pour lesquelles A______ était poursuivi étaient en relation avec l'exercice de son activité professionnelle, elle relevait de la procédure de mainlevée, de sorte qu'il n'appartenait ni à l'Office ni à l'autorité de surveillance de l'examiner.

c. L'Etat de Genève a aussi conclu au rejet de la plainte. Les conditions posées à l'art. 50 LP étaient toutes deux réunies, de sorte que c'était à bon droit que l'Office avait donné suite à la réquisition de continuer la poursuite.

d. Par courriers du 31 août 2022, les parties et l'Office ont été avisés de ce que l'instruction de la cause était close.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2 2.1.1 Aux termes de l'art. 88 LP, lorsque la poursuite n'est pas suspendue par l'opposition ou par un jugement, le créancier peut requérir la continuation de la poursuite.

2.1.2 La procédure sommaire (art. 252 à 256 CPC) est applicable aux procédures tendant au prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée à un commandement de payer, au sens de l'art. 80 LP (art. 251 let. a CPC).

La décision sur mainlevée peut être contestée par la voie d'un recours au sens des art. 219 ss. CPC (art. 319 let. a CPC cum art. 309 let. b ch. 3 CPC) dans un délai de dix jours courant dès sa notification (art. 321 al. 2 CPC). Un tel recours ne suspend ni la force de chose jugée ni le caractère exécutoire de la décision attaquée (art. 325 al. 1 CPC), l'instance de recours conservant toutefois la possibilité de suspendre le caractère exécutoire (art. 325 al. 2 CPC).

Cette règlementation légale a pour conséquence qu'une décision ne pouvant être contestée que par la voie du recours – telle un prononcé de mainlevée – est exécutoire dès sa communication (Bastons Bulletti, in Petit Commentaire CPC, 2021, N 1 ad art. 325 CPC); ni le cours du délai de recours ni l'éventuelle introduction en temps utile d'un recours, même assorti d'une requête de restitution de l'effet suspensif, n'y changent rien (Chenaux, Le recours et la LP, in JdT 2022 II 39, 44). En d'autres termes, le créancier poursuivant au bénéfice d'un jugement prononçant la mainlevée de l'opposition formée par la partie poursuivie peut immédiatement requérir la continuation de la poursuite, sans attendre l'expiration du délai de recours (Chenaux, op. cit., p. 51). Le caractère immédiatement exécutoire du jugement de mainlevée résultant de la loi (art. 325 al. 1 CPC), il n'a pas à fournir à l'appui de sa réquisition de continuer la poursuite d'autres documents que le prononcé de mainlevée (Winkler, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, N 8a ad art. 88 LP).

L'octroi, par l'instance de recours, de l'effet suspensif à un éventuel recours a pour effet de suspendre avec effet ex tunc le caractère exécutoire du prononcé de mainlevée; les mesures d'exécution intervenues dans l'intervalle (p. ex. notification d'un avis de saisie ou d'une commination de faillite) ne sont toutefois pas annulées mais "gelées" jusqu'à la décision tranchant le sort du recours (ATF 130 III 657 consid. 2; Chenaux, op. cit., pp. 51-52).

2.2.1 Le for ordinaire de la poursuite est au domicile du débiteur (art. 46 al. 1 LP).

En cas de transfert du domicile du débiteur à l'étranger avant la communication de l'avis de saisie (cf. art. 53 LP), la continuation de la poursuite commencée en Suisse y est impossible, sauf exception des fors spéciaux des art. 50 (for de poursuite d'un débiteur domicilié à l'étranger), 51 (for du lieu de situation de la chose), 52 (for du séquestre) et 54 LP (for de la faillite du débiteur en fuite)
(ATF 136 III 373 consid. 2.1; 134 III 417 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 7B.88/2006 du 19 septembre 2006 consid. 2.1).

Aux termes de l'art. 50 LP, le débiteur domicilié à l'étranger qui possède un établissement en Suisse peut y être poursuivi pour les dettes de celui-ci (al. 1) et le débiteur domicilié à l'étranger, qui a élu domicile en Suisse pour l'exécution d'une obligation, peut y être poursuivi pour cette dette (al. 2).

2.2.2 La notion d'"établissement" au sens de l'art. 50 LP al. 1 LP est plus large que celle de succursale du droit des sociétés. Il suffit qu'une activité économique soit déployée en Suisse, quelle qu'en soit la forme, de manière non transitoire, avec des moyens humains et des biens ou des services. L'établissement en Suisse peut, par exemple, être une entreprise individuelle (Ochsner, La poursuite contre le débiteur à l'étranger, in JdT 2014 II 3, p. 7-8).

Les dettes doivent, quant à elles, découler de cette activité. Selon la jurisprudence relative à l'art. 50 al. 1 LP, déterminer si une dette concerne l'établissement en Suisse est une question de fond, à résoudre dans la procédure de mainlevée
(ATF 114 III 6 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_295/2020 du 28 décembre 2020 consid. 7.3 et les références citées). A toutefois été laissée indécise la question de savoir si la voie de la plainte serait quand même ouverte dans le cas où il serait évident que les dettes n'avaient absolument aucun lien avec l'établissement (ATF 47 III 14 consid. 1).

2.3 Au moment de la notification du commandement de payer, le 22 février 2021, le plaignant était domicilié à Genève, de sorte qu'il existait un for de la poursuite ordinaire au sens de l'art. 46 LP.

Le plaignant a ensuite transféré son domicile à l'étranger, avant la réception de l'avis de saisie, de sorte que la continuation de la poursuite à l'ancien for ordinaire, selon l'art. 53 LP, n'entrait pas en considération.

Nonobstant le domicile à l'étranger, la continuation de la poursuite en Suisse demeurait toutefois possible en présence du for spécial prévu à l'art. 50 LP.

Dans le cas d'espèce, le plaignant ne conteste à juste titre pas la réalisation de la première condition posée par l'art. 50 al. 1 LP, à savoir l'existence d'un établissement en Suisse. Il résulte en effet des éléments du dossier que le plaignant exerce la profession ______ à Genève, à titre indépendant, dans sa propre ______[bureau]. Un courrier qui se trouve à la procédure de plainte écrit par son associée est d'ailleurs rédigé sur papier à en-tête de C______, sise ______[GE]. Cet élément – au demeurant corroboré par les inscriptions figurant au registre cantonal ______[spécificité] – suffit à considérer qu'il existe un établissement au sens de l’art. 50 al. 1 LP, qui crée un for de la poursuite à Genève, étant rappelé qu'il n'appartient pas à la Chambre de céans, mais au juge de la mainlevée de l'opposition, de se prononcer sur la question de savoir si la dette objet de la poursuite a un rapport avec les activités de cet établissement.

A la suite du jugement de mainlevée du 2 mai 2022, exécutoire au moment où l'Office a donné suite à la réquisition de continuer la poursuite et adressé au plaignant l'avis de saisie (le 20 mai 2022), l'Office pouvait dans tous les cas considérer que l'existence d'un lien entre la dette et l'établissement était à tout le moins vraisemblable, le Tribunal de première instance ayant admis la réalisation de cette condition au moment de prononcer la mainlevée définitive. Aussi, c'est à bon droit que l'Office a donné suite à la réquisition de continuer la poursuite.

La plainte sera donc rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP ; art. 61 al. 2 let. a OELP). Il ne peut être alloué aucun dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 3 juin 2022 par A______ contre l'avis de saisie du 20 mai 2022 dans la poursuite n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.